La visite du président de Gaulle




En septembre 1966, tout Tahiti est en effervescence à cause de la visite du président de Gaulle. Soeur Richards, épouse du président de mission, raconte :

« Ainsi, c'est ça Papeete, quand elle est propre ! Les rues sont balayées, les jardins entourant les maisons ont été ratissés et nettoyés. Je ne vois pas de boîtes de conserve ni de papiers traîner partout : je n'arrive pas à y croire ! Voici des semaines qu'ils se préparent pour la visite de de Gaulle, installant des lampes dans la rue..., peignant les marches du bureau de poste, nettoyant les vieux bâtiments et rafraîchissant les nouveaux. Les terrains vagues ont tous été débarrassés. J'ai observé tout cela avec beaucoup d'intérêt, mais en voyant aujourd'hui le résultat, j'ai eu une surprise. Je n'aurais jamais cru que l'amélioration serait si importante. Aujourd'hui, on pourrait dire : Papeete, la Belle ! »

Soeur Richards est invitée à s'asseoir à la tribune des femmes pour la parade en l'honneur du président de Gaulle. Elle raconte :

« Le soleil brille, il fait chaud mais pas trop, l'humidité est faible, les fleurs luxuriantes, il y a de l'excitation dans l'air. Les drapeaux flottent, les fanfares jouent et voilà le président de Gaulle dans sa décapotable avec son entourage qui descend l'avenue… De Gaulle est un homme grand aux épaules carrées, il se tient droit, les épaules redressées avec une belle attitude militaire... Il est très gentil, très cordial, les gens réagissent avec de grandes acclamations… Les écoliers défilent fièrement, représentant leurs différentes écoles, les écoles publiques, catholiques, protestantes ; et l'école mormone est représentée par cent jeunes souriants... Les athlètes font une belle démonstration, mais quand je vois nos scouts mormons... et nos guides défiler avec une si belle allure avec leurs bannières, l'émotion m'étreint ; je sens la lourde responsabilité qui repose sur les dirigeants de toutes les nations et je prie pour eux avec ferveur. »

Pendant la visite du président de Gaulle, le président Richards a l'occasion de rencontrer le général et sa femme et reçoit beaucoup de compliments pour la beauté des propriétés de l'Église. La visite de de Gaulle est enthousiasmante pour tous les Tahitiens. Elle suscite un sentiment de patriotisme et renforce les sentiments positifs que les membres de l'Église ont vis-à-vis du gouvernement français.

C'est pendant cette période que commencent les visites annuelles des inspecteurs du gouvernement français (la Sûreté ou Bureau des renseignements généraux) au siège de la mission, visites qui se poursuivront longtemps. Le but de ces visites est d'informer le gouvernement des activités et des programmes de l'Église. Ces entretiens sont de nature amicale et placés sous le signe de la coopération plutôt que d'être une forme d'interrogatoire ou d'enquête. Karl Richards coopère à ces visites et fait beaucoup pour diminuer les inquiétudes longtemps entretenues par le gouvernement et pour qui l'Église était un instrument de la diffusion de l'américanisme.

Source : S. George Ellsworth et Kathleen C. Perrin, Chronique de la foi et du courage – Les saints derniers jours en Polynésie française, 1994, Sandy, Utah, p. 212-213