En
1959, alors que Joseph Reeder est président de la
mission de Polynésie française, des dispositions sont prises pour permettre à un groupe de trente saints tahitiens
de voyager à bord du Paraita, le voilier de la mission, au
temple de Hawaii. Le président Reeder et Raituia Tehina Tapu,
le capitaine, ont reçu la permission nécessaire du
gouvernement français ainsi que du président de l'Église, David O. McKay. Depuis bien
des années les membres travaillent diligemment à
épargner les fonds nécessaires. Après des années
d'attente et de planification, tout semble finalement se mettre en
place.
Ernest
C. Rossiter, qui a été deux fois président de la mission
tahitienne et parle couramment le français, est en visite à
Tahiti, envoyé par la Première Présidence de l'Église pour aider
à apaiser les tensions acumulées depuis une décennie entre l'Église et les représentants du gouvernement
français. Frère Rossiter informe un groupe de frères de la
prêtrise que le président McKay leur recommande vivement de ne
pas faire le voyage. Quelques jours seulement avant le départ des
saints pour Hawaii, le président Reeder écrit dans le journal de
la mission :
« Nous
nous rendîmes à la réunion avec les détenteurs
de la prêtrise pour écouter le président
Rossiter. Après avoir entendu le message de la Première
Présidence, il fut persuadé que si cela venait des
dirigeants de l'Eglise, c'était inspiré par le Seigneur
et que la seule manière de lui montrer qu'ils l'aimaient et
étaient reconnaissants des bénédictions qu'il
leur avait données, était de suivre la recommandation
qui avait été faite. Je les fis tous soutenir à
main levée la décision de la Première Présidence
et tous la soutinrent.
« Les
membres déçus acceptèrent de bonne grâce
la tournure que prenaient les événements. La raison
pour laquelle le président leur avait demandé d'annuler
le voyage devint bientôt manifeste. Quelques jours plus tard,
le capitaine Tapu recevait un coup de téléphone de la
capitainerie du port l'informant que le Paraita était
en train de couler. Voici comment le capitaine Tapu raconte
l'incident :
‹ Le
capitaine du port me dit : 'Votre bateau est en train de
couler.' Je lui dis : 'Quoi ? Je viens de le sortir du
chantier naval.' Il dit : 'VOTRE BATEAU EST EN TRAIN
DE COULER ! DEPÊCHEZ-VOUS !' Je courus jusqu'au
port : le bateau était à moitié submergé.
Mon second était en-dessous de la coque pour essayer de
découvrir ce qu'il se passait. Il découvrit que le
tuyau d'élimination des déchets de cuisine était
pourri. Les ouvriers avaient repeint le bois pourri et le tuyau
pourri et brisé avait laissé l'eau entrer dans le
bateau. Que serait-il arrivé si nous avions fini à
trois ou quatre cents kilomètres en mer sur une chaloupe de
sauvetage ? Si nous étions partis comme prévu,
c'est là que nous nous serions trouvés lorsque le tuyau
se serait rompu. ›
« Quelques
jours plus tard, lorsque la transmission du Paraita fut
démontée, la raison
de
l'inspiration et de la recommandation de la Première
Présidence fut confirmée. Tous les engrenages de la
transmission étaient complètement usés et
n'auraient jamais tenu le coup pour le voyage aller-retour de Tahiti
à Hawaii. »
Source
: S. George Ellsworth et Kathleen
C. Perrin, Chronique de la foi et du courage – Les saints
derniers jours en Polynésie française (1843-1993),
1994, Sandy, Utah, p. 172-73