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le Christ



Stephen E. Robinson



©1995 Stephen Edward Robinson
Titre de l'édition originale : Following Christ

Traduction : Claude Boisseau




 
PRÉFACE

REMERCIEMENTS
 
CHAPITRE 1 : LENTRÉE DANS LE ROYAUME
 
CHAPITRE 2 : PERSÉVÉRER JUSQU’A LA FIN

Que signifie « être fidèle »

La parabole des plongeurs Fidélité et repentir
Le « Grand Changement »
 
CHAPITRE 3 : LA CHUTE D’ADAM ET ÈVE

La Mortalité n’est pas notre élément naturel

Les aspects familiers de la Chute
D’autres aspects de la Chute
Pourquoi avoir choisi d’affronter cette situation ?
La bonne Nouvelle : l’expiation du Christ
 
CHAPITRE 4 : LA FOI ET LES OEUVRES

Alors pourquoi travailler ?

D’autres raisons de travailler à notre salut
Les oeuvres : une nécessité
La foi et les oeuvres
Lalliance
Travailler à son salut
Frustrations et miséricorde divine  
 
CHAPITRE 5 : LES DANGERS DE LA PERSÉVÉRANCE

Déception

Révélation par la rumeur ?
Le troupeau entend ma voix
Plus ou moins
Menteur dès le commencement
Résister à la rancune charnelle
Deux genres d’hypocrisie
D’autres dangers : les sado-masos spirituels
Liniquité
 
CHAPITRE 6 : LE PREMIER COMMANDEMENT

Mettre la charrue avant les boeufs

L’œuvre de Dieu
Un amour inconditionnel
La foi, l’espoir et la charité
Une instructrice de la Primaire
Un dirigeant scout
Grand’mère préférait la carcasse des poulets
Passez à votre voisin

 

PRÉFACE

Il y a quelque temps j’ai écrit un livre sur les premiers principes de l’Évangile que certains membres de l’Église ont trouvé utile. Ce livre, « Croire le Christ », Parabole de la bicyclette et autres bonnes nouvelles », explique ce que veut dire avoir foi dans le Seigneur Jésus-Christ et être justifié par la foi grâce à l’alliance de l’Évangile, dont la plénitude a été rétablie en ces derniers jours. Cependant, comme l’ont montré de nombreux lecteurs, notre vie ne s’arrête pas après avoir contracté l'alliance. Dès que nous sommes nés de nouveau, nous devons faire face à la nécessité de continuer à vivre. La plus grande frustration que beaucoup de gens ressentent c’est peut-être que, sans exception, nous sommes convertis avant d’être rendus parfaits. Cela signifie que tous autant que nous sommes, devons boiter pendant un temps assez long au cours duquel nos objectifs et nos désirs ne correspondent pas avec nos réalisations et pendant ce temps-là nous devons faire confiance à Dieu dans tous les aspects de notre vie. Cette condition ne concerne pas seulement l’inadapté spirituel, mais c’est le lot commun de tout un chacun dans l’Église. Aussi la question logique qui suit est celle-ci : « Si Dieu n’exige pas de moi la perfection absolue tout de suite après ma conversion, qu’attend-il de moi, et comment suis-je censé y arriver ? Maintenant que je suis né de nouveau, qu’est-ce que je fais du reste de ma vie ?
 
Lendurance est un des termes le plus utilisé dans les Écritures concernant ce que Dieu attend du converti. Une fois entrés dans l’alliance de la grâce par le baptême, il nous est demandé d’endurer jusqu’à la fin. Ainsi l’expression « endurer jusqu’à la fin » décrit de façon adéquate notre obligation à respecter l’alliance depuis le moment de notre conversion jusqu’à notre mort.
 
Alors que « Croire le Christ » traitait de l’entrée dans l’alliance, ce livre insistera sur le fait de rester dans l’alliance. Le livre précédent insistait sur la croyance en Christ et d’aller au Christ ; le présent volume parle de suivre et d’adorer le Christ. Si être véritablement converti c’est accepter le Christ comme Seigneur et faire de lui le Seigneur de de notre vie, alors, ceci doit se refléter d’une façon ou d’une autre dans notre vie ; mais comment ? Comment le fait de naître de nouveau se traduit-il dans notre comportement après notre conversion  ? Après tout, la foi et les œuvres ne sont pas les pôles opposés que certains théologiens prétendraient qu’ils soient, mais, dans le cadre de l’Alliance, ce sont plutot des compagnons sous le même joug ou les deux faces de la même pièce. C’est un peu débile de parler sans cesse d’aller au Christ sans jamais dire où nous sommes une fois que nous sommes convertis. L’autre face de la pièce, la raison d’être des œuvres exigées par l’Évangile du Christ, est le sujet de ce livre. 
 
 
REMERCIEMENTS 
 
Je tiens à remercier tous ceux qui ont permis que ce livre voie le jour : mes élèves de l’École du Dimanche qui m’ont encouragé. Fawn et Carol Morgan pour m’avoir fourni un refuge pour me permettre d’écrire. George Karlsven qui m’a aidé à rester en vie en m’obligeant à marcher dans les collines de Grandview. Debbie Parker, Sue Olstler, Larry Dahl, Dennis Largey et Karen Stoddard qui ont lu le manuscrit et m’ont proposé des suggestions d’amélioration. Et particulièrement Deseret Book Company qui a tenu patiemment à aller jusqu’au bout du projet alors que j’étais empêché par diverses occupations. J’ai eu le bonheur d’avoir deux excellentes secrétaires, que je veux remercier tout particulièrement : Michelle Green et Connie Lankford. Et comme toujours, je reconnais en Janet, ma muse, dont l’amour souffle doucement sur les faibles charbons de mes capacités et qui les fait briller pendant un temps un peu plus que d’habitude.


 
CHAPITRE UN : L’ENTRÉE DANS LE ROYAUME

Que dois-je faire pour entrer dans le royaume de Dieu ? À cette question les Écritures répondent de façon étonnamment claire et explicite. Jésus dit dans l’Évangile de Jean : « Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que tous ceux qui croient en lui ne périssent pas, mais qu’ils aient la vie éternelle » (Jean 3 :16). Dans l’Évangile de Marc, alors que Jésus ressuscité envoie ses apôtres prêcher au monde entier, il leur dit que « celui qui croit et est baptisé sera sauvé » (Marc 16 :16). Que dit-il dans le Livre de Mormon ? « Le Père commande à tous les hommes, de partout, de se repentir et de croire en moi. Celui qui croit en moi, et est baptisé, celui-là sera sauvé ; et ce sont ceux qui hériteront du royaume de Dieu » (3 Néphi 11 :32-33). Le sens profond de ces Écritures et de nombreuses autres qui s’en rapprochent nous échappent souvent. En effet, ces Écritures à propos du salut, de la vie éternelle ou du fait d’hériter du royaume de Dieu soulignent les conditions à remplir pour entrer dans l’alliance de l’Évangile et n’ont pas trait à un lointain futur ou à la façon de vivre le reste de sa vie. Les éléments qu’elles soulignent se rencontrent au début de notre vie en Christ et au moment où nous devenons membres de l’Église. En d’autres termes, « mettre sa vie en accord avec Dieu » et devenir héritiers du salut consiste à aller au Christ et à entrer dans l’alliance de son Évangile. Nous le faisons en ayant foi au Christ, en nous repentant de nos péchés et en étant baptisés par immersion pour la rémission des péchés. Nous recevons alors de Dieu le don ineffable du Saint-Esprit. C’est pourquoi nous insistons davantage sur notre conversion initiale en Christ que sur le jour du Jugement dernier.
 
Avec ceci à l’esprit, lisez les paroles de Moïse dans la Perle de Grand Prix : « Le Seigneur Dieu appela des hommes de partout par le Saint-Esprit et leur commanda qu’ils devaient se repentir. Et tous ceux qui croiraient dans le Fils, et se repentiraient de leurs péchés seraient sauvés, et tous ceux qui ne croiraient pas et ne se repentiraient pas seraient damnés, et les paroles sortirent de la bouche de Dieu en un ferme décret, c’est pourquoi elles doivent s’accomplir » (Moïse 5 :14-15). 
 
Croire, se repentir, être baptisé, recevoir le Saint-Esprit, tels sont les éléments trouvés dans les Écritures, directement associés au salut, à l’entrée dans le royaume ou au don de la vie éternelle. Toutes ces choses arrivent au début de notre vie en Christ, pas à la fin.
 
Les saints des derniers jours hésitent à employer le terme « être sauvé », comme le font les protestants, dans le sens « être converti » ou « venir au Christ », parce qu’ils considèrent que ce salut est conditionné par leur persévérance jusqu’à leur mort. Si certains chrétiens contestent ce fait, il convient de lire les paroles du Sauveur dans Matthieu 24 :13 : « Mais celui qui persévère jusqu’à la fin, celui-là sera sauvé » (voir aussi Matthieu 10 :22 ; Marc 13 :13 ; 2 Néphi 31 :15). C’est pourquoi les saints des derniers jours hésitent à parler du Salut comme « une affaire conclue » lors de cette vie (je suppose qu’ils ne sont pas sûrs de rester fidèles jusqu’à la fin). Les saints des derniers jours appliquent généralement le terme ‘sauvé’ à leur situation après le Jugement, au moment où cette situation sera devenue un fait accompli, plutôt qu’à une promesse divine conditionnée par leur « persévérance ». D’autres chrétiens préfèrent appliquer ce terme à la situation dans laquelle ils se trouvent au moment où ils entrent dans l’alliance, ce qui est également correct et en accord avec les Écritures1. Il est vrai par ailleurs que si les croyants convertis restent fidèles, ils sont « sauvés » au présent, alors même que, d’après le Sauveur, ils seront sauvés s’ils persévèrent jusqu’à la fin (Matthieu. 10 :22 ; 24 :13, etc.). Certains non-mormons pensent que le fait ‘d’être sauvé’ est irrévocable. Les saints des derniers jours ne sont pas d’accord. D’autres supposent que les ‘sauvés‘ doivent juste rester fidèles. Les différences avec les saints des derniers jours relèvent plus de la sémantique que de la théologie.
 
Lisez Moïse 6 :59 : « …C’est ainsi que vous devez naître de nouveau dans le royaume des cieux, d’eau, et de l’Esprit, et être purifiés par le sang, même le sang de mon Fils unique, afin que vous soyez sanctifiés de tous péchés, et jouissiez des paroles de la vie éternelle dans ce monde, et de la vie éternelle dans le monde à venir, même la gloire immortelle ». De nouveau il nous est dit que la porte que nous devons franchir pour « naître de nouveau dans le royaume des cieux, être « sanctifiés » et jouir de la « vie éternelle » et de la gloire est symbolisée par le baptême et le don du Saint-Esprit, ce qui signifie entrer dans l’alliance du baptême. Une fois ces étapes franchies, nous faisons partie du Christ. Nous faisons partie de son corps métaphorique, l’Église (1 Corinthiens 12 :27), et nous sommes justifiés par la grâce de Jésus-Christ notre Sauveur. En d’autres termes, même si nous sommes personnellement imparfaits, nous sommes déclarés innocents parce qu’il est innocent et que nous faisons partie de lui.
 
Par la foi, le repentir et le baptême, nous sommes unis au Christ et nous recevons une nouvelle identité en lui. Nous ne sommes plus isolés, nous sommes maintenant en Christ, et il est en nous, de même qu’un homme et une femme deviennent un par l’alliance du mariage. Une épouse prend habituellement le nom de son mari et devient héritière de ses biens à lui ; de même nous prenons le nom du Christ sur nous pour devenir héritiers de son royaume par sa mort. Étant ainsi unis nous devenons une créature nouvelle, composée d’une partie finie (nous) et d’une partie infinie (Christ) (2 Corinthiens 5 :17). Puisque le Christ est infini, c’est sa personnalité qui détermine le verdict qui devra être prononcé à notre encontre lors du Jugement. C’est pourquoi tant que nous restons un avec le Christ dans cette nouvelle relation qu’est l’alliance de l’Évangile, nous sommes, pour le moment, justifiés et rachetés grâce à sa justice (2 Néphi 2 :3) parce que nous sommes devenus une partie de lui et que sa justice est aussi la nôtre. Comme nous sommes un en Christ par notre partenariat dans l’Évangile, nous bénéficions du crédit dont jouit le Christ, et c’est son mérite infini plutôt que nos piètres performances qui assurent finalement un verdict de non-culpabilité pour la nouvelle créature que, par son concours, nous sommes devenus en Christ. Ce processus s’appelle « la justification par la foi en Christ » (D&A 20 :30 ; Galates 2 :16).
 
Une fois justifiés par la foi en Christ, nous sommes sanctifiés ou rendus saints en recevant le don du Saint-Esprit (3 Néphi 27 :20 ; Alma 13 :12), et ceux qui sont sanctifiés sont appelés « saints » (du latin « sancti » ou saint). Sanctifiés signifie « rendus saints ». Étant déclarés innocents (justifiés par la foi), nous sommes alors dignes de recevoir le Saint-Esprit et nous sommes rendus saints par la réception de ce don. Tous les membres sincères de l’Église reçoivent le don du Saint-Esprit et sont sanctifiés à ce moment-là. C’est pourquoi on les appelle collectivement « les saints ». C’est de cette façon que Paul s’adresse aux Corinthiens dans sa première épître : « À ceux qui sont sanctifiés en Christ Jésus, appelés à être saints » (1 Corinthiens 1 :2). Ceux qui sont sanctifiés ou rendus saints par le Christ en ces derniers jours sont appelés plus précisément « saints des derniers jours ». Ainsi, pour nous, les membres de l’Église, même le terme saint par lequel nous sommes appelés témoigne que nous sommes déjà saints grâce à l’expiation du Christ bien que nous soyons encore dans la chair et que nous nous débattions toujours dans la condition mortelle.
 
À proprement parler, pour entrer dans le royaume de Dieu nous devons avoir la foi en Jésus-Christ, nous repentir et être baptisés. Pour montrer son engagement dans le processus et pour accomplir l’alliance, Dieu nous donne le Saint-Esprit. Ainsi, il est important de souligner le don du Saint-Esprit que nous recevons lors de la confirmation. Ce don est le signe par lequel Dieu nous montre qu’il accepte l’alliance du baptême par laquelle nous sommes passés. Si nous recevons sincèrement le Saint-Esprit et que nous apprécions ce don merveilleux, c’est la preuve qu’à partir de ce moment-là nous sommes véritablement dans l’alliance et dans le royaume, justifiés par notre foi en Christ et sanctifiés par le don du Saint-Esprit.
 
Je traite ce sujet dans mon livre précédent « Croire le Christ » auquel le lecteur se rapportera pour plus de détails. Ainsi la ligne de démarcation entre ceux qui sont sauvés et ceux qui ne le sont pas, entre ceux qui héritent du royaume et ceux qui n’en héritent pas, entre ceux qui sont justes devant Dieu et ceux qui ne le sont pas n’est pas définie en fonction de « bons » ou de « mauvais », car techniquement parlant, nous sommes tous « mauvais » à un degré ou à un autre (Romains 3 :23 ; Mosiah 2 :21). Cette ligne de démarcation se définit plutôt par notre acceptation ou notre rejet de l’alliance avec le Sauveur Jésus-Christ, le seul être dans l’éternité qui peut nous rendre notre innocence en nous incorporant à sa nature infinie, parfaite et sans péché. Cette ligne de démarcation est franchie lorsque nous accomplissons cette alliance et que nous entrons dans l’Église de Jésus-Christ. Comme le Christ est déjà dans le royaume de Dieu, quand nous venons à lui, nous entrons aussi dans le royaume.
 
Ce que je veux souligner à ce propos devrait aller de soi, mais pour beaucoup d’entre nous ça n’est apparemment pas le cas. Pour les membres de l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours, ces étapes importantes, qui correspondent à notre entrée dans le royaume, sont déjà du passé. C’est de l’histoire. C’est pourquoi nous n’attendons pas un éventuel futur verdict. Si nous sommes dans l’alliance, le verdict a déjà été rendu. Puisque toutes ces conditions : la foi, le repentir, le baptême et la réception du Saint-Esprit doivent être remplies avant d’être comptés parmi les membres de l’Église, les fidèles sont déjà dans le royaume. Nous y sommes maintenant. Pour la plupart des lecteurs de ce livre, la merveilleuse porte d’entrée a déjà été passée, et les portes du royaume se sont doucement refermées derrière eux ! Celui qui est entré sincèrement dans l’Église se trouve véritablement dans son royaume.
 
Il est évident qu’il convient d’être dans l’Église suite à un choix réfléchi et pas seulement par le fait d’y être né ou pour d’autres raisons de « mauvaise foi », telles que la famille, la société, ou des raisons économiques.
 
De nombreux saints des derniers jours qui croient au Christ, se sont repentis, ont été baptisés et ont reçu le don du Saint-Esprit, c’est à dire qui sont déjà entrés dans l’alliance, continuent de croire, et d’agir comme si le choix entre le royaume et les ténèbres extérieures, entre le salut et la damnation, entre le céleste, le terrestre et le téleste, devait se faire d’une façon ou d’une autre dans le futur. C’est parce qu’ils sont influencés par les traditions du monde qu’ils croient cela. Trop de saints considèrent leur appartenance à l’Église, pendant leur séjour ici-bas, comme une sorte de vestibule ou d’antichambre située à l’extérieur des portes du royaume. Ils pensent que s’ils œuvrent diligemment ici-bas les portes du royaume finiront par s’ouvrir pour qu’ils y soient reçus quelque part dans le futur ; cette croyance est évidemment fausse.
 
Après avoir reçu la bonne nouvelle du salut, ils se refusent à ouvrir l’enveloppe et continuent à battre la campagne en se demandant jour après jour s’ils sont « suffisamment bons » pour bénéficier de ce qu’en réalité ils possèdent déjà. Ils sont comme un accusé, que le tribunal a déclaré innocent, mais qui n’aurait pas entendu l’énoncé du verdict. Des heures après il serait encore assis, seul sur son banc, à se morfondre et à prier pour être acquitté, alors que le juge et les jurés se seraient prononcés depuis longtemps et seraient déjà rentrés chez eux.
 
Ces membres de l’Église croient que leur place dans le royaume ne leur a pas encore été accordée. Parmi ceux-là quelques-uns ne sont pas entrés dans l’Église de bonne foi, les autres sont venus au Christ honnêtement, mais n’ont pas compris ce qui se produit lorsqu’on a eu la foi, qu’on s’est repenti, qu’on a été baptisé et qu’on a reçu le don du Saint-Esprit. On a passé la porte étroite et resserrée et l’on se trouve déjà, sous conditions, dans le royaume de Dieu. Il reste beaucoup à faire, mais on a passé la porte, cette porte qu’est la foi, le repentir et le baptême. « Car la porte par laquelle vous devez entrer c’est le repentir et le baptême d’eau » (2 Néphi 31 :7). Le Seigneur a révélé à Emma Smith par l’intermédiaire de Joseph, le prophète : « Tous ceux qui reçoivent mon Évangile sont des fils et des filles dans mon royaume » (D&A 25 :1).
 
Il existe peut-être une raison pour laquelle tant de gens, souvent, ne saisissent pas ce principe, c’est parce qu’il y a une ambiguïté dans la façon dont on emploie un certain terme. Quelquefois, mais ce n’est pas systématique, « le royaume » ou « le royaume de Dieu » se rapporte au royaume dans l’avenir, la réalité physique ou la gloire à venir. C’est ce sens par exemple qui est utilisé dans 1 Corinthien 15 :50 ; 2 Néphi 10 :25 ; Alma 41 :4, et D&A 6 :13. Mais dans d’autres passages, « le royaume » est un nom collectif se rapportant à la société des saints et est l’équivalent de « l’Église » comme dans l’expression : « L’Église et le royaume de Dieu ». C’est ce sens que l’on trouve dans Luc 11 :20 ; D&A :27 et D&A 115 :19. Dans cette acception, le terme royaume ne désigne pas un bien immobilier, mais, il est ici parmi nous (en anglais Luc 17 :21, donne « within » pour « dans » au lieu de « among » [au milieu de], qui est traduit correctement en français). Les « Doctrine et Alliances » font une distinction nette dans la section 65 :6 entre « le royaume de Dieu » (le royaume actuel dont nous sommes membres par le baptême) et « le royaume des cieux » (le royaume politique futur qui sera établi en gloire). Il n’y a pas deux royaumes, mais plutôt deux aspects du même royaume. De plus, cette distinction particulière dans les termes ne doit pas être poussée trop loin, car elle n’est pas toujours observée dans les Écritures.
 
J’aime la distinction qui est apportée dans le « Guide des Écritures ». On y trouve deux références pour « royaume » : « royaume de Dieu dans les cieux » et « royaume de Dieu sur terre ». On reconnaît par là les deux aspects présent et futur pour le même et de plus, l’Évangile de Matthieu utilise le terme de « royaume des cieux » là où Luc et Marc utilisent « royaume de Dieu ». Cet usage n’a pas pour fonction de spécifier le royaume futur opposé au présent, mais Matthieu, qui est un document spécifiquement juif, cherche à éviter par respect la répétition trop fréquente du nom de Dieu en le remplaçant par le mot cieux.
 
D’un côté, le royaume est présent ici et maintenant en tant qu’Église, et en tant que communauté des saints. D’un autre côté, on doit encore l’attendre en tant que réalité politique et géographique, jusqu’à la seconde venue de notre Seigneur.
 
De même le royaume se trouve ici dans un sens, mais que dans l’autre il ne l’est pas encore, ainsi d’un côté ma place dans le royaume à venir est sûre est certaine (puisque la promesse de Dieu est sûre et certaine à moins que je choisisse de partir), mais d’un autre côté, je n’ai pas encore été glorifié. Bien que je sois déjà racheté de la Chute par le Christ, je dois toujours souffrir de ses conséquences ici-bas. C’est pourquoi dans un sens je suis déjà sauvé, l’expiation est accomplie et la victoire est acquise, mais je ne suis encore pas totalement sauvé, puisque je dois lutter dans la mortalité, je mourrai sûrement, et en réalité je ne serai pas glorifié avant longtemps. Si on admet, que ceux qui atteindront la gloire céleste (s’ils sont sincères et fidèles) représentent le royaume sont déjà ici alors ils sont sauvés maintenant, si on considère ceux qui recevront la gloire céleste, le royaume se trouve évidemment encore dans le futur. 
 
Je ne pense pas que les saints des derniers jours adopteront la terminologie protestante et commenceront à parler du fait « d’être sauvé » au temps présent. Il existe un risque que l’on prenne en compte les autres interprétations protestantes. Cependant, nous devons comprendre que le salut conditionnel est une réalité présente, que nous pouvons être certains maintenant de ce que Dieu a promis pour le futur. Après tout, les saints des derniers jours utilisent correctement le terme « être scellé » au présent alors même que nous savons que ces scellements sont conditionnés par notre fidélité et ne seront pas pleinement effectifs avant longtemps. Je suggère que l’on utilise l’expression « être sauvé » de la même façon. Nous sommes sauvés maintenant de la même façon que la plupart d’entre nous le sont : à condition d’être fidèles continuellement. En supposant que nous sommes fidèles, nous pouvons dire que nous sommes « sauvés », au même titre que nous disons que nous sommes scellés même si la pleine réalisation de cette promesse n’aura pas lieu avant la résurrection.
 
Je peux illustrer par un exemplela nature ambiguë du « déjà ici, mais pas encore là » du royaume ou du fait « d’être sauvé ». J’ai emmené récemment ma petite fille, Mary, à la pêche, et il était important pour moi qu’elle attrape du poisson. J’ai jeté la ligne pour elle et quand j’ai senti que ça mordait, j’ai ferré fermement. Ensuite j’ai laissé du mou et j’ai donné la canne à Mary. J’ai attendu quelques secondes et je lui ai suggéré de rembobiner lentement. Après quelques moulinets elle a senti le poisson remuer au bout de la ligne et criant de joie elle l’a ramené sur la berge.
 
Maintenant, voici ma question : a quel moment le poisson a-t-il été réellement attrapé ? Est-ce qu’il a été attrapé lorsque j’ai ferré et que j’ai fait en sorte que le dénouement soit sûr et certain, ou est-ce que c’est Mary qui l’a l’attrapé lorsqu’elle l’a physiquement amené sur la berge ? On peut accepter les deux possibilités. De même, lorsque nous héritons du royaume, quand sommes-nous « sauvés » ? Est-ce que c’est lorsque l’hameçon est accroché, c’est à dire lorsque les évènements déterminants ont eu lieu et rendent le dénouement certain à la seule condition de persévérer (l’expiation du Christ et mon entrée dans l’alliance) ou est-ce que c’est lorsque nous ressuscitons dans la gloire céleste et que nous recevons ce qui nous a été promis avec certitude ? Il existe des arguments valables des deux côtés.
 
Brigham Young n’éprouvait aucun problème à utiliser le terme « sauvé » au présent : « Notre œuvre se fait au présent. Le salut que l’on cherche est pour le présent, et si on le cherche correctement, on peut l’obtenir et en jouir continuellement. S’il continue aujourd’hui, c’est selon le même principe qu’il continuera demain, le jour suivant, la semaine suivante, ou l’année prochaine, et nous pouvons dire dans l’éternité prochaine » (Journal of Discourses vol. 1, p. 131).
 
En fin de compte, l’hameçon est accroché pour ceux qui sont venus au Christ, et Dieu à l’ intention de nous amener à lui. Aussi, à moins que nous coupions délibérément la ligne, nous pouvons tout à fait anticiper avec joie la venue de ce qui nous est promis. C’est maintenant que nous sommes membres du royaume à venir, et à moins de choisir le suicide spirituel, nous pouvons nous considérer comme sauvés. J’espère que la compréhension correcte de cette grande vérité aidera de nombreux membres de l’Église à ressentir plus aisément « la joie », « l’allégresse », « la confiance » et « l’espoir » que la bonne nouvelle de l’Évangile est censée apporter.
 
Il y a plusieurs années, des amis ont adopté une enfant assez âgée du tiers monde qui avait connu une vie difficile avant de venir aux États-Unis. Pendant longtemps ils subirent de grandes frustrations dans leurs relations avec leur nouvelle fille à cause de son insécurité maladive ; elle ne pouvait se faire à l’idée qu’elle était en sécurité. Elle faisait attention d’une façon obsessive et servile à tout ce que disaient ses nouveaux parents de peur de faire une erreur qui l’aurait fait renvoyer « là-bas ». Elle était tellement terrifiée de ce que ses parents pourraient faire si elle n’était pas assez « bonne », parfaite, qu’elle fut incapable pendant longtemps d’avoir les relations d’amour et de confiance qu’ils désiraient avoir avec elle. Ils ne pouvaient pas faire de suggestions dans le cadre de son amélioration, ni faire de critiques constructives, ni montrer le moindre signe d’irritation ou d’impatience sans que la pauvre fille se mette à paniquer, à supplier en larmes de lui pardonner et de lui donner « juste encore une chance ». Ça faisait mal au cœur de la voir. Ils essayaient de la rassurer encore et encore qu’elle avait toutes les « chances » dont elle avait besoin, que leur décision de l’adopter était éternelle, irrévocable, et qu’on ne reviendrait plus làdessus ; qu’elle faisait maintenant partie de leur famille et qu’elle n’avait pas besoin d’avoir peur d’être renvoyée. Ils la suppliaient :

« S’il te plaît, fais-nous confiance. Ne te rends-tu pas compte que toi seule peux rompre le lien qui nous unit maintenant ? Il ne sera jamais tranché de notre côté. Sois sûre que ta place est avec nous. Tant que tu voudras rester, tu es chez toi ». Cela lui prit des années pour réaliser qu’on n’envisageait pas un renvoi éventuel à chaque fois qu’elle faisait une erreur.
 
Eh bien, spirituellement, certains d’entre nous sont exactement comme elle. Nous avons été si traumatisés par le monde que nous avons les pires difficultés à accepter l’amour de Dieu et à croire qu’il nous est possible d’avoir une place dans sa famille. Nous recevons déjà son amour et nous sommes déjà adoptés en tant que fils et filles et certains d’entre nous essaient encore de gagner son affection et d’entrer dans sa famille. Notre incapacité à accepter les dons et les tendres miséricordes de Dieu nous empêche de jouir de cette relation supérieure que nous pourrions avoir avec lui si nous connaissions seulement la place que nous occupons dans son amour et dans son royaume et qui nous permettrait de progresser.
 
Je me demande si nos frères et sœurs nés de nouveau en tant que fils et filles de Dieu grâce à l’expiation du Christ ne frustrent pas notre Père éternel lorsqu’ils paniquent à chaque faute de peur qu’Il cesse de les aimer et les renvoie dans le monde. Je peux presque l’entendre nous supplier : « S’il te plaît, aie confiance en moi. Ne sais-tu pas que toi seul peux briser le lien qui nous relie ? Il ne sera jamais tranché de mon côté. Ta place avec moi est assurée. Tant que tu voudras rester, c’est ton foyer. »

De nouveau, nous devons croire ce que le Seigneur a dit à Emma Smith : « Tous ceux qui reçoivent mon Evangile sont fils et filles dans mon royaume (D&A 25 :1) ». Il doit en être ainsi, car Dieu ne ment pas. Quand nous élevons nos enfants, nous ne disons pas : « Tu as fait du bon travail jeune homme. Si tu continues comme ça, tu pourras gagner ta place dans la famille ! On peut même envisager que tu puisses devenir notre fils (maintenant, garçon, il ne faut pas trop espérer !) » non, ce n’est pas ainsi que nous agissons. Tout d’abord nous créons des relations familiales et ensuite ces relations deviennent la base d’un apprentissage. Sans cette relation, nous n’aurions aucun droit d’imposer un quelconque apprentissage ou attendre l’obéissance de qui que ce soit. Je crois qu’il en est de même avec Dieu.

Lorsque nous allons au Christ avec un cœur brisé et l’esprit contrit, il nous encercle dans les bras de son amour (2 Néphi 1 :15), il nous adopte en tant que fils et filles. Ensuite comme un père aimant, il nous enseigne comment devenir comme lui. Mais le lien, la relation, que nous avons appelé de nos vœux précède l’enseignement et ce lien justifie et rend supportables son enseignement et la discipline qu’il nous impose.
 
Par rapport au royaume de Dieu, la plupart des gens sont « dehors jusqu’à ce qu’ils soient dedans ». Ce qui veut dire qu’ils ne sont pas membres du royaume tant qu’ils n’ont pas accepté l’Évangile et n’ont pas fait alliance. Mais contrairement à cette situation, les membres de l’Église sont « dedans jusqu’à ce qu’ils soient dehors ». Ce qui signifie que tous ceux qui sont dans l’alliance sont maintenant des enfants de Dieu, et le resteront jusqu’à ce qu’ils choisissent de partir. Si nous acceptons son enseignement et sa discipline, si nous persévérons jusqu’à la fin, nous serons toujours ses enfants au dernier jour.
 
Peut-être que la meilleure analogie est cette écriture favorite : Le Christ en tant qu’Époux, l’Église en tant qu’Épouse et l’alliance de l’Évangile en tant que mariage. À quel moment ce mariage estil célébré ? À quel moment le Sauveur et nous devenons-un par l’alliance ? Pas au moment d’un jugement futur, mais au baptême ! Nous ne vivons pas seulement ensemble, nous sommes dans l’Église et l’Église est l’épouse, d’où il s’ensuit que nous jouissons des relations maritales maintenant. Étant unis à l’époux par l’alliance de l’Évangile, nous ne pouvons passer notre vie comme des concubins, en espérant qu’un jour il nous épousera et régularisera la situation. Nous sommes déjà mariés et il attend de nous que nous le sachions et que nous agissions en conséquence !
 
Maintenant il est vrai que nous pouvons décider de ne plus vouloir rester dans l’alliance et dans le royaume. Nous pouvons nous rebeller contre Dieu, violer notre accord passé avec lui, et choisir de partir. Nous pouvons demander le divorce d’avec le Christ. Mais cette décision n’est pas du fait de Dieu, c’est notre fait à nous. Il ne nous renverra jamais tant que nous essayons de faire sa volonté, même si parfois on se conduit plutôt mal, pas plus que nous condamnerions notre conjoint ou nos enfants parce qu’ils essaient de faire notre volonté d’une façon imparfaite. En d’autres termes, la seule incertitude ou la seule échappatoire concernant le contrat de l’Évangile se trouve de notre côté. Cette situation nous donne le moyen de sortir du royaume si nous désirons le quitter. Ceux qui sont déjà dans l’alliance, et qui continuent à se faire des soucis sur ce que Dieu va faire de nous dans le futur n’ont rien compris. À ce niveau dans notre relation cela n’est plus du ressort de Dieu, il est lié (D&A 82 :10). La seule incertitude ne réside pas dans ce que Dieu va faire (on est sûr de ce qu’il va faire), mais plutôt dans ce que nous allons faire. Nous avons l’option à n’importe quel moment d’annuler le contrat, de demander le divorce par nos actions, mais Dieu, lui, ne le fera pas, il s’est engagé. Nous pouvons rompre l’accord, mais si nous choisissons de ne pas le rompre, l’issue est absolument sûre et certaine. La balle est dans notre camp et notre sort entre nos mains.
 
Notre place dans le royaume nous appartient. Nous pouvons la garder ou la perdre, mais c’est à nous de choisir. En tant que membres de l’Église, si nous voulons rester dans le royaume, nous pouvons. Si nous voulons partir, nous pouvons.
 
Il est important de se rappeler que la porte du royaume de Dieu est symbolisée par l’alliance de la foi, du repentir, du baptême et de la réception du Saint-Esprit. Si cela vous est déjà arrivé, alors les portes se trouvent derrière vous, et tant que vous êtes fidèles, vous êtes dans le royaume de Dieu. Cette partie du jugement est déjà du passé. Rien de ce qui peut se passer ultérieurement ne peut être considéré comme une aide pour vous permettre d’entrer dans le royaume, ou de payer votre entrée, parce que vous y êtes déjà. Il s’ensuit logiquement que pour ceux qui sont nés de nouveau, la question cruciale n’est pas de savoir comment entrer dans le royaume, mais plutôt comment y rester et de persévérer jusqu’à la fin. Car nous devons choisir une base ferme sur laquelle reposer, ce choix doit refléter ce que nous aimons et ce que nous cherchons. C’est pourquoi persévérer jusqu’à la fin est le cinquième principe de l’Évangile. Tous les jours notre interrogation ne devrait pas être : «Est-ce que je suis déjà arrivé dans le royaume ? Mais plutôt : « Est-ce que je veux toujours y rester ? »
 
Je crois que la clé capitale pour réussir à suivre le Christ toute notrevie vie est de se rendre compte que nous agissons en tant que fils et filles « nés de nouveau » (Mosiah 5 :7). Je trouve personnellement une grande puissance et un grand réconfort à savoir que j’œuvre pour le Christ, j’œuvre comme un fils, entouré des bras de son amour, en situation sure dans son royaume. Je crois que la reconnaissance et l’amour que je ressens en réponse à cette connaissance est une motivation bien plus forte pour faire le bien que la crainte et l’angoisse ressenties à cause d’un jugement futur ou d’éventuels châtiments.
 
Une grande partie de la bonne nouvelle contenue dans l’Évangile est la promesse que le royaume est à nous maintenant. « Voici, le royaume est à vous, et les ennemis ne vaincront pas » (D&A 38 :9 ; voir aussi D&A 29 :5 ; 35 :27 ; 38 :9 ; 42 :69 ; 45 :1 ; 50 :35). Dieu peutil mentir ? Évidemment non. Alors nous devons accepter le fait que nous sommes membres de son royaume maintenant, ô joie, ô allégresse ! Tout comme nous devons accepter aussi les devoirs et les corvées appartenant aux fils et filles de ce royaume. Alors, arrêtez de vous faire du souci ! Le poisson est ferré et si vous ne détachez pas la ligne, il n’existe qu’une seule issue à votre engagement de fidélité envers le Christ.
 
Le choix d’une vie entière pour rester dans le royaume, pour rester en Christ et continuer avec lui dans l’alliance de l’Évangile, c’est ce que les Écritures appellent : « persévérer fidèlement jusqu’à la fin ». Si on considère l’entrée dans l’alliance par la foi, le repentir, le baptême et la réception du Saint-Esprit (la foi au Christ), et ensuite que l’on reste dans l’alliance en persévérant fidèlement jusqu’à la fin de sa vie (en suivant le Christ) tout cela permettra d’hériter de la gloire céleste à la résurrection. C’est pourquoi la question n’est pas : « Est-ce que j’ai fait ce qu’il fallait, ou non ?». La question est : « Ayant été admis sous conditions dans le royaume de Dieu par le baptême par la grâce du Christ, est-ce que je veux toujours rester ? Est-ce que je choisis de persévérer ? » il en sera de la façon dont on répondra honnêtement à cette question.
 
 
CHAPITRE DEUX : PERSÉVÉRER JUSQU’À LA FIN

Dans le chapitre précédent, nous avons vu que, quelle que soit la persévérance que nous montrons pour conserver la place qui est déjà la nôtre grâce à l’alliance que nous avons faite en Christ, nous devons nous conduire dans le royaume de Dieu en situation de force et de sécurité. Nous ne partons pas de l’hypothèse que si nous sommes suffisamment bons, nous verrons un jour s’ouvrir doucement les portes du royaume. Non, c’est en tant qu’enfants de Dieu que nous persévérons alors que nous sommes déjà « encerclés dans les bras de la sécurité » (Alma 34 :16) et nous savons que cette persévérance sera d’autant plus facile si nous continuons en nous considérant comme les héritiers légitimes. Alors, que signifie exactement persévérer jusqu’à la fin ? Persévérer : en quoi et comment ? Et jusques à quand ?
 
On trouve peu de promesses dans les Écritures qui aient plus de crédibilité et de garanties que celles qui sont faites à ceux qui persévèrent jusqu’à la fin. Prenez, par exemple, 3 Néphi 15 :9 :
 
« Levez les yeux vers moi, et persévérez jusqu’à la fin, et vous vivrez; car à celui qui persévérera jusqu’à la fin, je donnerai la vie éternelle.» Outre les nombreux prophètes qui ont fait écho de cette promesse au nom de Dieu, les Écritures témoignent que le Père (2 Néphi 31 :15, 20) et le Fils (3 Néphi 27 :6) ont eux-mêmes fait cette promesse. Il n’y a absolument aucun doute que ceux qui persévèrent jusqu’à la fin seront sauvés.
 
Pour la plupart des gens, le terme « persévérer » inspire des images de goudron et de plumes ou de torture au pilori. Mais actuellement, peu de saints ont à faire face à de telles persécutions. Alors sommes-nous moins éprouvés que les saints des temps passés ? Nous est-il plus facile, en l’absence d’épreuves physiques (collectivement parlant) de persévérer jusqu’à la fin ? Je ne pense pas. En fait, supporter les afflictions n’est que l’infime partie de ce que signifie « persévérer jusqu’à la fin ». 
 
Très souvent, les Écritures utilisent le terme « persévérer » dans le sens de « durer », « continuer », ou « rester » plutôt que « souffrir ». C’est important ; cela indique que la persévérance se rapproche plus de la régularité que de la résistance. Par exemple, Alma exprime l’espoir que son fils Shiblon « continuera(s) à garder ses commandements ; car béni est celui qui persévère jusqu’à la fin.» (Alma 38 :2). Dans cet exemple, persévérer jusqu’à la fin signifie la même chose que continuer fermement jusqu’à la mort. Néphi le disait déjà clairement dans 2 Néphi 33 :9 : «…qu’ils ne se soumettent au Christ, et entrent par la porte étroite et marchent dans la voie resserrée qui mène à la vie, persévérant dans la voie jusqu’à la fin du jour de l’épreuve.» Remarquez que ceux qui viennent au Christ sont déjà entrés par la porte étroite. Maintenant, ils doivent continuer. Ainsi, persévérer signifie qu’une fois que l’on a trouvé le chemin étroit et resserré, on doit continuer dans cette voie (que l’on a choisi lors du baptême) en respectant son engagement envers le Christ. Tout d’abord, on vient au Christ, ensuite on reste ferme. Persévérer c’est rester ferme dans l’Église et dans l’alliance.

« La fin », c’est la fin de notre probation mortelle (voir 2 Néphi 33 :9). Persévérer jusqu’à la fin signifie que nous n’abandonnions pas le Christ ; que nous ne quittions pas l’Église et le royaume ou que nous ne perdions pas notre témoignage à cause des difficultés de la vie ou des tentations, nous restons fermes. A contrario, ne pas persévérer signifie reculer en deçà de notre point de départ alors que nous avions juré loyauté envers Dieu et son Église et que nous renions notre promesse, et, ce faisant, nous démontrons que nous ne sommes ni fiables ni fidèles. « Quiconque a mis la main à la charrue, et regarde en arrière n’est pas digne du royaume de Dieu » (Luc 9 :62). L’endurance dans le sens biblique a peu de choses à voir avec la résistance physique, car beaucoup de saints très éprouvés sur le plan physique persévèrent comme des champions pendant qu’ils tracent le sillon que Dieu leur a assigné. La persévérance est plutôt une question d’intégrité, de capacité à garder notre promesse envers Dieu une fois que nous avons été admis dans son alliance et son royaume.
 
De la même façon qu’on fera confiance à un conjoint qui garde fidèlement l’alliance du mariage, on fera confiance à ceux qui gardent les alliances de l’Évangile. Dans les Écritures, le mariage symbolise souvent l’alliance, il est donc tout à fait juste de considérer que ceux qui la respectent fidèlement sont des partenaires fidèles. Dans l’Ancien Testament, les mots foi, fidèles, et fidélités viennent tous du mot hébreu ‘haman’ (être ferme ou digne de confiance). Ils impliquent plus des notions de loyauté et de détermination que des notions de croyance. Les mots pour « sécurité », « certitude » et « garantie » viennent tous de la même racine hébraïque. C’est pourquoi être fidèle se rapporte moins à notre croyance ou même à notre activité dans l’Église qu’à la question de savoir si on peut nous faire confiance quant à notre devoir dans le royaume terrestre de Dieu.

Les alliances du baptême et du temple sont des promesses solennelles faites envers Dieu se rapportant à la façon dont nous voulons diriger notre vie. Persévérer jusqu’à la fin consiste à garder ces promesses toute notre vie, quelles qu’en soient les conséquences (cependant, garder ses promesses ne veut pas dire « ne plus jamais pécher », puisque l’alliance fournit en elle-même le moyen du repentir continu en prenant la Sainte-Cène). Malheureusement, à cause d’influence confessionnelle dans le français moderne, le mot foi en est arrivé à être largement associé au mot croyance et ne tient pas compte de sa connotation d’origine avec le mot fidélité. Le mot foi rend seulement une partie du sens de l’hébreu d’origine. Si nous rétablissons cette nuance d’origine (que la foi est un engagement actif envers une idée, la fidélité, plutôt que sa simple acceptation passive), nous résolvons dans une grande partie le faux choix entre la foi et les œuvres. Avoir une foi salvatrice en Christ consiste à croire en Christ et à lui être fidèle. Cela consiste à s’investir en Christ. Il ne suffit pas d’être convaincu mentalement qu’il est le Fils de Dieu si cette conviction n’a aucune influence sur notre mode de vie. Si nous nous bornons à simplement croire en son identité sans lui dédier notre vie, alors nous sommes comme les démons qui eux aussi croient qu’il est, mais ne jouissent pas de cette connaissance (Jacques 2 :19).
 
En général les Écritures associent « persévérer jusqu’à la fin» avec la fidélité à nos alliances en tant que chrétiens et à celles de la communauté qui est l’Église. Par exemple, dans D&A 20 :29, on dit : « Nous savons que tous les hommes doivent se repentir et croire au nom de Jésus-Christ, adorer le Père en son nom, et persévérer jusqu’à la fin dans la foi en son nom, sinon ils ne peuvent être sauvés dans le royaume de Dieu » (voir aussi 2 Néphi 9 :24).
 
Le Sauveur insiste sur cette dimension que représente la persévérance dans l’alliance lorsqu’il enseigne les Néphites, en soulignant en particulier l’obligation que l’on a de se repentir et d’être baptisé : « Il arrivera que quiconque se repentira et sera baptisé en mon nom, sera rassasié; et s’il persévère jusqu’à la fin, voici, celui-là je le tiendrai pour innocent devant mon Père, en ce jour où je me tiendrai pour juger le monde» (3 Néphi 27 :16).
 
Donc persévérer jusqu’à la fin signifie entrer dans l’alliance de l’Évangile par la foi en Christ, le repentir, le baptême, et la réception du Saint-Esprit et ensuite rester fidèle à cette alliance. Dans D&A 20 :37 « la détermination à servir le Christ jusqu’à la fin » est une condition pour être baptisé dans l’Église.
 
C’est pourquoi persévérer jusqu’à la fin signifie plus qu’être pratiquant dans l’Église. Persévérer jusqu’à la fin exige d’être conscient des obligations contenues dans l’alliance et que l’on est profondément déterminé à les garder fidèlement. Alors que le terme pratiquant décrit un comportement visible, persévérer jusqu’à la fin décrit un engagement intérieur envers l’Évangile et l’Église de Jésus-Christ. Évidemment, il vaut mieux être pratiquant que ne pas l’être, mais le fait de l’être ne garantit pas grand-chose de notre engagement spirituel. On peut être pratiquant pour de fausses raisons ou des raisons superficielles. Avoir une connaissance lucide de nos obligations envers l’alliance et la détermination à les respecter jusqu’à la fin c’est cela être pratiquant pour les bonnes raisons.
 
J’ai connu un jour un homme que devait décider à chaque fois qu’il recevait son salaire s’il devait ou non payer sa dîme, à chaque fois qu’il y avait une réunion, s’il devait y aller, à chaque fois qu’on lui offrait un verre, s’il devait l’accepter. J’ai fini par lui demander : « Pourquoi ne décidez-vous pas une fois pour toutes à choisir votre camp ? Pourquoi vous sentez-vous obligé de tester votre loyauté à chaque fois qu’on vous demande de prendre une décision ? Vous passez votre temps à réinventer sans cesse la roue spirituelle. Vous ne pourrez jamais progresser tant que vous ne construirez pas sur ce que vous possédez déjà. » Quelques semaines plus tard, il me demanda de l’emmener à nos réunions de pieu. Je fus content qu’il vienne et je le lui dis. Il me répondit :

« Vous savez, ça ne me plairait pas que ma femme me dise tous les matins qu’elle doit décider si elle m’aime ou pas, ou qu’elle me dise qu’elle reste avec moi parce qu’elle n’a pas encore trouvé de bonnes raisons pour me quitter. Je pense que le Seigneur mérite, venant de ma part, un engagement autrement supérieur que celui-là. Je suis prêt à arrêter de réinventer la roue et à évoluer dans ma vie. Je suis décidé une fois pour toutes à être un saint des derniers jours. »
 
Il y a des gens qui disent grosso modo : « Bon, aujourd’hui je pense que l’Église est vraie, mais venez me le redemander demain. » Il arrive un moment où notre engagement envers l’Évangile et la conviction que nous avons de ses vérités règle certaines questions et prédétermine nos réponses envers les défis que nous rencontrons quant à notre foi, aux commandements que nous recevons, ou les sacrifices que nous sommes appelés à faire. Ce n’est pas de la foi aveugle, c’est plutôt un vague soupçon (voir la traduction de Joseph Smith de Luc 14 :38, où le Sauveur conseille à ses disciples « Méditez ceci en votre cœur, afin de faire les choses que je vous enseignerai et que je vous commanderai ») qui, à terme, a fini par devenir de la vraie foi ! La foi, après tout, c’est la connaissance spirituelle, ce n’est pas une supposition, une hypothèse, ni un espoir, mais c’est de la connaissance. Bien souvent, c’est une connaissance qui n’est pas soutenue par des preuves tangibles ni même remise en question par une preuve visible. Tant que notre foi n’a pas une vie et une force indépendantes et qu’elle continue à s’appuyer sur des arguments intellectuels ou des preuves physiques, ce n’est toujours pas de la foi. Dans ces conditions, ce que nous croyons être de la foi se limite à n’être que l’argument humain le plus puissant que nous ayons examiné jusqu’à ce jour. Un témoignage n’est pas une hypothèse scientifique, qui peut être soutenue par une preuve un jour et détruite le lendemain. C’est une conviction au-delà de la preuve intellectuelle du moment que certaines choses sont éternellement vraies. 
 
Les « convertis intérimaires » font partie de ceux qui n’ont pas reçu cette conviction ou qui ne veulent pas l’accepter, mais qui n’ont pas encore trouvé une raison suffisante pour partir. Tout comme un engagement partiel n’est pas satisfaisant dans le cadre du mariage, il en est de même à long terme dans le mariage spirituel de l’Évangile. Ce genre de personnes a besoin de se convertir et de faire en sorte que le témoignage de l’Esprit décide une fois pour toutes de la question de la vérité de l’Évangile. Dans un mariage céleste, on dit : « Nous sommes scellés, quelles qu’en soient les conséquences ». De même un membre véritablement converti dira : « Je suis membre de cette Église, et ma destinée est d’être avec les apôtres et les prophètes, qu’importe le reste. Audelà de ces questions, loyautés, réunions, engagements, c’est là que je suis, c’est ce que je crois, c’est là que je veux servir ». C’est seulement à ce moment que l’on peut goûter aux pouvoirs et aux bénédictions promis aux fidèles.
 
Sans cet engagement préalable, un nouveau commandement, un sacrifice ou quelque offense réelle ou supposée de la part des dirigeants de l’Église pourraient mettre en danger notre persévérance. On peut être pratiquant dans l’Église sans en être convaincu, mais on ne peut persévérer jusqu’à la fin. Le Seigneur a parlé de ceux qui ne pourraient prendre de tels engagements dans la Parabole du Semeur. Ils n’ont pas de racines en eux-mêmes, mais ils persévèrent pendant un temps ; ensuite, lorsque les difficultés arrivent à cause du monde, alors ils sont offensés (Matt. 13 :21). Nous ne devons pas craindre d’enfoncer nos racines profondément, au tréfonds de l’Évangile et de l’Église, car il est aussi autodestructeur spirituellement de ne pas être loyal à cent pour cent, comme nous l’avons promis, que cela l’a été pour Ananias et Sapphira qui avaient gardé par-devers eux une partie de leurs offrandes consacrées (voir Actes 5 :1-11).
 
Selon les écritures, en dehors du fait d’être fidèles à nos alliances du baptême, il existe d’autres éléments soutenant cette persévérance dans la fidélité : 
 
1. Se tourner vers le Christ (3 Néphi 15 :9).
2. Continuer à prendre sur soi le nom du Christ (3 Néphi 27 :6).
3. Se faire un festin des paroles du Christ avec fermeté, espérance et amour (2 Néphi 31 :20 ; Moroni 8 :26).
4. Offrir  toute  notre  âme  au  Christ  en  prière  et  en  jeûne (Omni 26).
5. Suivre l’exemple du Christ (2 Néphi 31 :16).
6. Adorer le Père au nom du Christ (D&A 20 :29).
7. Garder les commandements (1 Néphi 22 :31 ; Alma 38 :2 ; D&A 14 :7).
8. Chercher à établir Sion par la patience et l’humilité (1 Néphi 13 :37 ; Alma 32 :15 ; D&A 24 :8).
 
Le point commun de toutes les exhortations que l’on trouve dans les Écritures concernant la persévérance n’est pas la souffrance, mais la loyauté envers le Christ. Il arrive souvent que ceux qui n’observent pas leurs engagements cherchent à se justifier en séparant leur loyauté envers le Christ avec celle qu’ils auraient vis-à-vis de l’Église(voir aussi les exemples de ceux qui ont entendu le sermon de Jésus sur le « Pain de Vie » et se contentèrent de croire en lui lorsqu’il les a nourris, mais furent offensés et « ne marchèrent plus avec lui » lorsqu’il leur enseigna une doctrine plus puissante (Jean 6) ; mais c’est impossible. Les alliances que nous avons passées dans le cadre de l’Évangile rétabli du Christ comprennent précisément notre relation avec son Église et les alliances faites en son sein ; c’est à dire dans l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours. Nous ne pouvons persévérer jusqu’à la fin dans ces alliances sans persévérer dans l’Église. Le Seigneur l’a dit clairement : « Quiconque est de mon Église et y persévère jusqu’à la fin, je l’établirai sur mon roc et les portes de l’enfer ne prévaudront point contre lui » (D&A 10 :69). Il ne peut y avoir d’arrangement personnel.

Persévérer jusqu’à la fin dans nos alliances signifie persévérer dans l’Église. Dieu n’excusera pas ceux qui quittent l’Église en pensant qu’ils ont de bonnes raisons ou qu’ils peuvent garder leurs alliances faites dans l’Église tout en la rejetant ou en s’opposant à elle. Quelles que soient leurs intentions, ils se trompent. Par définition, s’ils ne durent pas, ils ne persévèrent pas jusqu’à la fin. Il n’existe aucun succédané acceptable pour remplacer l’alliance en dehors de l’Église et du royaume de Dieu sur terre.
 
Que signifie « être fidèle »
 
Une erreur commune à certains membres de l’Église consiste à assimiler la fidélité, partie intégrante de la persévérance jusqu’à la fin, et le fait d’être sans péché. À chaque fois que nous commettons un péché, arguent-ils, nous sommes infidèles au Christ et de ce fait violons nos alliances. Mais ce n’est pas comme cela que cela fonctionne, car tous les saints fidèles commettent des péchés de temps en temps. C’est pourquoi le repentir et le renouvellement des alliances dans le cadre de l’ordonnance de la Sainte-Cène font partie de l’alliance de l’Évangile. Dieu a prévu que ses enfants dans l’Église et dans l’alliance chuteraient plus ou moins régulièrement et il leur a fourni un remède quand cela leur arriverait.
 
Tout comme des conjoints fidèles ne peuvent être parfaits et peuvent faire des choses blessantes envers leurs partenaires et (voir aussi D&A 50 :8 et 85 :11, 33) égratigner leurs relations sans que le mariage prenne fin nécessairement, les membres fidèles de l’Église sont aussi imparfaits et peuvent faire des choses qui suscitent des tensions relatives à l’alliance avec Dieu, sans que pour autant celle-ci prenne fin. Je ne suis pas en train de dire que ces fautes sont minimes ou sans importance. Je dis simplement qu’elles n’annulent pas obligatoirement l’alliance. Qu’est ce que ça veut dire lorsque Janet, ma femme, dit en faisant les gros yeux : « Oh au moins, il est fidèle ? ». Elle ne veut certainement pas dire que je suis parfait ! Mais en dépit de mes nombreux défauts, je lui suis loyal et il n’y a personne d’autre.

De même, dans l’alliance évangélique, être fidèle ne veut pas dire être parfait. Cela signifie simplement être loyal envers le Christ et qu’il n’existe rien d’autre (pas d’intérêt, de cause, ou d’allégeance qui lui soient supérieurs). Nous savons distinguer dans nos accords humains entre la perfection d’un côté et la fidélité de l’autre. Il est vrai que certains actes peuvent détruire l’alliance du mariage et le laisser en ruines, mais oublier un anniversaire de mariage n’en fait pas partie. De même, certains actes vils brisent l’alliance de l’Évangile et nous font expulser du royaume, mais jurer dans la circulation n’en est pas un. C’est pourquoi le Seigneur nous a donné comme instruction de nous réunir souvent pour partager la Sainte-Cène, pour nous repentir des péchés qu’il sait que nous commettons et par là renouveler nos alliances. Nous les « renouvelons » parce que nous les souillons et les déchirons dans notre vie quotidienne parce que nous faisons des fautes et avons besoin de revenir à la base.

Encore une fois, tant que le Christ est placé en premier dans notre vie, tant que nous ne le plaçons pas derrière un deuxième « amour », alors nous sommes toujours des partenaires fidèles, bien que nous ayons besoin de nous excuser de temps en temps et repartir sur de bonnes bases avec lui. Tant que nous serons mortels, nous devrons nous repentir et renouveler régulièrement nos alliances. Mais cela ne signifie pas que nous soyons infidèles, tant qu’une autre allégeance, un autre amour n’a pas pris la place du Christ dans nos soucis primordiaux.
 
Pour illustrer cela, on peut imaginer un gardien de foot qui est moyen, mais n’est pas aussi bon que celui d’en face. C’est pourquoi la plupart du temps il reste sur le banc de touche. Est-il rejeté de l’équipe parce qu’il ne joue pas ? Non ; il fait partie de l’équipe ; simplement, il n’est pas le meilleur joueur pour l’instant. Maintenant, supposons qu’en raison de blessures, subies par le gardien d’en face, ce gardien moyen est propulsé dans le jeu, où il joue correctement, et que son équipe gagne, même s’il concède trois buts. Le considère-t-on comme faisant partie de l’autre équipe parce qu’il a laissé passer trois buts quand un meilleur goal n’en aurait laissé passé aucun ? Les joueurs de son équipe vontils le considérer comme un traître après le match à cause de ses erreurs ? Du fait que ses talents limités ont joué en faveur de l’équipe adverse, celle-ci lui doit-elle quelque chose ? Évidemment non. Notre goal de deuxième catégorie peut manquer de talent, mais il hors de question de douter de sa loyauté ni à quelle équipe il appartient. Jouer du mieux qu’on peut et faire des fautes ne nous exclut pas de l’équipe. On peut être relégué sur le banc, mais on n’est pas l’adversaire. 
 
Dans l’Église et le royaume de Dieu, certains joueurs ont plus de talents dans certains postes que d’autres ; certains ont plus de force ou d’expérience que d’autres. Tout le monde ne peut pas être bon dans toutes les circonstances ou dans tous les postes. Cela ne fait pas d’eux des infidèles et qu’ils sont rejetés de l’équipe. Pour l’instant ils sont en deuxième position. Leur désir de servir le Christ, de se repentir régulièrement et de s’améliorer réellement leur garantit qu’ils sont toujours dans le royaume. Ils sont du bon côté ; même s’ils ne sont pas les plus talentueux du moment dans leurs postes. Nous, dans l’Église, nous devons apprendre à séparer la question de la force et du talent avec celle de la loyauté et de la fidélité, tant pour nous évaluer personnellement que pour juger autrui.
 
Nous devons aussi apprendre à faire la distinction, comme l’a montré Frère Dallin Oaks, entre les « fautes » et les « péchés » (voir Dallin Oaks, ‘Sins and Mistakes’, BYU Campus Education Week, août 1994). D’un autre côté, supposons qu’avant le match, le meilleur goal soit allé voir l’équipe adverse et qu’il se soit fait payer pour les laisser marquer. Qui sert-il ? À qui appartient-il ? Bien qu’il ait des qualités supérieures, il sert un autre maître que les membres de son équipe et sa déloyauté en fait un ennemi. Mais être maladroit ne fait pas de nous un ennemi à la cause.
 
Certains parmi nous ont vite fait de penser que nous sommes des joueurs de deuxième, voire de troisième catégorie, ou que nous sommes spirituellement maladroits. Nous oublions que Dieu, dans son jugement parfait, ajuste les crédits et les débits pour tenir compte des circonstances de l’individu en question. L’Évangile dans ce domaine n’est pas un costume « une pièce ». Dieu nous place tous ici-bas dans des conditions différentes et nous juge en conséquence. Dans la Parabole des Talents, peu importe qu’un serviteur ait reçu cinq talents et l’autre seulement deux. L’important c’est ce qu’ils en ont fait tous les deux. Le Maître a dit à chacun d’entre eux : « C’est bien, bon et fidèle serviteur » (Matt. 25 :21). Il vaut mieux être un joueur fidèle de deuxième catégorie avec des talents limités (humour) qu’une superstar infidèle. 
 
La parabole des plongeurs
 
Il y a longtemps, lorsque j’avais entre neuf et onze ans, j’ai participé à une activité d’été pendant les vacances dans la ville où j’ai grandi. Je me souviens en particulier d’un concours de plongée destiné à plusieurs groupes d’âge tenu à la piscine municipale. Certains des gosses les plus fortunés dans notre région possédaient leur piscine avec des plongeoirs, et c’était d’assez bons plongeurs amateurs. Il y avait aussi un gosse de mon âge originaire de la partie défavorisée de la ville et qui n’avait pas de piscine. Tout ce qu’il avait c’était du courage à l’état brut. Alors que la plupart d’entre nous procédaient à des plongeons tels de petits cygnes nerveux, des plongeons en arrière, debout en faisant bien attention à redresser notre dos et à pointer les orteils, ce jeune garçon essayait des sauts en arrière, doublés et redoublés et ainsi de suite. Mais qu’il était empoté ! Il gardait rarement les pieds joints, ne tenait pas ses orteils bien droits et habituellement ratait son plongeon. Nous autres, nous l’observions, satisfaits et suffisants, pendant que les juges levaient leur carton où s’inscrivaient les scores et qu’il obtenait des notes inférieures à celles que nous avions obtenues avec nos simples et sûrs plongeons ; nous nous félicitions d’être les meilleurs plongeurs. « Il y met tout son cœur, mais il n’est pas bien fin », nous disionsnous. « Après tout, nous, nous gardions les pieds serrés et les orteils joints. »
 
Lannonce des vainqueurs nous fut un grand choc, car le brave gars avec ses sauts minables nous avait tous battus. J’avais suivi grosso modo les scores dans ma tête et je savais avec l’arrogance de ma connaissance limitée que ça ne collait pas. Il était manifeste que je l’avais battu aux plongeons. C’est pourquoi certain d’une injustice, je me précipitais vers la table des arbitres et exigeais une explication. « Degré de difficulté » me répondit l’arbitre prosaïquement tout en me regardant dans les yeux. « C’est sûr, tu as fait mieux dans la forme, mais lui a fait des sauts plus difficiles. Si tu appliques un coefficient de difficulté, il t’a battu haut la main, mon garçon ». J’ignorais jusqu’alors que certains plongeons étaient dotés de « crédits supplémentaires » en raison de leur plus grande difficulté. 
 
J’ai une amie pour qui la vie n’a pas été aimable. elle s’est mariée au temple, mais son mari a été infidèle et l’a finalement abandonnée avec leurs petits enfants. Depuis il n’a jamais payé un sou pour l’entretien des enfants, mon amie travaille à plein temps pour subvenir à ses besoins et à ceux de ses enfants. Pendant plusieurs années, elle est allée aussi à l’école des adultes le soir pour améliorer sa situation financière. Par la force des choses, elle ne pouvait pas être avec ses enfants autant qu’elle l’aurait voulu ni les élever et les discipliner comme ils en avaient besoin. C’était tout simplement impossible dans ses circonstances difficiles. Le résultat de cette situation de famille moins que parfaite donna des adolescents à problèmes. Maintenant, entre deux âges, elle est obligée d’élever certains de ses petits enfants, de nouveau toute seule. Sans compagnon fidèle, sans la prêtrise au foyer, sans les bénédictions qui se réalisent dans un cadre idéal familial, il est presque inévitable que mon amie ressente que ses « scores », en tant qu’épouse et mère, et qui sait, en tant que personne, ne sont pas très élevés. Lorsqu’elle va à l’église et qu’elle voit les autres familles « idéales », lorsqu’elle les entend porter témoignage et rendre grâce pour toutes leurs bénédictions spirituelles et matérielles, elle voit dans sa tête les juges qui lèvent leur carton pour attribuer des 9.9 ou des 10.10. Quand elle considère sa vie, son mariage raté, ses enfants à problèmes, elle sait que les notes sont plus basses, et elle s’angoisse pour sa place dans le royaume.
 
Qu’elle ne s’inquiète pas, car elle est aussi fidèle à ses alliances dans ses problèmes que le reste d’entre nous l’est dans nos bénédictions. C’est vrai qu’il y a des choses qu’elle ne peut pas faire, mais ce sont les conséquences des circonstances, non pas des choix qu’elle a faits, et là où il n’y a pas de choix, il ne peut y avoir de condamnation. Je n’ai aucun doute que lorsque le « coefficient de difficulté » sera appliqué pour la vie qu’elle aura menée, sa couronne brillera bien plus que beaucoup d’autres, car Dieu applique toujours des « coefficients de difficulté » dans ses jugements.
 
Lorsque je suis tenté de me sentir supérieur à d’autres saints, la parabole des plongeurs me revient à l’esprit et je me repens. Au moins dans un concours de plongeons, on peut en général dire quel est le plongeon le plus difficile. Mais là, dans la mortalité, nous ne pouvons pas toujours dire qui porte quels fardeaux : intelligence limitée, dépression chimique, comportement compulsif, incapacité à apprendre, environnement familial abusif ou déséquilibré, mauvaise santé, handicaps physiques ou psychologiques, personne ne choisit ces choses. C’est pourquoi je ne dois juger ni mes frères ni mes sœurs. Je suis reconnaissant pour mes bénédictions, mais je ne m’en fais pas gloire, car je ne voudrais pas entendre l’Arbitre me dire : « C’est sûr, tu as fait mieux dans la forme, mais elle, elle a eu une vie plus difficile. Quand tu affectes un coefficient de difficulté, elle te bat haut la main ».
 
Ainsi, persévérer jusqu’à la fin n’a pas grand-chose à voir avec souffrir en silence, surmonter tous les obstacles de la vie, ou même s’accomplir comme saint des derniers jours idéal (« pointer les orteils » et « garder les pieds serrés »). Ça veut simplement dire ne pas abandonner. Cela veut dire garder, dans la mesure de nos possibilités, les engagements que nous avons faits avec le Christ lorsque nous avons contracté le mariage de l’Évangile. Cela signifie ne pas divorcer d’avec le Sauveur ni de tricher avec lui en permettant que d’autres amours prennent place dans notre vie. Cela signifie ne pas rejeter les bénédictions de l’Expiation qu’il a déversées sur nous lorsque nous sommes entrés dans son Église et son royaume.
 
Fidélité et repentir
 
On appelle repentir le processus qui consiste à reconnaître que notre moi est bien charnel et que ses désirs sont souvent opposés à la volonté de Dieu. Lors de ce processus on rejette ce moi charnel afin de se conformer à la volonté divine. Le mot hébreu pour « repentir » est shuv, il signifie littéralement « tourner », c’est à dire, se détourner du moi charnel et commencer à suivre le Christ.
 
Certains saints ont des difficultés à comprendre la notion du repentir. Ils le considèrent plus comme un évènement qu’un mode de vie. S’il est vrai que l’on doit se repentir avant de se faire baptiser, celui-ci ne se produit pas une fois pour toutes à ce moment. Ce serait impossible, car le repentir est un mode vie continue, une façon de vivre en suivant le Christ. Il est vrai que comme nous n’avons pas la foi pour ensuite ne plus l’avoir dès que nous sommes baptisés, de même nous ne nous repentons pas juste une fois pour ensuite s’arrêter de nous repentir après le baptême ; la foi et le repentir sont un processus continuel après le baptême. Le repentir continuel est essentiel pour suivre le Christ et être fidèle à nos alliances.
 
Le Seigneur a tout d’abord donné comme instructions que nous devions prendre la Sainte-Cène régulièrement pour renouveler nos alliances. La foi et le repentir qui sont les étapes antérieures au baptême précèdent aussi la Sainte-Cène, et la prendre dans le même esprit peut avoir le même effet spirituel que d’être baptisé de nouveau. Si nous pouvions nous repentir une fois pour toutes avant le baptême et laisser nos péchés derrière nous, nous n’aurions pas besoin de renouveler fréquemment nos alliances et notre engagement en prenant la Sainte-Cène.
 
De plus, comme notre but est la justice parfaite du Père et du Fils, étant donné que nous ne pouvons l’atteindre ici-bas, il y aura toujours quelque chose, tant que nous vivrons, dont nous devrons nous repentir, quelque erreur à corriger, des choses sur lesquelles nous devrons travailler ou que nous devrons éliminer de notre vie pour ressembler de plus en plus à Dieu. Ceux qui disent qu’ils n’ont pas besoin de repentir ne sont pas conscients de leurs péchés ou alors ils les cachent. Étant donné que la perfection n’est pas de ce monde (à l’inverse de la perfection en Christ, Romains 3 :23), il y aura toujours quelque chose que l’on devra abandonner. C’est pourquoi le repentir est un processus qui doit véritablement commencer dès la conversion et doit continuer à nous améliorer et à nous rapprocher de plus en plus de Dieu dans notre vie.

Nous n’aurons jamais fini de nous repentir tant que nous ne serons pas devenus comme lui. Dans ce sens, le repentir est une attitude nous amenant à reconnaître nos péchés, à poser le principe de leur rejet, pour ensuite a travailler effectivement pour s’en débarrasser. Au fur et à mesure que nous reconnaissons et que nous nous débarrassons des péchés graves tels que la violence, l’immoralité, ou le mauvais caractère, nous progressons vers les péchés moins graves comme l’égoïsme, l’ingratitude et la paresse. Et on peut espérer arriver aux péchés véniels comme celui d’arriver en retard à l’Église ou de s’abstenir d’entonner les cantiques.
 
Puisque le repentir consiste à « tourner » sur nous-mêmes, on peut utiliser cette analogie marine. Lorsqu’un commandant décide de faire changer le cap de son bâtiment, ou de son porte-avions, cela
prend un certain temps pour opérer la manœuvre. Bien que la décision ait été prise, que l’ordre ait été lancé, et que le changement soit en cours, cela prend un certain temps avant que le navire ait fini de virer de bord. De même dans notre vie, les décisions se rapportant au Christ ont pu être prises sincèrement et effectivement, l’ordre réellement donné et exécuté, il n’en reste pas moins que cela prend du temps et de l’espace pour vaincre la résistance naturelle du moi charnel et réaliser la transformation complète.

Nous aurons de la joie lorsque la transformation sera accomplie et que nous aurons amélioré tout ou partie de notre vie, mais si nous devons mourir avant la fin de la manœuvre, le Seigneur tiendra quand même compte de la bonne décision que nous avons prise, des ordres appropriés que nous avons donnés et d’avoir essayé de les mettre en application dans notre vie. Le reste n’est qu’une question de temps. Si nous mourons, comme nous devons tous mourir, avec quelques péchés résiduels, cela ne nous gênera pas. Dieu tiendra compte de ce que nous avons accompli dans le temps qui nous aura été imparti. (D&A 137 :7-8). Étionsnous sincèrement repentants ? Alors nous sommes justifiés par le sacrifice expiatoire du Christ et nous accomplirons à terme ce que nous avons désiré ici-bas.
 
Le « grand changement »
 
Il va bien s’en trouver un parmi nous, un de ces masochistes ou sadiques spirituels (nous avons les deux dans l’Église) qui va objecter : « Mais qu’est-ce que c’est le « grand changement » ? » L’Esprit n’at-il pas opéré un grand changement parmi le peuple de Benjamin de sorte qu’il « n’avait plus de disposition à faire le mal, mais faisait le bien continuellement ? » (Mosiah 5 :2). C’est vrai, mais ce que l’on décrit ici est un changement de disposition, un changement de désir, un changement d’orientation. À partir du moment où sa conversion (ou reconversion) est survenue, le peuple de Benjamin a changé son orientation et s’est porté vers la justice au lieu de la méchanceté. C’était devenu leur unique but. Mais ça ne signifie pas qu’il l’avait atteint tout de suite ! Cela ne veut pas dire qu’il n’a jamais eu d’autres pensées charnelles ou qu’il n’a jamais perdu une bataille contre sa nature charnelle. À ce moment, rempli de l’Esprit et voyant clairement les deux voies placées devant lui, le peuple de Benjamin avait perdu tout désir de suivre la voie du mal. Je ressens la même chose lorsque je ressens l’Esprit, mais je ne ressens pas toujours l’Esprit. Comme avec Moïse, lorsque l’Épiphanie (l’apparition divine) se termine, Satan tente quelquefois sa chance (Moïse 1 :9-12). C’est pourquoi nous devons recharger régulièrement nos batteries spirituelles.
 
On peut commettre de grands dommages spirituels si l’on enseigne aux saints que le « grand changement » signifie qu’une fois que l’on est converti, on ne sera plus tenté de pécher. Car si les saints croient que les véritables convertis ne sont plus jamais tentés, lorsqu’ils le seront, et ils vont l’être, ils en concluront qu’ils ne sont pas réellement convertis. Car la véritable conversion ne supprime pas les épreuves de la condition mortelle, car nous continuerons à être éprouvés et tentés tant que nous serons dans la chair. Même en tant que membres de l’Église de Jésus-Christ, nous continuerons à être assujettis aux pulsions de la chair et autres faiblesses conséquentes de la Chute.
 
Depuis ma conversion, si un ange s’était présenté à moi avec deux possibilités en me disant : « Tu appuies sur le bouton A et tu ne pécheras plus jamais ; tu appuies sur le bouton B et tu continues », sans hésitation, j’aurais appuyé sur le A et tellement fort que je me serais cassé le pouce ! Imparfait comme je suis, depuis ma conversion, je n’ai en fait
« aucune disposition à faire le mal, mais à faire le bien continuellement », et la plupart d’entre nous sont de même. C’est que nous avons des difficultés à surmonter en tout temps notre nature charnelle et les conséquences de la Chute afin d’agir selon notre prédisposition. Nous sommes bien prédisposés, car lorsque nous agissons différemment de temps en temps, nous nous sentons mal à l’aise, nous nous repentons, et retournons vers la justice. L’aiguille d’une boussole se déplace dans un sens ou dans l’autre, mais revient toujours pointer vers le Nord, il en est de même des croyants à qui il peut arriver de faire des faux pas, mais corrigent toujours leur marche et repartent dans la bonne direction. C’est cela avoir une disposition claire à faire le bien.

« Le grand changement », c’est un changement de cœur, un changement de désir, un changement de disposition concernant nos objectifs. Ce n’est pas la victoire totale une fois pour toutes sur la Chute ou sur notre nature charnelle. 
 

CHAPITRE TROIS : LA CHUTE D’ADAM ET ÈVE
 
On ne peut comprendre la bonne nouvelle de l’Évangile et particulièrement l’expiation du Christ si nous ne comprenons tout d’abord la mauvaise nouvelle qui est la chute d’Adam et Ève, car c’est à cause de la chute et de ses conséquences qui l’Expiation est devenue indispensable. La Chute nous sépare de Dieu, l’Expiation nous ramène en sa présence. C’est pourquoi sans la Chute, l’Évangile serait inutile, tout comme un hôpital dans un monde où personne ne serait ni malade ni blessé. La Chute est le problème et l’Expiation est la solution.
 
En fait, les occasions où nous nous tournons vers Dieu avec le plus d’empressement sont souvent celles où nous sommes confrontés directement aux conséquences de la Chute. Ainsi, lorsque nous, ou un être aimé est malade ou mourant, nous nous tournons vers Dieu pour avoir de l’aide. Nous ne réalisons pas que nous lui demandons de supprimer certains effets de la Chute, et pourtant, c’est ce que nous faisons. De même, lorsque nous prions pour obtenir le pardon de nos péchés, ou pour obtenir de l’aide quand nous n’arrivons pas surmonter les obstacles de la vie, ou quand nous demandons à être guidés lorsque nous hésitons à faire un choix, nous prions pour être délivrés d’aspects particuliers de la Chute ou de ses conséquences naturelles. Beaucoup d’entre nous pensent que nos problèmes sont des symptômes personnels et ne saisissent pas la cause sous-jacente de notre condition. Nous parlons de « problèmes de santé », de « problèmes de Q. I. », de  « manque de volonté », ou de « problème pour contrôler mes pensées » sans réaliser qu’il s’agit là de simples symptômes isolés relevant d’un problème bien plus vaste : la Chute de la race humaine.. Comme le Président Ezra Taft Benson l’a dit : « Personne ne sait correctement et d’une façon appropriée pourquoi on a besoin du Christ tant qu’on ne comprend pas et n’accepte pas la doctrine de la Chute et de ses conséquences sur l’ensemble de l’humanité » (A Witness and A Warning [Deseret Book : Salt LakeCity, 1988], p. 33) 
 
Nous devons aussi comprendre la Chute afin de connaître nos limites ici-bas dans la mortalité. Beaucoup de saints désespèrent parce qu’ils ne voient pas clairement leurs limites causées par la Chute, et qu’ils ne peuvent vaincre toutes choses par eux-mêmes et dans l’immédiat. Mais étant données les circonstances réelles ici-bas dans la mortalité, ces espoirs sont complètement irréalistes. Pendant que nous nous efforçons d’endurer jusqu’à la fin, nous aurions intérêt à savoir quels sont nos handicaps. Nous devons savoir ce que nous pouvons raisonnablement attendre de nos accomplissements personnels et les choses que nous devons remettre entre les mains du Sauveur pour qu’il vainque pour nous par son amour et sa miséricorde. Par exemple, il serait idiot de ma part de penser que si je suis assez juste je puisse vaincre la vieillesse ou la mort, car la victoire sur ces ennemis (bien que garantie) ne viendra qu’ultérieurement et par l’intermédiaire du Christ. Il existe d’autres ennemis que nous ne pouvons pas espérer vaincre maintenant et de notre propre fait. Ces empêchements sont tous en rapport avec la chute d’Adam et Ève.
 
Les conséquences de la Chute continuent à se faire sentir parmi nous bien que Jésus-Christ ait déjà vaincu tous nos ennemis. Ces conséquences perdureront jusqu’au retour de celui-ci et il imposera son autorité suprême. Ainsi, bien que la victoire ultime sur nos ennemis soit un fait acquis en Jésus-Christ, car déjà accomplie, nous devons quand même lutter contre eux pendant notre séjour ici-bas. Dieu veut que nous luttions contre ces handicaps et ces limitations, car ils font partie de l’épreuve de la mortalité.
 
Le fait est que nous, mortels, avons tous des problèmes, d’énormes problèmes. Suite à la Chute, nous nous trouvons dans une situation « d’échec » appelée la mortalité. Dans ces conditions, nous sommes à la merci de nombreux ennemis (Satan, le péché, la mort, l’enfer, la maladie, l’erreur, etc..). Nous avons besoin de l’aide divine pour nous arracher à leur pouvoir et à terme nous échapper du piège. Les gens dénués d’intelligence arrivent à faire le rapprochement entre le pouvoir rédempteur de Dieu et leurs problèmes bassement matériels lorsque les conséquences de la Chute les tiennent entre leurs griffes, comme la maladie ou la mort. Mais c’est ça tout l’Évangile : prendre conscience de notre véritable situation et des circonstances désespérées (le résultat de la Chute) dans lesquelles nous nous trouvons pour ensuite apprendre comment elles peuvent être vaincues à jamais (par le sacrifice du Christ).
 
Il semble raisonnable que si nous sommes tombés, c'est que nous sommes tombés de quelque part. Nous n’avons pas commencé dans ce monde où nous vivons actuellement, et ce monde n’est pas notre monde d’origine. Nous avons tout d’abord vécu en tant qu’enfants d’esprits de Dieu, avec des parents célestes dans une gloire dans laquelle nous aspirons maintenant à revenir. On peut dire que nous sommes tombés de ces lieux célestes et nous cherchons maintenant l’échelle pour y remonter. Il faut dire aussi que ce fut dans un état plus glorifié que celui où nous nous trouvons actuellement que nos premiers parents furent créés physiquement ici-bas, une situation équivalant grosso modo à la gloire terrestre, où personne ne souffre ni ne meure. Dieu a créé Adam et Ève non mortels et étrangers à la souffrance, mais ces conditions physiques agréables ont dégénéré suite à la Chute
 
Ainsi l’humanité, qui se trouvait en présence de nos parents divins, est descendue graduellement du monde prémortel céleste jusqu’à l’Eden terrestre, et de là a chuté dans le monde téleste où elle se trouve actuellement (techniquement, Adam et Ève étaient « amortels » plutôt qu’immortels. Amortel signifie que l’on n’est pas sujet à la mort, bien que sous certaines conditions on pourrait l’être. Immortel signifie que l’on est immunisé contre la mort dans n’importe quelles conditions).
 
Par son œuvre rédemptrice, le Christ va inverser le processus, en rétablissant tout d’abord la terre dans sa gloire paradisiaque ou terrestre (gloire associée à l’Eden), et ensuite après le Millenium élever la terre jusqu’à sa gloire céleste ultime (10e Article de foi : Apocalypse 21 :1-2 ; D&A 77 :1-2).
 
Cependant, la Chute n’a été ni une tragédie, ni une faute, mais une étape nécessaire dans la progression éternelle des enfants d’esprits de Dieu. Nous avions atteint le moment dans notre progression prémortelle où il était temps de faire face à l’opposition dans un environnement mortel, de rencontrer le mal et les éléments négatifs de l’existence, pour être triés selon notre réaction à cette opposition.
 
La mortalité est le hangar de triage. Ici certains d’entre nous s’attacheront à la lumière la plupart du temps, quel qu’en soit le prix ; certains s’attacheront à la lumière de temps en temps si ça ne coûte pas trop cher, et d’autres préféreront les ténèbres. Malheureusement, nos préférences ne peuvent être vérifiées que sur un plan d’égalité, c’est à dire dans un endroit ou la lumière et les ténèbres, le bien et le mal sont à notre disposition facilement d’une manière égale, « car il est nécessaire qu’il y ait de l’opposition en toutes choses » (2 Néphi 2 :11). La mortalité a été faite pour offrir ces conditions. La condition mortelle est semblable à un buffet où tout le monde se sert de toutes les options morales étalées devant soit, les pures, les vertueuses, les justes, et les saintes à un bout de la table et les abominables, les dépravées, les corrompues, et les viles à l’autre bout. Prenez ce que vous voulez, mangez ce que vous voulez, mais votre choix révélera immanquablement ce que vous préférez et par conséquent ce que vous êtes. Si nous pouvons obtenir tout ce que nous voulons de tout ce que nous désirons, nos choix révèlent sans erreur notre véritable caractère. Suivant cette analogie, vous êtes ce que vous mangez. Dans la vie réelle, vous êtes ce que vous choisissez.
 
Cependant, l’environnement nécessaire à cette épreuve, ce buffet où l’on présente le bien et le mal à la même table, avec l’opposition présente en toutes choses, n’aurait pu être créé en présence de Dieu, car « aucune chose impure ne peut demeurer en la présence de Dieu » (Moïse 6 :57). (Maman ne peut savoir si je suis digne de confiance tant que je n’ai pas été laissé seul devant la boîte de gâteaux. Tant qu’elle me surveille, ce n’est pas un bon test). C’est pourquoi pour que nous puissions être tentés autant par le bien que par le mal, il était nécessaire de quitter le foyer, de descendre de cet endroit exalté où nous étions nés en esprits pour venir dans un monde comme celui-là : un terrain neutre pour une épreuve honnête. Ici, nous ne pouvons même pas dire que nous avons des parents, et encore moins qu’ils nous surveillent ou non. 
 
Il serait tout à fait injuste qu’Adam et Ève soient punis à cause de la Chute (cette séparation d’avec Dieu qui nous permet d’être attirés autant par le bien que par le mal). Dieu avait vraiment l’intention qu’elle ait lieu, ce n’était pas une erreur tragique, mais nécessaire pour leur progression. Après tout, le jardin d’Éden était le lieu approprié pour l’avènement de la Chute. C’est pour cette raison que Dieu pardonna leur transgression à Adam et Ève après qu’ils eurent été chassés et les eut absous de toute faute (Moïse 6 :53). Il leur fut assuré qu’ils ne subiraient aucun blâme pour ce qui s'était passé avant la Chute ni pour la Chute elle-même. Au contraire, puisque celle-ci faisait partie de son plan, tous ses aspects négatifs seraient supprimés sans condition et unilatéralement pour eux et pour leur postérité par sa grâce et l’Expiation de Jésus. Lui seul porterait le poids de la Chute. J’espère que le lecteur perçoit la merveilleuse équité de la chose : puisque celle-ci faisait partie de son plan, ce n’est que lui et seulement lui qui en assumera tous les coûts et tout le poids.
 
C’est pour cette raison que plusieurs dirigeants de l’Église ont insisté sur la différence de nature entre la « transgression » d’Adam et Ève dans le Jardin d’Eden et les péchés commis après la Chute. Après tout, la « transgression » fut commise sous la pression dans le cadre du Jardin avec ses options extrêmement limitées. Elle fut commise alors qu’Adam et Ève ne jouissaient pas de toute leur compréhension morale ou de leur responsabilité. Elle était nécessaire pour la progression future du plan divin et était prévue par Dieu comme étant l’issue de l’expérience en Eden. C’est pourquoi il leur fut pardonné unilatéralement grâce au sacrifice du Christ. Ce n’est que justice.
 
Les péchés commis par Adam et Ève et leur postérité après la Chute, en raison de leur libre arbitre, en pleine connaissance de cause et impliquant leur responsabilité, ne peuvent être lavés par le sacrifice du Christ que s’ils acceptent librementt l’alliance de l’Évangile. Veuillez noter le parallèle : les effets négatifs de la Chute, qui surviennent sans notre participation (la maladie, la mort, etc..) sont aussi annulés sans notre participation. Les effets négatifs qui surviennent avec notre participation (nos péchés personnels) ne sont annulés que par notre participation dans l’alliance de l’Évangile. 
 
Les aspects familiers de la Chute
 
Dans quelle mesure la chute d’Adam et Ève a-t-elle encore des conséquences sur nous ? En tant que descendants, nous héritons des conséquences physiques résultant de leurs actions tout comme nous héritons de la modification de leur condition physique. La descendance d’Adam et Ève est physiquement déchue. Ce n’est peut-être pas évident quand on a vingt ans et que l’on jouit d’une bonne santé, mais lorsque l’on est malade ou blessé et que nous vieillissons, cela devient plus évident : naître c’est aussi souffrir et mourir. Il n’existe pas de rapport plus inexorable, aucune certitude scientifique plus fermement établie dans le monde naturel que ce fait. La mauvaise nouvelle dans ce cas est particulièrement mauvaise : à un moment de la vie, même si ça va mal, cela ne fera qu’empirer : on mourra.
 
Cet aspect distinctif de la Chute ne nous apparaît pas tout d’un coup. D’abord, les dents se carient, la taille s’épaissit, les genoux faiblissent, les cheveux tombent. On commence par avoir besoin de verres simples, ensuite de prescriptions plus importantes, après des lentilles à double foyer, et puis à trois foyers. On ne pense pas toujours que le dentiste, l’optométriste, ou le fabricant de perruques nous aident à combattre les conséquences de la Chute, mais en fait, c’est ce qu’ils font. De même, les médecins, les infirmières, les pharmaciens, les psychiatres, les psychologues, les techniciens de laboratoires, les diététiciens, les fabricants de vitamines, les produits diététiques, les exercices à bicyclette, et les tapis roulants, tous ceux-ci et d’autres encore n’existent que pour nous permettre momentanément de contenir les effets de la Chute. Mais personne ne peut arrêter le processus, car les directeurs, les entrepreneurs de pompes funèbres et les fossoyeurs participent au business de la Chute et en sont la conclusion ultime et inévitable icibas. Bien que la mort soit l’évidence la plus dramatique de notre état physique déchu, nous ne devons pas oublier que les blessures, la maladie, la douleur, tous les problèmes physiques dont souffrent les humains sont aussi le résultat de notre état déchu. En Eden, il n’en était pas ainsi, ni lorsque le Christ rétablira sa gloire paradisiaque ici-bas. 
 
Si nous sommes déchus physiquement, nous le sommes aussi sur le plan spirituel. On peut décrire cette situation comme une séparation géographique de la présence de Dieu, à cause de notre condition déchue et pécheresse (Moïse 5 :4). Mais les aspects spirituels de la Chute se manifestent plus particulièrement par des sentiments de solitude, de faiblesse, d’aliénation, d’anxiété, de dépression, et de culpabilité. Nous avons soudain été séparés de cette influence divine et chassés de cet endroit où nous avons vécu et communiqué avec nos parents célestes pendant peut-être des milliers, voire des millions d’années. On peut imaginer le confort, la sécurité que nos parents nous ont prodigués pendant que nous grandissions grâce à leurs tendres soins. On ne peut imaginer la place qu’ils ont occupée durant ces éternités prémortelles. Et maintenant, telles de jeunes recrues, nous souffrons d’une anxiété terrible due à la séparation, un sentiment de perte due à la Chute, mais parce que le voile est tiré sur notre esprit, nous ne nous souvenons pas de ce que nous regrettons si désespérément. La situation qui en découle peut être qualifiée de grave traumatisme spirituel, comme si on avait reçu un coup sur la tête, qu’on avait été kidnappé et qu’on se serait réveillé frappé d’amnésie, esclave à Tombouctou. Lors de nos moments spirituels plus sensibles, on peut ressentir qu’il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans tout ceci, mais tant qu’on ne trouve pas et que l’on n’accepte pas l’Évangile de Jésus-Christ, on ne peut trouver la faille dans cette vie et la façon de la réparer. Quelque part au fond de nous, nous pleurons la perte d’un foyer et d’une vie dont nous ne nous souvenons pas. C’est seulement dans nos os que nous ressentons cette perte.
 
D’autres aspects de la Chute
 
Bien que les aspects spirituels et physiques de la Chute, la mort et la séparation d’avec Dieu, attirent beaucoup l’attention, je voudrais souligner d’autres aspects que nous négligeons souvent, mais qui ont un profond impact sur nous ici-bas. Ainsi, nous oublions souvent que si nous sommes déchus, nous le sommes aussi mentalement.
 
En tant qu’humains nous nous appuyons sur la raison et la logique. Certains accordent plus de foi à la raison qu’à Dieu. Nous avons tendance à considérer que si nous partons de ce que nous savons être vrai et procédions logiquement, nous arriverons toujours à des conclusions correctes. Mais c’est inexact, car la raison humaine est faillible, elle est déchue. Nous ne pouvons même pas commencer avec ce que nous savons déjà puisque nous démarrons sur terre sans rien savoir. Nous n’apportons aucune donnée avec nous de derrière le voile. Nous pouvons avoir des éclairs d’intuition, et certaines choses peuvent nous paraître familières, mais nous n’avons pas de données empiriques, aucun souvenir rationnel de notre vie préterrestre. Nous démarrons avec une bande magnétique vierge. Seul l’Évangile nous donne des informations garanties de notre point de départ et une perspective assurée pour l’interpréter.
 
Même si la raison déchue avait des données fiables, ce qui nous permettrait de commencer à réfléchir, nous ne pourrions arriver à des conclusions correctes, car il se trouve que l’intellect lui-même est un instrument défectueux. Si nous utilisons toujours une aune trop longue ou trop courte pour mesurer, l’erreur ne sera jamais détectée. Comme notre intellect est une aune défectueuse, elle ne pourra jamais détecter ses propres distorsions. Beaucoup d’entre nous savent que notre univers nous réserve des surprises, et qu’il résiste à nos tentatives de lui imposer notre façon de voir les choses. Nous vivons journellement en nous cognant le nez et nous constatons que les choses sont véritablement différentes de ce que nous supposons. Ce sont là des leçons pratiques montrant l’incapacité de l’intellect humain à gérer infailliblement la réalité de ce bas monde. Si nous ne montrons pas une certaine humilité, et donc une certaine prudence, sur notre capacité à raisonner correctement pour contrôler notre sort, la vie nous le fait payer chèr. Et c’est quand nous sommes le plus surs de nous que nous sommes le plus en danger.
 
Lexpérience et le bon sens nous permettent de percevoir dans notre environnement les conséquences de la Chute, même si cette perception n’est pas toujours en relation avec le domaine religieux. Par exemple, la loi de Murphy définit notre situation déchue par un dicton populaire : « Si les choses vont mal, alors elles iront encore plus mal et c’est probablement déjà le cas ». Cette tranche de sagesse populaire admet d’une façon correcte la « friction » ou l’opposition dans notre existence, conséquence de la Chute. Cette idée est contenue dans l’expression populaire : « C’est le bazar ». Bien que n’étant pas à proprement parler du domaine religieux, ces deux formules décrivent les conséquences réelles et perceptibles de la Chute dans les affaires humaines. Le poète écossais Robert Burns a remarqué les limitations de la mortalité lorsqu’il écrit : « The best-laid schemes o’ mice an’ men gang aft agley » (les plans les mieux ourdis des souris et des hommes sont souvent tordus).
 
Bien que les humanistes sincères, et ils s’en trouvent dans l’Église, argueront du contraire, nous ne pouvons en tant qu’humains maîtriser notre sort par notre seule raison, car celle-ci est déchue et défectueuse et nous induits en erreur. « L’homme naturel ne reçoit pas les choses de l’Esprit de Dieu ; car elles sont folies à ses yeux, et il ne les connaît pas non plus, car c’est spirituellement qu’on les discerne... Car la sagesse de ce monde est folie pour Dieu » (1 Corinthien 2 :14 ; 3 :19). Si nous voulons arriver à détecter et à nous élever au-dessus des distorsions de notre intellect déchu, nous avons besoin d’une autre aune, une correcte cette fois-ci, pour prendre la mesure de notre raison. L’Évangile de Jésus-Christ est cette mesure.
 
En général, c’est une procédure assez saine que de se reposer sur notre bon sens. La plupart du temps c’est ce que nous avons de mieux. Mais ce raisonnement doit toujours être tempéré par l’humilité et la compréhension des conséquences de la Chute sur celui-ci. L’intellect déchu n’arrivera jamais à la vérité pleine et entière par lui-même. C’est pourquoi ceux qui considèrent que l’intellect et le raisonnement humains sont les meilleurs guides ici-bas sont condamnés à « toujours apprendre, mais n’arrivant pas à la connaissance de la vérité ». Ils utilisent une aune qui se contrôle elle-même, et n’en est pas moins défectueuse. Seul l’Évangile nous fournit une indication fiable à partir du moment où nous commençons à agir au-delà de nos limitations rationnelles. On ne peut utiliser qu’une mesure révélée pour vérifier le calibrage de la sagesse humaine. Car l’aune défectueuse de la sagesse humaine ne peut que se valider si on l’utilise pour la mesurer elle-même. En dehors de l’influence du Saint-Esprit à quelque niveau que ce soit (révélation, inspiration, intuition, ou n’importe quoi d’autre) notre raison nous conduira à terme à la faute.

Nous sommes aussi déchus sur le plan émotionnel. Nos émotions, comme notre corps, font partie de notre nature charnelle. Elles sont défectueuses et nous les maîtrisons rarement. Nous ne choisissons pas notre caractère. En général on ne choisit pas ses défauts. quelquefois notre état émotionnel est influencé par des facteurs physiques ou chimiques agissant dans le cerveau, et celuici ne peut être contrôlé librement ni en être tenu pour responsable. Cependant, dans la plupart des cas nos émotions déchues, comme notre corps physique, peuvent et doivent être assujetties à la férule de notre esprit. De plus, nous ne choisissons pas correctement qui ou ce que nous aimons et nous ne déterminons pas l’intensité de notre amour. Si nous avons trop de mauvais contacts, nos émotions peuvent créer des attachements ou en dissoudre d’anciens contre notre gré. Nos émotions représentent de pauvres substituts à l’Esprit en tant que guide dans notre vie. Il est aussi vain de suivre nos émotions débridées que notre chair. J’exprime là mon opinion que dans la résurrection, nos émotions, si nous les avons assujetties à notre esprit seront sous notre maîtrise complète, et qu’elles ne seront plus déchues, mais que notre volonté les maîtrisera. Elles seront alors comme celles de Dieu, toujours sous contrôle et leurs manifestations auront toujours un caractère rédempteur.
 
Nous sommes aussi déchus moralement. Cela signifie que notre sens du bien et du mal est défectueux. Il est vrai qu’en général nous pouvons utiliser notre conscience comme guide, mais il est notoire que deux individus arriveront à des conclusions opposées s’ils ne font appel qu’à leur seule conscience. Il arrive aussi que celle-ci ne fournisse aucune opinion. Le désir de faire le bien n’aide pas beaucoup quand on ne sait pas ce qu’est le bien. La lumière du Christ donne aux gens assez de renseignements pour être responsables de leurs péchés, et peut-être pour en éviter certains, mais celle-ci ne peut remplacer le Saint-Esprit. La lumière du Christ n’a pas d’intensité suffisante pour servir de guide pour tout le monde en toutes circonstances, surtout si une raison bassement matérielle et notre nature charnelle nous poussent dans une autre direction. Cependant, la mortalité exige que nous émettions des jugements moraux complexes sur ce qui est bien et mal. En l’absence du don du Saint-Esprit, nous arriverons simplement à la mauvaise conclusion, et nous pourrons même croire que nous avons raison.
 
Notre déchéance globale (physique, spirituelle, mentale, émotionnelle et morale) rend le test de la mortalité encore plus difficile. En même temps, nous recevons un corps physique qui recherche naturellement les plaisirs plutôt que la justice. Celui-ci est incapable de distinguer le bien du mal, la chair n’a pas de conscience. Je le dis littéralement. Tout comme un thermomètre ne détecte pas les radiations et que le compteur Geiger ne détecte pas la chaleur, notre chair ne distingue pas la lumière et la vérité, elle n’a pas été conçue pour ça. La chair ne distingue que le plaisir et la douleur, ce qui est agréable et ce qui ne l’est pas. Le moi charnel qui n’est pas racheté, notre chair et nos désirs, sert le diable parce qu’il n’a pas de sens moral, aucun discernement spirituel, ni aucune conscience. Il n’a pas été conçu dans ce but, cette capacité a été donnée à l’esprit. Si notre chair n’est pas rachetée et que nous n’avons pas la direction de l’Esprit, celle-ci est moralement aveugle. C’est pourquoi elle est une ennemie de Dieu. Satan peut persuader la chair que le péché donne du plaisir alors qu’il ne peut convaincre l’esprit que le péché est bien. C’est pourquoi étant à la fois d’une puissance incroyable et moralement aveugle, tant que le charnel ne se soumet pas aux inspirations du Saint-Esprit et qu’il n’accepte pas la direction de notre esprit avec sa vision morale, celui-ci reste une référence peu fiable et se trouve être l’ennemi de Dieu (Mosiah 3 :19).
 
Remarquez que nous ne cherchons pas à détruire ou à éviter le côté charnel qui est en nous, mais plutôt à l’assujettir à l’esprit et à le sanctifier. La capacité à obtenir du plaisir n’est, après tout, pas un mal. Il est nécessaire et désirable, mais il ne faut pas le placer en priorité des priorités, mais qu’il soit soumis à la direction de l’Esprit et qu’il serve ses intérêts.
 
Comme nous n’avons pas atteint la perfection au moment de notre conversion, nous ne devons pas nous attendre à ce que notre moi charnel accepte d’être assujetti à l’esprit une fois pour toutes. Nous devrons mourir quand bien même nous avons été rachetés de la mort par l’expiation et la résurrection du Sauveur, mais nous devrons quand-même toujours lutter même après avoir vaincu notre nature charnelle grâce à son expiation.
 
Dans le pire des cas, le moi charnel peut être horriblement vicieux. Dans le meilleur des cas, il peut être aussi humain, les hommes font, sans Dieu, le bien du mieux qu’ils peuvent, mais ils ont quand même tout faux à la fin. Même si les convertis sincères essaient de suivre le Christ, ils ne doivent pas supposer qu’ils seront délivrés immédiatement de toute l’influence du moi charnel. La lutte contre ce moi fait partie de l’épreuve, et celle-ci n’est pas encore terminée. En fait, le processus de raffinement durera au-delà de notre vie terrestre. La victoire est garantie au fidèle grâce au sacrifice expiatoire du Christ (1 Jean 5 :4-5 ; D&A 38 :7-9), mais notre lutte individuelle continuera tant que nous serons sur terre.
 
Le dernier aspect de la mauvaise nouvelle, c’est que, étant donné que la Chute nous assujettit à la nature charnelle, elle nous place aussi devant un risque accru de péché personnel. La Chute n’est pas en soi la cause immédiate de nos péchés, mais elle nous place dans un environnement négatif dans lequel nous sommes susceptibles de nous trouver face au péché et d’être tentés. Cette attirance, combinée aux impulsions enthousiastes de la chair, vainquent souvent les désirs justes de l’esprit, et nous nous polluons. C’est ce que dit Moïse 6 :55 : « Étant donné que tes enfants sont conçus dans le péché, lorsqu’ils commencent à grandir, le péché est conçu dans leur cœur, et ils goûtent à l’amer afin d’apprendre à apprécier le bien ». Concevoir dans le péché signifie concevoir dans la mortalité, avec une nature déchue. Cela ne veut pas dire une conception coupable, mais la tentation constante de la nature charnelle rend inévitable le péché dans notre vie.
 
Pour résumer, la mauvaise nouvelle réside dans le fait que hors l’expiation du Christ, nous sommes, en raison de notre choix prémortel, coincés dans une existence qui n’offre que douleur, souffrance, et angoisse. Menés par la tendance bien compréhensible de notre nature charnelle pour le plaisir plutôt que pour la douleur, nous sommes, à cause de nos péchés, devenus les esclaves de Satan. Notre capacité à raisonner selon des critères célestes est affaiblie, et cette condition déchue ne sert pas notre esprit, mais notre chair. Nous ne maîtrisons pas toujours nos émotions, et nous considérons souvent que le mal est bien. À terme et inévitablement nous mourrons, et à ce moment, nous ne pourrons pas revenir à la maison. Et ça, sans l’Évangile, c’est la mauvaise nouvelle de la Chute. Mais ne soyez pas déprimés ; la bonne nouvelle c’est que la Chute et toutes ses conséquences ont été vaincues par Jésus-Christ, et que nous ne les subirons plus lorsque cette épreuve mortelle sera finie.
 
Pourquoi avoir choisi d’affronter cette situation?
 
Si la Chute a suscité les conséquences décrites ci-dessus, pourquoi des gens comme vous et moi ont accepté-t-ils de les vivre ? Je crois que notre acceptation, dans la vie prémortelle, à faire face aux dangers de la Chute, était dans la plupart des cas un acte de foi envers le Christ. Nous sommes entrés dans le piège de la condition mortelle sur la foi de la promesse divine, la Parole de Dieu, qu’Il nous sortirait de là si nous nous repentions quand nous pécherions et que nous nous tournerions vers lui, et tous les enfants d’esprit, sauf un petit nombre d’entre nous, qui arrivent dans ici-bas avaient alors pleinement l’intention de se repentir et de se tourner vers lui dans cette vie.
 
Ainsi, le fait de venir sur terre consiste à se remettre entièrement entre les mains du Sauveur, à sauter dans la fosse aux lions et à lui faire confiance pour nous en retirer. Nous lui avons fait confiance, et nous avons fait alliance avec lui que nous passerions par les épreuves de la Chute, que nous nous repentirions et que nous nous tournerions vers lui, s’il acceptait de vaincre tous nos ennemis pour nous accorder l’expiation et la résurrection. S’il échouait, nous étions perdus, mais tout ceci démontre que nous avions une haute opinion du Christ à ce moment, puisque nous étions prêts à courir le risque. Les évènements ont démontré qu’il a respecté son alliance, alors que beaucoup d’entre nous ne l’ont pas fait. Le Sauveur n’a pas failli à sa mission grandiose, et tout ce que nous avons à faire est de lui faire confiance ici et maintenant comme nous lui avons fait confiance lorsque nous avons voté pour lui autrefois, et de nouveau nous remettre complètement entre ses mains.
 
La Bonne Nouvelle : l’expiation du Christ
 
Comme j’ai écrit assez longuement sur la Bonne Nouvelle dans mon livre précédent, je ne vais pas reprendre tout ça ici si ce n’est pour dire que le Christ a surmonté toutes choses et vaincu tous les ennemis.
 
Cependant, si nous choisissons de céder au moi charnel, si nous cherchons à plaire à la chair, si nous chérissons et nourrissons les pensées charnelles au lieu de les rejeter de notre esprit, si nous obéissons à nos pulsions émotionnelles déplacées, ou si nous persistons à dire que le mal est bien après que l’Esprit ou des dirigeants inspirés nous aient instruits différemment, alors nous sommes responsables de nos choix. Dans ces cas, notre nature déchue se borne à frapper à la porte, et nous lui ouvrons largement et nous embrassons avec empressement ce qui se trouve à l’extérieur au lieu de garder la porte fermée. Dans ces cas nous ne luttons pas simplement contre une nature déchue qui passe son temps à nous imposer ses préférences en gémissant, mais nous passons la ligne et nous commettons le péché consciemment. Nous serons tenus responsables de cela si nous ne nous repentons pas.

Une partie de la Bonne Nouvelle de l’Évangile est que les conséquences physiques, spirituelles, mentales, émotionnelles et morales de la Chute ont toutes été vaincues par le Sauveur, et que nous serons à terme libérés de toutes celles-ci par sa grâce. Néanmoins, nous devons encore travailler pendant un temps avec ces handicaps comme faisant partie de notre épreuve mortelle ou probation. La maladie et la mort nous réclameront nonobstant notre foi. Des pensées charnelles surgiront quelquefois dans notre esprit (même dans des lieux saints) qu’importe notre justice. Nous commettrons des erreurs de jugement, quel que soit le niveau de conversion que nous ayons vis-à-vis du Christ. Nos émotions vont nous inciter à mal faire et le mal nous semblera bien quel que soit le niveau d’engagement dans l’Église et le royaume. Il nous est promis que ces limitations nous seront ôtées totalement dans la résurrection, et que nous ne serons pas punis pour les avoir endurées dans la mortalité (à moins de choisir de les embrasser et d’y obéir), mais jusqu’à ce grand jour nous devons souffrir les frustrations et les limitations quand nous luttons contre la bête immonde. Cela fait partie de notre épreuve.

Notre devoir consiste à admettre notre handicap, chose que certains d’entre nous trouvent très difficile à faire, et continuer quand même à servir humblement et fidèlement autant que faire se peut jusqu’à ce que nous soyons délivrés. De plus, au fur et à mesure que nous apprenons à obéir aux commandements de Dieu, et que nous progressons pour devenir de plus en plus semblables à lui, nous nous rendrons compte que l’influence du moi charnel dans notre vie diminue avec le temps.
 
Je connais des gens dans l’Église qui se flagellent parce que leur nature est déchue, et qui considèrent ceci comme un signe de leur indignité dans le royaume. Pour ces masochistes spirituels, il ne leur suffit pas de contrôler leur nature charnelle, ou de commencer à diminuer son influence en développant des habitudes d’obéissance envers Dieu. Ils ne veulent même pas avoir de nature charnelle. Ils s’attendent bêtement à ce que leur conversion envers l’Évangile et leur désir de suivre une vie céleste leur permettent de vaincre les conséquences de la Chute maintenant, mais ça n’arrive pas. Le « grand changement » est un changement d’orientation, de désirs, de buts, qui nous permet de recevoir les bénédictions de l’Expiation. Mais la plupart d’entre nous n’atteindront pas ces buts dans cette vie. C’est un processus qui continuera dans l’éternité. Dans la mortalité, le fait de résister aux incitations de nos pensées charnelles et de les chasser de notre esprit est déjà un objectif et une attente raisonnables. Mais ne jamais avoir de pensée charnelle n’est pas un objectif et une attente raisonnables. Le Président Brigham Young a dit : « Ne supposez pas que nous serons libres dans la chair de toute tentation de pécher. Certains supposent qu’ils peuvent dans la chair se sanctifier le corps et l’esprit pour devenir si purs qu’ils ne ressentiront plus jamais les conséquences du pouvoir de l’adversaire de la vérité. S’il était possible à quelqu’un d’atteindre ce degré de perfection dans la chair, il ne pourrait mourir ni rester dans un monde ou le péché prédomine... Je pense que nous devons plus ou moins ressentir les effets du péché tant que nous vivons, pour finalement devoir passer par l’épreuve de la mort. »
 
Il faut dire que ce qui précède est la vérité, mais il y a grand danger à dire ces choses. Le danger c’est que quelqu’un, quelque part, risque de penser qu’il est impossible de résister à sa nature charnelle. C’est faux. La résistance n’est pas seulement possible, elle est exigée. Dans cette vie le progrès est possible, la perfection ne l’est pas. Ce qui est impossible est complètement séparé de notre moi charnel. Nous sommes coincés, comme des missionnaires dont le compagnon ne veut pas sortir du lit. On ne peut pas le laisser seul. Alors nous faisons du mieux que nous pouvons pour respecter les règles tout en essayant de rendre notre compagnonnage aussi productif que possible en fonction des circonstances. Et nous espérons un transfert. De même dans la chair nous faisons de notre mieux pour résister à l’influence de notre compagnon charnel pour garder les règles tout en essayant de rendre notre vie aussi productive que possible en fonction des circonstances. Et nous espérons la résurrection.
 
Les conséquences de la Chute (physiques, spirituelles, mentales, émotionnelles, et morales) constituent des handicaps extérieurs sur lesquels nous devons travailler pendant la mortalité, mais il nous est promis qu’elles seront supprimées dans l’éternité grâce à la victoire de Christ.
 
Les coincés et les perfectionnistes parmi nous doivent se rendre compte qu’une grande partie des raisons pour lesquelles les choses vont mal ici-bas, est à cause de la Chute, et non de leur incompétence. Une fois que nous comprenons et que nous acceptons les limitations naturelles placées sur nous à cause de la Chute et de ses conséquences, alors nous devons nous attaquer aux risques autrement plus dangereux qui se présentent à nous dans notre tentative de suivre le Christ : nos propres péchés.
 
 
CHAPITRE QUATRE : LA FOI ET LES OEUVRES

J’espère que les trois premiers chapitres de ce livre auront au moins établi que :

1. En tant que membres sincères de l’Église qui ont contracté l’alliance de l’Évangile, nous sommes déjà dans le royaume de Dieu (encore que, à l’heure actuelle, sous conditions) pour autant que nous choisissions d’y rester.

2. Endurer fidèlement jusqu’à la fin ne signifie pas faire face avec succès à nos problèmes ou souffrir les afflictions avec courage, bien que certains aient à faire face à ces difficultés. Il est certain que cela n’a pas grand’ chose à voir avec le fait de vaincre des obstacles ou d’atteindre des objectifs personnels. Cela signifie plutôt rester ferme dans le royaume en se tenant au Christ et à son Église sans modifier notre engagement, quelqu’en soit le prix. « Endurer » et « être fidèle » ne signifient pas être parfaits ou vivre dés notre baptême jusqu’à la mort sans pécher, car Dieu à prévu que nous faiblirions et a instauré la Sainte-Cène comme moyen pour se repentir régulièrement et pour s’améliorer dans le cadre de l’alliance.

3. Certaines imperfections qui nous embarrassent dans la mortalité ne sont pas de notre fait, et nous n’en serons pas tenus comptables. Les imperfections de ce genre sont des handicaps innés et des limitations qui sont là simplement à cause de la Chute, suite à la mortalité, et lorsque nous quitterons celle-ci alors nous en serons délivrés.
 
Alors, pourquoi travailler ?
 
Si tout ce qu’on vient de dire est vrai, pourquoi travailler davantage ? Après tout, si nous sommes déjà dans le royaume, faire de bonnes œuvres n’a pas pour finalité d’y entrer ! Les œuvres doivent se rapporter à autre chose, car nous ne travaillons pas pour gagner ce que nous avons déjà. Mais si la tâche monumentale qui se trouve devant moi en tant que membre mortel de l’Église ne consiste pas à faire ma place dans le royaume, alors qu’est-ce ? Si je suis déjà dans le royaume, pourquoi est-ce que je travaille si dur ? En fait, pourquoi devrais-je même travailler ?
 
Certains chrétiens n’apportent pas de réponses correctes à ces questions, puisqu’ils ne possèdent pas la plénitude de l’Évangile. Ils considèrent le salut comme un simple évènement. Pour eux c’est en fait le seul véritable évènement significatif existant, et dès qu’on a atteint le royaume, le jeu est terminé et on a gagné. Mais pour les saints des derniers jours, la réponse n’est pas aussi simple. Nous considérons l’œuvre salvatrice de Dieu dans son intégralité, non comme un simple évènement, mais comme un processus avec un commencement et une fin. Le début du processus consiste à venir au Christ par la foi, le repentir, le baptême, et la réception du don du Saint-Esprit. Ce faisant, à un certain moment dans le processus, nous sommes justifiés, sanctifiés, et « sauvés » à condition de persévérer (Matthieu 10 :22).

Jusque là, la théologie des saints des derniers jours est semblable à celle d’autres chrétiens. Mais les saints des derniers jours savent que la fin du processus est de loin, bien plus grandiose que celui d’être sauvé. Le but ultime, l’objectif de l’œuvre de Dieu, ne se borne pas à nous sauver de la mort et de l’enfer, aussi merveilleux que cela puisse être en soi. L’objectif caché est que nous devenions comme le Christ (cela ne vous semble-t-il pas fantastique ?) Être sauvés c’est devenir des enfants de Dieu par l’expiation du Christ, mais le but ultime pour des enfants consiste à grandir pour devenir semblables à leurs parents. Seuls les saints des derniers jours intègrent cette dimension ! Je ne me borne pas à œuvrer dans le royaume, après ma conversion, pour y entrer. Je ne travaille pas pour être sauvé. Je travaille pour devenir ce qu’il est, faire ce qu’il fait, et avoir ce qu’il a.
 
Aller au Christ c’est un peu comme prendre le train pour une destination précise. Si vous voulez arriver à cette destination, il est indispensable de monter dans le train. Et après avoir pris le train, il est inévitable que si nous y restons, nous arriverons à destination. Mais même si on fait ceci, prendre le train n’est pas l’objectif du voyage. Notre objectif c’est d’arriver à destination. Aller au Christ, être sauvés, c’est le début de notre transformation. Pour ainsi dire, on monte dans le train. Mais notre objectif ultime, notre but, c’est de devenir comme le Christ. C’est pour cela que nous travaillons, pas pour être sauvés de l’enfer, car le Christ l’a déjà fait pour nous. Dans sa grande condescendance, Dieu le Fils est devenu tout ce que nous sommes, a souffert tout ce que nous avons souffert pour ôter tous les obstacles et ouvrir toutes les portes (Apoc. 3 :8).

Maintenant, il nous invite à devenir tout ce qu’il est en suivant le chemin qu’il a tracé. C’est pourquoi nous travaillons à diminuer la distance, à devenir plus semblables à notre Père (Mosiah 5 :7), à réaliser la perfection individuelle que le Christ a rendue possible. Ceux qui ne désirent pas devenir entièrement semblables au Christ tel qu’il est maintenant, se trouveront de plus en plus mal à l’aise et finiront par descendre du train, certains plus ou moins loin de leur destination. Mais nul ne sera rejeté. Si nous restons dans le train, si nous endurons jusqu’à la fin, nous avons la promesse divine que nous atteindrons notre destination et que nous deviendrons tout ce qu’il est, et que nous recevrons tout ce qu’il a (Romains 8 :14-19, surtout 17 ; Jean 16 :15 ; Luc 12 :44 ; D&A 84 :38).
 
Malheureusement, les autres confessions ne peuvent donner cette réponse, car selon leur théologie, nous et le Christ sommes deux espèces complètement dissemblables l’une de l’autre : il est divin, nous sommes humains. Selon leur point de vue, il est blasphématoire de suggérer que nous puissions devenir ce qu’il est. Ils soutiennent qu’il n’existe aucun processus, aucun but à long terme, et rien dans le domaine de la religion au-delà de l’évènement isolé consistant à être sauvé de la mort et de l’enfer. Une fois sauvés, ils restent théologiquement parlant en plan sans nulle part où aller, sans rien faire, ni aucune raison de faire quoi que ce soit. Leur train est immobile, sans moteur, sans rails, ni destination. Pour eux, monter dans le train représente la destination finale. Il n’est pas étonnant que l’évènement unique permettant « d’être sauvés » devienne pour eux le point central pour toute l’éternité et que l’insistance des saints des derniers jours à travailler pour atteindre un but futur les irrite tellement. Ils nient l’existence d’un but autre que celui d’être sauvés de la mort et de l’enfer. Ils supposent à tort que les saints des derniers jours travaillent pour être sauvés, et malheureusement, certains parmi nous le font. Mais le Christ a déjà fait cette œuvre, maintenant nous travaillons à lui ressembler autant que nous le désirons.

Seuls les saints des derniers jours comprennent que la grâce de Dieu consiste à nous ramener vers lui, et de faire de nous, littéralement, ce qu’il est. Ça, c’est vraiment de la grâce ! Pour les saints des derniers jours le point central de cette vie consiste à venir au Christ et à commencer le processus, mais nous espérons aussi ce moment grandiose qui adviendra dans l’éternité lorsque nous lui ressemblerons finalement (1 Jean 3 :2 ; 2 Cor. 3 :18). Nous nous consacrons, en tant qu’enfants de Dieu, tous les jours de notre vie en vue de ce glorieux jour, afin que, par nos œuvres nous nous rapprochions de lui. Lorsque nous utilisons l’expression « aller au Christ » pour décrire la conversion, il s’agit d’une figure de style qui définit notre intention et nos désirs. Mais la réalisation ultime pour arriver au Christ consiste à diminuer la distance qui nous sépare en faisant ce qu’il fait pour devenir ce qu’il est.
 
Si nous concentrons trop notre attention sur les débuts de notre vie en Christ, sur notre conversion initiale et notre justification par la foi en Christ (c’est-à-dire sur le fait d’être sauvé) on peut obscurcir l’objectif, le but et la raison de notre nouvelle vie, qui graduellement, dans cette vie et dans l’éternité devant nous, est de devenir en réalité semblables au Christ. Une insistance exagérée sur le début masque l’importance de la fin. Il est tout à fait capital d’être convertis, si nous ne commençons pas alors à imiter le Christ et à nous rapprocher graduellement de lui, nous ne l’honorons pas véritablement ou nous ne l’adorons pas sincèrement, car la véritable adoration se manifeste dans l’imitation.
 
De même, si nous concentrons trop notre attention sur la réalisation finale de notre but éternel, à devenir un jour ce qu’est notre Père, il se peut que nous sous-évaluions, ou même que nous ne tenions pas compte de l’œuvre salvatrice du Christ, et qu’au lieu de cela nous glorifiions nos propres efforts et que nous avons l’impression de « nous sauver nous-mêmes » en travaillant à notre objectif. C’est pour cette raison que beaucoup ne ressentent pas le pouvoir et la bénédiction d’avoir le Christ dans leur vie maintenant. C’est pourquoi je suggère qu’il vaut mieux considérer le salut comme un processus avec un commencement dans cette vie et une fin dans l’éternité3. Le début est surtout entre les mains du Christ ; la fin est particulièrement dans les nôtres. C’est ce que Néphi nous dit dans 2 Néphi 31 :19-20. Nous entrons dans le chemin étroit et resserré avec une foi inébranlable dans la parole du Christ, nous reposant totalement sur les mérites de celui qui est puissant à sauver. Maintenant, nous devons nous presser en avant avec fermeté dans le Christ avec une espérance parfaite. Si nous « endurons jusqu’à la fin » de cette façon, le Père nous promet : « Vous aurez la vie éternelle ». Mais nous devons toujours nous souvenir que tant que nous sommes engagés sincèrement dans le processus, tant que nous travaillerons du début à la fin, nous serons en sécurité dans son royaume et dans ses bras aimants, sauvés au sens classique (Alma 5 :33 ; 34 :16 ; Mormon 5 :11 ; 6 :17).
 
D’autres raisons de travailler à notre salut
 
Il existe encore d’autres raisons de travailler dans le royaume. Tout d’abord, l’œuvre que nous accomplissons pour le royaume est une forme d’adoration ; en fait, c’est la forme la plus élevée du culte. Dieu, dans tous ses attributs glorieux, dans toute sa justice parfaite est notre Dieu. Nous aimons et respectons ce qu’il est. Comment pouvons-nous l’adorer et ne pas adorer ce qu’il est ? Nous ne pouvons pas, car ce serait illogique. Une chose est sûre : nous ne pouvons adorer une chose et ne pas adorer ce qu’elle est. C’est pourquoi nous honorons, nous respectons, et nous attachons de la valeur à la justice, car il est juste. Nous accordons de la valeur à l’amour, car il est amour. Nous accordons de la valeur à la compassion et au pardon, car il est plein de compassion et de pardon. Nous cherchons à posséder ce à quoi nous attachons de la valeur. C’est ainsi que nous adorons Dieu en cherchant à posséder ses attributs divins dans notre vie. On adore les faux dieux que sont la richesse, la célébrité, le sexe, en les recherchant pour les posséder. Celui qui adore l’argent cherche à acquérir de l’argent ; celui qui adore la célébrité cherche à devenir célèbre et ainsi de suite. Le vrai Dieu est amour, vérité et lumière. C’est pourquoi si nous l’adorons véritablement, nous cherchons à posséder son amour, sa vérité et sa lumière. Nous ne pouvons rechercher le bien, adorer le bien sans devenir bons (ou tout au moins sans devenir meilleur avec le temps). La vraie question que nous devons nous poser sur l’éternité n’est pas : « Qu’est-ce que je veux obtenir ? » ni : « Où est-ce que je veux aller ? », mais : « Qu’est-ce que je veux être ? ».
 
Nous travaillons aussi pour témoigner. Les Écritures nous donnent plusieurs exemples sur ce point : « Que votre lumière brille devant les hommes, afin qu’ils voient vos bonnes œuvres, et glorifient votre Père qui est dans les cieux » (Matt. 5 :16). À ceci tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples, si vous avez de l’amour les uns les autres » (Jean 13 :35). Si le Christ et moi sommes véritablement unis dans l’alliance de l’Évangile, alors je dois véritablement refléter sa nature dans ma vie. Ma conduite, en s’améliorant, témoigne du Christ qui m’a pris à lui. Le résultat final peut ne pas être visible tout de suite, mais le processus du changement en moi sera facilement reconnaissable. Si mon apparence, avec le temps, ne devient pas de plus en plus visible en moi, si je ne commence pas à porter les fruits de ma conversion, il semble douteux que je sois entré de bonne foi dans l’alliance ou que je n’ai pas secrètement changé d’avis quelque part avec le temps.
 
De plus, selon Éphésiens 2 :19-22, nous, les membres de l’Église, sommes comme les pierres ou les briques dans la structure de l’Église. Maintenant, que font exactement les pierres d’un mur ? Quelle grande œuvre accomplissent-elles ? Eh bien, elles sont simplement là, elles ne font pas grand-chose en réalité ! C’est peut-être le cas... mais elles sont là ! En fait, c’est ce qu’elles font. Elles sont là. Elles sont sûres, elles sont fermes, on peut compter dessus, elles endurent à l’endroit où on les a placées. C’est comme cela qu’elles servent le Maître Bâtisseur. Elles ne font pas de vaet-vient, elles ne se déplacent pas, elles ne se promènent pas, elles n’essaient pas de se reposer ou de passer la part de leur fardeau à leurs voisins, elles ne créent pas de trous dans le mur.
 
Nous aussi, nous faisons du bon travail pour construire le royaume. D’après mon expérience, ce sont ceux qui sont le plus convertis à l’Évangile qui travaillent le plus dur pour l’avancement de l’Évangile. La vérité c’est que les plus grandes œuvres suivent la conversion, elle ne la précède pas. Joseph Smith a donné sa vie, les pionniers ont traversé les plaines, les premiers chrétiens ont été livrés aux lions, non pour se convertir à l’Évangile, mais parce qu’ils étaient déjà convertis.
 
Lisez les Écritures suivantes :
 
1. Alma 7:24 : « Veillez à avoir la foi, l’espérance et la charité, alors vous abonderez toujours en bonnes œuvres ». Il est clair qu’Alma comprend que ces bonnes œuvres qui arrivent en abondance sont le résultat de notre foi, de notre espérance et de notre charité. Les bonnes œuvres d’Alma lui-même ne sont apparues qu’une fois que sa remarquable conversion au Christ eut lieu. Alma était positivement méchant jusqu’à ce qu’il accepte le Christ et soit racheté ; ensuite, il « œuvra sans cesse » (Éther 12 :4) « Quiconque croit en Dieu peut avec assurance espérer un monde meilleur, oui, même une place à la droite de Dieu, espérance qui vient de la foi, est une ancre pour l’âme des hommes, laquelle les rendra fermes et inébranlables, toujours abondant en bonnes œuvres, étant poussé à glorifier Dieu ».
 
De nouveau, nous noterons que l’on abonde en bonnes œuvres après avoir reçu cette ancre de la foi et de l’espérance. C’est la conversion au Christ qui nous convainc de notre besoin de nous améliorer et qui crée le désir de se repentir et de faire de bonnes actions. Les bonnes œuvres sont généralement les fruits résultant de l’acceptation de l’alliance de l’Évangile et non l’inverse. Moroni 7 :28 : « Car il a satisfait aux buts de la loi, et il revendique tous ceux qui ont foi en lui ; et ceux qui ont foi en lui s’attacheront à tout ce qui est bon ». C’est notre foi en Christ et le fait qu’il nous revendique comme siens qui nous obligent en tant que saints à rechercher le bien. Les vrais saints s’attacheront à tout ce qui est bon ; pas pour qu’il les reconnaisse comme siens, mais parce qu’il les a déjà reconnus comme siens.
 
De plus, je crois qu’il existe un lien indissoluble entre l’effort et le bonheur, une loi qui s’énonce à peu près comme suit : « Plus on a de volonté à obtenir de la joie, plus on en obtient ». Notre nature éternelle comme enfants de Dieu est telle que notre capacité pour avoir de la joie est augmentée par l’effort que nous déployons (opposition en toutes choses). Après tout les champions du divan perdent énormément de bonheur dans cette vie ; il se peut que dans les éternités spirituelles, ces champions aient manqué certaines choses qu’ils auraient pu obtenir avec un peu d’effort. Voir Alma 36 :12-24 (surtout 24).
 
Si nous voulons être comme Dieu, nous devons nous souvenir que Dieu travaille ; et qu’il travaille très dur. L’œuvre et la gloire de Dieu consistent à réaliser l’immortalité et la vie éternelle de ses enfants, c’est pourquoi si on évite cette œuvre, on perdra aussi sa gloire.

Il est naturel que les enfants de la maison participent aux corvées de la maison. Tout comme le Christ a fait « les œuvres que le Père lui a données » (Jean 5 :36), de même, en l’imitant, nous faisons les corvées qu’il nous a données « Celui qui croit en moi, fera, lui aussi les œuvres que moi je fais » (Jean 14 :12). Mon fils Michael, ne m’obéit pas et ne fait pas les corvées pour devenir mon fils. Je ne lui dis pas : « Allez, Mike, si tu fais vraiment bien tes corvées, tu peux espérer devenir un jour mon fils ». Il est déjà mon fils, et il le sait ; c’est arrivé il y a des années. Inversement, si je devais dire aux fils Karlsven qui vivent de l’autre côté de la rue de tondre ma pelouse, il est probable qu’ils ne le feraient pas, parce que je ne suis pas leur père, et que ce n’est pas leur pelouse. Ils ne me doivent aucune corvée. Michael m’obéit parce que c’est mon fils, et que cette relation existe déjà entre nous et qu’il l’apprécie. Il obéit pour montrer qu’il accepte volontairement les termes qui le lient en tant que fils et la place qu’il occupe légitimement dans notre famille. Michael ne peut pas en travaillant comme un forcené, en rendant service, ou en obéissant devenir mon fils parce qu’il est déjà mon fils (encore que s’il désobéit volontairement, et renie cette relation et l’endommage à un point tel qu’elle ne sera plus qu’un fait biologique et rien de plus). Parce que tous les deux nous chérissons cette relation et parce que nous nous aimons, j’essaie d’être un père compréhensif et il essaie d’être un fils obéissant. Dans le même esprit, et pour les mêmes raisons, nous accomplissons, en tant qu’enfants du royaume, les œuvres que le Père nous a confiées. Si nous voulons continuer, endurer, dans le cadre de cette relation glorieuse, alors nous faisons nos corvées du mieux de nos possibilités. 
 
Les œuvres : une nécessité
 
Les Écritures affirment clairement qu’une conduite correcte (œuvres) fait partie intégrante de notre vie en Christ. Le Sauveur a enseigné : « Celui qui dit : Seigneur, Seigneur, n’entrera pas dans mon royaume, mais celui-là seul qui fait la volonté de mon Père dans les cieux... Loin de moi, vous qui commettez l’iniquité » (Matt. 7 :21 ; 23). En d’autres termes, il ne suffit pas de prononcer des mots ou de confesser le Christ, et de refuser de le reconnaître comme notre Seigneur en le servant et en nous conformant à sa volonté pour que nous puissions entrer dans le royaume. La confession ou la reconnaissance du Christ doit se concrétiser en faisant la volonté du Père qui est dans les cieux et non en commettant l’iniquité. Jésus a souligné le lien explicite existant entre le salut et les bonnes œuvres : « Si tu veux entrer dans la vie, garde les commandements » (Matt. 19 :17). Dans l’Évangile de Jean (3 :20-21), il dit : « Car quiconque fait le mal a de la haine pour la lumière, de peur que ses œuvres ne soient réprouvées, mais celui qui pratique la vérité vient à la lumière, afin qu’il soit manifeste que ses œuvres sont faites en Dieu ». On ne peut faire le mal et être dans la lumière, nos œuvres, notre condition spirituelle et notre destinée sont intimement liées.

De plus, Jésus exige que garder ses commandements, c’est-à-dire avoir le même comportement que lui, soit une condition pour demeurer dans son amour. « Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour, comme j’ai gardé les commandements de mon Père, et que je demeure dans son amour. » (Jean 15 :10 ; voir aussi 14 :15, 21). Jean développe la nécessité du rapport entre un comportement correct et le fait « d’être en Christ » : « Celui qui dit, je le connais, et ne garde pas ses commandements, est un menteur, et la vérité n’est pas en lui, mais, celui qui garde sa parole, l’amour de Dieu est vraiment parfait en lui. À ceci nous reconnaissons que nous sommes en lui » (1 Jean 2 :4). Qui est véritablement en Christ ? Celui qui garde ses commandements ! Il y a ceux qui professent le Christ, mais qui ne travaillent pas pour lui, ceux qui prétendent être ses enfants, mais refusent de faire leurs corvées. Selon les Écritures, ce sont des « menteurs ». 
 
Jean insiste encore sur la nécessité d’avoir une bonne conduite afin de vivre en Christ : 1 Jean 3 :6-8 : « Quiconque demeure en lui ne pèche pas ; quiconque pèche ne l’a pas vu et ne l’a pas connu. Petits enfants, que personne ne vous égare ; celui qui pratique la justice est juste, comme lui (Jésus) est juste. Celui qui commet le péché est du diable, car le diable pèche dés le commencement ».
 
En fin de compte, l’Apôtre Paul, qui ne peut être accusé d’être opposé à la grâce, enseigne en plusieurs endroits qu’il est nécessaire que le salut et les bonnes œuvres soient liés, ainsi dans 1 Corinthien 6 :9-10 : « Ne savez-vous pas que les injustes n’hériteront pas le royaume de Dieu ? Ne vous y trompez pas : ni les débauchés, ni les idolâtres, ni les adultères, ni les efféminés, ni les invertis, ni les voleurs, ni les cupides, ni les ivrognes, ni les insulteurs, ni les accapareurs n’hériteront le royaume de Dieu. » Point. Aucune exception, même pas les chrétiens adultères, les chrétiens voleurs, ou les chrétiens accapareurs. Dans le jargon de mes étudiants, Dieu n’acceptera pas que nous ayons un discours différent de nos actions.
 
La foi et les oeuvres
 
La doctrine de la justification par la foi est en accord totale avec les Écritures (voir par exemple, Galates 2 :16 ; 2 Néphi 2 :5 ; D&A 20 :30), par contre la justification par la foi seulement, sans effort, sans obéissance, sans engagement ni réponse de la part du croyant ne l’est pas du tout.
 
Certains chrétiens (mais pas autant qu’on voudrait le croire) prétendent que Dieu n’exige rien de nous après notre conversion, mais qu’il acceptera avec amour n’importe quel genre de vie dans laquelle la personne sauvée aura choisi de se vautrer, subventionnant leurs péchés comme un père riche, indulgent ou crédule qui continue à payer les factures d’enfants gâtés, ingrats et rebelles. Pour les saints des derniers jours, cette façon de voir insulte à la dignité, la justice et l’intégrité de Dieu.
 
D’un autre côté, depuis de nombreuses années le mormonisme « populaire » (cette religion déformée inventée par des membres toujours prêts à trouver une réponse) fait l’erreur de promouvoir l’autre face du faux dilemme de la grâce contre les œuvres. Parce que « l’ennemi », (c’est-à-dire les baptistes, les pentecôtistes, ou tout autre confession avec laquelle on est en désaccord) rejette la nécessité des œuvres et met la seule grâce en avant, on a ressenti pour des raisons inexplicables le besoin de prendre la position opposée, rejetant la grâce et mettant la priorité sur les œuvres seules. La théologie « populaire » qui en découle est aussi défectueuse que l’attitude opposée soutenue par d’autres chrétiens.
 
Puisque les Écritures, et pas seulement la Bible, mais toutes les Écritures discutent de l’importance de la grâce et des œuvres, nous n’avons pas le droit de choisir l’un ou l’autre ou de rejeter l’un au bénéfice de l’autre. L’opinion qui met en relief soit la grâce soit les œuvres est fausse. Luther a eu tort de ne pas tenir compte de Jacques. Les saints des derniers jours ont tort de jeter la pierre à Paul. Jacques et Paul ont tous les deux écrit la parole de Dieu. L’Épître de Jacques et l’Épître aux Romains sont toutes les deux des Écritures. Malheureusement, lorsque certains missionnaires saints des derniers jours, sont confrontés au « par la grâce vous êtes sauvés » de Paul (Éphésiens 2 :8) ou « Un homme est justifié par la foi sans les œuvres de la loi » (Romains 3 :28) contre-attaquent avec « La foi sans les œuvres est morte » de Jacques (Jacques 2 :26) comme si Paul avait tort ou comme si Jacques censurait Paul8. Mais Paul était un apôtre du Seigneur, et ses lettres sont la parole de Dieu au même titre que celles de Jacques (voir le 8éme Article de Foi). Nous ne pouvons choisir entre la grâce et les œuvres. Nous devons choisir les deux !
 
Lalliance
 
Le concept de « l’alliance » que l’on trouve dans les Écritures nous permet, grâce à une vue plus large sur le plan théologique de mettre en accord et la grâce et les œuvres. L’alliance est un accord passé volontairement entre deux parties et qui a chacune des obligations. Ce concept est enseigné dans l’Ancien et le Nouveau Testament et caracérise la relation correcte entre Dieu et son peuple.
 
La possibilité d’entrer dans l’alliance, le Sauveur qui en est le médiateur, son agonie qui l’a rendue possible, sont des dons de la grâce : Dieu n’était pas obligé de les offrir ; Jésus n’était pas obligé de souffrir. Ces dons nous ont été octroyés par amour. Mais la décision de rester dans l’alliance, de tenir ferme et « d’endurer jusqu’à la fin », ce choix c’est le nôtre, et nous manifestons celuici en montrant qui nous servons et quelles œuvres nous accomplissons. Tant que nous choisissons de lui rester fidèles, le Christ continue à nous justifier par sa grâce et son expiation pour nos péchés. Nos éventuelles bonnes œuvres ne sont qu’un signe de la justice parfaite que nous cherchons sincèrement à offrir, mais à ce point ces œuvres ne peuvent être accomplies que dans le Christ, et ce signe montre que c’est lui que nous servons lui et pas l’ennemi. Ce signe (nos efforts sincères) est accepté par le Christ, qui seul nous sauve et nous justifie par l’alliance.
 
À terme, le salut, c’est la responsabilité de celui qui porte le titre : Sauveur. C’est son titre parce que c’est sa fonction et non la nôtre. Occasionnellement, il nous permet d’œuvrer pour lui comme instruments pour sauver autrui, mais jamais pour nous-mêmes. Nous ne pouvons nous baptiser nous-mêmes, nous faire des bénédictions, nous ordonner nous-mêmes, ou nous doter personnellement. Cependant, nous pouvons et nous devons accomplir certaines choses pour entrer et rester dans l’alliance. Logiquement, nous ne pouvons soutenir qu’il est notre maître et en même temps refuser de le servir. Nous ne pouvons suivre les deux chemins en même temps. Les serviteurs, par définition, servent. Si entrer dans l’alliance c’est choisir le Christ à la place de Satan, alors rester dans l’alliance consiste à servir le Christ, c’est à dire, à continuer à choisir le Christ, à persévérer ou à persister à choisir le Christ, et nous manifestons ce choix par notre conduite. Nous ne pouvons venir au Christ et continuer à vaquer à nos affaires.
 
Bien qu’on puisse trouver ce terme choquant, il n’en est pas moins vrai que la relation décrite par les termes bibliques de « serviteurs » et de « maître » se rapporte à l’institution de l’esclavage. En fait, le terme « rédimer » signifie littéralement « racheter ». Nous appartenions à Satan ; nous étions ses esclaves, et le Christ nous a rachetés. Mais Jésus ne nous a pas rachetés avec son sang pour que nous puissions nous appartenir, maintenant nous lui appartenons. C’est pourquoi il est le Maître et nous les serviteurs. Nous sommes tenus de le servir, lui et non pas le péché, le diable ni nous-mêmes, juste lui. Nous sommes ses serviteurs, rachetés et payés avec son sang précieux (1 Corinthien 6 :20).
 
Dire sans hypocrisie : « Le Christ est le Seigneur » revient à dire « Le Christ est mon Seigneur ». Et dire « Le Christ est mon Seigneur » sans hypocrisie consiste à le servir et à rejeter Satan. Les Écritures nous assurent que nous ne pouvons nous contenter de reconnaître sa suzeraineté sans le servir et espérer ensuite entrer dans son royaume (Matthieu 7 :21). On ne peut être son serviteur si on ne le sert pas. C’est faire de beaux discours sans les mettre en application. D’un autre côté, les œuvres sans la grâce du Christ ne peuvent nous sauver, car dans nos meilleurs jours, en raison des limitations dues à la Chute, il nous faut faire plus d’efforts pour nous maintenir à niveau que pour progresser (voir Mosiah 2 :21 ; Luc 17 :7-10). Nous ne pouvons, par nos œuvres et en donnant le meilleur de nous-mêmes, que confirmer notre loyauté envers notre Sauveur, et réitérer notre désir de continuer tout en étant justifiés par sa grâce. Notre obéissance à ses commandements, ce symbole imparfait de nos intentions parfaites, manifeste notre décision de rester dans l’alliance.
 
Jacques  contre Paul
 
Les opinions apparemment contradictoires de Jacques et de Paul concernant la foi et les œuvres représentent peut-être le plus grand problème que l’on puisse trouver dans le Nouveau Testament.
 
On ne doit pas minimiser cette contradiction apparente. Paul dit d’un côté dans Romains 3 :28 : « Car nous pensons que l’homme est justifié par la foi, sans les œuvres de la loi ». De l’autre côté, Jacques, le propre demi-frère du Seigneur, dit dans Jacques 2 :14 et 24 : « Mes frères, que sert-il à un homme de dire qu’il a la foi, s’il n’a pas les œuvres ? Cette foi peut-elle le sauver ? [Souvenezvous Paul dit que oui !] …vous voyez que l’homme est justifié par les œuvres et non par la foi seulement ». Cette contradiction apparente a suscité des siècles d’argumentations enflammées pour savoir si nous sommes justifiés par notre foi ou par nos œuvres et de nombreux exégètes en sont arrivés à rejeter l’un en faveur de l’autre. Je crois que la clé de l’énigme réside dans le fait que Paul et Jacques définissent différemment dans leurs écrits le mot foi. Jacques définit la foi dans le sens moderne du terme : une simple croyance. C’est pourquoi il montre que les démons croient aussi et qu’ils tremblent. C’est-à-dire, qu’ils croient, mais ça ne les empêchera pas d’être damnés, la simple croyance ne leur sert à rien.
 
D’un autre côté, Paul affirme clairement que la foi est plus qu’une simple croyance. Pour lui, la foi a toujours la signification qu’on lui donne dans l’Ancien Testament qui est la « fidélité » (voir chapitre deux) ou l’engagement dans l’Évangile. Dans 1 Timothée 4 :1 et 5 :8, par exemple, la « foi » c’est ce en quoi nous sommes fidèles, c’est à dire, l’alliance de l’Évangile, qu’il décrit plus loin comme pouvant être « gardée » ou « reniée » en raison de notre bonne ou mauvaise conduite.
 
Maintenant, si nous utilisons la définition paulinienne de la foi dans le sens de fidélité à l’alliance de l’Évangile, nous voyons que la formule de Paul dans Romains 3 :28 est correcte : La foi seule (engagement dans l’Évangile) nous justifiera devant Dieu, même si on ne vit pas la loi de Moïse. D’un autre côté, si nous définissons la foi comme Jacques, une simple croyance, alors cette formule est également correcte : une simple croyance ou une simple affirmation sans une bonne conduite est insuffisante en elle-même pour nous justifier devant Dieu. Si nous utilisons la définition étroite de la foi donnée par Jacques, alors cette formule est correcte. Si nous utilisons la définition plus large de Paul, alors la formule de Paul est aussi correcte. Les deux apôtres enseignent la vérité. Là où nous commençons à avoir des problèmes, c’est quand nous mélangeons les définitions de Jacques avec la formule de Paul et vice versa. Accoler la définition paulinienne de la foi à la formule de Jacques nous amène à affirmer qu’il suffit de croire en Jésus pour être sauvés même en l’absence d’une bonne conduite. Ces deux hybrides sont faux. Alors si vous êtes encore à faire des efforts pour entrer dans le royaume, allez-vous vous décider à abandonner le froid de l’extérieur ? et si vous êtes entrés dans le royaume sincèrement, allez-vous faire vos corvées ?
 
Travailler à son salut
 
Une autre objection courante faite à la doctrine de la grâce est présentée quand on applique mal les enseignements de Paul dans l’épître aux Philippiens 2 :12 : « Ainsi, mes bien-aimés, comme vous avez toujours obéi, travaillez à votre salut avec crainte et tremblement, non seulement en ma présence, mais bien plus encore maintenant que je suis absent. » Ceux qui résistent à la bonne nouvelle de l’Évangile et voudraient s’autoproclamer Sauveur en lieu et place du Christ disent en effet : « Ah, vous voyez ? Jésus ne nous sauve pas ; il n’accomplit pas l’œuvre. Nous nous sauvons nous-mêmes, nous travaillons à notre salut ; c’est pourquoi, nous n’avons pas besoin de la grâce ou de la miséricorde ; nous faisons tout nous-mêmes, et Philippiens 2 :12 le prouve. »
 
En fait, l’expression « travailler à votre salut » apparaît trois fois dans les Écritures, et à chaque fois le sens est exactement l’opposé de cette affirmation erronnée donnée ci-dessus. Tout d’abord, dans Philippiens 2 :12, il est commandé d’obéir avec humilité et non avec l’orgueil de « celui qui se sauve lui-même », sachant que Jésus, et non pas nous, est le Seigneur (verset 11) et sachant que la capacité d’accomplir ce pour quoi nous œuvrons vient seulement de Dieu et non de nousmêmes (verset 13).

Dans le Livre de Mormon, Moroni ordonne : « Demandez au Père, au nom de Jésus tout ce dont vous avez besoin » et « (venez) au Seigneur de tout votre cœur ; et travaillez à votre salut avec crainte et tremblement devant lui. » (Mormon 9 :27). Mais comment pouvons nous demander à Dieu avec foi ce dont nous avons besoin, aller au Christ, et en même temps nier que nous avons des besoins, même nier implicitement que nous avons besoin du Christ, tout en travaillant à notre salut ? Nous ne pouvons pas. Ce que Moroni dit c’est qu’il faut garder l’alliance, faire notre part avec crainte et tremblement et faire confiance à Dieu pour ce qui nous manque. Travailler à son salut ne signifie donc pas travailler indépendamment du Christ et de son expiation. Cela signifie plutôt respecter notre part de l’alliance de l’Évangile avec humilité tout en se reposant sur le Seigneur pour tout ce dont nous avons besoin et en le demandant avec foi.

Alma est encore plus explicite à ce propos (Alma 34 :37-38) : « Je désire que vous vous souveniez de ces choses, que vous travailliez à votre salut avec crainte devant Dieu, et que vous ne niiez plus la venue du Christ. Que vous ne luttiez plus contre le Saint-Esprit ; mais que vous le receviez et preniez sur vous le nom du Christ ; que vous vous humiliiez même jusqu’à la poussière ; que vous adoriez Dieu en quelque lieu que ce soit, en esprit et en vérité ; que vous viviez en rendant grâces, chaque jour, pour les miséricordes et les bénédictions nombreuses qu’il vous accorde ». Nous ne pouvons « travailler à notre salut » sans le Christ ; nous ne pouvons « nous humilier jusqu’à la poussière » si dans notre arrogance nous pensons pouvoir nous sauver sans le Christ ; nous ne pouvons vivre « en rendant grâces, chaque jour, pour les nombreuses miséricordes » de Dieu, si nous refusons de reconnaître que nous avons eu de nombreuses miséricordes. En fait,
« tout ce que nous pouvons faire » (2 Néphi 25 :23) c’est avoir la foi au Sauveur, nous repentir, entrer dans l’alliance, et y rester fermement.
 
Frustrations et miséricorde divine
 
Il semble qu’il y ait dans l’Église d’aujourd’hui des saints qui ont des difficultés à reconnaître les grandes miséricordes de Dieu. C’est arrivé aussi dans d’autres dispensations. Par exemple, Alma cite le Prophète d’antan Zénock à son peuple (et à nous) de cette façon : « Tu es irrité, O seigneur, contre ton peuple, parce qu’il ne veut pas comprendre les miséricordes que tu as déversées sur lui à cause de ton Fils » (Alma 3 :16). Je crois que c’est pécher par ingratitude que de résister aux miséricordes qui ont été déversées sur nous grâce au Fils.
 
Pourquoi est-il si difficile pour certains d’entre nous d’accepter et de reconnaître la miséricorde et la grâce de Dieu ? C’est en grande partie dû à la crainte que quelqu’un, quelque part s’en sortira avec bénéfice. Tout d’abord nous avons peur que les coupables puissent « s’en tirer » sous souffrir. Puisque la bonne nouvelle de la justification par la foi en Christ est pleine de miséricorde, elle viole naturellement notre sens de la justice. Et puis si les gens sont trop assurés de leur place dans le royaume de Dieu, ils pourraient être tentés de s’en sortir en faisant moins d’efforts que ce qu’ils devraient faire.
 
À propos des durs efforts, je suggère que l’amour et la reconnaissance sont, sur le long terme, de bien meilleures motivations pour bien travailler que ne le sont la crainte et l’angoisse. Elles sont certainement supérieures à la dépression et au désespoir. Si nous ressentons l’amour du Sauveur et que nous savons que nous lui appartenons, notre désir de le servir sera plus fort que si nous ne connaissons pas son amour et que nous nous inquiétons d’être envoyés en enfer. Les parents finiront par perdre les enfants qui obéissent par la crainte, alors que les enfants qui obéissent par amour resteront avec leurs parents à tout jamais.
 
A propos des coupables qui se débarrassent de leurs péchés, mon collègue Larry Dahl offre une illustration qui vaut la peine d’être répétée ici. Il connaissait un jeune couple non marié qui avait eu des relations sexuelles. Après quelques temps, une grossesse inattendue, un scandale énorme, ils se sont repentis, se sont mariés civilement, et un an plus tard ont été scellés au temple. Mais des sœurs de la paroisse s’indignèrent de la « facilité » avec laquelle ce couple s’en était sorti. On entendit une sœur dire : « Eh bien, si c’est aussi facile que ça de s’en tirer, pourquoi n’allons-nous pas toutes nous amuser et ensuite nous irons nous repentir quand nous serons attrapées ? »
 
La faute que fait cette sœur, comme le souligne frère Dahl, c’est de penser que le péché est une chose désirable et que ceux qui pêchent et se repentent jouissent d’un avantage par rapport à ceux qui ne pêchent pas. Sa réaction ne relevait pas d’une supériorité morale. C’était l’envie d’une nature charnelle bavant littéralement sur les bonbons dont d’autres jouissaient et elle ressentait de la colère parce qu’elle ne pouvait pas en avoir. En bref, elle était verte de jalousie. Dans son cas, elle aurait bien voulu se conduire mal sur le plan sexuel, mais elle n’osait pas se lancer et elle se sentait frustrée.
 
Évidemment, la façon correcte de voir les choses c’est que les justes qui gardent les commandements s’arrangent pour vivre fidèlement, pour avoir la compagnie du Saint-Esprit et font en sorte de devenir comme le Christ, alors que les pauvres pêcheurs autour de nous sont embourbés jusqu’à ce qu’ils se repentent. Les nouveaux repentants devraient nous envier notre service ininterrompu envers le Maître plutôt que nous, d’envier leur récent esclavage chez l’adversaire. La perspective correcte c’est que je jouis de ma relation avec le Christ depuis trente ans, alors que cette pauvre âme ne jouit de la vie en Christ que depuis trente jours. Je suis en avance sur elle, pas en arrière. Je ne me sens derrière ou désavantagé que lorsque mon système de valeurs personnel attribue un coefficient de désir supérieur à la méchanceté plutôt qu’à la justice ! Le problème c’est de savoir qu’est-ce qui pour vous est préférable : la vie de péché ou la vie en Christ. Si c’est le premier, alors laisser les pécheurs se décrocher de l’hameçon vous perturbe, et vous voulez qu’ils souffrent (pour contrebalancer tous ces plaisirs et ces amusements supplémentaires qu’ils ont eus et que vous n’avez pas eus). Si c’est le deuxième, alors vous savez que leur vie pécheresse était déjà leur punition, et vous vous réjouissez avec les anges pour ceux qui se sont repentis et ont été sauvés.
 
Marcher sur la corde raide
 
Les deux principaux dangers lorsqu’ on oppose la foi aux œuvres tels deux concurrents sont (1) l’antinomianisme et (2) le salut « do-it-yourself » (faites-le vous-même).
 
Lantinomianisme est le mot savant pour dire « tu parles, tu parles, c’est tout ce que tu sais faire ». C’est croire que la grâce nous délivre de toute obligation d’accomplir de bonnes œuvres ou se borner à affirmer que le « Christ est le Seigneur » garantira le salut aux chrétiens impies et infidèles. Le Salut « faites le vous-mêmes» est un terme à moi pour décrire la croyance qui veut que l’on se sauve soi-même, que nous « travaillons à notre salut » sans la grâce et la justification par la foi au Christ. Théologiquement, nous marchons sur une corde raide entre ces deux extrêmes également désagréables. Le produit fini de la relation dans l’alliance, qui n’est pas fait que de grâce ou que d’œuvre, donne un Chrétien fidèle sauvé dans le royaume de Dieu par la grâce en Christ. Sans la grâce du Christ point de salut. Mais sans notre fidélité il n’est point de salut non plus. Pour emprunter l’analogie de C.S. 
 
Lewis, telles les deux lames d’une paire de ciseaux, la grâce et les œuvres doivent faire partie du processus. C’est pourquoi la relation est décrite dans les Écritures comme une alliance et non comme un don de la grâce seule ou une récompense pour des œuvres seulement. Ceux qui sont sauvés participent au processus du salut et y contribuent parce qu’ils sont partie prenante de l’alliance et qu’ils doivent la respecter. Abandonner la grâce ou abandonner les efforts personnels et le désir, et il ne vous reste que la moitié des ciseaux, insuffisant pour accomplir le travail. Les saints des derniers jours acceptent le principe d’être sauvés par la grâce. Cependant, ils rejettent la proposition que la grâce puisse les sauver contre leur volonté, sans leur assentiment ou suite à la rébellion contre le Christ.
 
Pour autant, il n’existe pas de vie si misérable, ni de talent si petit ni de force si faible qu’elle ne soit acceptable dès maintenant, pour que le processus du salut puisse commencer. Mais nous devons offrir notre vie, nous devons nous consacrer et nous devons briser notre cœur orgueilleux. Ainsi quiconque désire le Christ plus que le péché, quel que soit son passé ou son histoire, peut entrer dans l’alliance du Christ pour être sauvé.
 
Notes
 
1. Il est évident que certains péchés sont suffisamment graves pour menacer la relation que nous avons dans l’alliance. Ces situations doivent être discutées avec le représentant du Seigneur, l’Evêque ou le président de branche.
 
2. Il est possible d’être sauvé dans un royaume de gloire, même dans le royaume céleste, sans devenir pleinement tel que Dieu (D&A 131 :1-4 ; 132 :17)
 
3. Les protestants, cependant, n’emploient le terme de « salut » que pour le début du processus, puisqu’ils ne croient pas qu’il y ait une fin. Si on ajuste correctement les définitions, en fait on parle de la même chose. 
 
4. Voir Alma 36 :12-24

5. Comme je l’ai présenté clairement dans « Croire le Christ », « garder les commandements » n’est pas la même chose que « toujours garder tous les commandements ». Il y a de la place dans la relation de l’alliance pour nos erreurs et nos faiblesses (mais pas pour la rébellion) tant que nous nous améliorons.

6. La traduction de Joseph Smith précise que Jean ne fait pas allusion aux infractions occasionnelles, mais au péché délibéré et répété en utilisant ici le terme : « continue dans le péché ».

7. L’expression « par la grâce seule » n’apparaît pas dans la Bible. On trouve l’expression « la foi seule » dans Jacques 2 :24, mais dans un passage qui nie explicitement l’éventualité de la justification.
 
8. Je fus moi-même coupable de cela lorsque j’étais missionnaire, bien que cela ne fit pas partie des discussions missionnaires. Je l’avais appris de mes compagnons seniors et l’avais enseigné à mes compagnons juniors. Pour autant que je le sache, les bleus ont toujours la maladie (à savoir que Jacques avait raison et que Paul avait tort) et continuent de la passer aux autres.
 
9. Voir par exemple Genèse 6 :18 (Noé), Genèse 15 :18 et 17 :2 (Abraham), Exode 34 :27-28 (Moïse), 2 Samuel 23 :5 (David), 2 Rois 11 :17 (Jehoiada), 2 Rois 23 :3 (Josiah), et beaucoup d’autres dans l’A.T. La relation présentée par Jésus est la nouvelle alliance selon le Nouveau Testament. Voir Hébreux 8 :7-13 ; 9 :15-20 (Où « Testament » signifie « alliance », comme le note JST. En réalité, le mot grec traduit par « Testament » est le même mot pour alliance. Le Nouveau Testament est la Nouvelle alliance.
 
10. Deux fois dans son épître aux Romains chap. 1 verset 5 (qui est mal traduit dans la version du Roi Jacques), et dans 16 :26, Paul utilise l’expression : « l’obéissance de la foi », indiquant plus loin, que l’obéissance ou le comportement fait partie de la foi telle qu’il définit le terme.

11 La plupart des savants disent que Paul n’a pas écrit les Epîtres pastorales (1 et 2 Timothée et Tite). Ils soutiennent que ces lettres furent rédigées par des proches de Paul en son nom. Je pense qu’ils ont tort, mais cela importe peu ici. Les « étudiants » de Paul peuvent être à même de fournir un excellent témoignage sur la façon dont Paul et ses associés comprenaient et employaient ce terme.
 
12 Dans les Écritures, « crainte et tremblement » décrit une attitude de révérence et de respect, mais aussi de joie. L’expression originale se trouve dans le Psaume 2 :11 : « Servez l’Éternel avec crainte, et réjouissez-vous avec tremblement ». Ceux qui embrassent le Fils (verset 12) tremblent de joie, et non de peur dans le sens moderne du terme. Ceci est d’une importance capitale, car c’est exactement le contraire de l’interprétation habituelle de l’expression « avec crainte et tremblement ».
 
 
CHAPITRE CINQ : LES DANGERS DE LA PERSÉVÉRANCE
 
Nous essayons de respecter notre engagement dans l’alliance de l’Évangile et de persévérer jusqu’à la fin, cependant il existe certains dangers menaçant notre constance qui se situent au-delà des limitations de la Chute et de notre lutte contre la nature charnelle. Dans Matthieu 24 :9-13, la merveilleuse promesse que le Seigneur a faite à ceux qui persévéreront comprend un avertissement concernant trois choses auxquelles on doit prêter attention. Ces dangers sont la faiblesse dans l’affliction, la déception, et l’iniquité. A propos de l’affliction, le Seigneur a dit à ses disciples : « Alors, on vous livrera aux tourments, et l’on vous fera mourir ; et vous serez haïs de toutes les nations, à cause de mon nom. Et ce sera pour beaucoup une occasion chute, ils se trahiront, se haïront les uns les autres » (Matthieu 24 :9-10).
 
Satan est un violent, la première de ses tactiques pour approcher les fidèles consiste à menacer, bousculer et violenter. Nous avons dans l’Église des exemples historiques et contemporains de gens qui n’ont pas supporté et qui ont brisé leurs alliances plutôt que de faire face à l’opposition, aux critiques et aux désagréments. Ils n’ont pas supporté la malice du monde, et c’est une de ces choses qui nous est promise si nous sommes fidèles au Christ (Jean 15 :18-19). La devise du monde se résume à : « tu dois te faire accepter si tu veux continuer ». Mais nos obligations dans l’alliance et notre relation avec le Christ ne doivent faire l’objet d’aucun compromis sur les principes de l’Évangile. Ceuxci doivent rester non négociables. Cependant, quand Satan menace certains saints de souffrir voire de mourir, ils perdent de vue qui sera le vainqueur dans la lutte cosmique. C’est pourquoi ils perdent pied, délaissent leurs alliances et abandonnent le royaume.
 
D’un autre côté, l’histoire de l’Église fournit parmi les premiers pionniers les meilleurs exemples de gens ayant enduré fidèlement les afflictions. Quand nous pensons à eux et à leurs souffrances, nous devons réfléchir pendant un instant à ce que « endurer » pouvait signifier dans les circonstances qui étaient les leurs. Nous avons tendance à penser aux saints vivants, s’avançant victorieusement dans la vallée du Lac Salé après avoir « enduré » les difficultés de la piste de l’Ouest, cependant nous devons nous souvenir que pour beaucoup de saints fidèles, « endurer jusqu’à la fin » s’est résumé à mourir sur le chemin. Les vieux, les jeunes, les malades, les malchanceux n’ont pas enduré les difficultés de la traversée. Leurs épreuves les a fait mourir, par dizaines et par centaines. Certains sont juste partis de Nauvoo pour mourir. Néanmoins, au sens de l’Évangile, ceux qui sont morts le premier jour sur la piste ont « enduré jusqu’à la fin », tout comme ceux qui ont vécu pour entrer dans la vallée. Ils ont « enduré » parce qu’ils ont été fidèles à leurs alliances jusqu’à la fin de leur vie.

Aussi fiers que nous soyons des pionniers qui ont vaincu le désert, nous devons nous souvenir qu’ « endurer » ne signifie pas obligatoirement « vaincre » ou « surmonter ». Nous ne pouvons permettre que la merveilleuse endurance physique du dur à cuire éclipse l’endurance spirituelle tout aussi merveilleuse de celle de l’être fragile, car les faibles et les isolés peuvent endurer, au sens de l’Évangile, jusqu’à la fin tout autant que les forts.
 
Quand je travaillais à ma maîtrise à l’Université Brigham Young, je suivais plusieurs cours avec une convertie de Finlande appelée Helvi Temisevä. Helvi avait contracté la polio à huit ans, et ensuite avait souffert d’arthrite rhumatismale. Ainsi dés son enfance, Helvi était totalement invalide. Elle ne pouvait bouger ni son cou ni son corps. Elle n’avait qu’un usage partiel de ses mains. Elle venait en classe dans un étrange moyen de transport qui tenait du fauteuil et du lit. Helvi tapait un seul caractère à la fois et tournait les pages des livres avec une longue aiguille à tricoter qu’elle tenait d’une seule main. Ce n’est que des années plus tard que j’ai appris qu’il lui fallait quarante cinq longues minutes tous les matins pour se lever de sa position inclinée à sa position semi assise avant de commencer sa journée, et encore quarante cinq autres minutes douloureuses pour effectuer le processus inverse le soir pour aller dormir.
 
Helvi Temisevä n’a jamais surmonté les obstacles de la vie ; elle n’a jamais atteint ses buts les plus chers. Elle n’a jamais marché. Elle ne s’est jamais mariée. Elle n’a jamais pu se passer de soin pendant vingt quatre heures. Mais elle a enduré jusqu’à la fin et a été une bénédiction pour tous ceux qui la connaissaient. Quand elle est morte à cinquante deux ans, des saints sur deux continents ont porté le deuil de son trépas. Car Helvi rayonnait la lumière du Christ. Elle se tenait à la barre de fer comme nulle autre. Personne en sa présence ne se permettait de se montrer rude ou vulgaire, personne ne jurait, ne murmurait ni ne se plaignait. Elle ne m’a jamais fait de reproche, mais son exemple m’a rendu honteux de tous mes péchés. Helvi élevait et améliorait tous ceux qu’elle rencontrait, mais ce n’était pas son courage qui nous inspirait, ce n’était pas sa victoire sur les obstacles de la vie, ce n’était même pas ses souffrances, c’était son engagement envers le Seigneur, la mesure dont elle l’aimait et le servait jusque dans sa faiblesse, et même lorsqu’il lui refusait totalement et sèchement ses plus ferventes prières. Non, endurer n’est pas toujours surmonter. Quelque fois cela consiste à être écraser et réduit en poudre en conservant son nom sur nos lèvres.
 
Je suis fortement inspiré par l’exemple d’un pionnier du nom d’Orson Spencer, un parent éloigné, qui fut appelé à partir en mission en Angleterre, mais interrompit ses préparatifs pour fuir Nauvoo avec les saints en février 1846. Un mois après avoir quitté Nauvoo, son épouse, Catherine, mourut, alors il repartit vers la ville de l’Iowa pour l’enterrer à côté du bébé qu’ils avaient perdu six mois plus tôt. Finalement, après avoir rejoint les saints à Winter Quarters, les Frères lui demandèrent de repartir vers l’Est une fois encore pour commencer la mission à laquelle il avait été précédemment appelé. Pour accepter cet appel, frère Spencer dut laisser six enfants seuls et sans parents à Winter Quarters. La plus âgée, Ellen, avait quatorze ans. Les conditions à Winter Quarters empirèrent à un point que personne n’avait imaginé, et les enfants Spencer, bien qu’aidés de temps en temps par des voisins aimants, faillirent mourir de faim. Plus tard dans l’année, Wilford Woodruff écrivit une lettre d’excuses à Frère Spencer, en expliquant qu’avec tant de gens qui mouraient il avait été impossible de faire plus pour ses enfants. Après trois longues années, Orson Spencer, finalement, fut réuni avec ses enfants à Salt Lake City, mais au bout d’à peine un an il fut rappelé de nouveau pour une nouvelle mission.

Dans son courrier envoyé à ses enfants, Frère Spencer écrivait souvent : « Confiez vous dans le Seigneur, même s’il vous tue ». Je ne peux m’empêcher de penser que, d’après les critères modernes, on pourrait qualifier la famille de Spencer de « dysfonctionnelle ». Mais ils n’ont pas tenu compte de cette situation par amour de l’Évangile. Parmi les enfants d’Orson et de Catherine Spencer, on trouve Aurélia Spencer Rogers, fondatrice de l’organisation de la Primaire de l’Église, et Howard Orson Spencer qui devint plus tard l’évêque d’Orderville. Je trouve ironique que dans l’Église aujourd’hui, nous trouvons des gens qui prétendent aux mêmes avantages de l’alliance, au même dévouement à l’Évangile que les Spencer et autres pionniers, mais qui ne sont même pas disposés à accepter un appel à la Primaire ou une tâche à la ferme du pieu !

Dans la résurrection, quelle attitude aurons-nous devant ceux qui donnèrent leur vie, qui perdirent leur foyer et leurs biens, qui enterrèrent leurs êtres chers dans des tombes à peine creusées, tout cela pour l’amour de l’Évangile, si nous plions devant des choses sans importance et si nous lâchons la barre ? Comment, nous qui refusons de faire le moindre sacrifice pour le Christ, pouvons-nous espérer avoir part à son sacrifice infini au dernier jour ? Suivre le Christ consiste à le suivre lui et personne ni rien d’autre. Si nous aimons quelqu’un ou quelque chose de plus que lui, nous devenons des conjoints infidèles, et notre relation ne relève plus du mariage.
 
Certaines des épreuves et des afflictions les plus rudes auxquelles nous aurons à faire face dans l’Église se manifestent dans les offenses qui font partie naturellement des relations humaines. Beaucoup de gens quittent l’Église ou n’endurent pas jusqu’à la fin parce qu’on les a offensés. Ils se sentent lésés par quelqu’un ou par quelque chose dans l’Église, et ils en arrivent à rejeter leurs alliances et à divorcer d’avec le Christ.

Je suis toujours étonné que ceux qui sont offensés parmi nous pensent qu’il est important de savoir que leurs plaintes sont justifiés ou non. Ils semblent penser que s’ils ont été véritablement offensés, alors, quelque part, ils se sentent justifiés lorsqu’ils lâchent la barre de fer. Mais que leurs plaintes soient justifiées n’a jamais été la question. Je voudrais leur dire : « OK, admettons un instant que vous avez raison, d’une façon absolue à cent pour cent. Admettons que l’évêque X a été maladroit et stupide, ou que la Sœur Y a été grossière et pénible, ou que le président Z a trahi votre confiance, ou que je suis insensible, ou que ma femme vous a snobé. Et alors ? Une enquête révélera que la plupart de ces blessures sont infligées sans intention de nuire, mais admettons que dans votre cas, c’était vicieux et prémédité. Bon… et alors ? Qu’est-ce que le Sauveur commande dans le cas d’affront intentionnel et personnel ? (il ne suggère pas, il ne conseille pas, il commande). « Tendre l’autre joue » (Matthieu 5 :39 ; 3 Néphi 12 :39).

S’il nous commande de tendre l’autre joue lorsque l’offense est intentionnelle, ne devonsnous pas à plus forte raison « tendre l’autre joue » lorsque celle-ci n’est pas intentionnelle ! Mais en supposant que votre plainte soit absolument valable et correcte, en supposant que vous avez été profondément blessés, où cela vous mène-t-il ? Après tout, est-ce que le Christ qui a souffert l’agonie infinie pour nous a le droit de nous demander de supporter un ou deux imbéciles dans l’Église pour lui ? Je parierais que oui. Le Christ est aussi mort pour les imbéciles, vous savez. Briser ses alliances avec le Christ au motif que l’on déteste quelqu’un dans l’Église c’est comme divorcer d’avec un conjoint fidèle parce que l’on ne peut pas supporter un membre de sa famille.
 
Déception
 
Bien que des cas manifestes isolés de persécution religieuse arrivent encore et que de nombreux saints supportent de pénibles épreuves physiques, il ne semble pas qu’aujourd’hui l’ensemble de l’Église de Jésus-Christ ait à souffrir d’afflictions physiques et de persécutions comme cela a été le cas autrefois pour la gloire de l’Évangile. Actuellement, nos épreuves collectives les plus importantes semblent se situer dans d’autres domaines.
 
Le Sauveur nous a avertis de l’existence d’un deuxième danger visant la persévérance, danger peut-être plus réel pour les saints d’aujourd’hui que celui qui consiste à faiblir devant l’affliction. Il s’agit du danger de la déception : « Plusieurs faux prophètes s’élèveront et séduiront beaucoup de gens. » « Car en ces jours-là, il s’élèvera aussi de faux Christs et de faux prophètes, et ils feront de grands prodiges et des miracles, au point de séduire, s’il était possible, même les élus, oui, ceux qui sont les élus selon l’alliance » (Matthieu 24 :11 ; Joseph Smith – Matthieu 1 :22).
 
Si Satan n’arrive pas à nous intimider ou nous brutaliser par des épreuves physiques, il essaiera souvent de nous tromper en nous présentant des programmes ou des problèmes de remplacement. Il voudrait nous voir investir notre temps, nos talents, et notre énergie dans des causes qui ne relèvent pas de Sion, dans l’espoir, que celles-ci remplacent à terme notre engagement dans l’Évangile. Il arrive souvent que ces problèmes soient valables. Mais c’est hors de propos. La déception arrive lorsque l’on accorde la priorité à ces problèmes par rapport à ses alliances dans l’Évangile et ce faisant, on montre que l’on est infidèle à notre amour prioritaire qui est le Christ. Ceux qui sont bernés de cette façon pensent, en général, que l’Église ne fait pas assez dans le domaine de leurs dadas. Ils peuvent en arriver à être déçus par les programmes de l’Église et commencent à écouter « des voix alternatives ».

Ces membres ne manquent pas de zèle, en fait, ils sont suffisamment forts pour endurer des épreuves terribles. Mais Satan a détourné leur zèle pour défendre d’autres causes que celle de Sion, et ils ne se rendent pas compte que le déplacement de leur loyauté est en réalité de l’infidélité. Ceux qui sont ainsi déçus, en général, ne rejettent pas le Christ ; ils décident juste d’interpréter sa volonté différemment ou de le servir selon des modes, des critères ou des valeurs différents, et leur engagement d’origine est mis en retrait dans leur nouvel ordre du jour. Ils changent fondamentalement l’orientation de leur boussole spirituelle. Mais le résultat c’est qu’on ne peut plus faire confiance à la direction qu’ils ont prise dans leurs nouveaux engagements. Ils n’ont pas enduré.
 
À plusieurs reprises le Seigneur a averti l’Église sur le fait d’écouter d’autres voix, comme par exemple dans D&A 43 :5 : « Et ceci sera une loi pour vous, pour que vous n’acceptiez pas comme révélations et commandements les enseignements de quiconque viendra devant vous. Et ceci je vous le donne afin que vous ne soyez pas séduits afin que vous sachiez qu’ils ne sont pas de moi. »
 
Ce verset des Écritures mérite plus d’attention qu’il n’y paraît. C’est une loi, un commandement de Dieu, dont les moindres détails engagent les membres autant que le « Tu ne tueras point » ou le « Tu ne déroberas point », peut-être même plus puisqu’il fut donné spécialement à l’Église dans ces derniers jours. Si nous voulons éviter d’être trompés, Dieu nous commande de n’écouter personne qui prétend révéler sa doctrine ou sa volonté s’il n’est dirigeant de la prêtrise appelé, soutenu et ordonné. Point. Pas de si, pas de et, ni de, mais, aucune exception. Ceci inclut les instructeurs de religion, les auteurs, les voisins, les rumeurs, les journaux, la télévision, les soi-disant « intellectuels », les opinions scientifiques du moment, les missionnaires rentrés au foyer, les beaux-frères, les associés en affaire, les ménagères, les petits amis, les petites amies, les candidats politiques, « l’ami d’un ami », un « type dans ma paroisse », un mystique, des gourous, et « les gens vraiment spirituels » (Je n’ai oublié personne ?) Est-ce qu’on a saisi le message ?

Personne ne parle pour Dieu si ce n’est Dieu et les personnes dûment appelées par Dieu et soutenues régulièrement par l’Église pour le représenter et conduire ses affaires ici-bas. Je trouve que la soumission aveugle et ignorante de tant de saints à briser ce commandement pour suivre ce gourou ou cet instructeur autoproclamé est aussi scandaleux et inexplicable que la soumission que montrait l’Israël d’antan à adorer les idoles dans les clairières et les hauts lieux des Canaanites. Il est certain que la stupidité exigée et les résultats qui en découlent sont les mêmes dans les deux cas.
 
Je ne comprends pas pourquoi tant de saints d’aujourd’hui éprouvent des difficultés avec ce principe. Dieu révèle sa volonté à ceux dont c’est le devoir de la recevoir, les individus pour euxmêmes (et seulement pour eux-mêmes), les parents pour les enfants, les évêques pour les paroisses, les présidents de pieu pour les pieux et ainsi de suite. Mais, Dieu révèle les nouvelles doctrines ou parle autrement à l’ensemble de l’Église d’une seule façon : par révélation au Président de l’Eglise. Pourquoi tous ceux dont les oreilles les démangent (habituellement ce sont ceux qui se glorifient le plus de leur maturité spirituelle) se tournent-ils tant vers d’autres sources spirituelles ? Je ne sais pas, mais j’ai dans le passé conseillé à plus d’un de mes étudiants d’écrire
« D&A 43 :5 » sur leur front avec un feutre et de le conserver jusqu’à ce qu’ils aient appris à garder le commandement qui y est donné.

Mais Dieu ne révèle-t-il pas des choses à des personnes qui ne sont pas dirigeants dans la prêtrise ? N’est-il pas possible que des individus exceptionnels apprennent des mystères, inconnus du commun des mortels, par révélation directe ? Oui, c’est possible, mais cela se fait toujours selon une condition extrêmement importante donnée dans Alma  12 :9 : « Il est donné à beaucoup de connaître les mystères de Dieu ; cependant ce leur est un ordre strict de ne dévoiler que la portion de sa parole qu’il donne aux enfants des hommes, selon l’attention et la diligence qu’ils lui apportent ». En d’autres termes, beaucoup parmi les fidèles peuvent recevoir des révélations de Dieu, même des révélations concernant les mystères. Mais il leur est commandé en même temps, de se taire ! Ils peuvent partager avec d’autres ce que Dieu a déjà révélé à l’Église dans les Écritures et par les prophètes, mais le reste est privé, et le garder privé est une obligation sacrée.
 
En effet, le Seigneur dit de ceux qui sont bénis en recevant davantage de discernement : « Si je voulais que tout le monde sache, j’instruirais le prophète afin de l’enseigner à l’Église. Mais c’est exclusivement pour vous, alors gardez-le pour vous. » C’est pourquoi quiconque dans l’Église (ou en dehors pour ce qui concerne ce sujet) fait part d’une révélation privée sans en avoir l’autorité, agit en violation de « l’ordre strict » de Dieu. Par exemple, si quelqu’un a une vision ou une expérience extracorporelle et se met ensuite à instruire les saints sur la nature du monde spirituel ou sur les évènements de la Seconde Venue, ce serait, à mon avis, en contradiction directe avec le principe énoncé dans Alma 12 :9 et une désobéissance à « l’ordre strict » du Seigneur. C’est arrivé une fois à l’époque de Joseph Smith lorsque Hiram Page bien que fidèle dans d’autres domaines, commença à « révéler » des choses aux membres. Le Seigneur instruisit l’Église à ce moment que
« nul ne sera désigné pour recevoir les commandements et les révélation dans cette Église si ce n’est mon serviteur Joseph Smith fils… Car je lui ai donné les clés des mystères, et les révélations qui sont scellées, jusqu’à  ce que j’en désigne  un autre à sa place. » (D&A 28 :2, 7)

Hiram Page était bien intentionné, mais il fut trompé et à terme en aurait trompé d’autres avec ses fausses révélations. Évidemment, si le Seigneur veut révéler certains renseignements à l’Église, il le fera, comme l’indique D&A 28 :2 et 43 :5, par l’intermédiaire de son prophète. Il n’y a pas de place dans le cadre de la doctrine de l’Église pour les révélations faites par des francs-tireurs. Il n’y a pas d’autorités religieuses « indépendantes » dans l’Église, et il n’y en a jamais eu. Ce n’est pas la façon du Seigneur de travailler. Même si les expériences rapportées sont valables, et quelquefois, elles le sont, en faire part publiquement revient à trahir la confiance de Dieu. Et franchement, j’ai peine à croire qu’une personne suffisamment mûre pour recevoir une révélation « particulière » se montrerait suffisamment perverse ou dénuée d’intelligence pour tourner casaque et manger le morceau.

Il est possible que s’ils pouvaient se taire selon Alma 12 :9, beaucoup parmi nous seraient susceptibles de recevoir des révélations personnelles pour leur édification ! La frontière se trouve là : Lorsque qu’on impose ses révélations à autrui sans en avoir l’autorité, soit on ment, soit on est infidèle, c’est l’un ou l’autre. Étant donné Alma 12 :9 et D&A 43 :5, il n’y a pas d’autres possibilité, et les saints intelligents veilleront à éviter ces révélations et ces révélateurs comme autant d’embuscades spirituelles.

Je rencontre un autre style de cette embuscade presque tous les ans à BYU. Je suis régulièrement approché par des étudiants (des deux sexes, mais la majorité sont des filles) qui me sortent l’histoire suivante : « Frère Robinson, mon petit ami (ou ma petite amie selon le cas) est un missionnaire de retour au foyer, et il a eu une révélation comme quoi il est censé m’épouser. Je ne suis pas particulièrement amoureux de cette personne, mais dois-je l’épouser ? Je ne veux pas désobéir au Seigneur. » Dans ces cas, je réponds : « Bon, quel est l’ordre de la prêtrise  ? Qui a le droit de recevoir des révélations pour vous ? Les apôtres et les prophètes dans l’accomplissement fidèle de leurs responsabilités. Votre président de pieu, votre évêque, vos parents, et votre mari (de même dans l’accomplissement fidèle de leurs responsabilités). Finalement, et le plus important : vous. Vous avez le droit de recevoir des révélations pour vous-même, et vous avez le devoir de recevoir la confirmation pour vous-même de toute révélation reçue pour vous par ceux qui se trouvent dans la ligne d’autorité de la prêtrise. Est-ce que cette personne, ce missionnaire de retour avec cette révélation, se trouve-t-elle dans la ligne d’autorité de la prêtrise ? Non, évidemment pas, bien qu’elle le veuille désespérément. Le Seigneur vous a-t-il confirmé cette révélation personnellement ? Non, évidemment. Alors fuyez le plus loin possible de cette personne et aussi rapidement que vous le pouvez. C’est quelqu’un qui essaie d’utiliser votre religion pour vous manipuler et vous contrôler. Fuyez maintenant avant de tomber dans le piège ! »
 
Maintenant il se peut que de temps en temps le Seigneur révèle à quelqu’un qui il va épouser. Ma grand’mère, Willmia Brown, par exemple, entendit une fois une voix claire désigner Joseph E. Robinson comme son futur époux et c’est ce qui arriva. Mais dans ces cas on gardera la révélation en confidence jusqu’à ce que l’autre partie en soit arrivée à la même conclusion. Ce genre de discernement sacré ne doit pas être utilisé comme un pied-de-biche pour tenter de forcer autrui à soumission. Si cette révélation est authentique, cela arrivera tout seul.
 
Révélation par la rumeur ?
 
Pour moi, l’observation la plus mémorable de Delbert L. Stapley, des Douze, et ma citation favorite venant des autorités générales, est celle-ci : « Les saints sont des poires. » En réalité, il y en a beaucoup qui sont des poires, et un domaine dans lequel c’est tout à fait vrai c’est leur acceptation stupide des rumeurs. Dieu ne gouverne pas son Église par la rumeur, et cependant, certains saints sont tout excités en entendant des rumeurs émises en dehors des circuits appropriés de la révélation.

Une fois j’ai eu un étudiant qui est venu me voir pour me demander si lui et sa femme devaient abandonner leurs études pour vendre leur voiture afin d’avoir leur année de réserves à la prochaine conférence d’avril. « Sans doute pas », lui répondis-je. « Avoir un an de réserve est un but important, mais pour l’instant, je penserais qu’il est plus important pour vous de faire tous les sacrifices nécessaires pour que vous finissiez vos études. Pourquoi voudriez-vous abandonner ? » Il me répondit : « Eh bien, c’est à cause de la prophétie, me dit-il, vous savez, celle où le président Benson a dit à sa famille de s’assurer d’avoir sa réserve de nourriture pour avril parce que « des évènements importants doivent arriver ». Plusieurs personnes dans ma paroisse ont parlé de cette prophétie à la Sainte-Cène depuis quinze jours, et mon épouse et moi somme inquiets car la seule façon pour nous d’être prêts pour avril c’est de vendre notre voiture et d’abandonner nos études. »
 
« Ah, mon jeune ami », lui dis-je, réalisant finalement ce qui s’était passé, « vous avez été victime de la bande ‘chair de poule’. Ce sont les inventeurs et les pourvoyeurs de la ‘religion tabloïde’ dans l’Église, ils jugent la vérité d’une idée à l’aune de son sensationnalisme, de son côté excitant ou palpitant, vous savez le genre : ‘les extra-terrestres ont kidnappé le président Hunter’. L’Évangile véritable est beaucoup trop ennuyeux pour le gang ‘chair de poule’, alors ils inventent constamment quelque chose et ils en diffusent une version ‘améliorée’ : l’Évangile ‘tabloïde’. Vous avez besoin de vous faire vacciner contre ça en apprenant un principe fondamental : Le Seigneur ne gouverne pas son Église par la rumeur. Il n’existe pas de prophétie telle que celle qu’on vous a rapportée, ou pour parler plus précisément : il en existe des douzaines du même acabit : toutes du vent. Apprenez l’ordre de la prêtrise, mon ami, et sachez que la rumeur n’y a pas sa place. Alors vous serez assuré contre les futures déceptions de la bande ‘chair de poule’ et de leur Évangile tabloïde. »
 
Ces dernières années, j’ai repéré des douzaines de rumeurs promouvant la foi fréquemment répétées par la bande « chair de poule ». Celles que j’entends souvent sont du style : « Le prophète dans l’ascenseur », « Le Néphite dans la Mesa », et « la soirée familiale particulière de la famille Benson».

« Le prophète dans l’ascenseur » se présente sous différentes formes. Mais grosso modo quelqu’un est censé se heurter au président de l’Église en entrant dans un ascenseur, lequel l’avertit explicitement de faire un an de réserves, de faire sa généalogie, d’avoir une recommandation pour le temple, ou quelque chose comme ça, parce que la Seconde Venue, l’appel pour le retour au Missouri, une attaque soviétique nucléaire, ou un truc de ce genre, va arriver en avril ou en octobre à la prochaine conférence générale. Cette histoire est apparue tout d’abord dans les années 1950 et a été redite sous une forme ou une autre à propos des présidents McKay, Smith, Lee, Kimball, Benson et Hunter. Je suis sûr qu’une version révisée pour le président Hinckley sera en circulation au moment où ce livre sortira de presse.

« Le Néphite dans la Mesa » est aussi en circulation depuis au moins trente ans : On raconte que des membres pratiquants vont en voiture à la conférence et sont arrêtés par un homme en noir. L’étranger les avertit qu’il leur faut remplir un but spirituel quelconque (réserve, généalogie, etc.) avant une certaine date parce qu’un truc apocalyptique va bientôt survenir. L’homme en noir demande alors qu’on le dépose, et alors que la voiture s’éloigne, celui-ci disparaît de leur vue. Il est évident qu’il est sous-entendu qu'il s’agissait là d’un des Trois Néphites. Ce qui est moins évident, c’est pour quelle raison ces instructions destinées à l’ensemble de l’Église n’ont pas été données par les circuits appropriés.
 
J’ai le privilège de compter parmi mes amis et collègues, frère Reed Benson. Après avoir identifié environ une douzaine de rumeurs attribuées à Reed ou à sa famille pendant plusieurs semaines, je m’avisais de lui demander combien il en recevait en réalité. « Oh, environ soixante par semaine, me dit-il. Quelquefois j’aimerais qu’on me laisse parler à une conférence rien que pour dire aux saints une bonne fois pour toutes que la famille Benson n’a pas eu de révélations particulières, de prophéties spéciales, de visites extraordinaires, de conseils de familles exceptionnels, d’ordinations personnelles ou de renseignements privés. L’Évangile est le même pour nous comme pour tout le monde. » Une fois encore, « Le Seigneur ne gouverne pas son peuple au moyen de rumeurs ».
 
D’autres sources fertiles suscitant les rumeurs sont « la bénédiction patriarcale de l’ami d’un ami » ou les histoires de missionnaires soi-disant de retour de mission. Les bénédictions patriarcales font partie des révélations individuelles, c’est pourquoi, s’il existe des renseignements particuliers dans une bénédiction, le commandement se trouvant dans Alma 12 :9 de les garder sacrés et privés s’applique particulièrement. S’il ne s’agit pas de ma bénédiction patriarcale, toute information s’y trouvant ne peut être considérée comme me concernant, parce que si cette personne est digne, la bénédiction ne doit pas être rendue publique. D’un autre côté, s’il s’agit de ma bénédiction patriarcale, alors les renseignements s’y trouvant me concerne et ne sont pour personne d’autre. Beaucoup d’histoires sur les bénédictions patriarcales d’autrui, et la plupart des histoires de missionnaires sont devenues des « légendes urbaines » dans l’Église et en plus sont fausses. Il n’y a pas grand-chose dans le magasin du « gang chair de poule » qui puisse édifier, et il convient que les saints qui ne sont pas tombés de la dernière pluie ne tiennent pas compte de tout ceci.
 
Le troupeau entend ma voix
 
Dans la vie prémortelle, nous avons tous rejeté Satan et ses plans alternatifs. Maintenant nous devons refaire de même. Si nous devons endurer, il nous appartient d’éviter les groupes religieux « d’intérêts particuliers » autant que les influences impies. Tout ce qui est étiqueté LDS ou qui est religieux n’est pas forcément bon. Il y a des loups déguisés en brebis. Malheureusement, les loups ont appris que les saints sont prêts à acheter ou à croire n’importe quoi, pourvu qu’une grande étiquette LDS soit clairement collée dessus. Les loups essaient d’imiter la voix du berger, mais son troupeau écoute seulement sa voix et le suit lui-seul (Jean 10 :27).
 
Actuellement, il existe de nombreuses autres voix, « des voix alternatives », essayant d’attirer l’attention des saints. Il y a des voix sociales, des voix intellectuelles, des voix politiques, et d’autres encore. Par exemple, j’ai un ami qui a des soucis. Il est très engagé politiquement. Il est très concerné par « un nouvel ordre mondial » et aussi par la fin du monde. Il voit des conspirations sataniques partout, dans les évènements mondiaux, dans les écoles, dans le gouvernement, dans la société, et il ne comprend pas pourquoi l’Église n’est pas aussi impliquée et concernée que lui par ces menaces. Il passe beaucoup de temps à essayer « d’avertir » les membres de l’Église qui, pour lui, sont endormis, et il se demande en privé si les dirigeants de l’Église ne sont pas, eux aussi, endormis. En gros, il fonctionne comme ça dans sa tête :

« Mon Église et mon point de vue politique me disent deux choses différentes, et je sais que mon point de vue politique est bon, donc il doit y avoir quelque chose de faux dans l’Église ». Il ne veut pas considérer l’autre possibilité logique : que l’Église doit être vraie et qu’il ait besoin de remettre en cause son point de vue politique. Il ne reconnaît pas non plus son apostasie implicite, le renversement évident de ses priorités et de sa loyauté dans son esprit. Il est en danger de placer le Christ après son point de vue politique, et de divorcer d’avec son premier amour. Il y a souvent du vrai dans ce qu’il dit, mais ce n’est pas le problème. Le problème c’est qu’il prête l’oreille à d’autres voix et qu’il a transféré sa loyauté suprême vers des programmes différents de ceux du Seigneur. Tragiquement, son point de vue politique est devenu l’idole devant laquelle tout dans sa vie doit se courber, même son engagement envers l’Église et ses alliances envers Dieu.

Ce concept ne devrait pas être trop difficile à saisir pour la plupart d’entre nous : L’Église est vraie. C’est aussi simple que ça. Tout n’est peut-être pas bien en Sion, mais elle n’en reste pas moins vraie. Elle n’est pas anémique, elle n’a pas besoin de suppléments. Elle n’est pas vraie si, et elle n’est pas vraie mais, et elle n’est pas vraie sauf. Elle est simplement vraie ! De plus l’Église n’est pas hors course ; elle ne va pas trop lentement, ni trop vite. Ses dirigeants ne sont pas endormis, et ils n’ont pas besoin d’une aide non sollicitée de la part des passagers pour guider le navire. L’Église est vraie ! Savoir cela c’est avoir un témoignage de la véracité de l’Évangile rétablie, et ceux qui soutiennent autre chose sont des trompeurs ou des égarés qui ont perdu la foi, échangé leur loyauté et modifié l’orientation de leur boussole, ont divorcé d’avec le Christ par amour d’une idole, et n’ont pas persévéré jusqu’à la fin.

Je sais que je vais me faire critiquer pour ce qui précède, car beaucoup de membres fidèles, moi y compris, sont politiquement conservateurs. La question politique n’est pas en cause ici ; ce sont les priorités. Si l’Église ne prend pas un chemin particulier, il y a deux possibilités : (1) L’Église est fausse, ou (2) le chemin est faux. Choisissez 2.
 
Plus ou moins
 
On peut se protéger du danger de se tromper en suivant le principe du « plus ou moins » : « La vérité, c’est la connaissance des choses telles qu’elles sont, telles qu’elles étaient, et telles qu’elles doivent être, et tout ce qui est plus ou moins que ceci est l’esprit du Malin qui était menteur dés le commencement. » (D&A 93 :24-25 ; voir aussi 3 Néphi 11 :40, 18 :13 ; D&A 10 :68 ; 98 :7)
 
Dans le contexte de l’Évangile, la vérité c’est ce que Dieu a réellement dit, les instructions qu’Il donne réellement, ce qu’Il exige de nous réellement, ni plus ni moins. Sur un chemin droit et resserré, il importe peut que l’on tombe à droite ou a gauche, de toute façons on a des problèmes. Il importe peu d’être conservateur ou libéral, si nous croyons trop ou pas assez. Si Satan ne peut nous faire abandonner les principes de l’Évangile, il est satisfait si nous les vivons comme des obsédés ou des fanatiques. L’un est moins que la volonté du Seigneur, l’autre est plus. Les deux façons d’agir montrent que nous sommes sur le territoire du malin.
 
Je connais des gens qui ne veulent pas manger de pain blanc, du sucre raffiné, ou du chocolat parce qu’ils croient que ces choses sont en contradiction avec la Parole de sagesse. Ils sont obsédés par les vitamines, les herbes, les compléments alimentaires. Il se peut qu’ils n’aient pas tort dans certains cas, il peuvent même avoir raison, sauf qu’ils enseignent ces choses comme étant la volonté du Seigneur et comme faisant partie de la Parole de sagesse. Leur erreur consiste à « rajouter » à ce qu’a effectivement révélé le Seigneur, des choses qu’ils auraient voulu que le Seigneur révèle, ajoutant eux-mêmes à la Parole de sagesse pour ensuite dire qu’il s’agit de la parole de Dieu. Satan aime le fanatique autant que le rebelle, car ils sont tous les deux hors du chemin et donc en son pouvoir. Ce sont des fanatiques ! On ne doit pas supposer au motif que quelqu’un est un saint des derniers jours et qu’il montre un grand zèle et qu’il a une recommandation pour le temple, que cette personne est correcte ou même crédible. Le canon des Écritures digne de confiance, c’est ce que le Seigneur a effectivement dit aux apôtres et aux prophètes de l’Église, ou ce qu’il a effectivement dit en privé à une personne pour son bénéfice (et à nul autre).
 
Nous avons dans l’Église des gens qui sont gênés que Dieu ait dit autant de choses, qui n’apprécient pas certaines de ses paroles, et qui essaient de discréditer les Autorités générales pour mettre les révélations et les commandements entre parenthèses. Nous en avons d’autres qui sont gênés que Dieu n’en ai pas dit assez concernant leurs marottes, et qui s’emploient à prôner des programmes et des principes que le Seigneur n’a jamais révélés. L’un retire les paroles de la bouche de Dieu, l’autre les y enfourne. Chacun prêche un « nouvel Évangile amélioré » inspiré par ce malin qui était menteur dés le commencement, la première voix alternative.
 
Cela exige de la discipline pour accepter et enseigner comme Évangile exactement ce que le Seigneur a révélé, ni plus ni moins, et d’éviter de réviser celui-ci pour l’adapter à nos goûts. Mais ceux qui le font connaîtront les choses comme elles sont effectivement (Jacob 4 :13) et éviteront la tromperie.
 
Menteur dès le commencement
 
Satan ment, c’est dans sa nature. Comme Dieu est vérité, et que la vérité est la connaissance des choses telles qu’elles sont effectivement, Satan est un menteur qui enseigne les choses exactement telles qu’elles ne sont pas, mais telles qu’elles semblent être et souvent comme nous voulons qu’elles soient. Satan est le dieu du plausible, le dieu des apparences, le dieu des « ressemblances » et des choses qui « semblent être ». Il est le dieu des choses telles que nous les voulons et sous son influence il nous permet de créer l’univers que nous voulons, car Satan règne en tant que dieu sur tous les faux univers ainsi créés.

Dans le monde de Satan, toute philosophie peut être vraie, tout péché peut être vertu, toute opinion peut être juste. L’univers peut être tel que nous le souhaitons puisque Satan nous offre le moyen d’obtenir ce que nous voulons. En tant que mortels, nous sommes sensibles aux imitations de ses mondes et de ses réalités plausibles. Évidemment, le coût en est la vérité, car la vérité c’est la connaissance des choses telles qu’elles sont réellement, et non des choses telles que nous voulons qu’elles soient. Satan veut nous créer un univers pour satisfaire nos désirs, mais seul Dieu peut nous montrer la façon d’adapter nos désirs à l’univers, à l’univers réel, le seul qui ne changera pas pour nous plaire. Satan propose une fausse « vérité » pour légitimer, ou pour avoir la ressemblance, de tout nos désirs ; alors que Dieu voudrait changer nos désirs pour accepter la simple et légitime vérité.
 
Satan ment. C’est un principe très simple, mais peu s’en souviennent. À la place nous acceptons aveuglément la vérité des rumeurs, des reportages des médias, des anecdotes personnelles, et ainsi de suite qui donne une mauvaise image de l’Église ou de ses dirigeants. Lors d’un jugement futur, beaucoup de saints trompés diront lorsqu’ils apprendront enfin la vérité : « Oh, vraiment ? Eh bien, j’aurais bien voulu le savoir. Vous voyez, les renseignements que j’avais précisaient que...» et ils essaieront de blâmer le fait qu’ils auront lâché la barre de fer à cause de mauvaises informations, plutôt que se blâmer eux-mêmes pour avoir prêté l’oreille aux voix alternatives. Mais malheureusement, nous serons tenus pour responsables de nous être laissés trompés. Après tout, nous avons été clairement prévenus : « Satan mentira si habilement, que même les élus seront en danger ».

Nous avons les enseignements des apôtres et des prophètes. Nous avons les conseils d’autres dirigeants de la prêtrise. Nous avons les Écritures. Nous avons le don du Saint-Esprit. Nous avons la prière et la révélation personnelle. Nous avons reçu tout ce qui nous est utile pour éviter la séduction dans la doctrine, aussi si nous sommes trompés dans ce domaine, c’est malheureux, mais en général, c’est notre faute. D’un autre côté, ceux qui utilisent correctement toutes ces ressources et dont les doigts ne peuvent être décrochés de la barre de fer, ne seront pas trompés : « Et quiconque garde précieusement ma parole ne sera pas séduit » (Joseph Smith-Matthieu 1 :37)
 
La difficulté ce n’est pas tant de croire que Satan ment, c’est assez facile. La difficulté pour beaucoup de saints semble être de croire que Satan puisse mentir suffisamment habilement pour les tromper au point qu’ils en arriveraient à lâcher la barre de fer. (« Moi, séduit ? Allons, soyons sérieux ! L’élu de base, peut-être, mais moi ? Jamais ! Vous voyez, je suis... eh bien, je suis un cas à part »). Ils se croient « à part », particulièrement intelligents, doués ou intuitifs, ils insistent sur leur capacité à détecter la vérité par eux-mêmes, et c’est à ce moment-là qu’ils sont perdus. Car Satan ment et il est vraiment très bon à ce jeu. Certains saints sont particulièrement vulnérables aux mensonges venant des savants, d’autres le sont plus de la part des reporters, et d’autres encore semblent plus vulnérables aux mensonges dits par les amis ou les collègues. Il est tragique qu’à chaque nouveau mensonge des saints soient bernés et lâchent la barre de fer. Ils n’endurent pas jusqu’à la fin.
 
Satan est particulièrement habile pour mentir. Il calomnie les saints, et les calomniateurs sont crédibles et sont crus. En plus du titre que lui donne les Écritures comme « menteur dés le commencement » (D&A 93 :25), il en est un autre qui est « accusateur de nos frères » (Apoc. 12 :10). Satan est l’archétype du procureur ou de l’avocat général pour l’accusation. C’est un accusateur, un procureur, il ne défend jamais. Satan est un inquisiteur, il trouve la faute, et là où il n’y a pas faute, il crée astucieusement son apparence. Voilà ce qu’il est, ce qu’il fait, sa nature essentielle consiste à mentir et à accuser, et ses accusations mensongères apparaîtront souvent correctes à la plupart des observateurs honnêtes et objectifs. Il accusa Jésus de blasphème et de trahison et réussit à le faire croire aux gens. Il accusa faussement l’Oint du Seigneur et le fit croire. Nous ne devons pas être surpris de voir les Frères d’aujourd’hui, les oints du Seigneur dans l’Église moderne, mis en cause par de fausses accusations par les médias du monde. C’est ce que fait Satan, et il l’a toujours fait dés le commencement.
 
Le Sauveur a fait une promesse a ceux qui le servent : « Si le monde vous hait, sachez qu’il m’a haït avant vous. Si vous étiez du monde, le monde aimerait ce qui est à lui, mais parce que vous n’êtes pas du monde, et que je vous ai choisis du milieu du monde, à cause de cela le monde vous hait ». (Jean 15 :18-19).
 
Il arrive que les saints des derniers jours soient troublés par cette Écriture. Nous estimons que parce nous sommes « bons », parce que nous sommes « religieux », ou parce que nous recherchons la vérité, le monde doit nous admirer, et nous nous attendons à ce qu’il le fasse. Nous sommes souvent surpris de voir que nous sommes méprisés par le monde proportionnellement à notre foi véritable en Dieu et à nos tentatives de garder ses commandements. Nous oublions de quel monde il s’agit (au moins tant que son juste propriétaire n’est pas encore revenu pour le réclamer). Nous oublions qui, pour la plus grande partie, tire actuellement les ficelles et contrôle la situation ici-bas (2 Corinthiens 4 :4).
 
Lorsque les charges et les accusations s’abattent sur l’Église, lorsque les Frères sont accusés, lorsque le monde est unanime dans sa condamnation, alors les fidèles doivent sentir la présence du soufre et être prudents. Il est évident que de vrais scandales peuvent surgir dans l’Église de temps en temps, la conduite de Judas fut certainement un scandale, mais en général ce ne sont que des mensonges. Étant données la nature et la fonction de Satan et l’histoire de ce monde passé à son service, lorsque les charges et les accusations s’abattent sur l’Église et ses dirigeants, les fils et les filles du royaume doivent accorder, au moins le bénéfice du doute, à leur alliance avec le Christ dans l’Évangile et certainement le bénéfice de nombreux doutes. Après tout, pourquoi les affirmations d’un savant, d’un reporter, ou d’un ancien membre seraient-elles plus fiables à mes yeux que les affirmations solennelles du Saint-Esprit répondant à de ferventes prières ?
 
Résister à la rancune
 
Lopposition externe du monde envers les saints s’associe à l’opposition interne qui souvent n’est pas reconnue pour ce qu’elle est. L’homme charnel qui est en nous méprise notre façon d’agir par la foi. C’est un affront et une abomination pour lui. Le moi charnel se révolte et enrage lorsqu’on lui suggère qu’il est moralement aveugle et a besoin d’un guide, ou qu’il ne doit pas assujettir, mais être assujetti. Les Écritures nous disent que l’homme naturel est l’ennemi de Dieu (Mosiah 3 :19). Certains parmi nous ne se rendent pas pleinement compte que le baptême n’a pas totalement réduit cet ennemi. Le moi naturel, l’homme charnel ou la femme, qui réside encore en nous fait partie de notre épreuve mortelle et vu sa façon d’opérer il est toujours l’ennemi de Dieu. Malheureusement, beaucoup ne reconnaissent pas cet ennemi domestique, cet être rusé qui réside en notre sein prêt à trahir, qui répond avec une irritation immédiate et irrationnelle, avec condescendance ou hostilité à chaque fois que l’on évoque la question de Sion.
 
Ainsi, je décèle ces petites trahisons chez certains de mes étudiants de l’Université Brigham Young qui ont l’habitude de parler de leur université ou de l’Utah sur un ton moqueur ou avec condescendance. Qu’ils viennent de villes ou vous ne pouvez circuler en sécurité dans les rues la nuit, de collèges dont les valeurs morales sont du niveau de celles d’une série télé, ou de zones rurales qui sont des déserts intellectuels et culturels, certains montrent quand même ce mépris moqueur pour la « vallée heureuse » et pour BYU. Pourquoi ? Parce qu’à un certain niveau de conscience, ils associent ces choses avec l’Église et le royaume de Dieu, le moi qui n’est pas encore complétement vaincu en eux est l’ennemi de Dieu. Régulièrement, je vois même des membres fidèles se mettre en colère et montrer de l’hostilité ou du mépris et de l’énervement à l’idée qu’ils pourraient s’abonner aux magazines de l’Église ou soutenir financièrement le système d’éducation de l’Église ou lire « un livre de l’Église ». Les gens se disent que ce ressentiment inné envers la culture de l’Église est rationnel, mais il ne l’est jamais. Il est naturel, et nous reconnaissons rarement notre ressentiment pour ce qu’il est : L’homme naturel se met en embuscade en notre sein pour tirer sur la cause de Sion.
 
De nombreux saints autrement fidèles qui essaient de suivre le Christ dans la plupart des cas, se permettent néanmoins de montrer le ressentiment et l’irritation de cette agressivité charnelle envers certains aspects du royaume du Christ. Dans toutes les paroisses on trouve des gens qui réagissent agressivement, mais qui ne sont ni pécheurs ni méchants ni même « non pratiquants », mais dont le moi charnel ne supporte pas d’être assujetti à l’Esprit, aussi l’irritation et le ressentiment deviennent leurs réponses normales et habituelles aux programmes et aux autorités de l’Église. Leur moi charnel n’est pas assez fort pour les retenir en Égypte, mais il sabote les chariots sur la route de Canaan. Si nous sommes tenus de servir Dieu de tout notre cœur, de tout notre pouvoir, de toute notre pensée, et toute notre force pour édifier le royaume, pouvons-nous de bonne foi, résister, avoir du ressentiment ou attaquer une partie de ce royaume ?
 
Lobjectif des programmes de l’Église est de toujours perfectionner les saints. Pour autant, il n’y arrive pas complétement. Cela signifie que l’Église institutionnelle et ses membres essaient de faire quelque chose (atteindre la perfection) que ces programmes ne font pas. Le moi charnel et d’autres critiques aiment à interpréter cet échec comme étant de l’hypocrisie. « Hypocrites, disent-ils, vous vous considérez ‘meilleurs’, vous essayez d’être tellement bons, mais vous n’êtes que des humains comme nous autres ». Mais l’hypocrisie c’est prétendre posséder certaines valeurs qu’en fait nous n’essayons pas de vivre, il n’y a aucune prétention quant aux valeurs et aux buts que nous visons, ce ne sont que nos aspirations sincères. De plus, la faiblesse n’est pas la même chose que l’hypocrisie et ceux qui cherchent sincèrement la perfection et n’y arrivent pas ne sont pas plus hypocrites que le sauteur à la perche qui n’arrivent pas à passer au-dessus de la barre. Cette façon de voir est une des ruses dégoûtantes de Satan la plus largement acceptée. Je vois des gens qui ne remarquent jamais la corruption de Babylone et bavent littéralement de colère sur l’imperfection et « l’hypocrisie » des programmes de l’Église. Mais pourquoi ceux qui aspirent à la justice et n’y arrivent pas devraient-ils être plus méprisés que ceux qui aspirent au mal et réussissent dans le mal ? Parce que l’homme naturel est l’ennemi de Dieu, et l’homme naturel méprise toutes tentatives de vivre par l’Esprit.
 
Maintenant, qu’est-ce qui vous agace dans l’Église, dans ses programmes ou son organisation ? Pensez-y. Devons-nous avoir deux façons de voir ou devons-nous être borgnes ? Allons nous finalement nous décider à quelle équipe nous appartenons et assumer les conséquences ? Même après nous être convertis à l’Évangile, nous devons faire attention aux petites trahisons envers la cause de Sion dont l’origine se trouve enracinée dans l’entêtement du moi charnel à vouloir maîtriser l’Esprit.
 
Lorsque l’homme naturel acquiert plus d’influence sur l’homme spirituel, il ne se contente plus d’attaques contre les programmes en périphérie, mais il attaque les éléments centraux de l’Église ou même directement les Autorités générales elles-mêmes. Dans ces cas, le moi charnel ne montre plus simplement de l’entêtement, il devient la partie dominante de la personne et s’oppose ouvertement à l’Esprit. C’est la dernière étape avant la perte totale de l’Esprit et de l’apostasie complète.
 
Je ne dis pas que les saints fidèles ne peuvent pas critiquer de façon constructive les institutions de l’Église. Mais nous devons reconnaître et neutraliser le ressentiment qui nait de notre moi charnel. De nombreux saints ont deux façons de voir dans ce domaine. Ils se croient loyaux envers le royaume dans son ensemble tout en étant déloyaux envers les parties qui le constituent.
 
Deux genres d’hypocrisies
 
Le mot grec « hypokritếs » traduit généralement par « hypocrite » signifie en fait « acteur» ou « joueur ». Un hypocrite au sens classique est quelqu’un qui prétend soutenir des croyances ou des principes qu’il n’a pas adoptés ou qu’il ne vit pas. On rencontre dans l’Église plusieurs types de vrais hypocrites ; certains sont vicieux d’autres ne le sont pas. Il existe au moins deux types d’hypocrites qui constituent un vrai danger pour les saints fidèles quiveulent persévérer : les « oxymormons » et les joueurs.
 
Type 1 : Les « oxymormons ». Tout le monde sait ce qu’est un oxymore : C’est une figure de style qui est composée de partie se contredisant mutuellement, comme « grand nain », « innocence criminelle » ou « vrais mensonges ».
 
Les « oxymormons » sont des membres de l’Église dont la théologie se présente de la même façon. Il est fréquent que leurs sentiments profonds et ceux qu’ils affichent ne sont pas les mêmes, et ils en arrivent à soutenir des propositions mutuellement contradictoires. Par exemple, si on suggère que nous devons être fidèles selon une « nouvelle » façon tout en rejetant les propositions fondamentales de l’Évangile, alors cette « fidélité infidèle » se contredit elle-même. Le désir d’être infidèle associé au désir de ne pas paraître infidèle fait qu’on en arrive à dire des absurdités. On ne peut définir l’adultère comme une « nouvelle » forme de vertu, ou la violence comme une « nouvelle » façon de présider au foyer, ou douter comme une nouvelle forme de croyance. De même les ténèbres ne sont pas une « nouvelle » forme de lumière, ni la haine une « nouvelle » façon d’aimer. Ces affirmations confinent à la sottise et au non sens. Mais il n’empêche que nous avons dans l’Église des gens qui voudraient devenir une « nouvelle race » de saints des derniers jours en niant les principes de base de la foi : à savoir que Jésus est le Christ, que l’Église est vraie, que Joseph Smith est un prophète, que le Livre de Mormon est un livre correct. Ce sont des « oxymormons », ils ne veulent pas quitter l’Église. Ils veulent la changer. Ils veulent que les saints soient fidèles d’une « nouvelle » façon, en rejetant la foi traditionnelle. Après tout, si on décide que tous les points cardinaux s’appellent « nord », on ne pourra pas être accusé d’avoir quitté le cap quelque soit la direction prise ! C’est une stratégie propre à celui qui était menteur dés le commencement. Mais cette attitude ne relève pas d’une « nouvelle mode , et ce n’est pas endurer jusqu’à la fin. C’est de l’infidélité.
 
Type 2 : Le joueur de rôle. L’autre type d’hypocrite que l’on rencontre de temps en temps dans l’Église est une variété plus passive que j’appelle « jeu de rôle ». La plupart des joueurs de rôle ne sont pas vicieux, ils veulent juste rester dans l’Église même s’ils n’y croient pas. Mais même ces éventuels hypocrites font plus de mal qu’ils ne le pensent. Ainsi, il y a plusieurs années, je rendis un fort témoignage dans une de mes classes qu’en vivant l’Évangile on pouvait transformer le foyer en un petit coin de paradis sur terre. Après la classe une étudiante attendit que tous soient sortis pour me demander tranquillement : « est-ce que vous nous racontez des histoires, ou dites-vous la vérité ? Une famille peut-elle réellement être ce que vous dites, ou est-ce un conte de fée ? » Je lui demandais pourquoi elle me posait ce genre de question et me répondit : « Tous les membres de ma familles sont pratiquants dans l’Église, nous sommes ‘la famille mormone idéale’. Toute ma vie, j’ai vu mes parents créer et maintenir cette apparence de fidélité. Maman est ‘la femme indispensable’ dans notre paroisse, et papa sert au grand conseil du pieu, mais tout est mensonge ; c’est juste un rôle qu’il joue jusqu’à ce qu’ils rentrent à la maison. Mon frère est moi nous appelons cela ‘jouer à l’Église’. Extérieurement, nous paraissons être ‘une famille mormone idéale’, mais intérieurement c’est vide. Nous ne faisons pas la prière en famille ni les soirées familiales. Mes parents ne s’aiment pas et ne se respectent pas et notre foyer n’est pas le paradis. J’ai hâte de m’en aller pour fuir les disputes et l’hypocrisie. Pendant des années j’ai cru que toutes les familles de l’Église étaient comme la mienne et que ‘vivre l’Évangile’ signifiait pour tout le monde ce que je pensais : juste « jouer à l’Église ». J’ai toujours pensé que tout le monde jouait le même rôle et créait la même illusion pour dire le même mensonge, et maintenant vous venez me dire que pour certains, il ne s’agit pas d’une illusion ni d’un mensonge ? »

À ce moment, elle se mit à pleurer. « Je donnerais n’importe quoi pour avoir la famille que vous décrivez, mais est-ce que cela peut vraiment être comme vous le dites, ou est-ce que vous nous servez toujours la même rengaine ? Je lui pris la main et je la regardai droit dans les yeux : « Je vous témoigne sur mon honneur que je vous dis la vérité. L’Évangile est vrai, et ses bénédictions sont réelles pour ceux qui le vivent. Ce n’est pas un conte de fées réconfortant, c’est la vérité. »
 
Cette jeune personne avait été grandement blessée par le jeu de rôle de ses parents, et sa capacité à croire les promesses de l’Évangile en avait été diminuée. Malheureusement, il y a beaucoup de joueurs de rôles dans l’Église, et ils blessent de la même façon ceux qui les entourent, même s’ils n’ont pas l’intention de le faire. Ils blessent autrui en enseignant par maladresse, sans paroles, mais par leur attitude et leur exemple, qu’on n’a pas besoin de prendre l’Église au sérieux, que c’est une chose que nous faisons simplement pour des raisons sociales ou d’affaires, ou parce que c’est la tradition, ou encore que c’est bon pour les enfants, ou même que nous sommes trop paresseux pour briser les habitudes de notre enfance. Souvent ces joueurs de rôle connaissent toutes les bonnes réponses et prennent les bonnes décisions, mais intérieurement, ils sont spirituellement morts. Beaucoup d’entre eux aiment à être pratiquants dans l’Église, tout comme d’autres apprécient d’être au Rotary Club ou à l’Automobile Club.
 
J’ai connu des missionnaires, des étudiants, des conjoints et des enfants qui ont été détruits par l’hypocrisie de dirigeants ou de parents qui se bornaient à « jouer à l’Église » sans vrai témoignage ni conviction. Ces victimes en arrivent à croire que l’Église n’est qu’une plaisanterie à usage interne que tout le monde finit par s’en rendre compte, mais que l’on continue à y jouer, comme avec le Père Noël ou les œufs de Pâques. Les joueurs de rôle ont un comportement faux et cet exemple leur ôte l’occasion de connaître le Saint-Esprit qui pourrait les guider.
 
Si vous avez été blessés ou déçus par des joueurs de rôle, sachez que la grande majorité des membres ne sont pas ainsi. La persévérance exige que nous gardions nos convictions envers la vérité, même si certains pensent que l’Église est une plaisanterie à usage interne. Ne laissez pas votre témoignage ou votre persévérance diminuer par ceux dont le Seigneur a dit : « Malheur aux séducteurs et aux hypocrites, car, ainsi dit le Seigneur, je les amènerai en jugement. Voici, en vérité, je vous le dis, il y a des hypocrites parmi vous, et certains ont été trompés par eux, ce qui a donné du pouvoir à l’adversaire ; mais voici, ceux-là seront ramenés ; mais les hypocrites seront démasqués et retranchés, soit dans la vie, soit dans la mort » (D&A 50 :6-8)
 
D’autres dangers : les sadomasos spirituels
 
Les masochistes spirituels, c’est un terme à moi pour désigner les personnes qui résistent à la bonne nouvelle du « joug doux et du fardeau léger » (Matthieu 11 :28-30). Ils imaginent des conditions tellement difficiles pour obtenir le salut qu’ils savent qu’ils ne pourront pas les remplir. Croire que Dieu ne peut les sauver place certaines personnes dans un état de désespoir tel qu’ils le préfèrent à la joie et ce pour des raisons charnelles et perverses. Leur souci concernant leurs péchés et leurs faiblesses tourne en général à l’obsession, et souvent ça leur donne une sorte de satisfaction charnelle (« vos problèmes et vos péchés sont ordinaires, mais les miens sont trop complexes à résoudre, même pour Dieu !»). Ces individus ont besoin de se repentir, non pas d’une quelconque transgression (au moins pas pour commencer), mais plutôt de l’indulgence malsaine qu’ils montrent envers eux-mêmes d’un côté et de leur manque de foi dans le pouvoir infini du Christ de l’autre.  
 
Les sadiques spirituels sont ceux qui veulent que les autres, particulièrement ceux qui luttent contre des problèmes ou supportent des afflictions, sachent combien le salut sera difficile pour eux. Je pense qu’ils doivent être ennuyés à l’idée que le paradis risque d’être encombré, ou peut-être que ça les gêne d’avoir à le partager avec des êtres qui leur seraient inférieurs, aussi ils essaient d’en diminuer le nombre en faisant un peu le ménage avant d’y arriver. Les masos spirituels et les sadiques agissent tous les deux selon des motifs charnels plutôt que spirituels, et les deux sont un danger pour les jeunes, les tendres et les inexpérimentés qui essaient de persévérer.
 
J’ai demandé un jour à une amie proche pourquoi elle avait quitté l’Église adolescente pour y revenir quelques années plus tard, et je découvris qu’elle avait été trompée par une sadique spirituelle. « Je me souviens que j’étais assise dans la classe des Lauréoles, me dit-elle, et l’instructrice était en train de nous dire combien nous devions être pures et bonnes pour pouvoir entrer dans le royaume céleste. Elle nous enseignait combien il était dur de se repentir si nous commettions une faute, et que même si nous nous repentions nous n’aurions jamais les mêmes bénédictions qu’avant. Évidemment, à cette époque, j’avais déjà commis ma part de fautes. Elle souligna que seul un petit nombre trouverait le chemin droit et resserré, et lorsque je regardais autour de moi dans la salle et que je vis la concurrence, avec toutes ces saintesnitouches, je sus que je n’avais aucune chance d’en faire partie. Ne jamais embrasser un garçon ? Ne jamais écouter du rock ? Ne jamais me disputer avec ma mère ? Ne jamais avoir une pensée impure ? Je sus alors que je n’avais pas la moindre chance, alors j’ai abandonné et je ne suis plus venue ». Je lui demandai alors pourquoi elle était revenue à l’Église après plus de dix ans, elle répondit : « C’est là où se trouve la lumière, et je ne pouvais plus supporter l’obscurité. Au début, tout ce que je savais c’est qu’il fallait que je quitte l’obscurité, mais plus je me rapprochais de la lumière, plus je me rendais compte que mon instructrice n’avait pas dit la vérité. Il y a de la place pour moi dans le royaume de Dieu, et je n’ai pas besoin de concourir avec les saintes-nitouches pour y arriver. Je ne concours avec personne d’autre qu’avec moimême. Je me suis repentie, j’ai déjà trouvé le chemin droit et resserré, et tant que je suis un petit peu meilleure que le mois dernier, un petit peu plus gentille, un petit peu plus aimable, un petit peu  plus  compatissante  (ou que j’essaie sincèrement de l’être (D&A 46 :9), en son nom et pour sa gloire, alors je gagnerais tout ».
 
Liniquité
 
Le troisième danger cité dans l’avertissement donné par Jésus est l’iniquité. « Et parce que l’iniquité se sera accrue, l’amour du plus grand nombre se refroidira » (Matt. 24 :12). Si Satan ne peut nous ébranler par les afflictions ou nous tromper avec des voix et des plans alternatifs, alors quelquefois, il essaie de nous acheter. Dans les derniers jours beaucoup prendront l’argent et fuiront, ils prendront le liquide, la chair ou la gloire et fuiront les obligations de l’alliance. L’épreuve finale concernant notre endurance consistera à ne pas tomber amoureux des plaisirs de ce monde. Les fidèles ne peuvent être achetés avec ces choses. Le dimanche, ils sont à l’Église, ils paient volontiers leur dîme et leurs offrandes. Ils gardent leurs appétits physiques et leurs désirs dans les limites fixées, ils sont honnêtes dans leurs transactions. Leur loyauté n’est pas diminuée par les biens matériels et les pouvoirs que Dieu leur a confiés.
 
Cependant, ne pas endurer n’est pas un péché que nous commettons une fois pour toutes. Tant que nous sommes ici-bas, nous avons toujours le choix de nous repentir de nos échecs et de recommencer. Il y a peu, un ancien étudiant est venu me voir qui avait perdu son statut de membre suite à des actes impies et répétés. Il me dit qu’il voulait rectifier sa vie. Je lui demandais s’il avait un témoignage et me dit que non, il n’en avait pas. Surpris, je lui demandais pourquoi il voulait se repentir pour retrouver son statut de membre puisqu’il n’avait pas de témoignage. Je n’oublierai jamais sa réponse : « Je ne sais pas que l’Église est vraie, mais je sais que je l’ai su, et je sais que Dieu sait que je l’ai su. L’Église n’a pas changé entre avant et maintenant, c’est moi qui ai changé. Et maintenant, je veux savoir de nouveau ce que je savais avant, et je veux me repentir pour y arriver ». Même si l’on tombe avant la fin, la repentance peut toujours susciter un nouveau départ. 
 
Les épreuves, les déceptions et l’iniquité, voilà les ennemies de la persévérance. Ceux qui peuvent supporter la douleur des épreuves, qui peuvent ignorer le nombre sans cesse grandissant des voix alternatives, qui ne sont pas déçus par les oxymormons, les joueurs de rôles, ou les sadiques spirituels, que l’on ne peut acheter avec les plaisirs impies, ceux là ne trahiront pas la confiance que le Maître a placée en eux. Ils suivront fidèlement la course tracée. Qu’importe ce qui arrivera, l’aiguille de leur boussole reviendra toujours sur le Nord. Ils persévéreront.
 
Note : Je dois à mon collègue Joseph F. McConkie le terme « bande chair de poule » (goose-pimple gang). Cette expression décrit parfaitement cette frange imbécile dans l’Église, et les saints crédules qui répètent n’importe quelle histoire à faire frissonner leur auditoire. Apparemment, leur critère pour juger de ces « histoires inspirantes » n’est pas « est-ce vrai ? », mais plutôt « est-ce que cela donne la chair de poule ? »  


CHAPITRE SIX : LE PREMIER COMMANDEMENT
 
Comme ce livre traite de la façon de suivre le Christ, on peut être surpris de ce que je n’ai pas discuté plus avant des règles et des commandements particuliers et de la façon de les respecter plus précisément. C’est peut-être dû au fait que je suis moi-même rapidement affolé lorsque je pense à l’Évangile en terme de centaines de règles, toutes exigeant mon attention immédiate. Je ne nie pas que l’on puisse vivre l’Évangile de cette façon, mais pour moi c’est trop. Je suis vite désarçonné à l’idée qu’être juste envers Dieu consiste à maîtriser de nombreuses petites choses pour ensuite les exécuter exactement de la manière adéquate, exactement au bon moment, et dans le bon ordre.
 
Mais d’un autre côté, je ne les ai pas décrites en détail parce que certains d’entre nous considèrent un peu rapidement qu’endurer jusqu’à la fin pour suivre le Christ consiste à garder des centaines de règles plutôt que de vivre quelques principes. On peut exprimer les commandements divins sous forme de règles ou de principes selon les circonstances vécues par les personnes qui reçoivent la parole. Cependant, il existe une énorme différence entre les règles et les principes. Les règles sont habituellement basées sur les principes, mais les règles sont « taillées sur mesure », à partir des principes appliqués à certaines situations particulières. À cause de leur plus grande spécificité, les règles sont plus rigides et plus inflexibles que les principes. Par nature, elles n’offrent d’autre choix que de s’y plier ou de les violer et laissent peu de marge de manœuvre. Après tout, « la règle est la règle ». Les règles sont en général constantes; elles sont les mêmes pour tous en toutes circonstances.
 
« La règle est la règle ». Comme on n’a pas besoin de comprendre la règle pour s’y plier, c’est une bonne chose pour les jeunes, ceux qui sont inexpérimentés ou immatures spirituellement (je n’utilise pas ce terme pour diminuer qui que ce soit, puisque chacun d’entre nous est spirituellement immature dans un domaine ou un autre). 
 
Les règles nous permettent de suivre automatiquement des principes supérieurs dans nombre de situations de la vie courante. Elles agissent de façon prédéterminée et presque mécanique ce qui n’exige pas beaucoup de jugement ni de discernement pour ceux qui les suivent. « La règle est la règle ». L’exemple type de la justice exercée au moyen des règles est la loi de Moïse (notamment les Dix Commandements), donnée à l’Israël immature spirituellement dans le désert.
 
Les principes, au contraire, ne sont pas rigides et inflexibles dans leur observation, et on peut souvent les adapter et les changer selon les circonstances, mais cela exige plus de maturité spirituelle et de jugement que pour respecter les règles. C’est là le grand avantage de la justice basée sur le principe par rapport à la justice basée sur les règles : pour vivre notre vie selon les règles, nous devrions définir une règle pour chaque situation, des milliards de milliards de règles plus que nous ne pourrions nous rappeler, alors que nous n’avons besoin que de quelques principes sur lesquels nous appuyer pour vivre, et ceux-ci peuvent toujours être adaptés selon les circonstances en fonction des milliards de possibilités.

Les règles, telles que la loi de Moïse, sont accomplies (et obsolètes) lorsque nous apprenons à vivre selon les principes supérieurs sur lesquels celles-ci s’appuient. C’est pourquoi les principes de l’Évangile accomplissent les règles de la loi de Moïse, qui étaient une loi composée de « commandements charnels », ou une législation réglementaire. Par exemple, dans le contexte de l’Évangile, la règle concernant l’homicide est accomplie et obsolète par le principe de l’amour, la règle concernant l’adultère par le principe de la chasteté, et ainsi de suite. Les règlements de la loi de Moïse sont bons et vrais, mais ils expriment seulement en partie les principes supérieurs de l’Évangile, et à partir du moment où l’on vit ces principes, ils sont obsolètes et inutiles.

Vivre selon les principes exige que l’on connaisse la véritable nature du Dieu que nous adorons en l’imitant et en appliquant les principes qu’il a révélés dans son Évangile. On ne peut vivre selon des principes que nous ignorons ou suivre un exemple que l’on n’a pas vu. Vivre selon des principes exige aussi que nous ayons le don du Saint-Esprit pour nous guider pour les appliquer dans notre vie. Sinon, notre esprit charnel influencerait notre interprétation des principes et déformerait nos décisions. Finalement, vivre selon les principes exige, peut-être plus que tout, le désir sincère d’obéir à Dieu. Les menteurs qui veulent être libérés des contraintes de la règle, mais qui ne veulent pas réellement obéir à Dieu à un niveau supérieur peuvent ne pas être immédiatement détectés, et c’est pourquoi il arrive souvent qu’ils essaient d’utiliser le principe consistant à « vivre selon les principes » comme excuse pour briser les règles. Sans désir sincère d’obéir à Dieu, vivre selon les principes devient rapidement une excuse pour pécher. Voilà trois raisons pour lesquelles seuls ceux qui sont entrés dans l’alliance et qui la gardent peuvent vivre selon les principes.

Lorsqu’on a demandé à Joseph Smith comment il pouvait gouverner tant de saints des derniers jours, il répondit : « Je leur enseigne de bons principes et ils se gouvernent eux-mêmes ». C’est à dire, qu’il leur avait enseigné les principes de l’Évangile, ensuite motivés par le désir d’obéir à Dieu et avec l’aide du Saint-Esprit, les saints décidèrent d’appliquer ces principes dans leur vie. Mais c’est à ce momentlà qu’ils l’ont véritablement mis en action et qu’ils se sont gouvernés eux-mêmes selon ses principes (à BYU on entend souvent dire des étudiants qui se rebellent contre les principes : « Enseignez-nous les principes et laissez-nous nous gouverner »...)
 
Il y a beaucoup à dire sur la justice basée sur les règles. Beaucoup estiment que pendant un temps, c’est la façon la plus aisée de progresser vers une vie chrétienne. Cela exige beaucoup de travail pour apprendre tous les détails exigés par Dieu, et cela peut être un programme d’entraînement efficace pour apprendre à garder tous les commandements (Galates 3 :24). Les centaines d’éléments séparés qui se présentent à nous sont vrais et importants en eux-mêmes. Et chacun d’entre nous doit s’évaluer de temps en temps selon une perspective « basée sur la règle » simplement pour voir comment il gére les détails et pour évaluer ses progrès.
 
Cependant, personnellement, je ne souscris pas à cette approche livresque pour vivre l’Évangile quotidiennement, non parce que c’est mauvais ou faux, mais parce qu’il existe une meilleure voie pour suivre le Christ. Non seulement les principes supérieurs sont meilleurs que les règles étroites ; mais il existe encore un principe particulier qui contient en lui-même tous les autres principes. Jacques l’appelle « la voie royale » (1 Cor. 12 :31). Pour moi c’est la différence entre essayer de suivre des milliers de règles distinctes, comme si on voulait contrôler des milliers de billes qui rouleraient sur une table, et tenter d’appliquer un principe de base, qui serait de placer toutes les billes dans un sac que l’on pourrait manipuler comme un seul objet. Dans un sac toutes les billes sont toujours là, mais on se contente de surveiller un objet au lieu de milliers. De la même façon, un principe contient des milliers de règles.
 
Il existe un principe simple, qui inclut toutes les règles, comme les billes dans un sac, qui fait qu’en vivant ce principe, on les applique automatiquement. Et de la même façon qu’il y a une limite au nombre de pages que je peux inclure dans ce livre, et une limite au nombre de règles que nous devons apprendre par cœur ou s’inquiéter en une fois, il semblerait sage et économique, tant spirituellement que matériellement de se focaliser sur le seul principe plutôt que sur les milliers de règles individuelles. Ce principe simple est la loi de l’amour, et si nous l’appliquons correctement, et le vivons, alors nous vivrons aussi automatiquement toutes les règles. Ou tout au moins Dieu jugera qu’il en est ainsi (1 Pierre 4 :8 ; Rom. 4 :7-8).
 
Lapôtre Paul a clairement dit que la loi de l’amour comprend toutes les autres lois : voir Romains 13 :8-10. Maintenant, n’allez pas me faire dire que je suis opposé à la justice basée sur la règle (agir sur les parties du tout) ou contre le fait d’insister sur un ensemble de petites choses quand on peut le faire. Mais si on a besoin d’un seul objectif pour suivre le Christ, alors il faut suivre le principe de l’amour.
 
Le Sauveur lui-même a clairement affirmé dans le Nouveau Testament et dans le Livre de Mormon qu’il existe une chose, un principe, qui, plus qu’aucun autre, fait de nous de vrais enfants de notre Père céleste : « Aimez vos ennemis... afin que vous soyez enfants de votre Père qui est dans les cieux ». Voulez-vous être un vrai fils de Dieu ? Alors, aimez vos ennemis (et je pense vos amis aussi), car Dieu aime et bénit tous ses enfants. Voulez-vous être comme Dieu ? Alors, cultivez le seul trait qui caractérise Dieu par-dessus tous les autres : aimez tous vos frères et sœurs comme il aime tous ses enfants. 
 
En fait, dans l’Évangile de Jésus-Christ, le commandement d’aimer est le Premier Commandement. C’est le premier et le plus important dans l’éternité. C’est le principe le plus important dans l’Évangile et il inclut toutes les règles. Aimer autrui et agir en conséquence nous fera ressembler plus à Dieu que n’importe quel autre principe. Malheureusement, Il semble que ce soit l’élément que beaucoup d’entre nous oublie quand on essaie « d’être religieux ». Beaucoup de gens « religieux », surtout ceux qui ont une approche basée sur les règles, pensent que la religion c’est ce que nous mangeons, comment nous votons, à combien de réunions nous allons, combien nous donnons d’argent, ou combien de pages nous lisons. Toutes ces choses sont importantes, mais aucune d’entre elles n’est plus importante.
 
Nous pouvons être « pratiquants » dans l’Église tout en étant spirituellement morts, surtout si nous ne nous aimons pas mutuellement. C’est ce que Paul et Moroni nous ont dit dans 1 Cor. 13 et Moroni 7 : «  Quand je parlerais les langues des hommes et des anges, si je n’ai pas l’amour, je suis un airain qui résonne, ou une cymbale qui retentit. Et quand j’aurais le don de prophétie, la science de tous les mystères et toute la connaissance, quand j’aurais même toute la foi jusqu’à transporter les montagnes, si je n’ai pas l’amour, je ne suis rien… L’amour ne périt jamais… Maintenant, ces trois choses demeurent : la foi, l’espérance, l’amour ; mais la plus grande, c’est l’amour » ; « et si un homme est doux et humble de cœur et confesse par le pouvoir du Saint-Esprit que Jésus est le Christ, il faut qu’il ait la charité ; car s’il n’a pas la charité, il n’est rien ; c’est pourquoi il faut qu’il ait la charité… C’est pourquoi mes frères bien-aimés, si vous n’avez pas la charité, vous n’êtes rien, car la charité ne périt jamais. Ainsi, attachez-vous à la charité, qui est le plus grand de tous les biens »
 
Le premier commandement nous a été donné par le Sauveur en personne pas moins de trois fois dans l’Évangile de Jean : « Je vous donne un nouveau commandement… » (Jean 13 :34-35 ; 15 :12-13, 17). Matthieu donne le premier commandement à une autre occasion. Lorsqu’on a demandé à Jésus quel était le plus grand commandement, il a répondu : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, et de toute ta pensée. C’est le premier et grand commandement. Et le second lui est semblable. Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Sur ces deux commandements reposent la loi et les prophètes. » (Matt. 22 :37-40).
 
Ce n’est pas du sentimentalisme. Ce n’est pas un mirage, ce n’est pas un vœu pieux, ou de l’idéalisme. L’amour n’est pas un principe de substitution qui permet au pleurnichard de satisfaire ses caprices. Ce n’est pas un truc accordé aux sœurs pour leur faire plaisir ou aux types hyper sensibles efféminés. Ce n’est pas une option qui peut être ignorée pour qui ne souhaiterait pas que les problèmes d’autrui interfèrent dans sa vie. Il y a là une clé importante, probablement la plus grande de toutes : le cœur et l’âme de l’Évangile c’est l’amour, et tout le reste n’est que commentaire. Quelle que soit la façon dont nous abordons la religion, nous avons tort, car la véritable religion c’est l’amour en action, l’amour de Dieu à notre égard et notre amour pour Dieu et notre prochain. Mais si je dis : « Je suis juste, j’ai un diplôme universitaire, je suis président de pieu ou présidente de Société de Secours, je paie même vingt pour cent de dîme, j’ai quinze enfants, et je suis allé en mission. Je me suis marié au temple, je suis Aigle scout, j’ai deux ans de réserves, et ma généalogie est faite jusqu’à Adam, Dieu m’exaltera sûrement grâce à tout ça, même si je ne suis pas quelqu’un de très compatissant et que je n’aime pas réellement mes frères et sœurs ».
 
Faux !
 
Écoutez Joseph Smith : « Pour être justifiés devant Dieu nous devons nous aimer les uns les autres ».
 
Écoutez Néphi : « Le Seigneur Dieu a donné un commandement que tous les hommes doivent avoir la charité, laquelle charité est l’amour. Et s’ils n’ont pas la charité ils ne sont rien ».
 
Écoutez Alma : « Si vous ne vous souvenez pas d’être charitables, vous êtes comme du rebut, que les raffineurs rejettent (parce qu’il n’a pas de valeur) et qui est foulé au pied des hommes ». 
 
Écoutez  Moroni : « Cet amour que tu as eu pour les enfants des hommes est la charité, c’est pourquoi, si les hommes n’ont pas la charité, ils ne peuvent hériter ce lieu que tu as préparé dans les demeures de ton Père ».
 
Écoutez  de nouveau  Paul : « Quand je parlerais les langues des hommes et des anges, si je n’ai pas l’amour, je suis un airain qui résonne, ou une cymbale qui retentit. Et quand j’aurais le don de prophétie, la science de tous les mystères et toute la connaissance, quand j’aurais même toute la foi jusqu’à transporter des montagnes, si je n’ai pas l’amour, je ne suis rien ».
 
Écoutez Pierre : « Ayant purifié vos âmes en obéissant à la vérité pour avoir un amour sincère, aimez-vous ardemment les uns les autres, de tout votre cœur ».
 
Écoutez Jean : « Bien-aimés aimons-nous les uns les autres; car l’amour est de Dieu, et quiconque aime est né de Dieu et connaît Dieu. Celui qui n’aime pas n’a pas connu Dieu, car Dieu est amour »
 
Lamour est la condition sine qua non pour entrer dans le royaume de Dieu, la condition sans laquelle nous ne pouvons entrer dans la gloire céleste. D’autres choses peuvent être exigées, mais sans l’amour dans notre cœur envers Dieu et nos frères, nous n’hériterons pas de trône. Il n’y a aucune exception. Nous ne pouvons devenir comme Dieu, nous ne pouvons être de vrais fils et filles de Dieu sans amour, car Dieu est amour.
 
Mettre la charrue avant les bœufs
 
Les gens se créent beaucoup de soucis par rapport à la religion parce qu’ils mettent la charrue de la doctrine avant les bœufs au lieu de commencer par les premiers principes ou le premier commandement. Par exemple, si nous commençons par la doctrine de l’enfer et des souffrances promises à ceux qui désobéissent aux commandements, on a vite fait de conclure que Dieu est une espèce de père Fouettard, prêt à châtier ceux qui désobéissent. (Je connais des membres de l’Église qui y croient vraiment !) Mais si nous commençons par le bon bout, avec le premier commandement (Dieu est amour, et pour devenir comme lui nous devons aimer) alors nous constatons que Dieu est un Père qui essaie d’avertir des enfants précieux des récifs et des dangers, et qui les guide pour les ramener à lui. Les souffrances dues à la désobéissance ne sont pas la rétribution d’un autocrate offensé et vengeur, mais les conséquences naturelles suite aux avertissements dont nous n’avons pas tenu compte, avertissements donnés par un père aimant qui nous supplie de faire attention. Les commandements ne sont pas une liste d’exigences arbitraires de Dieu ou des haies que nous devrions sauter pour lui faire plaisir, mais une carte décrivant les écueils de la vie compilés par quelqu’un qui connaît ces eaux.
 
Un autre exemple de charrue mise avant les bœufs : On le voit dans l’angoisse et la douleur de gens qui se font du souci sur la question de savoir qui est scellé à qui (je suis scellé à A, et je veux être scellé à B, ou, Maman et Papa sont divorcés et scellés à des partenaires différents, alors je ne peux pas être scellé aux parents que j’aime, et ainsi de suite). C’est vrai, je ne peux répondre à toutes les questions que l’on se pose, mais je peux adoucir un peu la peine. Commencez par le bon bout, commencez par l’amour parfait de Dieu et ses promesses merveilleuses. Cet être merveilleux qui est l’amour pur nous a promis une plénitude de joie si nous sommes sincères et fidèles à nos alliances, pas seulement le bonheur, pas seulement une meilleure vie qu’ici-bas, mais une plénitude de joie, en d’autres termes, tellement de joie que jamais nous ne pourrons en avoir davantage. Aussi au lieu de commencer par moi ou Maman qui est scellée à la mauvaise personne et en conclure : « Il n’est pas possible que je sois heureux dans le royaume céleste », commencez par l’amour infini de Dieu et la promesse de recevoir une plénitude de joie et (en faisant preuve d’un peu de foi), dites-vous que ce problème sera réglé d’une façon ou d’une autre à ma satisfaction et à ma joie parfaites. »
 
Parce que Dieu s’occupe de ces problèmes, et il va faire quelque chose. Dieu fera exactement ce que nous choisirions si nous avions seulement eu toutes les informations et tous les pouvoirs qu’il a. Nous serons absolument, pleinement et totalement satisfaits. Il faut qu’il en soit ainsi autrement notre joie ne pourrait être pleine comme on nous la promit. Nul dans le royaume céleste ne sera scellé à quelqu’un qui ne sera pas désiré, ce ne serait pas une plénitude de joie. Nul ne perdra un être aimé auquel il ne pourra être scellé, ce ne serait pas une plénitude de joie non plus. Je ne sais pas comment Dieu démêlera ces problèmes, mais je sais qu’il nous aime ; je sais qu’il a promis que les fidèles recevront « toutes choses »; je sais qu’il leur a promis une plénitude de joie et je le crois sans réserve. « Ce sont des choses que l’œil n’a point vues, que l’oreille n’a point entendues, et qui ne sont pas montées au cœur de l’homme, des choses que Dieu a préparées pour ceux qui l’aiment » (1 Cor. 2 :9). En d’autres termes, on ne peut même pas imaginer combien ce sera merveilleux. Alors cessez de vous faire du souci ou de vous plaindre à l’avance, et faites-lui confiance, vous allez aimer ça.
 
Lœuvre de Dieu
 
Quelquefois, lorsque nous regardons par le mauvais bout de la lorgnette, nous oublions que l’œuvre de Dieu n’est pas la damnation, mais le salut. Je ne me souviens pas avoir déjà vu dans les Écritures Dieu dépeint comme « Terminator », par contre je me rappelle du terme « Sauveur » un certain nombre de fois. Je ne me rappelle pas que ceux qui essaient d’imiter le Christ pour faire son œuvre aient jamais été appelés « destructeurs sur le Mont Sion », ou « punisseurs sur la montagne de Sion ». Non, nous devons être comme lui : des « sauveurs », des « sauveurs sur la montagne de Sion ». Alors qu’est-ce que fait Dieu ? (on a plutôt intérêt à le savoir si nous essayons d’être comme lui ). Selon Jean : « Dieu est amour ». Et comment cet amour s’exprimet-il ? Que fait Dieu ? Il nous le dit dans la Perle de grand prix : « Car voici, mon œuvre est ma gloire, réaliser l’immortalité et la vie éternelle de l’homme » (Moïse 1 :39). L’œuvre de Dieu, c’est nous ! Il passe sa vie à nous améliorer, nous pauvres humains et à nous faire de plus en plus grandir.
 
Il est vital que nous comprenions que cette Écriture ne s’applique pas seulement aux enfants célestes de Dieu, mais à tous. 
 
Les nombreuses demeures dans la maison de notre Père comprennent les royaumes terrestres, télestes et céleste. Ce sont tous des royaumes de gloire. Ce n’est pas seulement ses enfants obéissants qui font partie de l’œuvre et de la gloire de Dieu, et pour lesquels il œuvre; ce sont tous ses enfants qui seront rachetés du malin et élevés à un degré de gloire (voir par exemple : D&A 76 :42-43, 85, 88-89). En d’autres termes, Dieu améliore tout le monde ; il bénit tout un chacun et tout ce qu’il touche; il est de sa nature d’élever et de bénir. Il nous a élevés du niveau auquel nous étions avant d’être des esprits pour faire de nous des enfants spirituels. Il a donné des corps physiques à ses enfants qui ont accepté d’en avoir un. Et dans la résurrection, il nous donnera une gloire éternelle selon le degré que nous aurons accepté. Dieu essaie de donner à ses enfants la gloire céleste, mais si nous résistons, il essaie de nous donner la gloire terrestre. Si nous résistons encore, il essaie de nous donner la gloire téleste. Son œuvre consiste à optimiser nos conditions éternelles, pour nous donner la meilleure situation dans l’éternité, c’est ce qu’il fait dans la vie. Naturellement, il veut tout nous donner, mais évidemment la plupart d’entre nous résistent, alors il nous donne ce qu’il peut. C’est son travail, son « œuvre »; et c’est ce qui le magnifie, c’est sa « gloire ». Nous sauver et nous améliorer, voilà ce qu’il fait avec nous.
 
Maintenant, si nous voulons hériter de son royaume, nous devons l’imiter et devenir comme lui. Cela signifie que nous aussi, comme lui, devons aimer tous les enfants de Dieu et améliorer tout un chacun et tout ce que nous touchons. Si nos enfants ou nos amis résistent à nos tentatives de les aider à gagner la gloire céleste, alors nous devons faire marche arrière et faire ce que nous pouvons pour les aider à gagner la gloire terrestre. Et s’ils résistent encore, nous devons travailler pour les faire entrer dans le vestibule, plutôt que dans le sous-sol de la gloire téleste. Mais si nous devons devenir comme Dieu et devenir des dieux, alors nous devons, comme lui, dans la mesure de nos moyens, bénir, élever et améliorer tous ceux avec qui nous sommes en contact, pas seulement nos enfants obéissants, pas seulement nos voisins susceptibles d’entrer dans l’Église.
 
Il y a quelques années, j’ai fait une conférence sur la religion au cours de laquelle le thème de l’amour de Dieu a été évoqué. Après la conférence, une femme s’est approchée de moi et m’a dit :
 
« Frère Robinson, j’aimerais que vous me donniez votre avis sur une chose. Mon mari et moi avons dit tout le temps à notre fille que si elle se mariait au temple nous paierions pour tout, mais elle ne s’est pas mariée au temple, elle a fait ce qu’elle a voulu, et ni son mari ni elle ne sont les bienvenus chez nous. Eh bien, vous savez ce qu’elle a fait ? Elle est tombée enceinte et ne peut se marier au temple ! Alors nous allons tenir parole. Nous n’assisterons pas au mariage, et tant qu’elle ne réglera pas sa vie, nous ne voulons rien avoir à faire avec elle. Certains de nos amis disent que nous sommes un peu durs, mais elle savait ce qu’elle faisait, et c’est sa responsabilité. Qu’en pensez-vous ? »
 
Voici ce que je voulais vraiment dire, mais que je n’ai pas dit : « Je pense que pendant les deux années qui viennent, lorsque vous irez, votre mari et vous à l’église, vous devriez vous asseoir sur le dossier des chaises plutôt que sur le siège. Comme ça, il se pourrait que les choses que l’on enseigne-là ne continuent pas à vous passer audessus de la tête ».
 
En fait, ce que j’ai dit, c’est : « Écoutez, nous qui sommes dans l’alliance de l’Évangile, notre rôle ne consiste pas à condamner, ça c’est le rôle que Satan s’est octroyé. Notre tâche ici consiste à sauver. D’accord, votre fille ne vit pas en ce moment la loi céleste, mais dans quelle mesure pouvez-vous l’en rapprocher ? Elle ne va pas se marier au temple, mais voudra-t-elle se marier à l’église et permettre à l’évêque d’accomplir la cérémonie au lieu d’aller à Las Vegas ou  ailleurs ? Aura-t-elle de bons sentiments envers l’Église et ressentira-t-elle l’amour de ses amis et de sa famille ici ? Son expérience positive avec l’Église lui permettra d’accepter à l’avenir les visiteurs au foyer et les sœurs visiteuses, des gens qui en son temps aideront ce jeune couple à être pratiquant dans l’Église et à terme être scellé au temple ? Qu’est-ce qui peut être sauvé en ce moment, sœur, et comment peut-on s’y prendre ? Faites l’œuvre de Dieu, améliorez votre fille et aidez-la à s’élever aussi haut qu’elle le peut. L’œuvre et la gloire de Dieu consistent autant à aider certains de ses enfants bienaimés à trouver la gloire téleste ou terrestre, qu’a aider un petit nombre à atteindre la gloire céleste. Aussi soyez comme Dieu, rapprochez-vous de votre fille autant que vous le pouvez et autant qu’elle vous le permettra. Si j’étais vous, je rentrerais de suite chez moi et j’appellerais votre fille. Présentez-lui vos excuses et demandez-lui comment vous et votre mari vous pouvez l’aider dans ces nouvelles conditions. Ensuite, allez acheter un siège de bébé et un siège auto en espérant que votre fille vous pardonne. »

Avez-vous des enfants qui posent problème ou qui sont infidèles ? Alors, imaginez la scène suivante. Je ne peux pas affirmer qu’elle représente la vraie doctrine, mais je crois véritablement que c’est le cas. Supposez que le Père céleste vous amène un petit bébé d’esprit et vous dise : « Cette enfant va avoir plus de problèmes que la plupart dans la mortalité, mais je sais que si c’est vous qui l’élevez elle montera plus haut et ira plus loin que si elle était dans n’importe quel autre foyer. Voulez-vous la prendre et l’aimer et lui faire atteindre le maximum de son potentiel ? Ce sera dur, parce qu’elle n’aura pas des 20 sur 20 et elle n’aura aucune récompense. Il y aura des choses qu’elle ne pourra pas surmonter, et par moment vous endurerez de grandes souffrances. Mais c’est mon bébé, et elle m’est précieuse, et je sais qu’elle ira plus loin et plus haut avec vous comme parents qu’avec n’importe qui d’autre. Voulez-vous bien la prendre et l’aimer comme moi ? »
 
Je crois que de nombreux parents justes dotés d’enfants à problèmes se sont portés volontaires dans la vie pré mortelle pour accepter ces enfants afin de les aider à atteindre un état de gloire supérieure qu’autrement ils n’auraient pu recevoir. Même Dieu ne peut exalter tous ses enfants. Nous devons nous souvenir que notre tâche ne consiste pas nécessairement à exalter tous les nôtres, mais à imiter Dieu en élevant et en bénissant tous nos enfants (qui sont aussi les siens) autant qu’ils nous permettent de le faire, même ceux qui ont des problèmes. Dans la résurrection, lorsqu’ils se seront améliorés et se seront finalement tournés vers Dieu, ils diront : « Tout ce que j’ai acquis, je le dois à mon Sauveur et à mes nobles parents ». Ils se lèveront pour nous remercier et nous bénir pour notre amour notre patience et les sacrifices que nous aurons faits pour eux. 
 
Un amour inconditionnel
 
On a beaucoup parlé de l’amour « inconditionnel » de Dieu, et ces discussions n’ont pas été très fructueuses. Si Dieu est amour, et si la première directive c’est d’aimer comme Dieu aime, alors est-ce que l’amour de Dieu est « inconditionnel » et dois-je aussi aimer « inconditionnellement » ? C’est une question importante, car le terme « inconditionnel » a des sens différents selon les gens, et le cœur de l’incompréhension réside dans ces définitions différentes. (Remarquez que « l’amour inconditionnel » n’est pas un terme que l’on trouve dans les Écritures, et je pense que ce terme n’est pas très utile. L’expérience m’a montré qu’à chaque fois que l’on discute des Écritures en utilisant des termes non scripturaux, on va droit dans les problèmes (comme les Pères au Concile de Nicée avec les mots trinité et homoousios (Homoousios est un mot grec que l’on ne trouve pas dans les Écritures qui signifie « de la même essence ». Il a été employé dans le Credo de Nicée pour décrire la relation entre le Père et le Fils).
 
Pour certains, l’amour « inconditionnel » de Dieu signifie qu’il acceptera tout un chacun à égalité, qu’importe ce que l’on a pu faire dans cette vie. Il ne nous tiendra pas comptables de nos péchés, et à la fin il pardonnera tout à tout le monde et accordera les mêmes bénédictions à tout un chacun. Les tenants de ce principe disent : « Les justes n’ont aucun avantage et les méchants aucun inconvénient, parce que cela représenterait des conditions, et l’amour de Dieu et son acceptation sont « inconditionnels ». Évidemment, ceci est complètement faux. Beaucoup d’enfants de notre Père ne le reverront jamais, car il ne leur sera pas permis d’entrer en sa présence dans leur état impur, sauf peut-être au jour du jugement.
 
Cependant, si l’on nie que l’amour de Dieu est « inconditionnel », on risque d’aller trop loin en refusant d’admettre qu’il aime tous ses enfants, et on en arrive à dire qu’il aime seulement ses « bons » enfants, et qu’il ne les aime que lorsqu’ils se sont repentis et qu’ils sont entrés dans l’alliance de l’Évangile. Ceci est aussi faux. C’est le même amour divin qui fait que les cieux se réjouissent pour les repentis et les justes et pleurent sur les rebelles et les méchants (Moïse 7 :28,37). Bons ou mauvais, nous sommes ses enfants, et dans les deux cas, Dieu nous aime, il nous aime tous.

Les opposants à la théorie de l’amour de Dieu pour tous ses enfants s’appuient d’habitude sur une Écriture dans Jean 15 :10 : « Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour », ce qui dénote clairement une condition pour « persévérer dans son amour ». Le malentendu doctrinal vient du fait que l’on met sur le même pied « être aimé de Dieu » et « demeurer dans l’amour de Dieu », car ces deux expressions ne décrivent pas le même état. Dieu peut nous aimer que nous lui rendions son amour ou non. Son amour envers nous n’exige pas une réponse émotionnelle de notre part. Mais pour ce qui nous concerne, « demeurer dans son amour » exige que nous voulions y demeurer. Dieu peut m’aimer sans mon consentement, mais il ne peut pas avoir de relation avec moi, je ne « demeure pas dans son amour », à moins que je le veuille.

L’amour défini comme le désir d’avoir une relation peut être unilatéral, il n’exige (hélas) qu’une seule partie. Mais l’amour en tant que relation exige deux parties. Je peux être amoureux d’une femme qui ne me le rend pas (ça m’est arrivé). C’est douloureux, unilatéral et sans condition. C’est simplement là. Peu importe l’intensité de mon amour envers cette personne, nous n’avons pas de relation. Même si je l’aime, nous ne nous aimons pas, parce que la relation n’existe pas, seul existe mon désir. Elle ne « demeure pas dans mon amour », même si je le veux, parce qu’elle refuse qu’il en soit ainsi.
 
De même, l’amour de Dieu (compris comme étant son désir d’avoir une relation avec nous) est inconditionnel. En réalité, Dieu commande à tous les hommes de partout de se repentir et de venir à lui (3 Néphi 11 :32). Il désire nous sauver, pour nous glorifier et nous exalter tous également et sans condition. Dieu désire-t-il avoir une relation éternelle avec tous ses enfants ? Oui, et dans ce sens, l’amour de Dieu est inconditionnel. « Tous sont invités, nul n’est exclu ». Mais il faut deux personnes pour créer une relation. Par définition, une relation exige deux points de référence, et seuls certains des enfants de Dieu lui rendent son amour et sont d’accord pour accepter cette relation désirée de lui. Initialement, il n’aime pas plus ces enfants que les autres, mais avec le temps, la relation d’amour qui est possible avec eux est beaucoup, beaucoup plus importante qu’avec ceux qui le rejettent. Ceux-là « demeurent dans son amour ».
 
Beaucoup d’enfants de Dieu ne l’aimeront pas. Ils n’accepteront pas la proposition du Fiancé, bien qu’il les aime tendrement. Ils ne ressentiront jamais les joies que le mariage de l’Évangile apporte. Cependant, ce n’est pas parce que Dieu ne veut pas ou parce qu’ils n’ont pas satisfait aux conditions qui auraient fait que Dieu les aurait acceptés. C’est parce qu’ils ne veulent pas accepter sa proposition, ils ne viendront pas aux noces. Bien qu’il les ait aimés d’abord, ils ne lui ont pas rendu son amour, et suite à leur choix, la relation ne sera pas aussi puissante qu’elle aurait pu être, ils refusent de « demeurer dans son amour ».
 
Pour résumer, l’amour de Dieu (c’est-à-dire son désir envers nous) est inconditionnel. L’amour de Dieu (c’est-à-dire sa relation avec nous) nécessite une réponse positive à son désir plein d’amour. La seule variable, c’est nous. Même Dieu ne peut forcer quelqu’un à l’aimer. Et même Dieu ne peut avoir la même relation avec ceux qui le haïssent qu’avec ceux qui l’aiment. Si l’amour de Dieu peut être inconditionnel, « demeurer » dans une relation avec lui exige en retour notre participation et notre amour.
 
La foi, L’espoir et la charité
 
La plupart des membres de l’Église comprennent que la foi, l’espérance et la charité (l’amour) sont liées entre elles, mais beaucoup ne réalisent pas pleinement l’importance de leurs relations mutuelles telle qu’elle est décrite dans les Ecritures. C’est lorsque nous avons véritablement foi au Christ que nous commençons à croire à sa bonne nouvelle et à croire en lui, c’est à ce moment-là que nous réalisons que si le Christ peut faire ce qu’il dit, alors il peut nous sauver réellement. Il y a là de l’espoir pour nous. C’est pourquoi si je crois sincèrement le Christ, alors logiquement, je dois aussi avoir l’espoir que je serais sauvé et exalté. C’est le thème du livre Croire le Christ. Mais au-delà de cela, espérer en Christ amène en retour la charité (l’amour), et c’est de cela que traite ce livre. Car l’attente d’être en présence du Christ c’est aussi l’attente d’être comme le Christ.

Nous ne pouvons aller au Christ pour l’adorer sans devenir ce qu’il est, et le Christ est amour. C’est pourquoi il est nécessaire que croire au Christ nous donne l’espoir d’être avec lui, et notre espoir d’être avec lui nous incite à l’imiter maintenant pour partager avec autrui ce qu’il a partagé avec nous. La foi sincère en Christ est, d’une certaine façon, semblable à une maladie : elle est très contagieuse, et elle nous fait briser nos habitudes et nous tourner vers l’espérance et l’amour. Selon les Écritures, c’est ainsi que l’on voit si on a la foi ou pas. Si nous avons la foi, nous avons l’espérance et nous aimons nos frères et nos sœurs (Jean 13 :35).
 
J’ai ressenti en de rares occasions l’amour pur de Dieu se déverser sur mon âme. Mais j’ai plus souvent ressenti cet amour par l’intermédiaire d’autrui. J’ai appris tout d’abord ce qu’était l’amour de Dieu grâce à la générosité de ma famille, des amis, et des instructeurs qui m’ont aimé, se sont sacrifié pour moi, et m’ont béni en son nom. Leurs noms sont légion, mais je voudrais partager mes expériences avec seulement trois. Ces gens qui ont eu un tel impact sur ma vie étaient des membres simples et ordinaires de ma paroisse et de ma famille qui faisaient de leur mieux pour vivre l’Évangile. Je ne crois pas qu’ils se considèrent comme les héros qu’ils sont pour moi.
 
Une instructrice de la Primaire
 
Quand j’avais dix ou onze ans, je crois que j’étais « blazer », mon instructrice s’appelait Maudie Barron. Je ne me souviens pas du tout de ce qu’elle a pu m’apprendre. Je ne me souviens pas non plus de ce qu’elle a pu faire de particulier que les autres instructrices n’auraient pas fait. Mais je savais, alors, et je le sais encore maintenant, bien que je ne me souvienne pas qu’elle l’ait jamais dit qu'elle m’aimait. Je le sais parce que je le ressentais du fond du cœur. En fait, je me souviens d’un jour où une autre sœur me mettait la pression pour chanter en solo lors d’un chant qu’elle avait arrangé pour le programme de Noël de la Primaire. Je suis sûr qu’il était important pour elle que son programme soit réussi, et pour des raisons connues d’elle seule, elle pensait qu’il était nécessaire que je chante cette partie. Je suis sûr aussi qu’elle ne se rendait pas compte à quel point j’étais traumatisé d’être forcé de chanter devant les autres gosses qui me taquinaient et se moquaient de moi. J’aurais préféré manger des araignées plutôt que de chanter ce solo. Mais cette sœur continuait à jouer ma partie encore et encore au piano, frustrée de voir que je ne voulais pas chanter, les yeux baissés, humilié et refusant de chanter, de parler, ou de bouger. Finalement, juste avant que le monde ne s’écroule sous moi, sœur Barron vit ma situation, vint sur l’estrade et me fit sortir de la salle. Hors de la chapelle, j’éclatais en sanglots, elle me serra dans ses bras et m’assura que je n’aurais pas à chanter si je ne voulais pas. Je sus alors qu’elle m’aimait plus qu’elle n’aimait ce fichu programme.

À ce qu’on m’avait dit, sœur Barron avait mauvais caractère, mais je ne l’ai jamais cru. Aujourd’hui, presque quarante ans après, je ne peux prononcer son nom sans que les larmes ne me viennent aux yeux, si grand a été son impact sur moi, non seulement à cause de cet épisode, mais aussi à cause de nombreux mois de gentillesse, de patience, et de soins alors que j’étais un enfant à un âge encore difficile. Je sais qu’il n’y avait rien de mauvais dans son cœur, et je ne me borne pas à me souvenir d’elle, je la révère. Voici pourquoi : sœur Barron m’a amené plus prés du royaume de Dieu par son influence chrétienne et en me faisant ressentir son amour sincère que tous les autres instructeurs, et ils étaient nombreux, avec leurs leçons et leurs activités. Je sais que ces leçons m’ont beaucoup aidé, et je suis reconnaissant à ces instructeurs qui se sont sacrifiés pour les préparer. Mais sur le long terme, la meilleure et la seule leçon qui ait eu le plus grand impact sur moi fut une vie chrétienne et un amour réel. Même jeune comme j’étais, je savais que Sœur Barron ressemblait beaucoup à notre Père céleste, et je savais que je voulais vivre dans l’éternité dans un endroit où les gens lui ressembleraient.
 
Peut-être faut-il remarquer, bien que cela me fasse de la peine de le dire, que Maudie ne sut jamais ce que je ressentais. Alors que j’étais assez âgé pour lui dire, son cœur plus qu’excellent s’était arrêté de fonctionner, et elle n’était plus là. Il n’est pas nécessaire de sauver le monde pour obéir à la Première Directive et être les enfants de notre Père céleste ; il nous suffit de participer et de s’aimer les uns les autres. Nous ne pouvons jamais savoir ici-bas qui nous avons touché, béni, ou même sauvé. 
 
Un dirigeant scout
 
Cy Watson fut mon dirigeant scout pendant plusieurs années et eut dans ma vie les meilleures influences. Cy était mon type de gars, c’était un vieux type grincheux. Mais quelque part sous le grincheux, nous, les scouts, savions qu’il nous aimait. Cy sacrifiait des heures, des soirées, des week-ends pour nous. Il ne manquait jamais les réunions de troupe, les activités, ou les courts d’honneur. Il ne disait jamais qu’il nous aimait (Cy ne l’aurait jamais fait), mais de toute façon nous le savions. Et parce que nous le savions, nous acceptions qu’il nous enseigne. Cy m’a appris comment plier le drapeau et aimer ma patrie. Il m’a enseigné que travailler dur apporte des récompenses. Il m’a appris à réfléchir avant d’agir. Il m’a enseigné à fermer les portes et à ne pas tolérer les papiers sales. Un jour il m’a fait « tenir un arbre » pendant une heure et demie parce que j’avais désobéi aux règles. Je ne sais plus ce que j’avais fait, mais il m’a enseigné la loi de la justice, et que nul n’était au-dessus des lois. J’ai appris de Cy, par l’exemple, les vertus d’antan. J’ai appris que l’honneur vaut plus que la richesse et que le devoir est plus urgent que le désir ou même le besoin. Je n’ai pas appris ces choses parce que Cy me les aurait dites, je les ai apprises parce qu’il me les a enseignées, parce que lui-même y croyait. Il croyait au serment scout, à la loi scoute, et il m’a insufflé ses valeurs nobles. Que Dieu le bénisse !
 
Rétrospectivement, je me rends compte que je ne connaissais pas grand’choses de Cy. Je sais qu’il a contribué en grande partie à ma personnalité d’aujourd’hui. Je sais que je le respectais. Je sais que je l’aimais. Cy avait un témoignage, mais sa religion n’était pas ostentatrice. Cependant, il obéissait à la première directive, et le fruit qui en est sorti a été une génération entière de garçons qui sont devenus des hommes, pas seulement des adultes, mais des hommes. J’attends avec impatience de le revoir dans le royaume de Dieu. 
 
Grand’mère préférait la carcasse des poulets
 
Je n’ai pas connu ma grand-mère autant que je l’aurais souhaité. Elle vivait avec des parents en Arizona, et je la voyais seulement une ou deux fois l’an. Elle est morte alors que j’étais encore adolescent, mais je me souviens encore que grand-mère aimait bien la carcasse du poulet. À chaque fois que nous mangions du poulet, elle disait : « Oh, est-ce que je peux avoir la carcasse ? J’adore la carcasse. » Pour moi c’était complètement absurde. Comment peut-on aimer la carcasse ? Je veux dire, une carcasse c’est juste de la peau grillée sur un os avec un tout petit peu de viande. En grandissant, il était évident que je n’avais pas ce genre de préférences absurdes, et j’étais content que mes parents et moi nous ayons le blanc, les pattes, les cuisses, et que nous les avions en partie grâce au fait que grand-mère préférait les carcasses. Mon père me disait qu’elle avait toujours été comme ça. Quand il était jeune, et que l’époque était dure à la ferme ingrate, les poulets étaient rares, et c’était rare qu’il y ait plus que le nécessaire pour une si grande famille, et même alors, Grand’mère aimait la carcasse.
 
Ce n’est que des années plus tard que j’ai réalisé, lorsque j’ai eu la clé en tant qu’adulte avec mes enfants, des enfants que j’aimais, et dont le bonheur était plus important pour moi que le mien. Un jour alors que mon cœur débordait d’amour pour mes êtres chers, je réalisais que toute sa vie, Grand’mère avait pris la plus petite part pour elle-même, et laissé le meilleur aux autres. Ce n’était pas du tout la carcasse que Grand’mère avait aimée ; c’était ses enfants et ses petits enfants, ses voisins, ses amies et son Sauveur. Oh, grand-mère, merci pour la leçon. Je vais essayer d’aimer davantage les carcasses de poulet.
 
Passez à votre voisin
 
C’est en suivant le Christ que l’on ressent l’expression la plus totale de son amour, qu’il le manifeste personnellement ou par ses serviteurs, nous en sortons élevé et béni et nous devenons pour autrui ce qu’il a été pour nous. Quelqu’un dehors va goûter à l’amour de Dieu tout d’abord et surtout grâce à vous. L’amour de Dieu s’étend au loin comme les ondulations créées par le caillou jeté dans l’eau, comme une maladie transmise d’une personne à une autre. La loi royale dit : « Comme je vous ai aimé, aimez-vous les uns les autres ». Et passez à votre voisin ! Nous ne pouvons toujours rembourser ceux qui nous ont aimés et qui nous ont le plus servis. Grand-mère, Maudie Barron et Cy Watson sont partis. Avec le temps, je me rends compte à quel point je les aimais, je ne pourrais jamais les rembourser. Que dois-je donc faire pour rembourser ma dette ? Je dois me tourner vers les autres ; je dois être pour autrui ce que ces membres ont été pour moi.
 
Je rembourse mes parents et mes grands-parents pour leur amour en aimant mes enfants et mes petits enfants, qui à leur tour aimeront et béniront leurs enfants et leurs petits enfants. Je rembourse mes instructeurs pour leur amour en enseignant autrui et en aimant ceux que j’enseigne. Et eux à leur tour aimeront et enseigneront encore autrui de sorte que mon influence, qui est celle de Cy de Maudie et de grandmère et à terme de celle du Sauveur, ne finisse jamais. Tout comme le Christ a aimé et servi ceux qui ne pourraient jamais le rembourser, de même j’aime et je sers ceux qui ne pourront jamais me rembourser, et eux à leur tour aimeront et serviront autrui qui ne pourra jamais les rembourser. De cette façon, en fait, l’amour ne périt jamais (1 Corinthiens 13 :8) ; il se propage au loin pour l’éternité. En devenant un maillon de cette chaîne, nous devenons une partie de cette éternité d’amour dans laquelle le Père et le Fils sont aussi des liens. Et c’est ainsi que nous suivons véritablement le Christ.
 
Nous pouvons aimer le Christ, aussi, mais nous ne pouvons pas réellement faire grand’ chose pour lui. Je veux dire qu’il doit avoir tout ce dont il a besoin à l’heure actuelle. (C’est un vieux problème : « Que peut-on faire pour quelqu’un qui a tout ? » ). Il est sûr que l’on ne peut le sauver. Nous ne pouvons soigner ses blessures, porter ses fardeaux, ou adoucir sa peine. Nous ne pouvons le nourrir lorsqu’il est affamé, ou le vêtir ou prendre soin de lui lorsqu’il est malade, car il est au-delà de toutes ces choses maintenant. Alors, comment peut-on lui exprimer correctement notre amour ? C’est dans Mathieu 25 :34-40 qu’il nous montre ce qu’il faut faire :
 
« Alors le roi dira à ceux qui seront à sa droite : venez, vous qui êtes bénis de mon père ; prenez possession du royaume qui vous a été préparé dès la fondation du monde. Car j’ai eu faim, et vous m’avez donné à manger, j’ai eu soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais étranger, et vous m’avez recueilli ; j’étais nu, et vous m’avez vêtu ; j’étais malade, et vous m’avez rendu visite ; j’étais en prison et vous êtes venus à moi. Les justes lui répondront : Seigneur, quand t’avons-nous donné avoir faim, et t’avons-nous donné à manger ; ou avoir soif, et t’avonsnous donné à boire ? Quand t’avonsnous vu étranger, et t'avons-nous recueilli ; ou nu, et t’avons-nous vêtu ? Et le roi leur répondra : je vous le dis en vérité, toutes les fois que vous avez fait ces choses à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous les avez faites ».
 
Le Christ nous invite à rembourser la dette en bénissant autrui en retour. Notre prochain dans le besoin devient le symbole du Christ, et en satisfaisant aux besoins d’autrui, comme le Christ a satisfait aux nôtres, nous remboursons partiellement notre dette. De même, lorsque nous servons notre prochain, nous endossons le rôle de celui qui bénit, rôle qui est le sien. Ce faisant, nous devenons ses disciples et en servant autrui nous devenons comme lui. Celui que nous servons nous imite en acceptant son amour et sa grâce. En le servant nous nous « élevons » en nous mettant à la place du Christ comme celui qui aime, qui bénit et qui sauve. Nous devenons sauveurs sur le mont de Sion de ceux que nous servons ; nous sommes exaltés, élevés à son niveau et à ses fonctions, par notre amour et notre service envers autrui.
 
Maintenant, sortez et trouvez votre prochain. Trouvez-le et servez-le. Trouvezle dans votre famille, vos amis, vos voisins, les étudiants, les collègues, et les inconnus dans la rue. Cherchez-le. Soignez ses blessures, nourrissez-le. Vêtez-le. Servez-le. Enseignez-le. Aimezle. Car c’est la Première Directive, la « loi royale », la « voie plus excellente ». De cette façon et plus que de toutes autres manières, nous le suivons véritablement.