CE QUE PEUT NOUS APPRENDRE
L'ÉGLISE DE JÉSUS-CHRIST DES SAINTS DES DERNIERS JOURS


par le Révérend Franck S. Morley,
docteur en Philosophie de l'Église presbytérienne,
15th Ave. and 9th St., S. W. Calgary, Alberta, Canada.

Dimanche 27 novembre 1954


Voir le fac-similé de l'édition française originale



Je fais une série de sermons intitulés « Les tâtonnements dans la compréhension ». Ce soir, c'est le tour de l'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours, de ce que peut nous apprendre cette Église, et j'estime qu'il n'est pas inopportun d'en parler ce soir aux francs-maçons.


La raison pour laquelle j'ai retenu ce sujet s'éclaircira, je crois, à mesure que j'avancerai dans mon sermon.

Jusque naguère, le peu que je savais des mormons, je le devais à la lecture de Zane Grey [1872-1939, auteur américain]. Je me souvenais d'un portrait peu flatteur donné par un de ses romans que j'avais lu dans mon enfance et que j'avais vu avec des yeux d'enfant. Cette impression ne m'a malheureusement pas quitté jusqu'au jour, relativement peu éloigné, où j'en vins à connaître beaucoup mieux cette Église. Je l'ai surtout découverte lors de la visite que me firent deux jeunes gens peu après mon arrivée à Calgary.

Ils venaient de loin, du fin fond des États-Unis, pour m'entretenir de leur foi. Ils faisaient là, pensais-je, une chose admirable. Il leur fallait du courage – à tout le moins je trouvais qu'il leur en fallait pour venir affronter un ministre presbytérien assez redoutable.

Je les fis entrer et les laissai parler. C'était de tout jeunes hommes qui, je pense, ne se rasaient pas depuis bien longtemps, et ils se mirent à parler de leur foi. Comme ils disaient que tous les frais étaient à leur charge, je leur demandai comment ils parvenaient à gagner de quoi vivre, et un jeune homme me répondit qu'il venait d'écrire chez lui pour demander à son père de vendre une vache et de lui envoyer l'argent. Ils consacrent deux ans à cette oeuvre et subviennent à leurs propres frais.

Ensuite, deux autres jeunes gens vinrent aussi me voir pour parler de leur foi et répondirent à plusieurs de mes questions.

Lors de la célébration du centenaire en 1947, l'Église mormone déclara qu'au cours de ces 100 ans, elle avait envoyé 51 612 missionnaires, qui partent pour une durée de deux ans et subviennent à leurs propres frais ! En 1949, elle en avait 8695 dans trente-huit pays. Mais, depuis lors, elle en envoie environ 4000 chaque année. Je présume donc qu'actuellement elle possède encore plus de missionnaires à l'oeuvre dans le monde. C'est là une oeuvre missionnaire stupéfiante pour une Église qui est relativement jeune.

Maintenant, qu'est-ce qui me plaît dans cette Église ?

D'abord la clarté de sa doctrine. Une doctrine que les jeunes peuvent comprendre, qui leur est accessible, bien qu'elle les conduise dans un domaine plus profond qui, naturellement, dépasse l'intelligence humaine. Par exemple, leur premier point de doctrine est la foi en Dieu, en Jésus-Christ et au Saint-Esprit. On m'avait dit que les mormons ne croyaient pas en Jésus-Christ ! Ces idées préconçues et cette incompréhension dont ils sont l'objet, il nous faut, voyez-vous, les tirer au clair.

Ils ont des croyances qui pourraient nous paraître un peu étranges, telles que la progression éternelle, la révélation actuelle – la révélation par les prophètes – et le mariage éternel. Ils ne croient pas que la mort provoque de séparation.

Mais ces croyances sont-elles mauvaises ?

En second lieu, ce que j'aime chez eux, c'est qu'ils ont un mode de vie. Leur religion pénètre directement dans leur vie. Pour eux, l'oisiveté, la paresse, le fait de vivre aux crochets du gouvernement sont néfastes. Ils n'aiment pas ce genre d'affaires. Ils estiment qu'on ne devrait pas être entretenu par le gouvernement.

Pour être membre de I'Eglise mormone, il faut suivre strictement la Parole de sagesse : pas de thé, de café, de liqueur, de tabac (ce qui élimine immédiatement beaucoup
d'entre nous). On doit être propre au point de vue moral et payer une dîme.

Maintenant, j'ignore si c'est dû ou non à leur mode de vie, auquel leur religion se rapporte si étroitement, mais ils sont peut-être les gens les plus sains du monde. Pendant la guerre, on trouva dans l'Utah plus de gens ou plus d'hommes aptes au service que dans tout autre État des États-Unis.

Le taux de la mortalité aux États-Unis est de 10 pour mille, mais, chez les mormons, il est inférieur à 6 pour 2 mille. Le taux de la natalité aux États-Unis est de 24 pour mille, mais, chez les mormons, de 38. Dans les 22 principales nations civilisées du monde, le nombre moyen d'enfants illégitimes est de 74 pour mille ; aux États-Unis, de 40 pour mille, mais, dans l'Utah, de 10 seulement, et, dans l'Idaho (dont la proportion est voisine, puisque c'est un État mormon) de 11 pour mille.

Quel contraste stupéfiant ! Ils ont également un taux de divorces fort peu élevé.

L'Utah est le premier État des États-Unis en ce qui concerne l'enseignement, et peut-être le meilleur du monde. Comme lieu de naissance d'hommes remarquables, l'Utah vient en tête devant le Massachusetts (ce qui ne me plaît guère, car le Massachusetts est puritain et était autrefois en tête des États-Unis, mais actuellement l'Utah précède de 20 pour cent le Massachusetts).

Pour la production de savants, l'Utah est au premier rang avec 30 pour cent de plus que le Colorado. Or le Colorado est voisin. C'est donc là une production étonnante d'hommes instruits, compétents et intelligents.

Après la clarté de leur doctrine et après un code de vie conforme à leur foi, ce qui me plaît en troisième lieu chez les mormons, c'est que leur religion est axée sur la famille. La polygamie fut abolie en 1890. C'est le président de l'Eglise, Wilford Woodruff, qui, je crois, prit cette décision, et je pense qu'il n'y a qu'environ quatre ans que l'un des douze apôtres fut excommunié pour impureté, immoralité, violation de cette règle de pureté que prônent tellement les mormons.

Cette religion axée sur la famille commence par les prières familiales du matin et du soir et aucune nourriture n'est prise avant d'être bénie. Toute la famille se rend à l'église sous la
conduite du père et de la mère. Le dimanche après-midi, la famille se réunit pour se consacrer à la vie religieuse et à la vie sociale.

Il y a aussi une soirée familiale par semaine. N'est-ce pas merveilleux ? Une soirée familiale par semaine : un soir, chaque semaine, tous les membres de la famille mormone sont à la maison et ont encore une vie familiale. Le père ou la mère qui est trop occupé pour se soucier des enfants ou pour les voir souvent risque d'être, tôt ou tard, réprimandé pour son comportement.

Les enfants reçoivent une éducation soignée depuis la crèche jusqu'à la classe de l'instructrice de l'École du dimanche. C'est ainsi qu'il y a une instruction religieuse à raison d'un jour par semaine, appelée la Primaire. Les enfants de 4 à 11 ans y viennent deux heures par semaine après l'école. Au premier groupe d'enfants, âgés de 4 à 5 ans, on apprend à prier et aussi à pratiquer des vertus telles que la vénération, la reconnaissance, l'amitié et la bonté. Puis, à l'âge de 6 ans, ils passent dans un autre groupe pour apprendre à connaître la nature et le Dieu de cette nature. De 7 à 8 ans, ils fréquentent des classes de préparation au baptême, car, à 8 ans, ils deviennent membres de l'Église. Ils reçoivent alors divers enseignements, les filles ont des cours appelés « investigations » et les garçons des cours différents.

Si un membre de l'Église mormone se trouve dans l'assemblée, qu'il veuille bien me pardonner si j'omets un point qu'il estime important, et aussi si je fais une erreur. J'essaie, croyez-le bien, que mon exposé soit le plus clair possible. Soyez tranquille, l'essentiel sera, je pense, assez proche de la vérité.

En tout cas, un garçon devient diacre à l'âge de 12 ans, et le reste pendant 3 ans, jusqu'à 14 ans. Puis il passe instructeur de 15 à 16 ans, prêtre à l'âge de 17 ans. Il peut dès lors baptiser, administrer le sacrement de Sainte-Cène, ordonner les diacres, etc. Il devient ancien à 19 ans lorsqu'il peut donner le droit de confirmation : il oint et bénit les malades.

Ceci est également intéressant. Les mormons affirment que la bénédiction et l'onction des malades provoquent des guérisons miraculeuses. Ils ont des médecins et coopèent avec eux, mais obtiennent parfois des bénédictions sans l'intervention des médecins.

Ce qui me plaît ensuite dans cette Église, c'est l'esprit d'amitié qui y règne, particulièrement chez les jeunes. C'est au sein de l'Église qu'ils se rassemblent. C'est là qu'ils trouvent leur joie, leur amusement. Ils ne doivent pas fréquenter ces vils tripots pour trouver leur amusement, pas plus que ces bouges. C'est dans un milieu religieux qu'ils se distraient et se donnent du bon temps. Je trouve que c'est merveilleux. Je voudrais que nous ayons ce genre d'activité dans notre Église.

Ce qui me plaît encore (peut-être est-ce le résultat de cet esprit d'amitié), c'est qu'ils sont partisans des mariages jeunes. L'idée est bonne. En effet, ils préparent les jeunes au mariage, et il serait souhaitable que nos jeunes y soient davantage préparés. Dans l'Église protestante, la préparation des jeunes au mariage est nettement insuffisante.

Le gouvernement de leur Église est une théocratie, mais une théocratie mêlée de démocratie. Leur Église possède une Première Présidence, composée d'un président et de deux assistants. À la mort du président, les deux assistants sont démis automatiquement de leurs fonctions . C'est l'aîné des douze apôtres qui devient président. Mais, bien qu'à tous les degrés règne la théocratie et que les différents officiers et fonctionnaires soient nommés, ces nominations doivent être entérinées par le vote d'une assemblée générale, à laquelle n'importe qui peut assister. Naturellement, seuls les membres de l'Église peuvent voter. Comme vous le voyez, l'organisation de leur gouvernement est vraiment remarquable.

Je voudrais avoir le temps d'en faire avec vous une analyse plus détaillée, parce que c'est un des gouvernements religieux les mieux organisés du monde, bien que (et il faut le souligner) il n'y ait nulle contrainte. Certains d'entre nous croient (et il y a peu de temps encore, moi aussi je le croyais) qu'on oblige les missionnaires à partir. Il n'en est rien. Dans leur Église, il n'y a aucune contrainte. Évidemment, celui qui y exerce une fonction doit respecter certaines règles, mais on n'est jamais forcé d'être missionnaire ou d'accomplir n'importe quelle autre tâche.

Ce qui me plaît encore dans leur Église c'est leur dévouement. Prenons par exemple le président de pieu. Un pieu désigne un certain territoire qui dépasse largement les limites de Calgary, qui comprend une vaste région avec, au centre, notre ville de Calgary. Eh bien, ce président de pieu n'est pas rétribué. L'homme qui exerce cette fonction est un citoyen important, l'un de nos hommes d'affaires les plus occupés, et cependant ce président de pieu consacre beaucoup de temps à son Église.

Il consacre une soirée par mois à une réunion des officiers enseignants du pieu. Il consacre une soirée par semaine à une réunion de la présidence du pieu. Il consacre deux dimanches par mois à la visite des paroisses. Il y consacre tout un dimanche après-midi par mois. Chaque année, à Salt Lake City, il assiste à deux assemblées générales, qui durent trois jours. Il a quatre assemblées de pieu par an, chacune lui prenant un jour et demi, et il consacre un jour par mois au temple, bien que ce ne soit pas obligatoire. Pensez donc à tout ce temps ! Pensez-y ! En ce qui me concerne, je ne peux le faire sans être consterné. Que de temps lui prend cette fonction !

Nous n'avons absolument rien de semblable ! Dans notre Église, personne ne sacrifie autant de temps. Personne ! Je connais mon Église d'une côte à l'autre des États-Unis, et je vous dis que je ne connais rien de tel.

Je pense aussi à leur générosité, pas seulement en fait de temps, mais aussi en ce qui concerne leurs dîmes. Ils paient la dîme ! Et cela aussi est très intéressant. Le premier dimanche du mois, ils offrent un jeûne. Ils se privent de leurs deux repas et vont en donner l'argent aux pauvres. Le président Hoover [président des États-Unis de 1929 à 1933] a même dit que, si toutes les Églises aidaient les pauvres à la façon de l'Église mormone, l'aide de l'État deviendrait superflue.

Ils s'occupent de leurs membres, et c'est encore une caractéristique de leur Église qui me plaît ; ils s'en occupent non seulement au point de vue matériel, mais aussi au point de vue spirituel. Leurs paroisses ou branches sont divisées en ce qu'ils appellent des « secteurs » ; chacun d'eux désigne simplement une partie de la ville, où vivent de trois à huit familles mormones (le plus souvent, je pense, il y en a environ six), qui, chaque mois, reçoivent la visite de deux instructeurs. Or il peut se faire qu'on ne les trouve pas chez elles ce mois-ci pour une raison ou pour une autre – elles peuvent être parties en Californie ou tout simplement être sorties au moment où l'on vient les voir – mais on reprendra le contact avec elles le mois prochain.

Toutes les familles de l'Église mormone reçoivent la visite de ces instructeurs de six à douze fois par an. Une visite mensuelle ! Le mois passé, leur but était de visiter absolument toutes les familles, et ils n'y sont pas parvenus. Ils ne les ont pas visitées toutes, ils n'en ont visité que 95 pour cent ! Certaines personnes n'étaient pas là, mais on passa chez elles, et, sans leur absence, c'eût été un succès total.

Normalement, ils parviennent à en visiter environ 80 pour cent. Les instructeurs ont trois tâches. D'abord, ils donnent un enseignement qui est basé habituellement sur le message mensuel. Deuxièmement, ils viennent en aide à tous ceux qui ont des ennuis, ou, si cela leur est impossible, ils les renvoient à l'évêque. Leurs visites ont aussi pour but de favoriser l'activité dans la vie de l'Église.

Je viens donc, mes amis, de vous parler de l'Église mormone. Quel message y trouvons-nous ? En premier lieu, celui-ci : cette Église se compose de laïcs. Les seules personnes qui sont rémunérées sont celles qui consacrent la totalité de leur temps à l'Église, comme le personnel de bureau, le président de l'Église ou les douze apôtres, mais ce sont des exceptions. Il n'y a aucun habitant du pieu de Calgary qui soit rétribué. N'est-ce pas ahurissant ? C'est une Église de laïcs. Songez donc à l'oeuvre qu'ils réalisent.

Elton Trueblood [auteur et théologien américain] a dit qu'une révolution se produirait dans notre vie si les laïcs de l'Église chrétienne se rendaient compte que chacun d'entre eux est un ministre de Jésus-Christ. Les laïcs constituent le fondement de notre Église protestante, de notre Église presbytérienne. Si nous ne ranimons pas la foi des laïcs presbytériens et protestants, je ne pense pas que l'Église protestante ait un grand avenir. L'un des points capitaux de la Réforme est, je crois, que tous les hommes sont les prêtres de Dieu : « la prêtrise de tous les croyants ».

Voilà la vérité fondamentale que nous avons enseignée. Mais que s'est-il passé ? Nous avons rejeté tout le travail sur le dos du ministre de l'Église, à l'exception de quelques bagatelles, de quelques broutilles. Si nous ne pouvons amener de nouveau les laïcs de notre Église à enseigner et à faire des visites avec le même dévouement qu'autrefois, je vous assure que notre Église va dépérir.

À mon avis, l'Église presbytérienne, peut-être plus que toute autre, fournit l'exemple d'une Église décadente, parce que, plus que les autres, elle a insisté sur l'institution des anciens, qui font des visites. Quant au ministre, c'est un ancien qui ne diffère des autres que parce qu'il enseigne. Ne vous rappelez-vous pas que, dans le Nouveau Testament, les apôtres devaient enseigner et prier, et étaient ainsi mis à part, mais que les autres personnes choisies devaient pouvoir se consacrer entièrement à leur oeuvre et assumer les tâches qui n'incombaient pas aux apôtres ?

Mais que se passe-t-il maintenant ? Nous avons une mentalité ridicule, dont j'ai eu une preuve l'autre jour. Une femme, qui n'avait plus été visitée depuis quelque temps, me dit qu'elle ne venait plus à l'église parce que le ministre ne l'avait pas visitée. Les ministres sont censés aller de porte en porte, sonner, et perdre bêtement leur temps à prendre çà et là une tasse de thé. Quelle déchéance pour un ministre et quelle tâche indigne et impossible ! Dans notre ville, aucun ministre protestant ne peut faire les visites de ce genre que les paroissiens attendent de lui. Si les laïcs n'assument pas à nouveau leurs responsabilités, l'Église protestante n'a, je crois, aucun avenir.

Edgar A. Guest [1881-1959, poète américain] l'a dit :

« Laissez l'Église aux ministres, et bientôt elle mourra,
Laissez-la aux femmes, la jeunesse la dédaignera ;
Car l'Église nous élève de la foule vile et égoïste
Et l'Église qui veut réussir a besoin du concours des laïcs.

« Un laïc a ses affaires, un laïc a ses joies,
Mais il doit aussi s'occuper de l'éducation de ses jeunes enfants,
Et je me demande ce qu'il dirait s'il n'y avait pas ici d'Églises
Et s'il devait élever ses enfants dans une ambiance athée.

« C'est à l'Église qu'il appartient de maintenir le bien,
D'enseigner un mode de vie qui nous ennoblisse,
Mais le ministre en est incapable s'il ne reçoit pas d'aide,
Car les laïcs du pays sont la pierre angulaire de l'Église.

« Quand on voit une église vide, bien que ses portes soient grandes ouvertes,
Ce n'est pas l'Église qui se meurt, mais les laïcs qui sont morts,
Car l'oeuvre de l'Église ne se réalise pas par le chant ou le sermon
Mais ce sont les laïcs du pays qui doivent poursuivre l'oeuvre de Dieu. »

(extrait de Collected Verse d'Edgar A. Guest, 1934, The Reilly & Lee Co., Chicago)

Voici encore un enseignement de l'Église mormone : la religion ne doit pas être prise à la légère. II ne faut pas croire qu'elle n'exige aucun sacrifice, qu'elle n'impose aucune obligation. Une religion qui n'impose aucune obligation n'est pas une religion. Elle a perdu ce qui fait sa qualité et sa grandeur, et devrait être abolie. Dans notre Église, nous avons supprimé considérablement l'esprit de sacrifice. Nous n'exigeons plus des gens qu'ils se sacrifient et qu'ils souffrent pour l'Église. Comme un grand prédicateur l'a dit récemment : « Les multitudes ont rendu le christianisme si facile que nous ne sommes plus protestants ».

Il fut un temps où les protestants souffrirent pour leur foi, se sacrifièrent pour elle. Aujourd'hui nous trouvons que c'est un sacrifice d'aller à l'église quand il tombe quelques flocons de neige. Michel-Ange peignit, couché sur le dos, 343 personnages de la chapelle Sixtine sans jamais ôter ses vêtements. À la fin, lorsqu'il les enleva, la peau vint avec eux. Il souffrit tant pour peindre cette chapelle !

Semblables souffrances existent-elles encore aujourd'hui dans notre foi ? Le docteur Buchman [1878-1961, évangéliste chrétien protestant] dit avoir rencontré des chrétiens en Chine, qui s'étaient rendus chez des ennemis de la foi chrétienne, avaient été fusillés, entassés, arrosés d'essence et brûlés. Mais l'un d'eux n'avait pas été tué par la fusillade et ne brûla pas entièrement, mais fut affreusement défiguré par le feu. Il porte sur lui les marques de Jésus-Christ. Quels sacrifices certaines personnes font pour leur foi ! Faisons-nous rien de semblable ? La foi chrétienne, dit-on, n'occupe pas une grande place dans la vie d'un homme, mais c'est l'homme tout entier qu'elle accapare, et c'est vrai.

Le troisième enseignement de l'Église mormone est la nécessité d'avoir le sens de la mission. Elle le possède. Pour devenir importante, une Église doit avoir le sens de la mission. L'Église protestante pourrait l'avoir remarquablement, dans ce monde, mes frères, qui est submergé par le communisme et le matérialisme, ce monde où, chaque jour, des millions de gens deviennent athées, où nous avons assisté à une incroyable marée d'athéisme.

Pensez donc au défi lancé à notre foi, et celle-ci dépérit parce que le sens de la mission nous fait défaut. C'est du moins ce que dit un grand homme comme le docteur Stanley Jones [1884-1973, théologien et missionnaire chrétien méthodiste américain]. À son retour, il dit en voyant notre pays : « Jamais la jeunesse américaine n'a été si merveilleuse à beaucoup d'égards : en esprit d'à propos, en dynamisme et en intelligence. » C'est une jeunesse merveilleuse, mais, dit-il, sa principale faiblesse c'est que le sens de la mission lui fait défaut. Est-ce vrai ? À mon avis, ce l'est en grande partie.

Il y a peu de temps, à Vienne, une femme souffrit d'un mal qui la rendit complètement chauve ; elle perdait du poids et souffrait beaucoup, et l'on se demandait ce qu'elle avait. On lui ôta les amygdales, mais cela ne servit à rien ; on lui ôta l'appendice, mais elle n'alla pas mieux et ne retrouva pas ses cheveux. On lui enleva la vésicule biliaire, mais, une fois de plus, il n'y eut aucune amélioration. On se mit donc à étudier un peu plus soigneusement le milieu où elle vivait (le milieu, cette fois, et non plus la malade) et on découvrit qu'elle était empoisonnée par du plomb provenant de la peinture des murs qui l'entouraient : le poison qu'elle absorbait, c'était du plomb.

Eh bien, à mon avis, c'est encore plus terrible d'absorber, comme nous le faisons, le poison des idées mauvaises. L'atmosphère de notre monde est empoisonnée. Ce sont les pensées et les idées mauvaises qui rendent le monde malade. Nous devrions leur faire la guerre, mais une guerre de bonté.

Veuillez me pardonner de vous avoir parlé durement ce soir. C'est que je suis tellement inquiet. J'aime notre Église, je l'aime et je suis inquiet, et je crois, mes frères, que l'époque où nous vivons est dangereuse et difficile. J'ai voulu que l'assistance si nombreuse que j'ai devant moi ce soir prenne mieux conscience du besoin pressant qui est le nôtre.

Il y a peu de temps, à Houston, Texas, un garçon de 12 ans, Bobby Vick, était parti avec un autre petit garçon à la recherche de palourdes. Il s'avança de plus en plus dans la boue, s'aperçut finalement qu'il était dans les sables mouvants et qu'il ne pouvait en sortir. Il se mit à crier, et des hommes vinrent le retirer in extremis avec une corde.

Ce soir, quantité de garçons et de filles sont dans les sables mouvants. Voulez-vous les connaître ? Parcourez les rues de votre ville, sortez d'ici et descendez la Huitième Avenue. C'est là que vous les trouverez. Que faisons-nous, vous et moi, pour eux ? Ils ne font pas partie de l'Église, ni de quoi que ce soit qui ennoblisse leur vie. Que faisons-nous pour eux ?

Nous avons cette grande foi chrétienne qui était destinée à leur procurer la joie et une vie pleine, et cependant ces êtres sont là en train de se perdre, soumis à des influences pernicieuses, avec, en eux, à peine une étincelle de vérité chrétienne, de lumière chrétienne. Que faisons-nous pour eux ? Ils sont dans les sables mouvants de la vie, mais nous en soucions-nous vraiment, vous et moi ? Si c'est le cas, nous devrions faire beaucoup plus pour eux.

Prions. Ô Dieu, aide-nous à aimer comme Jésus-Christ nous aime, à nous soucier les uns des autres comme Jésus se soucia de nous, à accepter de nous sacrifier, à donner notre vie afin que les garçons et les filles pour qui le Christ est mort vivent dans le bien.

Nous prions au nom de Jésus-Christ. Amen.