La Traduction de Joseph Smith :
Rétrospective et perspectives d’avenir



Séance de questions – réponses



animée par Robert J. Matthews (1926-2009)


professeur d’Écritures anciennes à l’université Brigham Young
et spécialiste de la Traduction de Joseph Smith


 



Lors d’un colloque tenu à l’université Brigham Young sur la Traduction de Joseph Smith, les personnes présentes étaient invitées à poser des questions par écrit. Les questions étaient ensuite lues aux intervenants qui y répondaient.




QUESTION : Est-ce que la Version inspirée, telle qu'elle est publiée par l’Église réorganisée, est conforme au manuscrit d’origine ?

ROBERT J. MATTHEWS :

 

      Je peux répondre en toute confiance : oui. Une autre façon de poser la question serait : Est-ce que cette édition est fiable ? La réponse est oui. C'est quelque chose que nous ignorions il y a encore peu de temps. Je dois dire que si le manuscrit est correct, cette édition de la Version inspirée l’est aussi car ils ont suivi de près le manuscrit. Il y a eu quelques corrections d'orthographe et de grammaire, et quelques autres changements mineurs ; mais j’ai lu le manuscrit un certain nombre de fois et suis familiarisé avec ; et selon mon jugement et mon expérience, le manuscrit a été publié avec précision.

QUESTION : Pourquoi Joseph Smith a-t-il fait une nouvelle traduction de la Bible ?

ROBERT L. MILLET :

 

      Après ce qui a été présenté au cours des deux derniers jours, on peut supposer que personne n'est venu directement à Joseph Smith pour lui dire : Fais une traduction pour telle et telle raison. Il y a cependant un certain nombre de choses que nous devrions garder à l'esprit. Bien que nous n'ayons pas en notre possession la révélation commandant au prophète de commencer la traduction, ce dont nous disposons implique que lui et ses secrétaires avaient reçu cette tâche. Ceci apparaît clairement dans la vision des gloires [D&A 76] : « Car tandis que nous faisions le travail de traduction que le Seigneur nous avait confié » [verset 15]. Ainsi, l'une des raisons est que le Seigneur leur commanda de le faire.

      Deuxièmement, ce travail semble avoir servi d'éducation spirituelle pour le prophète lui-même. Malheureusement, certains ne comprennent pas pourquoi Joseph Smith a fait la traduction. De nombreuses personnes me demandent : « Joseph Smith n’a-t-il pas simplement mormonisé la Bible ? » Je suppose qu'ils entendent par là : a-t-il revu la Bible à la lumière de la doctrine mormone pour en faire une Écriture mormone ? Le problème avec ce raisonnement, c’est qu’en juin 1830 il y avait peu de « mormonismes » avec lesquels mormoniser la Bible. Le prophète avait traduit le Livre de Mormon, et assurément appris un certain nombre de choses à mesure qu'il traduisait. Cela s'est avéré être une partie de son éducation, ainsi que de l'éducation de l'Église. Voici donc une deuxième raison : l'éducation spirituelle du prophète.

      La troisième chose que je dirais est que la traduction de Joseph Smith nous montre comment la révélation vint à Joseph Smith : ligne sur ligne et précepte sur précepte, au fur et à mesure qu’il était en mesure d'examiner et de réviser certaines choses. Nous voyons que la révélation est venue souvent de manière graduelle. Dans un sens, la traduction de Joseph Smith est un modèle pour chaque membre de l'Église : étudier les Écritures non pour ce que nous savons déjà de leur contenu, mais pour ce que nous avons encore à y trouver. Ainsi, la traduction de Joseph Smith est pour nous un modèle de la façon de recevoir la révélation.

QUESTION : Joseph Smith a-t-il terminé la traduction, et sinon, jusqu’où l’a-t-il menée ?

MONTE S. NYMAN :

 

      Il n'a pas terminé la traduction. Je sais qu'il est écrit dans l'histoire de l'Église qu'il a terminé en juillet de 1833. Nous n'avons aucune idée du stade d'achèvement de son travail. Je pense qu'il a fait un travail très approfondi dans les premières parties de la Genèse et dans certaines parties du Nouveau Testament, mais il en est autrement des prophètes de l'Ancien Testament. Quand on examine le livre d’Ésaïe on se rend compte que de nombreux passages n’ont pas été touchés. Il n'y a pas moyen de savoir s’il a traduit 10 ou 20 pour cent de ce qu’il pouvait faire. Ce qu'il a fait, il a bien fait. Mais faute de temps et à cause d'autres facteurs, il y beaucoup de travail qu'il n'a pas eu le temps de faire.

ROBERT J. MATTHEWS :

 

      Frère Nyman m’autorisera à ajouter quelque chose : Comme vous le savez probablement, dans le processus de traduction, Joseph Smith a utilisé deux systèmes différents. En fait, trois. Quand ils ont commencé à traduire, ils écrivaient les Écritures intégralement, y compris des passages et des chapitres entiers où il n'y avait pas de modifications à apporter. Dans Doctrine et Alliances 93:53 le Seigneur dit en substance, au prophète : « Dépêche-toi de traduire ». C'est un coup de coude donné en douceur, une manière de dire : «Tu ne peux pas faire un peu plus vite ? » Ils ont alors adopté une méthode plus rapide qui consistait à ne réécrire que les versets qui devaient être modifiés. Finalement, après un certain temps ils ont adopté une méthode encore plus rapide : ils n’ont réécrit que les mots qui devaient être changés. Ils mettaient ensuite une petite marque dans la Bible à l’endroit où ce mot devait figurer. C'était encore plus rapide. Je ne sais pas exactement pourquoi, mais en harmonie avec ce que Monte [S. Nyman] disait, les passages qui ont été complètement réécrits ont généralement reçu davantage de modifications que les passages qui ont été traités de façon plus rapide. Ceci n’est qu’une observation technique qui vaut ce qu'elle vaut, mais qui semble indiquer que la méthode utilisée a eu une incidence sur de nombreux changements.

QUESTION : Pourquoi aucun autre président de l’Église n’a achevé la traduction de la Bible ?

JOSEPH F. McCONKIE :

 

      Je crois que la raison est évidente : pour tout ce qui concerne l'œuvre du Seigneur, nous devons être appelés par le Seigneur pour agir. Il y a eu sans aucun doute des prophètes spirituellement et intellectuellement qualifiés pour faire ce travail, mais ils n'ont pas été appelés à le faire. Permettez-moi de mentionner un cas classique qui illustre ce principe. Dans 1 Néphi chapitre 14, nous voyons Néphi recevoir la même révélation que Jean le Révélateur, celle enregistrée dans le livre de l'Apocalypse. Néphi a voulu l'écrire, et sa capacité à le faire n’était pas en cause. Il était sur le point de le faire quand le Seigneur lui a dit en substance : « Rien à faire, cette mission est prévue pour quelqu’un d’autre du nom de Jean » [voir 1 Néphi 14:20-28]. Peut-être Jean était-il encore en phase de préparation dans la préexistence, je ne sais pas. Mais Jean est venu six cents ans plus tard et a écrit la vision, ce qui était sa mission. Pour cette raison, Néphi a reçu l’ordre de ne pas le faire. Des prophètes qui ont été formés depuis l'éternité arriveront au bon moment pour faire ce travail.

QUESTION : Pourquoi l'Église, l'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours, n’accepte-t-elle pas la traduction de la Bible par Joseph Smith ?

ROBERT A. CLOWARD :

 

      La réponse est que nous acceptons la traduction de Joseph Smith. Mais depuis que la traduction a été faite, certaines parties qui ne sont plus à la disposition de l'Église. De 1832 à 1851, des parties de la traduction ont été publiées dans différents périodiques. En 1851, la première édition de la Perle de Grand Prix a été publiée à Liverpool, en Angleterre, y compris les parties que nous appelons aujourd'hui le Livre de Moïse et le chapitre 24 de Matthieu, qui ont été tirés directement de la traduction de Joseph Smith. Depuis cette époque, ces parties de la traduction de Joseph Smith font partie du canon des Écritures. Je pense que le livre qui les contient porte bien son nom : la Perle de Grand Prix. Je vois dans l'Église d'aujourd'hui un processus en cours qui est illustré par la parabole du Seigneur sur une perle de grand prix. Vous vous souvenez de la parabole de la perle cachée dans un champ. Quand il a découvert la perle, l’homme s'en est allé vendre tout ce qu'il avait et il a acheté le terrain. Je vois la traduction de Joseph Smith comme une perle et les membres de l’Église comme étant à la recherche du champ où elle se trouve. Ils font l'étude et le travail nécessaires pour acheter le terrain, trouver la perle et bénéficier de sa valeur. Bien que nous acceptions la traduction, le processus consiste en une démarche individuelle pour trouver et étudier le travail de Joseph Smith et bénéficier de sa valeur.

QUESTION : Pendant de nombreuses années nous avons appelé le travail de Joseph Smith « la Version inspirée ». Pourquoi l'appelons-nous maintenant « la Traduction de Joseph Smith » ?

GERALD N. LUND :

 

      Joseph Smith lui-même en plusieurs endroits de son histoire qualifie son travail de « traduction ». Le titre le plus typique est : « Nouvelle Traduction » de la Bible. Quand l'Église réorganisée en a publié une édition en 1936, ils ont choisi de l'appeler la Version inspirée. Les deux mots sont précis : une « version » de la Bible est évidemment un titre approprié, et il s'agit clairement d'une version « inspirée ». Si j’ai bien compris, lorsque le Comité de Publication des Écritures a parlé d’inclure des extraits de la traduction de Joseph Smith dans l’édition de la Bible publiée par l’Église, ils ont choisi comme titre le terme le plus fréquemment utilisé par le prophète, à savoir « traduction », ce qui a donné « Traduction de Joseph Smith ».

      Peut-être qu’une autre raison est d’ordre pratique : les références à la Version inspirée se notent en anglais IV, ce qui risque d’être confondu avec le chiffre romain IV. JST est plus lisible.

ROBERT J. MATTHEWS :

 

      Aussi, si on l’avait appelé « Nouvelle Traduction », cela aurait donné NT en abrégé, ce qui est déjà la façon d’abréger « Nouveau Testament ». Pour ces raisons, on l’a appelé la « Traduction de Joseph Smith ». Autre chose : nous éprouvons du respect pour l'Écriture. Nous ressentons du respect pour les paroles des prophètes, chacun des prophètes. Donner le nom JST n'est pas un choix fait à la légère ou d façon téméraire. Cette suggestion a été faite par le Comité de Publication des Écritures, composé des frères Monson, Packer et McConkie, au cours d’une réunion au temple avec la Première Présidence et le Collège des Douze. C’est là qu’elle a été adoptée officiellement. Cette partie de l’œuvre de Joseph Smith a été officiellement adoptée en tant que « Traduction de Joseph Smith » par ces frères dans le temple, et officiellement abrégée « JST ».

QUESTION : Pourquoi Joseph Smith, dans ses sermons, citait-il parfois la version du roi Jacques alors qu’il avait déjà corrigé les mêmes passages ?

CLYDE J. WILLIAMS :

 

      Tout d'abord, je pense qu’aucune édition complète de la JST n’étant disponible à cette époque, il aurait été très difficile pour les gens de savoir exactement à quoi il faisait allusion.

      C'est une des raisons possibles. Un autre facteur peut avoir été les gens auxquels il s’adressait et ce qui leur servait de référence. Permettez-moi de vous donner un exemple tiré de Doctrine et Alliances 128, où l'on trouve un passage assez intéressant. Le prophète Joseph vient de citer Malachie 4:5-6 qui est cité de façons différentes dans deux ou trois endroits dans nos Écritures. Après avoir cité ce passage, il fait cette déclaration : « J’aurais pu en donner une traduction plus claire, mais elle est suffisamment claire pour telle qu’elle est pour ce que je veux montrer ». Et puis il développe. Le fait est que, souvent, ce qu’il était nécessaire de tirer d'un passage particulier pouvait être tiré de la version du roi Jacques, de sorte qu'il la citait telle quelle, son public étant familiarisé avec elle et ayant accès à cette version.

      Un autre exemple pourrait être Hébreux 11:40, où l'on retrouve dans la version du roi Jacques ce qui semble être une référence à l’œuvre pour les morts : « …afin qu’ils ne parvinssent pas sans nous à la perfection », etc. Dans la JST ce verset parle de souffrances endurées. En lisant tout le chapitre, on voit qu’il est question de ceux qui ont enduré des souffrances et du rôle de ces souffrances dans leur perfectionnement. Et ainsi, les modifications qui apparaissent dans la JST cadrent avec le contexte du chapitre. Pourtant, à maintes reprises plus tard, Joseph Smith se réfère à ce passage dans le cadre
de l’œuvre pour les morts. Je pense que la raison est que le principe est correct dans les deux cas. Le prophète Joseph Smith ne se sentait pas lié par l’écrit, mais plutôt par la révélation et par les principes vrais.

QUESTION : Quelles preuves avons-nous que Joseph Smith avait l'intention de publier sa traduction de la Bible et s'il existe des preuves, pourquoi ne l’a-t-il pas publiée ?

KEITH W. PERKINS :

 

      Probablement pour deux raisons : le temps et l'argent. Dans Doctrine et Alliances 43:12-13 le Seigneur dit clairement que les saints, s'ils veulent apprendre les mystères du royaume par le prophète Joseph, ils doivent le soutenir financièrement et temporellement. Il est intéressant de noter que les saints des derniers jours avaient en la personne de Joseph Smith un prophète, voyant et révélateur, un maire, un administrateur et un traducteur, et pourtant il devait pourvoir aux besoins de sa famille : construire sa maison, couper son bois, etc. Et le Seigneur a dû leur rappeler que s'ils voulaient que Joseph ait le temps de faire ce qu’il faut pour recevoir la doctrine, ils devaient l'aider en lui donnant argent, nourriture, etc. Malheureusement, cela n'a pas été fait aussi souvent que nécessaire. Par conséquent, nous n'avons pas obtenu autant que nous aurions pu obtenir. La section 94 parle de bâtiments qui devaient être construits à Kirtland. Un de ces bâtiments devait être construit pour le travail d’impression de la traduction de Joseph Smith. La section 104 parle de la publication des textes sacrés, se référant à la nouvelle traduction. Par ailleurs, dans le manuscrit de la section 104, il est fait référence au droit d'auteur qui devait être obtenu pour la nouvelle traduction de la Bible. Ce droit d'auteur n'a jamais été retrouvé, mais il a été apparemment obtenu.

      Enfin, le Seigneur dit dans Doctrine et Alliances 124:89 que William Law avait la responsabilité de donner de ses moyens pour que la nouvelle traduction puisse être publiée. Dans l’histoire de l'Église, comme certains d'entre vous le savez, William Law a commencé à perdre son témoignage et en fait n'a pas suivi le conseil du Seigneur à ce sujet. Je suppose que si William avait fait ce qu'il aurait dû faire, la traduction aurait été imprimée beaucoup plus tôt. Au lieu de cela, nous avons dû attendre plus de 125 ans avant que nous puissions la faire imprimer dans notre propre littérature, ce qui grandement dommage. Mais il est certain que le Seigneur voulait qu’ils la publient. En 1833, Joseph Smith a écrit une lettre à W.W. Phelps, qui avait publié quelques-unes des traductions dans le Evening and Morning Star. Il demandait à Phelps de ne pas publier davantage, le prophète ayant l'intention de publier le Livre de Mormon et le Nouveau Testament JST en un seul volume. Mais cela n'a jamais été réalisé, le prophète n’ayant pas eu le temps de terminer la traduction.

QUESTION : Comment doit-on utiliser la JST dans l'enseignement de l'Évangile ?

GEORGE A. HORTON :

 

      Je pense que la réponse à cette question sera évidente pour chacun de nous. Nous devons l'utiliser de la meilleure manière que nous pouvons, exactement comme nous le ferions avec toute autre Écriture. La première chose à faire est d'être conscient qu'il y a des apports de la traduction de Joseph Smith qui peuvent être appropriés pour tel ou tel sujet. En un sens, c'est comme placer un morceau d'un puzzle. Plus on place de morceaux, plus l’image apparaît clairement. Certains morceaux viendront de la JST.

      En décembre 1974 un article de Church News disait qu'il était approprié d'utiliser la
JST pour enseigner la doctrine de l’Église ou écrire à son sujet. L’article suggérait cependant que si la question à l'étude était déjà commentée dans nos ouvrages canoniques, il serait approprié de les citer en premier. En d'autres termes, s'il y a quelque chose dans le Livre de Moïse, citons le Livre de Moïse en premier plutôt que de citer le même verset dans la traduction de Joseph Smith. Une fois qu'on a utilisé les ressources des ouvrages canoniques, on peut alors se tourner vers d’autres sources disponibles.

      La seule chose que je pourrais ajouter à cela est que nous devons le faire avec le témoignage, par l'Esprit et en sachant que ces choses sont inspirées et que le Seigneur leur a donné un but. Ainsi, si nous ne pouvons trouver aucun autre outil que la JST, il est évident qu'elle aura une certaine importance et qu’il sera approprié de s’en servir dans notre enseignement.

QUESTION : Recommanderiez-vous que les missionnaires utilisent la JST dans l'enseignement de l'Évangile ?

GEORGE A. HORTON :

 

      Si j'étais en présence des missionnaires de ma propre branche au MTC et qu’un missionnaire me demande : « Faut-il utiliser la JST ? » je pense que ma réponse serait immédiate : Non, du moins pas au début. Je crois que le rôle du missionnaire n'est pas d'enseigner les doctrines les plus profondes de l'Église. La première chose qu'il doit faire est de témoigner du Seigneur et du rétablissement de l'Évangile par l'intermédiaire du prophète Joseph Smith. Ceci étant établi, je suppose que s’ils ont affaire à quelqu’un qui cherche la vérité ou, mieux encore, à un membre de l'Église qui a accepté le message du Rétablissement, qui a un témoignage du prophète, qui a lu et connaît le Livre de Mormon, alors peut-être sera-t-il approprié qu’ils passent à autre chose. Mais je pense que ce serait contre-productif s’ils devaient dès l’abord utiliser la JST. Ils pourraient utiliser la JST une fois que la personne a accepté le prophète comme le représentant de Dieu. Si elle accepte cela, les missionnaires travaillent sur une bonne terre. Il y a une petite mise en garde dans le premier chapitre du Livre de Moïse, où le Seigneur dit que ces choses doivent être données à ceux qui croient. Avec cette mise en garde à l'esprit, je pourrais en parler à cette personne, mais je ne l'utiliserais qu’au moment, dans sa progression, où elle est prête à le recevoir.

QUESTION : Pourquoi a-t-on inclus seulement huit chapitres de Moïse dans la Perle de Grand Prix ? Franklin D. Richards, qui a compilé la Perle de Grand Prix en 1851, n’avait-il pas accès à plus que cela ?

ROBERT J. MATTHEWS :

 

      Il semble que Franklin D. Richards n'a pas eu plus que cela. En fait, si quand on examine l’édition de 1851 de la Perle de Grand Prix, le texte que nous appelons maintenant Moïse est disposé sommairement et au coup par coup, une partie ici et une partie sur une autre page ; et rien de tout cela n’est appelé le Livre de Moïse. C’est simplement qualifié d’Extraits d'une autre traduction. C’est Orson Pratt qui plus tard, en 1879, a placé ces textes dans la Perle de Grand Prix et qu'ils ont commencé à ressembler à notre actuel Livre de Moïse. Il semble tout à fait approprié - peut-être le moment viendra-t-il – que le Livre de Moïse et la Perle de Grand Prix puissent un jour être complétés. Il semblerait logique pour moi qu'ils soient complétés au moins jusqu'à Abraham, pour avoir la continuité des événements dans la Perle de Grand Prix. Comme indiqué précédemment, les Écritures sont sacrées et utilisées avec précaution. De toute façon, ce genre de chose doit d’abord être recommandé et approuvé par la Première Présidence et le Collège des Douze. Je ne sais pas si cela arrivera ni quand, mais cela peut arriver un jour.

QUESTION : Qui est l’auteur des chapeaux précédant chaque chapitre dans la Bible éditée par l’Église, dans le Livre de Mormon, dans les Doctrine et Alliances et dans la Perle de Grand Prix ?

ROBERT J. MATTHEWS :

 

      Je vais vous le dire, mais permettez-moi de commencer par autre chose. Le Comité de Publication des Écritures a utilisé les compétences de nombreuses personnes dans de nombreux aspects de ce projet. Il s'agissait d'un projet de groupe et il était convenu que, bien que certaines personnes aient accompli certaines choses, leur nom ne serait pas cité. Voilà pourquoi vous ne pouvez pas trouver, dans les ouvrages publiés, qui a fait quoi. Je pense que ce ne serait pas une violation de l'étique ou de la confidentialité si je disais, ce que je fais avec plaisir, que Bruce R. McConckie est l’auteur de ces chapeaux. Je ne connais personne qui aurait pu le faire aussi bien que lui. Tous ces chapeaux ont un caractère d’interprétation et sont à ce titre un élément important de la nouvelle édition des Écritures. Parfois les gens me disent : « Nous avons un merveilleux Guide des Écritures (laissez-moi vous dire qu'il y a des gens ici qui ont contribué à son élaboration), « il y a beaucoup d'autres bonnes choses dans cette nouvelle édition des Écritures, mais il n'y a aucun commentaire ». J’ai été frappé un jour par le fait que les commentaires sont dans les têtes de chapitre. Faites un jour l’expérience de lire les chapeaux et seulement les chapeaux des quinze premiers chapitres de la Genèse. Vous constaterez non seulement que ces chapeaux résument bien chaque chapitre, mais aussi qu’ils s’enchaînent parfaitement entre eux.

QUESTION : Hier après-midi vous avez fait allusion à Doctrine et Alliances 35:18 où le Seigneur dit à propos de Joseph Smith : « Et je lui ai donné les clefs du mystère de ces choses qui ont été scellées, c’est-à-dire des choses qui étaient depuis la fondation du monde et des choses qui viendront depuis ce moment jusqu’au moment de ma venue… » Cela signifie-t-il qu’à l’avenir aucun mystère ne sera révélé autrement que par Joseph ?

ROBERT J. MATTHEWS :

 

      Je ne pense pas que c'est ce que cela signifie, mais je crois que la plupart de la doctrine de cette dispensation a été révélée par le prophète Joseph Smith. Frère McConkie y fait allusion dans son discours. Dans Doctrine et Alliances 5:10 le Seigneur dit à Joseph Smith : « Mais cette génération aura ma parole par ton intermédiaire ». Cela ne limite pas la parole à Joseph, mais signifie qu'il a jeté les bases doctrinales.

QUESTION : Peut-on et devrait-on acheter la traduction de la Bible par Joseph Smith pour l’utiliser dans l'enseignement des classes dans l'Église ? Est-il opportun de le faire ?

ROBERT J. MATTHEWS :

 

      Je pense que tout le monde sur l’estrade derrière moi et les deux tiers d'entre vous dans l’assistance répondraient à cette question : « Oui, vous pouvez », « Oui, vous devriez », « Oui, c’est approprié », ce qui suscite une autre question :

QUESTION : Comment se fait-il que seulement des extraits de la traduction de Joseph
Smith aient été inclus dans la Bible éditée par l’Église, et pas l’intégralité de sa traduction ?

ROBERT J. MATTHEWS :

 

      Dans la Bible du roi Jacques éditée par l’Église, près de 700 versets de la JST ont été inclus dans les notes de bas de page et dans le Guide des Écritures. Il ne semblait pas nécessaire d'inclure dans ces annexes le texte du Livre de Moïse ou le texte du chapitre 24 de Matthieu, car on a estimé que tous ceux qui possédaient la Bible éditée par l’Église possédaient également un exemplaire de la Perle de Grand Prix. Il semblait y avoir un gain de place à ne pas inclure le texte de Moïse et du chapitre 24 de Matthieu dans ces annexes. On compte près de 700 versets insérés ainsi dans la Bible, auxquels s’ajoutent les plus de 400 du Livre de Moïse et les 70 environ du chapitre 24 de Matthieu, ce qui donne environ 1150 passages ou versets de la JST dans notre édition des Écritures. Ceci pour donner une idée des chiffres.

      Maintenant, pourquoi n'a-t-on pas tout inclus ? Je peux vous donner deux raisons. D'abord, l’édition complète est déjà énorme. Deuxièmement, elle contient déjà pratiquement tous les changements significatifs du point de vue doctrinal. C’était une question de jugement. Une autre considération pratique, c'est que l'Église réorganisée est propriétaire du manuscrit original, et qu’il est sous copyright. Il est protégé au maximum de ce que la loi permet. Il semblait prudent de ne pas aller les voir pour leur dire : « Nous souhaitons obtenir de votre part toute la JST ». On a donc fait une sélection d'environ 700 versets, une liste de ces versets a été préparée, et elle a été présentée à l'historien de l’Église réorganisée. Nous avons expliqué que nous avions le projet d'une édition de la Bible et avions l’intention d'y inclure des extraits de la JST. L'historien de l’Église réorganisée a estimé que ce serait une excellente idée. Lorsque le travail a été fait, nous voulions un accord entre les maisons d'édition, Herald pour l'Église réorganisée et Deseret Book Company pour l’Église. Un contrat juridique a été élaboré et l'Église réorganisée a été conciliante et même ravie que nous ayons l’intention d’utiliser la JST. Vous voyez, c'est un bon signe, et cela nous a laissé un doux sentiment. Notre édition des Écritures ne contient pas toute la JST, mais je pense que nous avons tout ce qui est doctrinalement important.

QUESTION : Quelle est la position actuelle de l'Église réorganisée à propos de la Version inspirée ?

ROBERT J. MATTHEWS :

 

      Permettez-moi de faire une comparaison. Je ne peux pas parler au nom de l'Église réorganisée. Officiellement, ils tiennent la JST en honneur et la considèrent avec respect. Mais je crois avoir décelé un glissement parmi eux sur certaines questions. L'Église réorganisée voit d’un mauvais œil le Livre d'Abraham. En fait, si vous étudiez l'histoire des réorganisés, vous les voyez progressivement accepter de moins en moins le Livre d'Abraham jusqu'à le rejeter complètement aujourd’hui. Certains d'entre eux ont montré la même tendance avec le Livre de Mormon. Ils ne l'ont pas rejeté, mais ont commencé à en minimiser la valeur doctrinale et historique. Il y a parfois une différence d’un membre à l’autre. De même qu’il serait difficile de dire que tous les saints des derniers jours croient ceci ou ne croient pas cela, de même les réorganisés n’ont pas tous une croyance identique. Un bon nombre d'entre eux (certains de leurs dirigeants) ont adopté une position a minima vis-à-vis du Livre de Mormon. Maintenant, quelle est la position actuelle de l'Église réorganisée en ce qui concerne la traduction de Joseph Smith ?

      Ce que je veux dire, c’est qu’il se peut qu’il en soit de même que pour le Livre d'Abraham et le Livre de Mormon. Comment pourrait-il en être autrement ? Ce qui distingue la JST de la Bible est d’ordre doctrinal. Mais après une centaine d'années, il semble qu'ils soient un peu négligents dans leur façon de considérer la doctrine, et donc il me semble que la JST est moins tenue en haute estime aujourd'hui par les réorganisés qu’il y a une centaine d’années. Maintenant, il se peut que vous ayez parmi vos voisins un membre de l’Église réorganisée qui démentira. Il se peut que ce que je dis ne soit pas vrai pour lui, pourtant la JST ne semble plus aujourd’hui avoir tout à fait le même éclat et la même brillance parmi les réorganisés officiels qu'elle avait il y a cent ans. L’ont-ils rejetée ? Non, mais je pense qu'ils ont rejeté, ou du moins négligé certains des concepts qui s’y trouvent.


Source : Monte S. Nyman and Robert L. Millet, “The Joseph Smith Translation: The Restoration of Plain and Precious Things”, Religious Studies Center Monograph Series, vol. 12, 1985, Provo, Utah, Religious Studies Center, Brigham Young University, 2nd Printing, 1987, Produced and Distributed by BOOKCRAFT, INC. Salt Lake City, Utah