La nécessité des temples à notre époque

 

 

James E. Talmage (1862-1933)

 

Président de l'université d'Utah de 1894 à 1897

Membre du collège des Douze de 1911 à 1933

 

 

      

    Parmi les nombreuses confessions qui se réclament du christianisme, l'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours est la seule qui enseigne et pratique un ministère exercé dans un temple. L'ardeur avec laquelle ces gens se dévouent à l'œuvre sacrée de construire des temples et à y administrer les ordonnances de l'Évangile pour le salut, ne cesse d'attirer l'attention et de susciter l'étonnement, aussi bien des philosophes que des profanes. Il ne suffit pas de tenter d'expliquer ce sacrifice singulier et stupéfiant en l'attribuant à quelque fanatisme supposé et non encore prouvé ; l'investigateur consciencieux, l'observateur soigneux, et même le lecteur superficiel - s'il se trouve être honnête - admettent qu'au-dessous de cette dévotion il y a une foi profondément enracinée et durable. On ne peut affirmer que les saints des derniers jours construisent des temples comme signe de la richesse de leur communauté ou pour s'enorgueillir d'une grandeur humaine ; car nous les trouvons déjà opiniâtrement engagés dans cette œuvre à un moment où le pain et les vêtements étaient rares chez eux ; et tout au long de leur histoire, ces gens ont considéré leurs temples comme des édifices appartenant au Seigneur, eux-mêmes étant les intendants à qui était confiée la garde de ces biens sacrés. On ne peut dire non plus que cette Église construit des temples comme d'autres confessions érigent des chapelles, des églises, des cathédrales, et des synagogues ; car l'Église possède l'équivalent de celles-ci, et le fait est que les lieux de réunion et de culte publics tenus par les saints des derniers jours sont proportionnellement plus nombreux que ceux des autres dénominations. En outre, leurs temples ne sont pas utilisés comme lieux de réunion commune, ni comme des bâtiments destinés à un culte général et communautaire.

 

Pourquoi, dès lors, l'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours construit-elle et entretient-elle des temples ? En guise de réponse, considérons les faits que voici, qui ont trait à cette matière :

 

Il est nécessaire d'obéir aux lois et aux ordonnances de l'Évangile

 

     Dans ses articles de foi, l'Église proclame :

 

 « Nous croyons que, par le sacrifice expiatoire du Christ, tout le genre humain peut être sauvé, en obéissant aux lois et aux ordonnances de l'Évangile » (Articles de Foi, 3).

 

Tout en professant croire en la possibilité d'un salut universel, l'Église affirme que le salut n'est assuré qu'à la condition que l'individu satisfasse aux exigences posées par le Rédempteur, sans le sacrifice expiatoire de qui personne ne pourrait être sauvé. L'expiation réalisée par le Christ au Calvaire était une offrande vicariale, et toute l'humanité participe à ses conséquences bénéfiques. En ce qui concerne le rachat de cet esclavage qu'est la mortalité consécutive à la transgression en Eden, le sacrifice que le Christ a fait de sa vie satisfait entièrement aux exigences que pose l'infraction à la loi ; et personne à part Adam ne sera tenu pour responsable de la désobéissance d'Adam ni d'aucune de ses conséquences. Au juste jugement auquel tout mortel devra comparaître, tout sera dûment pesé et considéré : l'état de faiblesse reçu en héritage, les tentations dues aux circonstances, l'aptitude à choisir et à agir, la mesure de la connaissance atteinte par le sujet, la quantité de vérité qu'il a acceptée ou rejetée, les occasions qu'il a utilisées judicieusement ou dédaignées à tort, la fidélité avec laquelle il a marché dans la lumière, ou la dépravation qui lui a fait emprunter les sentiers interdits des ténèbres, en un mot, chaque fait, chaque circonstance constituant sa vie individuelle. Au tribunal de Dieu, le trait distinctif de la miséricorde divine sera, tout comme il l'est actuellement dans la vie mortelle, non pas un pardon arbitraire du péché ni une remise imméritée de la dette du coupable, mais le fait de fournir au pécheur un moyen de se mettre en règle avec les exigences de l'Évangile et passer ainsi en temps voulu de la prison du péché à la glorieuse liberté d'une vie juste.

 

Un seul prix est exigé pour le pardon des transgressions de l'individu, et il est le même pour tous, pour les pauvres comme pour les savants ; il ne connaît pas de fluctuations, il ne change pas avec le temps ; il était le même hier qu'aujourd'hui, et il le restera à jamais, et ce prix, qui est celui d'une perle sans prix, c'est l'obéissance aux lois et aux ordonnances de l'Évangile.

 

Écoutez cette autre déclaration de foi enseignée par l'Église rétablie :

 

« Nous croyons que les premiers principes et ordonnances de l'Évangile sont : 1) La foi au Seigneur Jésus-Christ ; 2) La repentance ; 3) Le baptême par immersion pour la rémission des péchés ; 4) L'imposition des mains pour le don du Saint-Esprit » (Articles de Foi, 4).

 

La foi dans le Seigneur Jésus-Christ est le principe fondamental de l'Évangile, la première lettre de l'alphabet du salut, dans lequel s'écrivent les paroles de vie éternelle. Or, qui peut avoir foi en quelque chose dont il ne sait rien ? La connaissance est essentielle à la foi, et la foi incite celui qui la possède à rechercher davantage de connaissance et de transformer cette connaissance en sagesse, qui n'est que la connaissance appliquée, utilisée. Prêcher le Christ crucifié (1 Corinthiens 1:23 ; 2:2), c'est absolument la seule façon d'enseigner la foi en lui par le moyen du précepte et de l'exemple. Bien que connaissance et foi soient ainsi étroitement associées, elles ne sont pas identiques, l'une n'est pas le prolongement assuré de l'autre. Il se peut qu'un homme ait appris la vérité et pourtant l'ignore. Sa connaissance, loin de développer en son âme la foi qui dirige les actions justes, ne peut qu'aggraver sa condamnation, car il pèche sans même avoir l'excuse de l'ignorance. Les mauvais esprits ont témoigné de leur connaissance que Jésus est le Christ, néanmoins ils restent les disciples déchus de Satan (Marc 1:24 ; 3:11 ; 5:1-18 ; et Matthieu 8:28-34). À mesure qu'une foi vivante se développe dans l'âme de l'homme, elle entraîne son possesseur à chercher le moyen de s'élever au-dessus de la servitude du péché ; et la pensée même de cette émancipation inspire un dégoût pour la contamination passée du mal. Le fruit naturel de cette glorieuse croissance, c'est la repentance.

 

La repentance, qui est exigée de tous les hommes, constitue le deuxième principe de l'Évangile du Christ. Elle comprend un regret sincère des péchés passés et leur abandon résolu, avec la détermination solennelle de s'efforcer - Dieu aidant - de n'y jamais revenir. La repentance vient de Dieu comme un don à celui qui a accumulé et développé en soi ce premier don qu'est la foi. On ne l'obtient pas en la demandant négligemment ; elle ne se trouve pas au milieu de la grand-route ; elle n'est pas de la terre, c'est un trésor du ciel ; elle ne se donne qu'à bon escient, et pourtant avec une libéralité sans bornes à ceux dont les œuvres en garantissent l'attribution. C'est-à-dire que tous ceux qui se préparent à la repentance seront amenés par l'influence toute de douceur et d'humilité du Saint-Esprit à la possession effective de ce grand don. Lorsque Pierre fut accusé par ses coreligionnaires d'avoir enfreint la loi en fréquentant des Gentils, il parla à ses auditeurs des manifestations divines qu'il venait de recevoir ; ils crurent et déclarèrent : « Dieu a donc accordé la repentance aussi aux païens, afin qu'ils aient la vie » (Actes 11:18). Paul également, dans son épître aux Romains, enseigne que la repentance procède de la bonté de Dieu (voir Romains 2:4).

 

Le fait de persister volontairement dans le péché peut amener la perte de l'aptitude à se repentir ; si l'homme remet à plus tard le moment de la repentance, il encourt cette perte et la rend de plus en plus certaine. La parole divine, rapportée par la bouche d'un prophète moderne, est très explicite :

 

     « Car moi, le Seigneur, je ne puis considérer le péché avec le moindre degré d'indulgence ;


     « Néanmoins, celui qui se repent et obéit aux commandements du Seigneur sera pardonné ;


« Et à celui qui ne se repent pas, on ôtera même la lumière qu'il a reçue ; car mon Esprit ne luttera pas toujours avec l'homme, dit le Seigneur des armées » (Doctrine et Alliances 1:31-33).

 

Les saints des derniers jours croient et enseignent que la repentance sera possible et effectivement exigée de la part de ceux qui ne se seront pas encore repentis, même après la mort ; et ils affirment que cette doctrine est appuyée par les Écritures, tant anciennes que modernes. Nous lisons que, pendant que le corps de notre Seigneur était couché dans le tombeau entre le soir du jour de la crucifixion et l'aube glorieuse de sa résurrection, lui-même exerçait un ministère dans le monde des esprits désincarnés. Pierre déclare expressément que notre Seigneur « est allé prêcher aux esprits en prison, qui autrefois avaient été incrédules, lorsque la patience de Dieu se prolongeait, aux jours de Noé » (1 Pierre 3:19-20 ; comparez avec 4:6). Le contexte dans lequel apparaissent ces paroles de l'apôtre inspiré montre que l'événement auquel il est fait allusion se produisit avant la résurrection du Sauveur. En outre, on se souviendra que l'un des larrons dont la croix se dressait à côté de celle de Jésus manifesta sa foi et même un certain degré de repentance et reçut du Christ souffrant une bénédiction avec cette assurance : « Aujourd'hui tu seras avec moi dans le paradis » (Luc 23:39-43). On ne peut soutenir que cette promesse signifiait que le pécheur repentant allait passer directement de la croix au Ciel - lieu où les rachetés seulement demeurent en la présence de Dieu - car assurément ce pénitent souffrant n'avait eu aucune occasion de témoigner effectivement sa repentance en se conformant aux lois et ordonnances de l'Évangile, et faute de s'être conformé - fût-ce seulement à l'exigence du baptême d'eau - cet homme ne pouvait pénétrer dans le royaume de Dieu, ni le voir, sinon la parole du Christ se serait révélée fausse (voyez la déclaration de notre Seigneur à Nicodème : Jean 3:1-5.) De plus, pour achever de prouver qu'entre le moment de la mort et de la résurrection du Christ, ni lui ni le pécheur repentant n'étaient allés dans la demeure de Dieu, nous avons les paroles du Seigneur ressuscité à Madeleine en pleurs : « Je ne suis pas encore monté vers mon Père » (Jean 20:17).

 

Mis en face de cette affirmation scripturale selon laquelle le Christ désincarné visita et exerça son ministère parmi les esprits qui avaient été désobéissants et qui étaient retenus en captivité parce que leurs péchés n'étaient pas pardonnés, il convient de nous renseigner sur la portée et l'objet du ministère de notre Sauveur parmi eux. Sa prédication a dû être riche de sens et positive ; en outre, on ne peut supposer que son message ait apporté autre chose que du soulagement et de la miséricorde. Ceux vers qui il allait étaient déjà en prison et ils s'y trouvaient depuis longtemps. Si le Rédempteur est allé vers eux c'est pour leur prêcher, non pour les condamner davantage, pour ouvrir la route qui menait à la lumière et non pour renforcer les ténèbres du désespoir dans lequel ils languissaient. Cette visite libératrice n'avait-elle pas été prédite depuis longtemps ? Plusieurs siècles avant cette époque fatale, Ésaïe avait prophétisé, parlant d'esprits fiers et méchants : « Ils seront assemblés captifs dans une prison, ils seront enfermés dans des cachots et, après un grand nombre de jours, ils seront châtiés » (Ésaïe 24:22). Ailleurs, parlant du ministère dévolu au Christ, la même voix prophétique inspirée déclarait qu'une partie de cette œuvre était « pour être la lumière des nations, pour ouvrir les yeux des aveugles, pour faire sortir de prison le captif, et de leur cachot ceux qui habitent dans les ténèbres » (Ésaïe 42:6-7). David, débordant d'émotion, de contrition et d'espoir chantait dans des vers où se mêlaient joie et tristesse : « Aussi mon cœur est dans la joie, mon esprit dans l'allégresse, et mon corps repose en sécurité. Car tu ne livreras pas mon âme au séjour des morts » (Psaumes 16:9-10). 

 

Ces Écritures ainsi que d'autres nous apprennent que le ministère du Christ ne se limitait pas au petit nombre de ceux qui vivaient leur existence mortelle pendant la brève période de sa vie terrestre, ni même aux personnes de cette génération-là et des générations futures, mais qu'il s'adressait à tous, les morts, les vivants, et ceux qui n'étaient pas encore nés. On ne peut nier que des millions de gens avaient vécu et étaient morts avant le midi des temps, et que, parmi ces multitudes comme parmi tous ceux qui sont nés depuis lors, innombrables sont ceux qui sont morts sans avoir connaissance de l'Évangile et du plan de salut qu'il prescrit. Quelle est leur situation ? Et, en somme, quelle sera la situation des habitants actuels de la terre et des multitudes encore à venir qui mourront dans l'ignorance et sans avoir la foi qui sauve ? Demandons-nous encore une fois, comment ceux qui ne connaissent pas le Christ peuvent-ils avoir foi en lui, et comment, ne possédant ni la connaissance ni la foi, peuvent-ils profiter des dispositions prévues pour leur salut ?

 

L'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours affirme que le plan de salut n'est pas limité par la tombe, que l'Évangile ne tient pas compte de la mort, et qu'il est éternel depuis les âges écoulés jusqu'aux éternités à venir. Il ne fait pas de doute que le ministère du Sauveur parmi les morts comportait la révélation de sa propre mort expiatoire, la prédication de la foi en lui-même et dans le plan de conception divine qu'il représentait, ainsi que la nécessité d'une repentance acceptable aux yeux de Dieu. Il est raisonnable de croire que les autres exigences essentielles comprises dans les « lois et ordonnances de l'Évangile » furent portées à leur connaissance.

 

Il peut sembler, à un lecteur moins réfléchi, qu'enseigner la possibilité de se repentir au-delà du tombeau, cela peut tendre à affaiblir la croyance en l'absolue nécessité d'un repentir et d'une réforme dans cette vie. Toutefois, après avoir considéré soigneusement la question, il apparaîtra que cette doctrine ne justifie pas une telle objection. Rejeter ou ignorer à quelque degré que ce soit un don de Dieu, c'est renoncer dans une mesure proportionnelle aux droits que l'on peut faire valoir sur ce don. Pour l'âme qui aura négligé volontairement les occasions de se repentir qui se seront offertes ici-bas, la repentance dans l'au-delà peut être - et on peut effectivement croire avec raison qu'elle sera - si difficile qu'elle n'y atteindra pas avant longtemps. Cette conception est justifiée par l'Écriture ainsi qu'en témoignent les paroles d'Amulek, un prophète néphite qui admonesta en ces termes l'Église sur le continent occidental quatre-vingts ans avant la naissance du Christ :

 

« Car voici, cette vie est le moment où les hommes doivent se préparer à rencontrer Dieu ; ... pour cette raison, je vous supplie de ne pas différer le jour de votre repentance jusqu'à la fin ; ... Vous ne pourrez pas dire, quand vous en arriverez à cette crise terrible : Je veux me repentir, je veux retourner à mon Dieu. Non, vous ne pourrez pas le dire ; car ce même esprit qui possède votre corps au moment où vous quittez cette vie, ce même esprit aura le pouvoir de posséder votre corps dans le monde éternel. Car voici, si vous avez différé le jour de votre repentance, jusqu'à la mort, voici, vous vous êtes assujettis à l'esprit du diable, et il vous scelle à lui comme siens » (Livre de Mormon, Alma 34:32-35).

 

Le baptême d'eau est enseigné par l'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours comme étant une ordonnance essentielle de l'Évangile. Le baptême est la porte qui mène à la bergerie du Christ, le portail de l'Église, le rite prescrit de naturalisation dans le royaume de Dieu. Celui qui présente sa candidature à l'admission dans l'Église, ayant obtenu et professé sa foi dans le Seigneur Jésus-Christ, et s'étant sincèrement repenti de ses péchés, est requis, comme il convient, de fournir la preuve de sa sanctification spirituelle par quelque ordonnance extérieure, prescrite par l'autorité comme le signe ou le symbole de cette nouvelle profession. Cette ordonnance initiatrice, c'est le baptême d'eau, qui doit être suivi d'un baptême plus élevé, celui du Saint-Esprit ; et, suite à cet acte d'obéissance, la rémission des péchés est accordée.

 

     Que le baptême soit essentiel au salut, cela est attesté par un grand nombre d'Écritures traitant de ce sujet ; et pourtant, même sans s'appuyer sur celles-ci, le caractère essentiel apparaît comme conséquence de cette exigence inconditionnelle de la repentance et de ce fait évident que pour être valable et effective, la repentance doit supposer l'obéissance aux exigences divines, lesquelles comprennent le baptême d'eau. Il faut se rappeler que Jésus, le Christ, bien qu'exempt de la souillure du péché, se soumit en personne à cette ordonnance qui lui fut administrée par Jean-Baptiste dans les eaux du Jourdain. L'essentiel de l'enseignement de Jean était : « Repentez-vous, car le royaume des cieux est proche », et à ceux qui venaient vers lui et professaient leur repentance, il administrait le baptême par immersion. C'est alors que Jésus vint vers Jean, pour être baptisé par lui ; et Jean-Baptiste, qui le considérait comme sans péché, protesta en disant :

 

   « C'est moi qui ai besoin d'être baptisé par toi, et tu viens à moi ! Jésus répondit : Laisse faire maintenant, car il est convenable que nous accomplissions ainsi tout ce qui est juste. Et Jean ne lui résista plus. Dès que Jésus eut été baptisé, il sortit de l'eau. Et voici, les cieux s'ouvrirent, et il vit l'Esprit de Dieu descendre comme une colombe et venir sur lui. Et voici, une voix fit entendre des cieux ces paroles : Celui-ci est mon Fils bien

aimé, en qui j'ai mis toute mon affection. » (Matthieu 3:13-17)

 

Il ressort de ce qui précède que le baptême de Jésus était acceptable pour le Père et que celui-ci lui donnait le caractère d'un acte d'humilité et d'obéissance de la part du Fils, acte dont il était pleinement satisfait. Quelque temps après son propre baptême, Jésus affirma, en des termes à la fois énergiques et sans équivoque, que le baptême est requis de tous les hommes comme une des conditions de leur entrée dans le royaume de Dieu. À Nicodème, un dirigeant juif qui vint le voir de nuit et montrait quelque foi, Jésus déclara : « En vérité, en vérité, je te le dis, si un homme ne naît d'eau et d'Esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu » (Jean 3:1-7). Quand il se manifesta aux apôtres dans son état ressuscité, il leur donna ces dernières instructions comme mission spéciale : « Allez, faites de toutes les nations des disciples, les baptisant au nom du Père, du Fils, et du Saint-Esprit » (Matthieu 28:19). La nécessité et le but de cette ordonnance apparaissent dans la suite des paroles qu'il prononça en cette même occasion solennelle : « Celui qui croira et qui sera baptisé sera sauvé, mais celui qui ne croira pas sera condamné » (Marc 16:16). 

 

Les apôtres, inspirés par cette mission divine, ne cessèrent d'enseigner la nécessité du baptême aussi longtemps que dura leur ministère parmi les mortels (Actes 2 :38 ; 9: 1-18 ; 10 :30-48 ; 22:1-16 ; 1 Pierre 3:21).

 

Les anciens de l'Église, dans la dispensation actuelle, ont reçu les mêmes directives, ont été revêtus de la même autorité, et presque dans les mêmes termes : « Allez dans le monde entier, prêchez l'évangile à toute la création, agissant avec l'autorité que je vous ai donnée, baptisant au nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit. Celui qui croira et sera baptisé, sera sauvé, et celui qui ne croira pas sera damné » (Doctrine et Alliances 68:8-9). En une autre occasion, le Seigneur ajouta, dans une révélation donnée par l'intermédiaire du prophète moderne, Joseph Smith : « C'est pourquoi ce que j'ai dit à mes apôtres, je vous le dis de nouveau : Toute âme qui croira à vos paroles et sera baptisée d'eau pour la rémission des péchés, recevra le Saint-Esprit ». Et plus loin : « En vérité, en vérité, je vous le dis, ceux qui ne croiront pas à vos paroles, et qui ne seront pas baptisés d'eau en mon nom pour la rémission de leurs péchés, afin de recevoir le Saint-Esprit, seront damnés et ne viendront pas dans le royaume de mon Père, là où mon Père et moi sommes » (Doctrine et Alliances 84:64,74 ; voyez aussi 112:28-29).

 

Le don du Saint-Esprit suit le baptême d'eau, et son attribution par l'autorité voulue constitue une autre ordonnance essentielle de l'Évangile. Tant dans l'antiquité que dans nos temps modernes, cette dotation a été considérée comme un baptême supérieur, sans lequel le baptême d'eau est incomplet. Jean, mieux connu sous le nom de Jean-Baptiste, l'a enseigné à la veille même du ministère personnel du Sauveur. Considérez bien ses paroles : « Moi, je vous baptise d'eau, pour vous amener à la repentance ; mais celui qui vient après moi est plus puissant que moi, et je ne suis pas digne de porter ses souliers. Lui, il vous baptisera du Saint-Esprit et de feu» (Matthieu 3:11 ; comparez avec Marc 1:7-8 ; et Luc 3:16). Jean témoigne encore que celui qui inaugurera ce baptême supérieur sera Jésus lui-même. Ce n'est qu'après lui avoir administré l'ordonnance du baptême d'eau que Jean reconnut Jésus pour le Christ ; mais, immédiatement après cette reconnaissance, Jean- Baptiste proclama sans crainte son témoignage :

 

« Voici l'Agneau de Dieu... C'est celui dont j'ai dit : Après moi vient un homme qui m'a précédé... Je ne le connaissais pas, mais celui qui m'a envoyé baptiser d'eau, celui-là m'a dit : Celui sur qui tu verras l'Esprit descendre et s'arrêter, c'est celui qui baptise du Saint-Esprit » (Jean 1:29-33).

 

Jésus promit à plusieurs reprises aux apôtres que le « Consolateur » ou « Esprit de vérité » leur serait donné, et cette assurance leur fut définitivement confirmée avant l'ascension (Jean 14:16,17,26 ; 15:26 ; 16:7,13). Il « leur recommanda de ne pas s'éloigner de Jérusalem, mais d'attendre ce que le Père avait promis, ce que je vous ai annoncé, leur dit-il ; car Jean a baptisé d'eau, mais vous, dans peu de jours, vous serez baptisés du Saint-Esprit... Vous recevrez une puissance, le Saint-Esprit survenant sur vous et vous serez mes témoins » (Actes 1:4,5,8). Cette promesse fut remplie à la Pentecôte suivante, lorsque les apôtres reçurent un pouvoir qui leur était inconnu jusqu'alors, cette attribution se manifestant extérieurement par des langues de feu (Actes 2:1-4). Dans la suite, les apôtres promirent le Saint-Esprit à ceux qui cherchaient le salut. L'exhortation que Pierre adressa à la foule ce même jour mémorable de la Pentecôte, est particulièrement explicite et énergique. En réponse à la demande « Hommes, frères, que ferons-nous ? » le chef des apôtres répondit : « Repentez-vous, et que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus-Christ, pour le pardon de vos péchés ; et vous recevrez le don du Saint-Esprit » (Actes 2:37-38).

 

     Une semblable assurance quant à l'attribution supérieure du Saint-Esprit consécutive à l'ordonnance du baptême d'eau fut donnée par les prophètes néphites (Livre de Mormon, 2 Néphi 31:8, 12-14, 17), ainsi que par le Christ ressuscité lors de sa visite au peuple du continent occidental (3 Néphi 11:35 ; 12:2). Plus tard encore, ceci a été répété par l'intermédiaire de l'Église dans notre dispensation actuelle, celle de la plénitude des temps. « Je vous le dis de nouveau » déclara le Seigneur dans une révélation adressée à certains anciens de l'Église, « toute âme qui croira à vos paroles et sera baptisée d'eau pour la rémission des péchés, recevra le Saint-Esprit » (Doctrine et Alliances 84 :64).

 

 Répétons-le en résumé : l'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours tient pour doctrine essentielle, attestée et prouvée par les Écritures, tant anciennes que modernes, que l'obéissance aux lois et ordonnances de l'Évangile est une exigence absolue et irrévocable pour l'admission au royaume de Dieu, ou, en d'autres mots, pour assurer le salut individuel aux âmes des hommes, et que cette exigence est universelle, s'appliquant de même façon à toute âme arrivée à l'âge et à l'exercice de la responsabilité dans la chair, quelle que soit l'époque ou la dispensation (ndlr : une dispensation de l'Évangile est une époque au cours de laquelle le Seigneur a au moins un serviteur autorisé sur la terre qui détient les clefs de la Sainte Prêtrise) où cette âme a vécu dans la mortalité. Il s'ensuit comme conséquence nécessaire que si une âme a, par ignorance ou par négligence, omis de se conformer à ces exigences, l'obligation n'est pas annulée par la mort.

 

 

Ministère vicarial des vivants pour les morts

 

La question se pose maintenant de savoir comment il est possible aux morts de se conformer aux conditions de l'Évangile et de faire en esprit ce qu'ils ont omis de faire dans la chair. Il se peut que l'exercice de la foi et la manifestation de la repentance par des esprits désincarnés ne présentent pas de grandes difficultés pour une intelligence humaine ; mais que les morts doivent obéir aux ordonnances de l'Évangile qui exigent le baptême d'eau et le baptême d'Esprit par imposition des mains de quelqu'un en ayant l'autorité, cela paraît à beaucoup tout aussi impossible qu'une nouvelle naissance le paraissait à Nicodème. Il écoutait avec stupeur les paroles du Sauveur : « Si un homme ne naît de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu », et demanda : « Comment un homme peut-il naître quand il est vieux ? Peut-il rentrer dans le sein de sa mère et naître ? » Il apprit finalement que cette nouvelle naissance à laquelle il était fait allusion, c'était le baptême d'eau et le baptême d'Esprit. C'est avec une égale pertinence que l'on peut demander maintenant : Comment peut-on baptiser un homme quand il est mort ? Peut-il entrer une seconde fois dans son corps de chair et être immergé dans l'eau par l'action d'un homme ? La réponse est que les ordonnances nécessaires peuvent être exécutées au bénéfice des morts par leurs représentants vivants, le sujet mortel agissant par procuration pour le disparu. Ainsi, de même qu'un homme peut être baptisé en personne lui-même, il peut être baptisé au bénéfice d'un mort.

 

La validité d'un service vicarial, dans lequel une personne agit au bénéfice d'une autre, est généralement reconnue comme faisant partie intégrante des institutions humaines ; et ce genre de service est acceptable aux yeux de Dieu : cela est attesté par l'Écriture. Les Écritures anciennes et modernes, les annales d'histoire profane, les traditions de tribus et de nations, les rites des sacrifices sanglants, et même les sacrifices abominables de l'idolâtrie païenne impliquent cette conception fondamentale de propitiation vicariale et de service rendu par procuration. Le bouc émissaire (Lévitique 16:20-22) et la victime de l'autel (Lévitique, chapitre 4) de la dispensation de Moïse, à condition d'être offerts par l'autorité constituée et dûment accompagnés de confession et de repentance, étaient acceptés par le Seigneur comme des sacrifices destinés à racheter les péchés de son peuple.

 

Le sacrifice le plus chargé de sens, la plus grande œuvre jamais accomplie dans l'humanité, l'événement central de l'histoire humaine, la réalisation suprême, à la fois glorieuse consommation et commencement béni, c'est l'expiation du Christ, et c'était au plus haut titre une offrande vicariale. Aucune personne qui croit que Jésus mourut pour l'homme ne peut douter de la validité et de l'efficacité de l'administration vicariale. Il donna sa vie en sacrifice préordonné, offert volontairement et dûment accepté comme rachetant l'infraction à la loi, et comme étant le moyen par lequel le salut était mis à la portée de l'homme. Le fait que sa mort fut littéralement une offrande acceptée au bénéfice du genre humain nous est exposé en ces termes par le Christ ressuscité - c'est la révélation moderne qui nous les rapporte :

 

« Car voici, moi, Dieu, j'ai souffert cela pour tous afin qu'ils ne souffrent pas s'ils se repentent. Mais s'ils ne veulent pas se repentir, ils doivent souffrir tout comme moi. Et ces souffrances m'ont fait trembler de douleur, moi Dieu, le plus grand de tous, et elles m'ont fait saigner à chaque pore, m'ont torturé à la fois le corps et l'esprit, m'ont fait souhaiter ne pas devoir boire à la coupe amère et m'ont fait reculer d'effroi. Néanmoins, gloire soit au Père, j'ai bu à la coupe et j'ai terminé tout ce que j'avais préparé pour les enfants des hommes » (Doctrine et Alliances 19:16-19).

 

L'effet vicarial de l'expiation du Christ est double : il a racheté tous les hommes de la mort de la chair, consécutive à la transgression d'Adam, et il a procuré un moyen de propitiation pour les péchés individuels, grâce auquel le pécheur peut arriver au salut par l'obéissance. C'est par sa vie mortelle et le sacrifice de sa mort au bénéfice d'autrui - c'est-à-dire tous ceux qui ont vécu ou qui vivront jamais - que Jésus-Christ a conquis son titre de Sauveur et de rédempteur de l'humanité. Et de même que lui, par ses efforts, ses sacrifices et ses souffrances, a fait pour les hommes ce qu'ils n'auraient jamais pu accomplir pour eux-mêmes et est devenu en vérité le seul et unique Sauveur et Rédempteur de la race, de même chacun d'entre nous, en ouvrant à ses disparus la voie par laquelle ils peuvent arriver à la loi de salut de l'Évangile, devient dans une mesure réduite, le sauveur de ces personnes qui, autrement, seraient restées dans les ténèbres (Abdias 21 ; 1 Timothée 4:16 ; Jacques 5:20).

 

Dans chaque cas d'administration vicariale, il est absolument indispensable que l'intermédiaire soit digne et acceptable ; et, de toute nécessité, il doit lui-même s'être conformé aux lois et ordonnances de l'Évangile avant de pouvoir officier au bénéfice d'autrui. En outre, le ministère du représentant vivant doit être en accord avec la désignation divine et n'être en aucune façon simple présomption humaine. Les sacrifices acceptables de l'antique Israël étaient en tous points conformes à des spécifications précises et des prescriptions minutieuses ; et les sacrifices rituels ne pouvaient être célébrés que par les prêtres autorisés. Le sacrifice suprême qu'impliquait la mort expiatoire du Christ était tout aussi véritablement prévu et préordonné. Tout au long des siècles ayant précédé l'ère chrétienne, des prophètes prédirent la naissance, la vie et la mort de notre Seigneur : tout était déjà prévu (Deutéronome 18:15, 17-19 ; Job 19:25-27 ; Psaumes 2:1-12 ; Zacharie 9:9 ; 12:10 ; 13:6 ; Ésaïe 7:14 ; 9:6,7 ; Michée 5:2) ; et ces prophéties furent confirmées par Jésus lui-même (Luc 24:27,45,46). Considérez aussi le témoignage des apôtres sur le même sujet. Pierre désigne spécifiquement le Christ comme « un Agneau sans défaut et sans tache, prédestiné avant la fondation du monde » (1 Pierre 1:19-20). Cette appellation d' « Agneau » désigne la victime d'un sacrifice. Paul, écrivant aux Romains, dépeint notre Seigneur comme celui « que Dieu a destiné par son sang à être, pour ceux qui croiraient, victime propitiatoire, afin de montrer sa justice ; parce qu'il avait laissé impunis les péchés commis auparavant » (Romains 3:25 ; aussi Romains 16:2526 ; Éphésiens 3:9-11 ; Colossiens 1:24-26 ; 2 Timothée 1:8-10 ; Tite 1:2-3 ; Apocalypse 13:8).

 

Les saints des derniers jours affirment que cette œuvre vicariale au bénéfice des morts leur a été demandée par un appel du Seigneur reçu par révélation directe ; et que tout individu qui accepte l'Évangile et entre dans l'Église acquiert la possibilité - et le devoir - de travailler au salut de ses morts. Il est attendu et requis de lui, par les obligations et la responsabilité qu'il a assumées en tant que membre de l'Église de Jésus-Christ, qu'il vive de manière à être, dans ces saintes ordonnances, le digne représentant de ses ancêtres disparus, et aussi qu'il mène une vie pure, afin de ne pas s'aliéner le droit de pénétrer dans l'enceinte sacrée de la maison du Seigneur, seul lieu où il puisse officier en cette qualité privilégiée.

 

Cette doctrine de l'œuvre vicariale pour les morts n'implique, en rien, que l'administration des ordonnances au bénéfice des esprits des disparus gêne en quelque manière le droit de choisir de ceux-ci et l'exercice de leur libre arbitre. Ils ont toute liberté d'accepter ou de rejeter ce ministère exercé en leur faveur ; ils l'accepteront ou le rejetteront conformément à leur état - converti ou endurci - exactement comme il en va des mortels à qui parvient le message de l'Évangile. Bien que le baptême soit dûment administré à un homme vivant au bénéfice d'un ancêtre défunt, cet esprit n'en retirera aucun avantage immédiat, aucun bénéfice, s'il n'est pas encore arrivé à la foi au Seigneur Jésus-Christ ou s'il ne s'est pas encore repenti. De même que le Christ a offert le salut à tous, bien que peu nombreux soient ceux qui l'acceptent dans la chair, de même les ordonnances du temple peuvent être administrées pour beaucoup d'esprits se trouvant au royaume des disparus et qui ne sont pas encore préparés à en profiter.

 

Il est donc évident que l'œuvre au bénéfice des morts est double : ce qui est accompli sur terre resterait incomplet et inutile s'il n'y avait un complément, une contrepartie au-delà du voile de la mort. L'œuvre missionnaire est en progrès là-bas - œuvre à côté de laquelle l'oeuvre missionnaire sur terre n'est qu'une mince entreprise. Il y a des prédicateurs et des instructeurs, des ministres investis de la Sainte Prêtrise, tous occupés à annoncer la bonne nouvelle de l'Évangile aux esprits qui n'ont pas encore trouvé la lumière. Ainsi que nous l'avons déjà montré, cette grande œuvre parmi les morts a été inaugurée par Jésus-Christ au cours de sa brève désincarnation. Le ministère salvateur ainsi inauguré fut laissé à d'autres, dûment autorisés et chargés de la mission de le poursuivre, tout comme l'œuvre de prédication de l'Évangile et d'administration de ses ordonnances parmi les vivants fut confiée aux apôtres de l'Église de jadis.

 

 

Autorité d'oeuvrer au bénéfice des morts

 

Dans le chapitre final de ce recueil d'Écritures que l'on appelle Ancien Testament, le prophète Malachie décrit en ces termes une situation inhérente aux derniers jours, immédiatement avant la seconde venue du Christ :

 

« Car voici, le jour vient, ardent comme une fournaise. Tous les hautains et tous les méchants seront comme du chaume ; le jour qui vient les embrasera, dit l'Éternel des armées, il ne leur laissera ni racine ni rameau. Mais pour vous qui craignez mon nom se lèvera le soleil de la justice, et la guérison sera sous ses ailes. »

 

Cette prophétie lourde de conséquences se termine sur la promesse bénie que voici, dont la portée est longue :

 

« Voici, je vous enverrai Élie, le prophète, avant que le jour de l'Éternel arrive, ce jour grand et redoutable. Il ramènera le cœur des pères à leurs enfants, et le cœur des enfants à leurs pères, de peur que je ne vienne frapper le pays d'interdit » (Malachie 4:1-2, 5-6).

 

Il a été soutenu par certains théologiens et commentateurs bibliques que cette prédication avait trait à la naissance et au ministère de Jean-Baptiste (Matthieu 11:14 ; 17:11 ; Marc 9:11 ; Luc 1:17) sur qui reposaient l'esprit et la puissance d'Élie (Élias). Toutefois, il n'est rapporté nulle part qu'Élie ait conféré son ministère à Jean-Baptiste, et en outre, le ministère de celui-ci, si glorieux qu'il fût, ne justifie en rien la conclusion selon laquelle c'est en lui que la prophétie trouve son accomplissement total. De plus, il faut se souvenir que la déclaration faite par le Seigneur par la voix de Malachie, concernant le jour de l'embrasement où les méchants seront détruits comme du chaume, attend encore d'être accomplie. Il est donc évident que l'interprétation communément acceptée est en défaut et que nous devons chercher plus loin que l'époque de Jean-Baptiste l'accomplissement de la prophétie de Malachie. Cette occasion plus tardive est venue ; elle appartient à la présente dispensation et marque l'inauguration d'une œuvre spécialement réservée à l'Église de ces derniers jours. Au cours d'une manifestation glorieuse à Joseph Smith et Oliver Cowdery au temple de Kirtland en Ohio, le 3 avril 1836, le prophète de jadis, Élie, leur apparut, lui qui avait été enlevé de la terre alors qu'il était encore dans la chair. Il leur déclara :

 

« Voici, le temps est pleinement arrivé, ce temps dont a parlé Malachie, lorsqu'il a témoigné qu'il (Élie) serait envoyé avant que le jour de l'Éternel arrive, ce jour grand et redoutable, pour tourner le cœur des pères vers les enfants, et le cœur des enfants vers les pères, de peur que la terre tout entière ne soit frappée de malédiction. C'est pourquoi les clefs de cette dispensation sont remises entre vos mains, et vous saurez par là que le jour de l'Éternel, ce jour grand et redoutable, est proche, et même à la porte » (Doctrine et Alliances 110:13-16).

 

Un des principes fondamentaux sous-jacents à cette doctrine du salut pour les morts est celui de l'interdépendance des pères et des enfants. Les ramifications généalogiques d'une famille et la suite des générations dans chaque lignée particulière sont des faits qui ne peuvent être changés par la mort ; et d'autre part, il ressort avec évidence des Écritures anciennes déjà citées et corroborées par les paroles également nettes de la révélation moderne, que les rapports familiaux terrestres sont reconnus dans le monde des esprits. Ni les enfants ni les pères, ni les progéniteurs ni les descendants ne peuvent seuls atteindre la perfection, et la coopération nécessaire est réalisée par le baptême et les ordonnances qui s'y rattachent, administrés aux vivants au bénéfice des morts.

 

C'est de cette manière et par cette œuvre que les cœurs des pères et ceux des enfants se tournent les uns vers les autres. À mesure que les enfants vivants apprennent que sans leurs ancêtres ils ne peuvent atteindre un état de perfection dans le monde éternel, leur propre foi se renforce et ils se trouvent disposés à travailler à la rédemption et au salut de leurs morts. Et les morts, apprenant par la prédication de l'Évangile dans leur monde qu'ils dépendent de leurs descendants pour être sauvés par procuration, se tournent avec amour, foi et prière, vers leurs enfants encore en vie.

 

Cette fusion de l'intérêt des pères et des enfants fait partie de la préparation nécessaire à la future venue du Christ en tant que roi et seigneur de la terre. Joseph Smith nous l'a enseigné en ces termes :

 

« La terre sera frappée de malédiction à moins qu'il n'y ait un chaînon d'une sorte ou d'une autre entre les pères et les enfants dans un domaine ou l'autre, et voici, quel est ce domaine ? C'est le baptême pour les morts. Car sans eux nous ne pouvons pas être rendus parfaits, et sans nous ils ne peuvent pas non plus être rendus parfaits » (Doctrine et Alliances 128:18).

 

L'Église d'aujourd'hui s'appuie sur une autorité pour administrer les ordonnances au bénéfice des morts : l'attribution spéciale de ce pouvoir et de cet office par le ministère d'Élie ; en outre, l'Église soutient que la remise de ce pouvoir marquait l'accomplissement de l'importante prédiction de Malachie. Il semble qu'un élément soit particulièrement bien à sa place : le fait que le ministre par qui cette grande œuvre a été inaugurée n'était autre qu'Élie qui, n'ayant pas franchi les portes de la mort, se trouve lié de façon spéciale tant avec les morts qu'avec les vivants. Quant à la fidélité avec laquelle l'Église n'a cessé de s'acquitter de cette mission spéciale, les temples qu'elle a consacrés au prix de tant de sacrifices et d'abnégation de la part de ses dévoués adhérents, ainsi que l'œuvre des ordonnances déjà accomplie en ces temples, en sont une preuve suffisante.

 

L'importance que les saints des derniers jours assignent à l'œuvre du temple en faveur des morts détermine naturellement chez eux un vif intérêt pour les documents généalogiques de leurs familles respectives. L'œuvre des ordonnances dans les temples au bénéfice d'un disparu ne peut être accomplie que dans la mesure où cette personne peut être identifiée par des document quant à son nom, sa filiation, la date et le lieu de sa naissance et de sa mort, etc., tous éléments qui permettent de l'isoler et de l'identifier complètement et avec certitude (Doctrine et Alliances 128:5-8). C'est un fait bien connu que l'intérêt pour la recherche généalogique s'est grandement accru aux États-Unis et en Europe au cours des sept ou huit dernières décennies. Des sociétés de généalogie se sont constituées et des chercheurs isolés ont consacré énormément de temps et d'argent à compiler des documents établissant de nombreuses lignées familiales et les multiples ramifications de parentés compliquées. Dans toute cette entreprise, les saints des derniers jours affirment voir à l'œuvre une autorité toute-puissante qui leur facilite le service pour les morts.

 

 

Les temples sont nécessaires au service vicarial

 

Alors que les ordonnances du baptême, de l'imposition des mains pour le don du Saint-Esprit, et autres, telle que l'ordination à la prêtrise, peuvent être accomplies en n'importe quel lieu qui s'y prête, les ordonnances correspondantes accomplies au bénéfice des morts ne sont acceptables aux yeux du Seigneur, et par conséquent valides, que si elles sont administrées dans des lieux préparés tout exprès, mis à part et consacrés en vue de ce but ou d'autres du même genre ; c'est-à-dire que ces ordonnances appartiennent exclusivement à la maison du Seigneur. Ce n'est que pendant une période très brève, tout au début de l'histoire de l'Église moderne, avant que le peuple n'eût eu l'occasion d'ériger des temples, que le Seigneur accepta gracieusement un sanctuaire temporaire, de même qu'il avait accepté le tabernacle de jadis comme temple temporaire à l'époque des pérégrinations d'Israël.

 

Dans une révélation donnée au prophète Joseph Smith à Nauvoo, Illinois, le 19 janvier 1841, le Seigneur fit appel à son peuple afin qu'il construisît une maison à son nom « pour que le Très-Haut y habite », et il ajouta en guise d'explication et d'instructions :

 

 « Car il ne se trouve pas de lieu sur terre où il puisse venir rétablir ce qui a été perdu pour vous, où qu'il a enlevé, à savoir la plénitude de la prêtrise.



    « Car il n'y a pas sur la terre de fonts baptismaux dans lesquels mes saints puissent être baptisés pour ceux qui sont morts,


« Car cette ordonnance appartient à ma maison et ne peut être acceptable devant moi, si ce n'est dans les jours de votre pauvreté, si vous n'êtes pas capables de m'édifier une maison.


« Mais je vous commande à vous, tous mes saints, de me bâtir une maison, et je vous accorde suffisamment de temps pour me construire une maison ; et durant ce temps, vos baptêmes seront acceptables devant moi.


« Mais voici, à la fin de ce temps, vos baptêmes pour vos morts ne seront pas acceptables pour moi ; et si vous ne faites pas cela à la fin du temps fixé, vous serez, vous, l'Église, rejetés avec vos morts, dit le Seigneur votre Dieu.



« Car en vérité, je vous le dis, lorsque vous aurez eu suffisamment de temps pour me bâtir une maison, qui est le lieu où doit se faire l'ordonnance du baptême pour les morts et qui a été instituée pour cela dès avant la fondation du monde, vos baptêmes pour vos morts ne pourront être acceptables devant moi.



    « Car c'est là que sont conférées les clefs de la sainte prêtrise afin que vous receviez de l'honneur et de la gloire.


    « Et après ce temps-là, vos baptêmes pour les morts par ceux qui sont dispersés au loin ne seront pas acceptables devant moi, dit le Seigneur.


« Car il est décrété qu'en Sion et dans ses pieux, et à Jérusalem, ces endroits que j'ai désignés pour être des refuges, seront les lieux pour vos baptêmes pour vos morts.



« Et de plus, en vérité, je vous le dis, comment vos ablutions seront-elles acceptables devant moi, si vous ne les accomplissez pas dans une maison que vous aurez bâtie à mon nom ?



« Car c'est pour cette raison que j'ai commandé à Moïse qu'il construise un tabernacle, afin qu'ils le portassent avec eux dans le désert, et me bâtisse une maison dans la terre de promission, afin que fussent révélées ces ordonnances qui avaient été cachées avant que le monde fût.



« C'est pourquoi, en vérité, je vous dis que vos onctions, vos ablutions, vos baptêmes pour les morts, vos assemblées solennelles et vos souvenirs pour vos sacrifices par les fils de Lévi, et pour vos oracles dans vos lieux les plus saints où vous recevez des conversations, et vos statuts et vos jugements, pour le commencement des révélations et de la fondation de Sion, et pour la gloire, l'honneur et la dotation de tous ses habitants, sont ordonnés par l'ordonnance de ma sainte maison que je commande toujours à mon peuple de construire à mon saint nom.



« Et en vérité, je vous le dis, que cette maison soit bâtie à mon nom, afin que je puisse y révéler mes ordonnances à mon peuple.



« Car je daigne révéler à mon Église des choses qui ont été cachées dès avant la fondation du monde, des choses qui appartiennent à la dispensation de la plénitude des temps » (Doctrine et Alliances 124:28-41 ; lire toute la section).

 

Voilà donc une réponse suffisante à la question de savoir pourquoi les saints des derniers jours construisent et entretiennent des temples. Ils ont reçu instructions et ordres à cet effet du Seigneur des armées. Ils ont appris que beaucoup d'ordonnances essentielles de l'Église ne sont acceptables que si elles sont administrées dans des temples spécialement érigés et réservés à cet effet. Ils savent que dans ces enceintes sacrées, le Seigneur a révélé beaucoup de choses grandes et importantes relatives au royaume de Dieu ; et qu'il a promis de révéler encore davantage à l'homme dans des maisons consacrées à son nom. Ils ont appris qu'une grande partie de la mission et du ministère de l'Église rétablie est constituée par l'administration des ordonnances vicariales au bénéfice des innombrables morts qui n'ont jamais entendu la bonne nouvelle de l'Évangile, et, pour un service aussi sacré et aussi salvateur, les temples sont une nécessité.


 

Source : James E. Talmage, The House of the Lord, Salt Lake City, 1912