Pour un meilleur équilibre émotionnel 
  

Méthode conçue pour les saints des derniers jours 
  

Zane Nelson


Cet ouvrage est un récapitulatif des meilleures idées extraites de dizaines de livres sur le développement personnel où elles sont exposées dans le cadre de l’Évangile.
L’auteur, Zane Nelson, est membre pratiquant de l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours et psychologue professionnel à Boise, dans l’Idaho, aux États-Unis. Son livre, très concret, est basé sur ses expériences religieuses et professionnelles. Il explique de façon professionnelle et cependant humaine comment les membres de l'Église peuvent éviter les pièges émotionnels et psychologiques afin de mener une vie plus heureuse et plus paisible.


Introduction
Chapitre 1 : Placer les choses dans la bonne perspective
Chapitre 2 : Ne pas essayer de serrer un boulon avec un mixeur de cuisine
Chapitre 3 : Masquer, démasquer : affiner ses sentiments
Chapitre 4 : Exploiter ses sacs de jute et ses jambes de bois
Chapitre 5 : Vous avez combattu pour le libre arbitre – Maintenant profitez-en !
Chapitre 6 : Découvrir le papillon dans votre cocon
Chapitre 7 : Apprenez à reconnaître ce qui est et ce qui n’est pas
Chapitre 8 : Remodeler la vie avec les principes de la joie
Chapitre 9 : Les gens sont fragiles : à manier avec précaution
Chapitre 10 : Atteindre un équilibre pondéré


Introduction 
  
Lorsque je médite sur la vie et considère les pertes, les périodes de confusion et les peines que nous subissons, je comprends pourquoi nous appelons ce monde « la vallée des larmes ». Le commandement nous demandant « d'endurer jusqu'à la fin » peut paraître écrasant. Cependant, la vie n'est pas qu'un calvaire et ce livre ne traite pas uniquement de la façon de gérer la douleur. La vie peut et doit inclure ces moments beaux et enrichissants dont il est fait implicitement état dans la déclaration que « les hommes sont pour avoir la joie ». Un des messages fondamentaux de ce livre est que les moments de joie sont possibles dans la vie de tout un chacun. Mais la joie n'arrive pas par hasard ; elle est le résultat d'efforts personnels ajoutés à une bonne compréhension des choses.

Ce livre est le fruit de longues années d'expérience et d'enseignement dans le domaine de la thérapie de l'individu et de la famille, ainsi que toute une vie engagée à servir dans l'Église de Jésus Christ des saints des derniers jours. J'ai pu constater que l'expérience acquise, tant dans mon métier que dans l'Église, constitue une source abondante de savoir pour appréhender les voies du bonheur et de la satisfaction. C'est cette compréhension et cette connaissance que je me propose de partager (cependant, parallèlement à l'acquisition de la connaissance et de la compréhension des choses, nous devons aussi nous appuyer sur la foi pour recevoir de l'aide lorsque les épreuves de la vie menacent de nous accabler).

Beaucoup de grandes vérités de l'Évangile ont été « redécouvertes » par la psychologie moderne. Dans l'exercice de mon métier, j'ai pu constater que les principes de l'Évangile et ceux d'une bonne santé de l'esprit se renforcent mutuellement.

Ce livre est une tentative de transposition de ces principes en langage profane afin d'aider le lecteur à élargir sa compréhension de la manière de conserver un équilibre émotionnel, d'améliorer sa santé mentale, d'aider ceux qui sont en difficulté et de faire augmenter la proportion des joies par rapport à celle des peines dans la vie que nous menons, en nous efforçant d'endurer jusqu'à la fin.


Chapitre 1 : Placer les choses dans la bonne perspective

Les principes présentés dans ce livre peuvent profiter à tout le monde. Cependant, quelques particularités de la culture « mormone » rendent ces principes particulièrement importants pour nous, saints des derniers jours. Compte tenu de notre tendance à rechercher l'idéal, il est important de nous méfier des espérances irréalistes et d’acquérir plutôt une connaissance solide des principes de base d'une bonne santé émotionnelle afin d'éviter les pièges du perfectionnisme, du pharisaïsme et de la dépendance.

Si « la gloire de Dieu est l'intelligence », il est alors important d'atteindre la meilleure compréhension possible des choses. Lorsque notre compréhension augmente, nous nous rapprochons de la divinité, atteignant ainsi le but fixé pour nous par notre Père céleste de devenir plus semblables à lui. Cependant, la prise de conscience de ce but peut engendrer de la tension et du stress si nous ne savons pas la mettre en perspective.

Dans la condition mortelle, personne ne vit dans un monde idéal. C'est pourquoi il est impératif de nous débarrasser du sentiment persistant qu’il devrait en être autrement. Pour éviter de nous décourager nous devons apprendre, et c'est le défi de toute l'existence, à composer avec l'imperfection du monde et de nous-mêmes tout en nous améliorant pour devenir davantage semblables à notre Père céleste.

Parmi les membres de l'Église, certains malentendus engendrent des problèmes psychologiques courants. Par exemple, de nombreux saints des derniers jours croient à tort que le fait de s'acquitter régulièrement d'une suite d'actions vertueuses constitue une vertu en soi. Les sœurs, en particulier, semblent être vulnérables à la pression qu'une telle liste exerce sur elles. Le syndrome de « la liste de contrôle » conduit généralement à accorder une importance indue à ce que nous faisons au détriment de ce que nous sommes.

Une autre tendance est de vouloir que les dirigeants d'Église nous disent avec exactitude ce que cette liste devrait comporter. Une de mes patientes, qui n'est pas membre de l'Église, une femme réfléchie, intelligente et perspicace, m'a dit un jour : « Vous les mormons, vous êtes tellement scrupuleux de faire les choses à la perfection que vous ne prenez même plus de décision par vous-mêmes. Il faut que quelqu'un d'autre (un dirigeant) vous dise quoi faire ». Après avoir réfléchi à ses propos et à ma vie de service dans l'Église en tant que dirigeant dans divers postes, j'ai constaté que sa remarque était pertinente.

À l'époque du Nouveau Testament, le Christ reprochait aux Pharisiens, entre autres choses, d'être rigides et d'appliquer la loi à la lettre, au détriment de l'esprit. Beaucoup d'entre nous, au lieu de reconnaître la nécessité de vivre selon l'esprit de la loi, voudraient un manuel qui dicte tout ce que nous devons faire ; nous attendons de quelqu'un d'autre qu'il nous dise exactement ce que nous devons penser, faire et ressentir. Mais nous ne réalisons pas le tort qu'un tel document infligerait à l'individualité, à l'imagination et à la croissance personnelle.

En effet, nous savons qu’ « il n'est pas convenable que » le Seigneur nous « commande en tout ». Etre commandé en toute chose annihilerait notre capacité de progresser qui n'est possible que par l'exercice de notre libre arbitre. Vivre de façon rigide, selon une « liste de contrôle prise à la lettre de la loi », affecterait aussi notre capacité à vivre la loi supérieure de l'amour.

Lorsque nous vivons dans la mentalité de la « liste de contrôle », les points inscrits dans les « choses à faire », qui peuvent relever de traditions culturelles et de préférences individuelles, risquent de prendre autant d'importance que les commandements. Nous pourrions même en arriver à croire que notre salut dépend de notre capacité à nous acquitter de toutes ces conditions désormais assimilées à la doctrine de l'Église, alors qu'elles ne sont rien d'autre que différentes conceptions de la façon de faire les choses.

Toute organisation (en l'occurrence l'Église) affecte ses membres à trois niveaux :

1. la doctrine, le credo, les croyances
2. la tradition, les usages
3. les préférences individuelles, les opinions personnelles

Dans l'Église, il est utile de bien séparer ces trois niveaux. C'est d'ailleurs en partie pour cela que les dirigeants de l'Église nous recommandent d'étudier les Écritures. Si nous avons une bonne connaissance des Écritures nous serons capables de détecter les idées que certains membres de l'Église présentent comme étant la doctrine quand il ne s’agit que d'opinions personnelles ou de traditions. Par exemple, il y a une différence énorme entre la loi de la chasteté et la « loi » avancée par certains membres qui interdit à un couple de s'embrasser avant le mariage. Nous avons tous les droits d'être très stricts en ce qui concerne l'obéissance aux commandements de Dieu, mais il est nécessaire que nous fassions la différence entre sa loi et les opinions personnelles.

Beaucoup fabriquent leurs propres « lois de l'Évangile » en se référant à des usages qui ne relèvent que de la tradition, comme l'utilisation d'une nappe blanche pour recouvrir la table de la Sainte Cène. Les traditions locales régissent le déroulement des réunions et des enterrements, la préparation des corps des défunts, et même le jour où est sanctifié le sabbat (ainsi en Israël, les saints des derniers jours se réunissent le samedi). Dieu n'a pas donné de loi absolue en ce qui concerne ces points.

Les traditions locales peuvent apporter continuité et logique à nos réunions, mais il est important de savoir qu'elles ne sont que des usages. Elles ne sont pas liées à la doctrine, pas plus que de nombreuses autres opinions et préférences individuelles souvent présentées comme étant la doctrine. L'Église est constituée d'individus, chacun d'entre eux ayant ses préférences, ses opinions et ses faiblesses. L'Église est un refuge contre les valeurs du monde, mais pas contre les faiblesses des individus. Il arrive qu'un membre de l'Église édifie tout un système de croyance pour justifier ses préférences, souvent en faisant référence aux Écritures et aux discours des Autorités générales en-dehors de leur contexte. Ces croyances ainsi échafaudées peuvent couvrir une multitude de sujets allant de la prière au perçage des oreilles.

Compte tenu de la grande diversité des opinions et des préférences individuelles et des énormes contraintes, parfois de nature contradictoire, qu'elles peuvent imposer, ceux qui essaient de vivre selon ces lois ne peuvent parvenir à la tranquillité d'esprit. Ce n'est tout simplement pas la volonté de Dieu que nous nous conformions aux opinions et aux préférences des autres. Si trop de ces idées figurent dans la catégorie des « tâches à accomplir » de notre liste de priorités, nous finirons par être stressés, perturbés et complètement épuisés.

Récemment j'ai reçu dans mon cabinet une jeune fille que j'appellerai Valérie. Comme beaucoup de saints des derniers jours, Valérie s'engage intensément dans son désir de vivre l'Évangile et de faire ce qui est juste. Malheureusement pour elle sa connaissance de la doctrine de l'Église est très fragmentaire, ce qui l'amène à s'appuyer fortement sur ce que lui disent les membres de l'Église. Elle était très angoissée par les propos d'une sœur de l'Église qui lui avait dit qu'étant donné que son père a été incinéré au lieu d'être enterré selon la tradition mormone, son salut était compromis ainsi que le salut de tous ceux, membres de sa famille, qui avaient participé à cette « mauvaise décision ». Cette sœur avait expliqué que le corps est un temple et que l'incinération ne respecte en aucun cas cette vérité.

Pour couronner le tout, une autre sœur bien pensante lui fit remarquer que le perçage des oreilles était également un manque de respect, que si le Seigneur avait voulu que nous portions des boucles d'oreilles, nous naîtrions avec les oreilles percées, et que la décimation comme la mutilation du corps, de quelque manière que ce soit, va à l'encontre de la volonté de Dieu.

Valérie, qui croyait ces sœurs, souffrait d'angoisse et de culpabilité. Elle n'a été soulagée que lorsque je lui ai assuré que, sur ces sujets, l'opinion de ces deux sœurs n'était pas représentative de la doctrine de l'Église.


Il est absolument nécessaire d’avoir une bonne connaissance de la doctrine de l'Église pour ne pas être facilement influencé, voire déprimé par les opinions de membres de l'Église bien-pensants. Une méthode efficace en faveur d'un meilleur équilibre émotionnel consiste à passer en revue les éléments de notre liste et à déterminer les croyances et les suppositions qui les motivent. Rappelons que les croyances prises pour la doctrine peuvent être en grande partie la cause de notre stress. Lorsque nous avons identifié les croyances qui reposent uniquement sur des opinions ou préférences individuelles, il est alors possible de se protéger du stress qu’elles engendrent.

Ce livre présente un certain nombre d’idées pour aider le lecteur à résoudre les problèmes inhérents à notre culture et à la condition humaine. S'il se sent débordé par les multiples sollicitations qui semblent remplir la vie d’un saint des derniers jours, ce livre l'aidera. Nous commencerons par traiter de l'importance de la santé biologique et des émotions positives ; nous examinerons ensuite le rôle du comportement et de la pensée, puis nous étudierons les méthodes qui ont fait leurs preuves dans le traitement des pensées négatives.

Nous détaillerons enfin dix techniques efficaces en faveur de la santé de l'esprit et de la joie de vivre. Ces techniques nous permettront de mieux comprendre le rôle du libre arbitre et l'importance de l'équilibre dans l'équation du bonheur.


Chapitre 2 : Ne pas essayer de serrer un boulon avec un mixeur de cuisine

Dans son livre « Moins de stress pour les mormons », John C. Turpin raconte l'histoire d'une sœur éreintée qui, dans un état d'exténuation totale, était venue lui rendre visite à son bureau. Elle avait vécu dans la croyance erronée qu'elle devait tout donner à l'Église et à sa famille et qu'il était égoïste qu'elle prenne du temps pour ses propres besoins. Elle était tellement épuisée physiquement qu'elle frisait la dépression. Elle s'était éloignée du Seigneur et en voulait à l'Église. Or, aucune nouvelle technique psychiatrique n'aurait pu la soulager : ses problèmes physiologiques devaient être résolus en premier.

En commençant par cela, elle retrouva son énergie physique en quelques mois. Ensuite, et seulement ensuite, elle fut capable d'apprendre à gérer sa vie. Finalement ses sentiments envers elle-même et l'Église redevinrent positifs et plus solides qu'auparavant.

Résoudre d’abord les problèmes d'ordre physiologique

Les problèmes physiologiques sont souvent la cause première de beaucoup de troubles émotionnels courants, dont la dépression. Toute tentative visant à changer la façon de penser ou d'agir d'une personne doit tenir compte d'éventuels facteurs physiologiques. Par exemple, l'entraîneur d'un coureur sur piste ne pourra jamais, quels que soient les encouragements qu'il lui prodigue et la compétence dont il fait preuve, le faire courir à un niveau conforme à son potentiel si celui-ci souffre d'anémie sévère. Pour y parvenir, il faut commencer par traiter l'anémie. Travailler la technique de la course à pied, sans résoudre au préalable le problème physique, revient à vouloir serrer un boulon avec un mixeur de cuisine.

De même, dans le domaine de l'esprit, malgré les compétences du conseiller, le patient n’ira pas mieux si un problème physiologique affecte ses pensées, son humeur, sa disposition d'esprit, son énergie et sa capacité de raisonner.


La base physiologique de la santé mentale

Le corps humain est un « système intégré » particulièrement complexe. Pour s'assurer d'un bon fonctionnement mental, il peut s'avérer nécessaire de vérifier et éventuellement de réguler un certain nombre de mécanismes hormonaux et chimiques compliqués. Bien entendu, toutes les maladies mentales ne relèvent pas de causes physiologiques, mais lorsqu'une personne souffre de troubles émotionnels ou mentaux, il est nécessaire de faire l'évaluation des facteurs biologiques susceptibles de contribuer à ces troubles.

Beaucoup de troubles mentaux ont pour origine principale des désordres physiologiques dans lesquels les éléments chimiques appelés neurotransmetteurs jouent souvent un rôle. Par des analyses de laboratoire, il est possible de faire l'évaluation des différents éléments chimiques et des hormones stimulantes et régulatrices de l'organisme afin de déterminer si celui-ci souffre de carence.

Lorsqu'un patient se bat contre une affection physiologique et consulte en psychiatrie alors que son affection, dont il pourrait être vite rétabli, n'est pas traitée, les consultations psychiatriques sont une rude bataille inutile.

Dans notre culture, il n'est pas rare que des personnes repoussent l'aide dont elles ont besoin et refusent de prendre des médicaments. Elles croient peut-être que l'emploi abusif de médicaments dans notre société signifie que tout traitement médicamenteux est mauvais, ou bien qu'en faisant suffisamment confiance en Dieu, elles n'auront jamais besoin de médication. L'utilisation sage et mesurée de médicaments a pourtant transformé avantageusement la vie de nombreuses personnes. Beaucoup d'entre elles se sont même senties guidées par l'Esprit pour aller consulter tel médecin qui s'est avéré capable de diagnostiquer leur affection et de prescrire un traitement approprié.


Il y a quelque temps, une sœur d'une cinquantaine d'années est venue me consulter, après y avoir été encouragée par sa famille. Elle avait passé des années à ne rien faire, assise. Elle n'avait que peu ou pas d'énergie, aucun espoir, aucune ambition et aucun enthousiasme pour la vie. Elle attendait simplement de mourir. Sur mon insistance, elle consentit à une série d'analyses sanguines de routine qui montrèrent qu'elle souffrait d'une hypothyroïdie extrême (ce qui signifie que sa glande thyroïde fonctionnait en sous activité). Un complément d'hormones thyroïdiennes changea alors complètement sa vie. Elle commença à nettoyer sa maison, à adhérer à des associations et à participer aux activités de l'Église. Là encore, aucune séance de conseil psychiatrique n'aurait pu accomplir ce miracle, la cause du problème étant ailleurs.

Il est naturel qu'une personne hésite à suivre un traitement médicamenteux par crainte de ses effets secondaires. Cependant, la plupart des traitements utilisés pour corriger les problèmes physiologiques ne créent pas de dépendance physique ou psychologique. Ces médicaments rectifient une carence chimique dans le corps, tout comme l'apport d'insuline chez le diabétique. Souvent, ils aident une personne à sortir rapidement d'une période de dépression tout en résolvant le problème dans son ensemble.

En revanche, un déséquilibre chimique soigné par des séances de consultation psychiatrique mettra beaucoup de temps à guérir, s'il guérit un jour ! Par ailleurs, qu'il souffre d'un déséquilibre chimique ou non, le patient n'adoptera pas du jour au lendemain un nouveau mode de pensée ou d'action. Cependant, s’agissant d’un problème physiologique, la guérison sera nettement accélérée par un traitement médical.


Face à un problème d'ordre mental ou émotionnel, nous devons nous demander quelles en sont les conséquences sur notre santé spirituelle, notre carrière et nos relations avec les autres et si nous pouvons nous permettre de laisser perdurer cette situation. Nous devons aussi nous rappeler que la relation la plus importante est celle que nous entretenons avec nous-mêmes. En résolvant dès que possible un problème émotionnel nous conservons une bonne image de nous-mêmes et écartons du même coup les complications sérieuses qu’engendre un phénomène d'auto-dégradation.

Les physiciens et les psychologues ont fait de grands progrès en expliquant les mécanismes psychologiques au public. Ainsi, ils ont amoindri les stigmates liés aux déséquilibres physiologiques et aux problèmes psychologiques en général. Nous atteignons bientôt le stade où le déséquilibre chimique qui cause des troubles psychologiques ou émotionnels est perçu de la même façon que lorsqu'il entraîne des désordres thyroïdiens ou du diabète.

Non seulement la population a été plus sensibilisée et informée durant ces dernières années, mais les professionnels de la santé mentale deviennent de plus en plus compétents dans le traitement des déséquilibres complexes, psychologiques et physiologiques, et dans les interventions qu'ils requièrent. Au milieu des années 1970, l'informatisation des électroencéphalogrammes a fait son apparition. De nos jours, les professionnels peuvent évaluer avec précision les dysfonctionnements du cerveau, les troubles d'humeur causés par des lésions du cerveau, ainsi que d'autres problèmes subtils, génétiques ou développés, qui engendrent des troubles de la personnalité ou des affections mentales.

Ces changements ont permis d'apporter une aide efficace à beaucoup de personnes qui dans le passé, en raison des stigmates des maladies mentales, auraient probablement préféré voir leur vie brisée ou détruite plutôt que de rechercher un traitement adéquat. Il est encourageant de constater que de plus en plus de personnes acceptent l'idée qu'une médication appropriée puisse être bénéfique au patient qui souffre de troubles biochimiques, et que beaucoup de problèmes psychologiques découlent de déficiences physiques.


Chapitre 3 : Masquer, démasquer : affiner ses sentiments

La deuxième cause principale des problèmes émotionnels et mentaux réside dans les sentiments ; par conséquent, un élément essentiel de la bonne santé mentale passe par l’apprentissage de la compréhension et de la gestion efficace des sentiments.

Lors de mes consultations, lorsque je souligne l’importance de travailler au développement de bons sentiments, je fais référence à ce que j’appelle les « sentiments fondamentaux », ceux qui sont privés et profonds. Ces sentiments suscitent des émotions qui ordinairement n’émergent pas dans la communication typique de tous les jours, lorsque l’on parle du temps ou salue des personnes dans la rue.

En présence de bons sentiments et d’un fonctionnement physiologique correct, des aspects et symptômes positifs sont généralement mis en évidence. Inversement, en présence de sentiments négatifs ou si un quelconque trouble physiologique affecte la santé émotionnelle, des aspects et symptômes négatifs émergent. Par exemple, si un couple partage des sentiments d’amour, de confiance en soi et de charité, il est peu probable que les conjoints se disputent pour des choses comme le contrôle des comptes, faire la vaisselle ou préparer le repas à temps (bien qu’il puisse y avoir des discussions). Ils n’ont donc pas besoin d’un conseiller. Mais lorsque les problèmes surviennent, l’étude de nos sentiment profonds est essentielle à leur résolution.

En présence de sentiments négatifs, des aspects et comportements négatifs font surface et deviennent gênants. Nos faiblesses et penchants physiologiques particuliers seront les plus susceptibles à déterminer de quel symptôme physique nous souffrirons un jour. Par exemple, chez certaines personnes, la dépression et le stress ont tendance à tourner en colite ; pour d’autres, ce sera des maux de tête ou d’estomac. Ci-dessous une liste de sentiments positifs et négatifs et leurs conséquences respectives.

Sentiments positifs

Aspects et symptômes positifs

Amour

Accord sur la discipline

Acceptation

Budget équilibré

Franchise

Vie sexuelle harmonieuse

Honnêteté

Moments d’échange et de relaxation

Zone de bien-être

Conversation créative

Solidarité, unité

Bonne santé



Sentiments négatifs

Aspects et symptômes négatifs

Colère

Divergences sur les finances

Indifférence

Vie sexuelle non épanouie

Se sentir jugé

Toxicomanie

Être sur ses gardes

Menaces de suicide

Esquive

Violence physique

Peur

Cris et hurlements

Esprit de la critique

Injures

Solitude

Problèmes physiques et somatiques


S’occuper des sentiments avant de gérer les faits

Nos sentiments sont directement liés à nos pensées et actions. Pour transformer des sentiments négatifs en sentiments positifs, nous devons changer nos pensées et nos actions. Cependant, nous devons fixer notre attention sur les sentiments et émotions en premier lieu et laisser de côté les pensées et les actions pour plus tard. Il y a de bonnes raisons à cela : lorsque des personnes viennent me voir en suscitant de l’aide pour surmonter des problèmes dans leur vie, elles s’expriment souvent en termes de symptômes ressentis. Généralement, elles pensent que pour surmonter leurs difficultés, elles ont besoin de se débarrasser de ces symptômes. Or, j’ai appris que si nous ne traitons que les symptômes, il ne sera pas possible de les résoudre tant que nous n’aurons pas compris les sentiments qui sont à la racine de ces symptômes.

Par exemple, une épouse dira à son mari qui est dans l’épiscopat : « tu ne passes jamais de temps avec moi ». Si la conversation qui s’ensuit est axée sur le temps de son absence plutôt que sur les sentiments et le ressenti de l’épouse au sujet de son absence, il leur sera difficile d’avancer vers la résolution de leur problème. Le fait qu’il se soit absenté toutes les soirées de la semaine écoulée ou seulement un soir, est moins crucial que les craintes, l’appréhension et les sentiments d’insécurité de l’épouse. Ce sont les sentiments et le ressenti de l’épouse à ce sujet qu’il faut aborder. La thérapie la plus efficace se produit généralement lorsque les personnes sont capables de parler ouvertement de leurs sentiments, tout en laissant les faits et les questions spécifiques en arrière-plan.

Lorsque des personnes viennent pour la première fois me consulter, elles ont tendance à masquer leurs sentiments profonds et mettent en avant un certain nombre de problèmes dont beaucoup peuvent s’avérer non pertinents. Le plus souvent, elles pensent de façon erronée qu’une discussion sur des questions préoccupantes provoquera une réflexion sur les « principes » censés les endiguer. Elles jouent souvent au jeu des principes : « Ne pensez-vous pas que les gens devraient… ? ». Elles ne réalisent pas que les principes sont toujours corrects aux yeux de la personne qui les détient et que tout argument sur les principes n’est souvent que l’évitement pur et simple de montrer ses vrais sentiments.

La tentation de tomber dans ce piège est d’autant plus importante pour nous, les membres de l’Église consciencieux qui sommes fondamentalement engagés à des principes. Non seulement nous embrassons les principes de tous les citoyens honnêtes, mais nous y rajoutons des centaines d’autres principes. Des déclarations ayant pour but de corriger son conjoint, telles que « Nous devrions vraiment lire les Écritures et prier régulièrement ensemble » ou « Tu sais, nous devrions travailler à nos réserves alimentaires mais ton attitude est la raison pour laquelle nous ne le faisons pas » sont plus destructives que constructives dans une relation. Il en est de même de déclarations générales telles que : « tu conviendras que nous devrions passer plus de temps de qualité ensemble » ou bien « Il est évident que nous devrions être plus économes dans nos finances ».

Un couple est venu me consulter pour une aide matrimoniale. Il se disputait souvent au sujet de différents principes et questions. Une des plaintes principales du mari portait sur l’incapacité de son épouse dans l’entretien de la maison. Durant une session de thérapie, il me dit, devant son épouse, comment il avait observé qu’un emballage de pizza était resté cinq jours sur la table de la cuisine. Il passait quotidiennement devant la boîte et comptait les jours. Il utilisait ceci comme un bon exemple de l’inaptitude de son épouse en matière de ménage. Il appuyait ensuite ses arguments en évoquant des principes tels que « La propreté va de pair avec la piété » et « L’Esprit du Seigneur ne peut pas demeurer dans une maison négligée ». Les difficultés dans cet exemple sont des points de détail sans grande importance mais elles ont créé un problème majeur pour ce couple.

Regardons de plus près l’exemple ci-dessus. Combien de temps cela aurait-il pris au mari pour ramasser l’emballage de pizza et le jeter dans la poubelle qui se trouvait près de sa voiture ? Au lieu de cela, il essayait d’apporter une justification à ses mauvais sentiments. Si ce mari aimait son épouse, il essaierait de trouver des façons pour l’aider et la soutenir pour surmonter ses difficultés dans la tenue de la maison plutôt que de chercher des raisons pour justifier ses mauvais sentiments.

Un autre problème lorsque l’on parle de principes plutôt que de sentiments est le fait que les principes sont souvent en conflit l’un avec l’autre. Un homme qui vient de faire l’objet d’une procédure de faillite pourrait dire : « ne croyez-vous pas qu’on devrait faire grâce des dettes et aider ceux dans le réel besoin ? » L’autre partie pourrait répondre « ne croyez-vous pas que les gens devraient remplir leurs obligations et responsabilités dans la vie ? » Tous ces arguments sur des « principes » peuvent être vrais mais, en ignorant les sentiments profonds, ils compliquent le problème au lieu de le résoudre. Le « principe » peut aussi appartenir à la catégorie de l’opinion personnelle, de la tradition ou des préférences individuelles et à ce titre, devrait encore plus relever du principe du libre arbitre.

Aucun progrès ne peut être fait dans la discussion tant que les sentiments derrière les déclarations sur les principes ne sont pas explorés et compris.

Une fois que les sentiments sont reconnus, l’étape suivante consiste en les gérer. Pour gérer des sentiments, il faut d’abord être capable de les interpréter. Il est nécessaire de réaliser que beaucoup de choses que nous ressentons ne sont pas nécessairement des faits. Le trouble le plus courant que je constate est la dépression. Elle est habituellement accompagnée de problèmes de confiance en soi avec des sentiments d’inutilité et une perception de soi négative. En parlant d’eux-mêmes, ces patients utilisent des adjectifs tels que moche, stupide, gros, inutile, indigne d’être aimé et impopulaire. Quelquefois, il est immédiatement évident que les sentiments du patient n’ont pas grand-chose à voir avec la réalité. Une personne attrayante peut avoir le sentiment qu’elle est laide ; pour elle, sa « laideur » est bien réelle.

Le conseiller peut entre-autres aider ses patients à faire le tri entre les faits et la fiction de leurs sentiments en procédant à des épreuves de réalité et de juste valeur. Les épreuves de réalité et de juste valeur sont abordées plus tard dans cet ouvrage.

Masquer ou démasquer ? Telle est la question

Nous utilisons tous une méthode pour gérer nos sentiments, cela s’appelle masquer. Nous avons souvent entendu l’expression « se composer un visage de convenance ». Certains l’écartent comme étant une attitude superficielle et sonnant faux mais je pense que masquer ses vrais sentiments est approprié lorsque nous sommes dans des lieux publics. En effet, les avantages de masquer vos sentiments sont évidents lorsque vous vous imaginez assis au travail et sanglotant à cause d’un problème sérieux à la maison.

Les gens n’aiment pas être autour de ceux qui semblent toujours être malheureux. Beaucoup parmi les personnes qui viennent me consulter n’ont jamais réussi à masquer leurs sentiments négatifs et en conséquence, se sont retrouvées isolées des autres. En fait, les personnes dépressives sont parmi les plus isolées et ce sont souvent celles qui sont le moins capables de mettre un masque.

Pratiquement tout le monde met occasionnellement un masque émotionnel, fonctionnel et approprié pour minimiser les problèmes émotionnels lorsque nous nous trouvons dans l’espace public. Comprenez-moi bien : en disant qu’il y a un temps pour masquer ou minimiser des impulsions ou des propensions, je ne préconise pas de tromper systématiquement les autres. Je recommande une sorte de compartimentation. Au travail et en public, n’inondez pas tous les compartiments. Il y a des moments pour laisser aller les émotions, comme il y a des moments qui se prêtent à l’enseignement. Nous devons apprendre à les reconnaitre.

Si nous nous sentons profondément troublés, quand et en présence de qui oserons-nous laisser tomber le masque ? La réponse varie en fonction de la sévérité du problème, de la solidité des amitiés et des possibilités d’obtenir de bons conseils. Quelquefois, face aux bonnes personnes et dans un lieu approprié, il est bon de « retirer notre masque émotionnel » même si cela parait embarrassant et inconfortable. L’intimité émotionnelle est impossible si nous gardons constamment notre masque, d’autre part, il est essentiel de se démasquer pour permettre une évaluation et une thérapie appropriées en consultation. Il faut cependant que cela soit fait avec discernement.

Il n’est pas toujours aisé de trouver un équilibre entre le masquage ou le démasquage de ses émotions. Un grand nombre de nos relations sont des relations superficielles. Se démasquer ou essayer d’amener les autres à se démasquer n’est pas approprié dans ce type de relation. Cependant, pour établir des liens étroits, se démasquer ou partager des sentiments profonds est approprié et nécessaire. Pour être réceptifs et sensibles dans des relations importantes ou nécessaires, nous devrions regarder au-delà du superficiel et apprendre quand et comment exprimer nos sentiments les plus profonds.

Le partage d’émotions et de sentiments, lorsqu’il est fait de façon adéquate, est important pour une bonne santé mentale. Beaucoup de personnes se sont laissées aller à la passivité, avec pour résultat qu’elles ont tendance à ignorer leurs sentiments. Elles portent leur masque public lorsqu’elles devraient le retirer. Les sentiments enfermés dans un sac de jute et stockés pendant de longues périodes de temps finissent par causer une explosion et peuvent aussi entrainer des problèmes physiques, tels que des ulcères, de la tension artérielle ou des maux de tête.

Les sensibilités : remonter leurs origines jusqu’aux sentiments

Les sensibilités sont également un dérivé des sentiments et elles aussi varient grandement d’une personne à une autre. De bien des façons, les sensibilités sont le pont entre ce qu’une personne ressent vis-à-vis des autres et ce qu’elle ressent vis-à-vis d’elle-même. Certaines personnes sont extrêmement sensibles à des choses telles que la taille, le poids, la religion, la race et certain vocabulaire. La plupart d’entre nous ont suffisamment de délicatesse pour respecter la sensibilité des autres, même si cela signifie se donner de la peine pour être agréable. Il est vrai que certaines personnes sont trop sensibles et s’offensent très facilement (peut-être trop facilement) mais si nous voulons ressembler au Christ, nous avons l’obligation de ne pas offenser ces personnes une fois que nous connaissons leurs points sensibles.

Lorsque les chrétiens de Corinthe ont demandé à l’apôtre Paul s’ils devaient adopter la pratique de manger la viande qui avait été offerte aux idoles, Paul leur répondit que cette pratique ne pouvait ni leur faire du mal ni les aider. Ensuite, il dit : « Prenez garde, toutefois, que votre liberté ne devienne une pierre d’achoppement pour les faibles… C’est pourquoi, si un aliment scandalise mon frère, je ne mangerai jamais de viande, afin de ne pas scandaliser mon frère » (1 Cointhiens 8:9, 13). Ceci nous met en garde non seulement de ne pas nous en prendre aux sensibilités des autres, mais également nous rappelle que si nous sommes libres de choisir nos actes, nous sommes aussi responsables de leurs conséquences.

Si nous agissons de façon responsable, nous serons attentifs aux mots, maniérismes ou comportements qui offensent ou déconcentrent certaines personnes. Ainsi, nous pouvons respecter la sensibilité des autres, et à leur tour ils apprendront à respecter la nôtre. Avoir de l’égard envers les autres demande relativement peu d’énergie et pourtant cela contribue notablement à éviter une rupture de communication.

Quelquefois, nos propres sensibilités ne sont pas flagrantes pour nous-mêmes. Une de mes patientes qui menait un combat difficile contre son obésité a été amenée à réaliser sa grande sensibilité lors d’un incident amusant avec un de ses enfants qui a provoqué sa prise de conscience. Pour des raisons évidentes, le mot « gras » était devenu un vilain mot dans cette maison. Alors que la famille dînait chez un ami, le fils de ma patiente lui a apporté son assiette et lui a demandé « Maman, peux-tu enlever un peu du « potelé » de mon steak ?

Certaines personnes sont très récalcitrantes à l’idée d’une thérapie. Elles considèrent la suggestion du besoin d’une thérapie comme une insulte. Ceux qui consultent un thérapeute sans comprendre que la thérapie est une occasion de croître et d’obtenir une meilleure compréhension sont mis devant une double impasse. Si le thérapeute leur dit qu’ils doivent venir consulter une fois par semaine pendant six mois, ils traduisent qu’il leur dit qu’ils sont très malades et le resteront longtemps. D’autre part, si le thérapeute leur dit de revenir tous les deux mois parce qu’ils s’en sortent bien, ils pensent que le thérapeute ne les aime pas et ne veut pas les voir trop souvent. En raison de leur sensibilité extrême, certaines personnes ne gagnent jamais au jeu de la thérapie.

Les sentiments sont en effet la charnière sur laquelle oscillent la joie et la souffrance. Bien que les problèmes qui engendrent notre souffrance se manifestent par des symptômes déplaisants, ces symptômes sont en fait une manifestation de mauvais sentiments. Nous devons prioritairement aborder et comprendre ces mauvais sentiments, et pas uniquement les symptômes, si nous voulons être soulagés des symptômes et trouver joie et paix.

Chapitre 4: Exploiter ses sacs de jute et ses jambes de bois

Le principe du « agir comme si » : nous le vivons, nous le comprenons

William James, un philosophe du XIXème siècle, a parlé de ce principe en ces termes. Si vous voulez ressentir et penser d’une certaine façon, agissez « comme si » vous ressentiez et pensiez ainsi. Si vous voulez être courageux, agissez comme une personne courageuse le ferait. Et finalement, vous commencerez à vous sentir courageux. Pour mettre cela dans une perspective chrétienne, si vous voulez être une personne aimante, agissez avec amour. Vous ne penserez ni ne ressentirez de l’amour au début mais si vous persistez dans une attitude aimante, vous commencerez rapidement à éprouver de l’amour et à vous sentir aimé.

Il est vrai que les sentiments sont très difficiles à changer, même lorsqu’ils sont reconnus et ont fait l’objet de discussions, mais ils réagissent souvent aux comportements. Il convient de transformer les mauvais sentiments en sentiments positifs. Les bons comportements conduisent habituellement à des bons sentiments alors que les mauvais comportements favorisent les mauvais sentiments.

J’ai connu une femme, membre de l’Église, qui pour des raisons personnelles ressentait beaucoup de colère à l’encontre de son évêque. Elle m’a expliqué que ce sentiment de colère lui causait bien des désagréments, entre autres celui qui entravait son désir d’obtenir une recommandation à l’usage du temple.

Elle savait que durant l’entretien on lui demanderait si elle soutenait les autorités générales et locales de l’Église. Je lui ai demandé si elle soutenait son évêque. Elle a répondu qu’elle faisait tout ce qu’on lui demandait de faire et ne le critiquait pas derrière son dos mais que tout simplement elle ne l’aimait pas. Je lui ai expliqué que soutenir une personne ne voulait pas nécessairement dire qu’on l’aimait, que si elle appréciait son évêque, sa relation avec lui serait certainement plus agréable mais que ce n‘était pas une condition sine qua non pour le soutenir.

Elle a eu son entretien et lorsque la question du soutien des autorités générales et locales a été posée, elle a répondu « oui, je soutiens les autorités ».

L’évêque qui connaissait les sentiments négatifs de cette femme à son égard a demandé : « est-ce que vous me soutenez ? »

Elle a répondu « oui, je vous soutiens ; je ne vous aime pas, c’est tout » Sa réponse honnête et sincère a ouvert la porte à la communication. Un peu plus tard, ils ont pu régler beaucoup de leurs différends. Elle a pu se réconcilier avec son évêque car elle n’avait pas agi en fonction de ses sentiments négatifs, le critiquant derrière son dos ou ignorant ses demandes.

Interaction entre les pensées, les sentiments et les comportements

Pensées – Sentiments

Actions – Comportements

En soins de santé mentale, une des choses qu’un thérapeute recommande à un patient souffrant de dépression est d’agir comme s’il n’était pas dépressif. (Cela suppose qu’un contrôle de déséquilibre chimique a été effectué et corrigé le cas échéant, pour que la thérapie puisse être efficace).

Nombreux sont ceux qui réagissent aux sentiments dépressifs en ne parlant de rien d’autre mais de leur moral en berne. Il ne faut pas beaucoup de temps pour qu’ils réalisent que les personnes qui aimaient leur compagnie commencent à les fuir. Comprendre cela n’est pas difficile : l’être humain essaie naturellement d’éviter les situations démoralisantes, en particulier lorsqu’il ne voit aucun signe que la situation va en s’améliorant. Un élément clé pour pallier ce problème est que la personne dépressive agisse comme si elle ne l’était pas.

Les personnes souffrant de dépression restent souvent allongées au lit, longtemps après s’être réveillées. Si et quand elles se lèvent, elles tournent dans la maison avec la pensée unique de combien elles se sentent mal. Bien sûr, ceci les isole socialement, ce qui aggrave encore plus leur mal-être. En revanche, les personnes émotionnellement saines se lèvent rapidement après s’être réveillées. Elles se douchent, s’habillent, quittent la maison et se mêlent aux autres, au travail, au club de sport ou lors d’une activité sociale et civique. Elles s’impliquent dans des projets d’entraide, de service pastoral ou en étant des voisins attentionnés et respectueux. Elles n’ont pas toujours envie de faire ces choses au départ mais elles les font tout de même car elles savent qu’en agissant elles se sentiront mieux.

Il est bien entendu que les personnes souffrant de dépression n’auront pas envie de faire aucune de ces choses. Cependant, si elles se forcent à s’impliquer, même pour une seule activité qui les fait sortir de la maison, il y a des chances - si elles persistent suffisamment longtemps – qu’elles arriveront à vaincre la dépression et à se sentir mieux.

Évidemment, ceci ne s’applique pas aux dépressions causées par un déséquilibre chimique. Ceux qui souffrent de ce type de dépression peuvent s’user du matin au soir en faisant tout ce qu’il faut mais se sentiront toujours aussi déprimés. Par contre, pour ceux qui jouissent d’un équilibre chimique normal, un comportement positif peut réellement changer leurs sentiments vers le mieux.

Président Kimball a rendu célèbre la maxime « Faites-le ». Peu importe si nous n’avons pas envie de nous comporter comme une personne émotionnellement saine, au début nous devons tout simplement « le faire » !

L’effort est essentiel au changement et à la croissance

L’effort est l’élément essentiel pour pouvoir vaincre la dépression par un changement de comportement. Pour réussir à devenir une personne active et heureuse, vous devrez déployer vos efforts pour modifier votre comportement. C’est-à-dire : être disposé à pratiquer une discipline, accepter une gratification plus tardive, souffrir et rejeter l’homme naturel en vous.

Bien que nous soyons capables d’effectuer des changements importants, souvent nous avons tendance par paresse ou peur de l’inconnu à ne pas le faire. Nous voulons habituellement que notre monde change mais pas nous-mêmes ! Si je ne croyais pas que les gens puissent changer leurs actions, leurs pensées et leur perception de la réalité, je ne pourrais tolérer mon domaine professionnel. En qualité de thérapeute, j’admire les gens qui ont le courage de se confronter à eux-mêmes avec assurance et transparence et sont disposés à travailler pour effectuer les changements en leur propre personne, nécessaires à leur bonheur.

Les changements arrivent rarement d’un seul coup mais lorsqu’ils arrivent, ils sont souvent accompagnés de douleur et d’inconfort. Les changements positifs ne pourront jamais avoir lieu chez les personnes qui n’ont aucune tolérance pour l’inconfort et qui sont trop fragiles émotionnellement pour se confronter honnêtement à leurs propres faiblesses et problèmes.

Prenons l’exemple d’un skieur. Un bon skieur est tombé un nombre innombrable de fois. Ce sont les mauvais skieurs qui ne sont tombés que quelques fois. Le bon skieur apprend de ses chutes. Le mauvais skieur n’a pas osé tomber suffisamment de fois pour apprendre quoi que ce soit. Ce skieur abandonnera certainement ce sport, en expliquant que skier est trop compliqué et trop dangereux. Le bon skieur apprend de ses chutes et finit par être si bon qu’il ne tombe presque plus – mais pas avant d’être tombé un nombre innombrable de fois. Le mauvais skieur qui n’avait pas moins d’aptitude à skier que le bon skieur est devenu la victime de ses chutes et a abandonné.

La plupart des « victimes de la vie » ont omis de reconnaitre que le libre arbitre leur a été accordé. Ils ne comprennent pas qu’ils ont le droit de choisir. C’est en choisissant que nous sortons du rôle de victime et que nous nous rendons responsables de notre propre existence. Habituellement, les personnes qui endossent le rôle de victime n’assument pas leur responsabilité dans une situation donnée ; elles ont l’impression de ne pas avoir la maîtrise de leur environnement. Si ces personnes sont honnêtes envers elles-mêmes, elles se rendront compte qu’elles peuvent avoir tout autant le contrôle de leur environnement que toute autre personne. Leur problème pourrait bien être l’impatience et le refus de travailler et de souffrir suffisamment pour prendre ce contrôle.

Dans son ouvrage Faith Precedes the Miracle (la foi précède le miracle), Président Kimball présente la foi comme une action. La foi consiste en un effort vers quelque chose de vrai, que nous espérons mais ne pouvons pas encore voir. Au début, lorsque nous rassemblons suffisamment de foi pour nous lancer dans quelque chose de nouveau ou pour effectuer un changement, il se peut que nous ne soyons pas capables d’accomplir correctement ce que nous essayons de faire. Quoi qu’il en soit, il est d’une importance primordiale de continuer à essayer.

Alors que nous faisons les efforts nécessaires pour vivre selon les principes favorables à une bonne santé mentale, ces principes finiront par devenir une habitude avec le temps. Beaucoup ont témoigné avoir obtenu leur propre témoignage de la loi de la dîme seulement après l’avoir appliquée. Confucius a dit « Ce que j’entends, je l’oublie, ce que je vois, je le retiens, ce que je fais, je le comprends ». Que nous en ayons envie ou pas, nous devons vivre selon les principes d’une bonne santé mentale, sinon nous ne parviendrons pas à l’obtenir. La bonne nouvelle est que plus nous vivrons selon ces principes, plus nous aurons envie de le faire car les gratifications sont considérables.

La stratégie de la « jambe de bois » pour ne pas changer de comportement

Je constate un problème commun parmi les patients qui souffrent de dépression : la tendance à évoquer des prétextes plutôt qu’à affronter l’inconfort nécessaire au changement de comportement. Une attitude similaire est constatée lors des soins de santé physique. Supposez qu’après une opération à vos deux genoux, vous utilisiez un fauteuil roulant jusqu’à ce qu’un docteur vous dise ; « il est temps de marcher avec un déambulateur et de commencer à faire quelques exercices ». Et vous répondez : « Mais ça va me faire mal ! Je ne veux pas essayer de marcher tant que c’est douloureux ». Pensez-vous que vous remarcheriez un jour ? Jamais.

Je donne le nom de « jambe de bois » à la condition médicale dont le patient se sert comme prétexte et qui entrave inutilement la santé mentale. Tout simplement, certaines personnes qui souffrent de problèmes comportementaux mais n’ayant aucun problème médical, prétendent avoir des ennuis de santé dans le but d’éviter la douleur et l’effort qu’engendre un changement de comportement. Un bon exemple de cela est la personne boulimique obèse qui prétend avoir un déséquilibre métabolique.

Lorsqu’un homme a une vraie jambe de bois, il a une excuse. Si on lui demande de danser, il va dire « Oh, j’aimerais bien mais vous voyez, j’ai cette jambe de bois. Vous ne vous attendez pas à ce que je puisse participer avec ce sévère handicap, n’est-ce pas ? ». L’épouse de cet homme profite également de sa jambe de bois si elle le veut bien. Son histoire à elle « j’aimerais bien danser aussi mais c’est impossible à cause de la jambe de bois de mon mari ».

Une de mes connaissances a une épouse qui est bipolaire. Cet homme dit qu’il aimerait trouver un meilleur travail mais il se lamente que s’il change d’employeur et donc d’assurance avec de nouvelles prestations, la condition de son épouse sera considérée comme préexistante. Il affirme que pour cette raison, il reste dans son poste actuel.

Lorsque je dis que les jambes de bois sont utilisées comme excuse, je ne sous-entends certainement pas que les personnes qui avancent ces prétextes ne souffrent pas réellement. Cependant, tout comme pour beaucoup de maladies physiques, la douleur ne révèle pas immédiatement son origine. Nous pouvons examiner ce modèle : si un enfant attrape la varicelle, les boutons rouges ne sont pas la maladie elle-même mais un symptôme de la maladie. Le vrai problème est la contamination par un virus et l’incapacité du système immunitaire d’y résister.

L’enjeu face aux excuses de « jambe de bois » est de découvrir la réelle source de douleur qui fait obstacle au changement de comportement du patient.

Une dame que je nommerais Sue est venu me consulter, ayant pour but principal de perdre du poids. Sue était une mère seule dans la mi-trentaine et avait plusieurs enfants. Son problème de poids datait d’avant son divorce mais depuis le divorce son poids avait atteint 159 kg. Bien qu’elle ait stipulé qu’une des raisons principales de sa consultation était de perdre du poids, nous avons rapidement constaté que son poids était devenu sa jambe de bois.

Elle finit par admettre qu’à cause de sa culture religieuse, la chose la plus terrifiante qu’elle puisse imaginer était d’avoir des relations sexuelles en dehors des liens du mariage. Cette perspective l’effrayait encore plus que la mort. Avec le temps, elle s’est rendu compte que son poids était une protection contre les hommes et les relations sexuelles. Elle raisonnait ainsi : « Qui pourrait être attiré par une femme qui pèse 159 kg ? ».


Nous avons travaillé sur sa confiance en elle. Elle a fini par réaliser qu’une femme pouvait être mince et vertueuse. Forte de cette connaissance, elle a été en mesure d’abandonner sa « jambe de bois ». En conséquence, elle a commencé à perdre du poids, à avoir une vie sociable et à devenir une personne beaucoup plus extravertie et heureuse.

Il est clair que certaines personnes s’accrochent farouchement à leurs handicaps comme un moyen pour éviter d’autres problèmes.

Un de mes patients est venu me voir dans un tel état léthargique qu’il ne pouvait pratiquement pas fonctionner dans sa vie quotidienne. Une analyse ordinaire de laboratoire a permis de mettre en évidence une hypothyroïdie. Un médecin lui a prescrit des hormones thyroïdiennes et au bout de quelques semaines, l’homme était redevenu actif et avait retrouvé plus d’énergie.

Lorsqu’il a été capable de reprendre le travail, il a soudainement choisi d’arrêter son traitement. Quelques semaines plus tard, il était de nouveau immobilisé sur sa chaise, complètement insensible au monde. Il prétendait que si Dieu l’avait rendu hypothyroïdien, c’était tout simplement une croix qu’il devait porter. Si Dieu voulait le guérir, il changerait son métabolisme. Mon sentiment est que cet homme ne faisait pas là une démonstration de foi. Par un simulacre de foi, il justifiait son désir de rester inactif et de ne pas travailler.


Les jambes de bois se développent par peur et par manque d’engagement à l’égard de la vie, mais aussi par ignorance. Par exemple, alors que la plupart des gens ont une certaine connaissance du diabète, peu ont des difficultés à accepter l’insuline en tant que moyen légitime pour maitriser la maladie. Par contre, lorsque les gens découvrent qu’ils ont un déséquilibre de sérotonine, dopamine, noradrénaline, de la glande thyroïdienne ou de toutes autres hormones régulatrices ou stimulatrices, ils résistent souvent à suivre un traitement car ils ne comprennent pas ce que sont ces choses et quels sont leurs rôles. Étant donné que beaucoup évitent ce qui leur fait peur, ils rejettent souvent ce qui pourrait les aider à mener une vie plus heureuse.

Les programmes qui dirigent nos sentiments et nos comportements

Les pensées sont des programmes qui dirigent nos sentiments et nos comportements, tout comme les logiciels et les programmes font fonctionner le matériel informatique. Cependant, étant donné que les pensées sont insaisissables et difficiles à déterminer, les thérapeutes trouvent plus facile de se focaliser sur des changements de comportement. Comme vu auparavant, changer les comportements peut changer les pensées.

Ceci ne signifie pas que les thérapeutes passent outre le processus de réflexion sous-jacent aux comportements. En fait, les épreuves de réalité, la clarification des valeurs, les modèles de respect et l’analyse transactionnelle sont toutes des méthodes qu’un thérapeute peut utiliser pour aider les personnes à analyser et à évaluer leurs façons de penser. Dans les pages qui suivent, nous parlerons d’abord des changements de comportement puis nous passerons aux modèles de pensée.


Se concentrer sur les comportements

Je rencontre beaucoup de personnes dont une quelconque obsession dirige la vie. Par définition, une obsession est souvent une idée ou une pensée répugnante ou déraisonnable qui devient répétitive et peut conduire à des comportements compulsifs. J’ai déjà dit que les pensées et les sentiments ne sont pas simples à changer mais il est nécessaire de vaincre les obsessions pour atteindre un état de bonne santé mentale.

J’utilise quelquefois un exercice qui est plutôt absurde mais qui démontre bien que le changement de comportement est souvent plus efficace que d’essayer de changer ses pensées. Je demande aux gens de fermer les yeux et de s’imaginer qu’ils voient un éléphant dans leur imaginaire. Je leur demande ensuite de décrire l’éléphant avec tous les détails possibles. Une fois que cette pensée est imprimée dans leur cerveau, je leur dis de ne plus avoir aucunes pensées ou idées au sujet des éléphants. Habituellement, ils essaient de penser à autre chose et font du mieux qu’ils peuvent mais au bout de quelques instants, ils échouent. Une fois qu’une idée est fortement ancrée dans l’esprit, il est difficile de la faire sortir.

Comment est-ce que j’aide les gens à se débarrasser d’une obsession ? Est-ce que je leur dis simplement de ne plus penser aux éléphants ? Ceci est évidemment bien futile. En fait je ne mentionnerais probablement même pas leurs pensées ; au lieu de cela, je me focaliserais sur leurs comportements. Si leur obsession étaient les éléphants, je demanderais : « est-ce qu’ils ont l’obligation de se rendre au cirque ou au zoo ? » Bien sûr que non, ils peuvent aller ailleurs. « Est-ce qu’ils doivent lire des livres sur les éléphants ? » Non, ils peuvent lire des livres sur tout autre thème. « Est-ce qu’ils doivent regarder tous les anciens films de Tarzan ? Non, ils peuvent aller au cinéma et voir des millions d’autres choses que les éléphants. « Et quelles sont les paroles qu’ils prononcent ? Peuvent-ils éviter de parler des éléphants ? » Bien sûr qu’ils le peuvent.

L’idée est que nous traitons les obsessions en nous concentrant sur les comportements. Si une personne élimine tous les comportements en relation avec son obsession, l’obsession devient de moins en moins omniprésente dans ses pensées et elle peut commencer à fonctionner plus normalement.


Un plan pour affronter les obsessions et les faux systèmes de croyance

Comme mentionné auparavant, il est bénéfique pour chacun de nous d’examiner nos croyances et nos anciens « programmes » et d’analyser ceux qui nous causent des conflits. Ces croyances se sont formées dans notre enfance, sans avoir suffisamment d’expérience de la vie et de recul pour pouvoir analyser, juger et évaluer les enseignements reçus de nos parents, des enseignants et autres adultes. Beaucoup de ces enseignements sont basés sur la culture, la tradition, les opinions et les préférences individuelles comme évoqué dans le chapitre 1, mais ils peuvent également nous avoir été enseignés comme étant parole d’Évangile.

Il est utile de se souvenir lorsque nous analysons nos croyances que le mot « choisir » a du pouvoir. En tant qu’adulte, nous avons le pouvoir du choix – nous pouvons choisir de changer ces croyances ou pensées que nous découvrons être erronées, qui ne nous sont plus utiles ou sont autodestructrices. Les parents ne se sont pas fixés pour but de donner à leurs enfants des idées névrotiques ou autodestructrices mais malgré cela, ils peuvent transmettre des croyances dont ils ont hérité de leurs propres parents et qui sont en fait des mythes. Certaines de nos croyances ne proviennent pas des enseignements que nous avons reçus mais peuvent être le résultat de conclusions erronées ou de suppositions faites dans notre enfance.

Par exemple, lorsque Reed, un homme au début de la quarantaine, est venu me voir, il était plutôt évasif sur ses sentiments. C’était un homme jovial, à la stature imposante, qui semblait bien correspondre au stéréotype de l’homme corpulent enjoué.
Il a fini par avouer qu’il ne laissait jamais paraitre à personne son côté triste, blessé, craintif ou rejeté. À cause des croyances qu’il avait développées au cours des années, telles que « ne jamais montrer à personne son côté vulnérable car ils s’en serviront pour vous blesser », « éviter les sentiments étroits et intimes car ils vous rendent vulnérables » et « si vous faites rire les gens, ils vous aimeront », il trouvait pratiquement impossible de développer des relations approfondies avec quiconque.

Ces sentiments empêchaient Reed de mener une vie pleine et heureuse et ils nuisaient à sa relation conjugale. Même dans sa relation avec ses enfants, Reed n’était jamais sérieux et ne montrait jamais son côté doux et tendre. Au travail, ses collègues ont commencé à s’agacer de son style plutôt désinvolte et cavalier.
Fondamentalement, la personnalité de Reed était déséquilibrée à cause de son faux système de croyance. Alors que son humour et ses blagues pouvaient au premier abord paraître attrayants, ils finissaient par fatiguer les gens. Après un échange approfondi, Reed a été capable de réaliser qu’il avait besoin de trouver un meilleur équilibre entre trop d’humour et pas d’humour du tout. Il a également été en mesure de reconnaitre que certaines de ses croyances et suppositions étaient erronées et problématiques.

Comment changeons-nous les croyances ? Nous pouvons nous poser deux questions chaque fois que nous constatons des conflits en nous-mêmes : quelle supposition suis-je en train de faire concernant cette situation ou cette personne ? Et, suis-je certain que cette supposition est basée sur des faits ? Quand nous identifions la supposition ou la croyance sur laquelle nous basons nos actions, nous serons en mesure de détecter l’élément erroné de notre supposition ou de notre croyance et d’y apporter des corrections. Nous croyons en quelque chose parce que nous pensons que c’est vrai. Pour se séparer de cette croyance, nous devons constater clairement qu’elle est fausse et ressentir émotionnellement les dégâts que cette fausse croyance engendre en nous. Le changement est plus facile si la logique et les sentiments sont tous deux engagés.

Il est cependant possible de s’élever au-delà des comportements négatifs et pourtant rester bloqué dans des schémas de pensée négatifs ou névrotiques. En conséquence, nous nous sentirons toujours malheureux. Nous pouvons être dans l’action et engagés dans de nombreuses activités bénéfiques. Et pourtant, tout comme ceux qui croupissent dans une culpabilité imméritée, nous pouvons continuer à concentrer nos pensées sur nos lacunes et la liste interminable de nos péchés par omission.

Si nous tombons dans ce piège, nous risquons de nourrir de profonds sentiments d’amertume vis-à-vis de notre incapacité à agir correctement. Nous pouvons être en colère, critiques et subjectifs vis-à-vis des autres que nous trouvons désinvoltes, irresponsables, peu spirituels ou affublés de tout autre défaut. Nous pouvons projeter notre état du moi « parent normatif » et autodestructeur sur les autres et les considérer comme la cause de nos problèmes. Ceci nous amène à considérer les autres de façon critique et doublement contraignante.

Pour affronter les faux systèmes de croyances qui engendrent des pensées négatives et névrotiques, écrivez la liste des croyances, des conclusions, des suppositions et des valeurs qui sont les vôtres actuellement. Classez ces croyances par catégories, telles que la philosophie de vie en général, le mariage, Dieu, l’église, le travail, l’argent, le sexe, les hommes, les femmes, les enfants et l’image de soi.

Par exemple, lorsque j’étais jeune, j’ai tiré de mauvaises conclusions sur la corrélation entre la taille et l’intelligence des personnes. Je pensais que les personnes de grande taille étaient stupides. J’avais remarqué dans les films et autres médias où les personnes de grande taille étaient souvent décrites comme étant lentes d’esprit. Il faut dire que je mesure autour de 1m95. Il m’a fallu attendre le début de l’âge adulte pour réaliser que ma croyance était un stéréotype et qu’il n’y avait absolument aucun lien entre la taille et l’intelligence d’une personne. En faisant cet exercice, nous pourrons peut-être découvrir que nous avons tiré de nombreuses fausses conclusions de ce genre dans notre vie.

Les croyances peuvent être évaluées de façon efficace et logique sur le plan psychologique, ce que j’aime appeler « l’adulte équilibré » (voir chapitre 7). Cette évaluation peut requérir l’aide de quelqu’un qui nous aide à rester objectifs, nos croyances pouvant être tellement enracinées et faire partie de nos principes de base qu’elles paraissent presque sacrées. Nous risquons de les accepter inconditionnellement et de ne pas reconnaitre les problèmes qu’elles nous causent.

Le vieil adage qui dit « Ce qui mérite d’être fait mérite d’être bien fait » est un excellent exemple. Il parait anodin. Mais si cette croyance est réellement mise en pratique dans la vie, elle peut être restrictive et débilitante et exclurait toute activité entreprise rien que pour le plaisir. Qu’en serait-il si vous nettoyiez la maison, donniez un discours, skiiez ou prépariez un repas uniquement lorsque vous seriez capable de le faire bien ? Nous devons accepter le fait que nous sommes quelquefois limités par le temps, le manque d’expérience et des incapacités physiques, et que certaines choses ne sont tout simplement pas suffisamment importantes pour que nous y consacrions le temps et l’attention nécessaires pour les faire bien.


Comme vous pouvez le voir, certaines de nos croyances qui paraissent logiques peuvent causer des turbulences dans notre vie. Certains de nos faux systèmes de croyances peuvent nous concerner directement, comme ce que je croyais au sujet des personnes de grande taille, ou peuvent être dirigés vers les autres. Par exemple, une femme victime d’abus sexuels peut croire que tous les hommes sont mauvais. Cette croyance erronée entravera toute possibilité d’une relation positive et épanouissante avec un homme.

La prise de conscience et la compréhension des effets sur notre vie qu’engendrent ces croyances peuvent être un exercice compliqué sans l’aide d’une personne extérieure qui aura un regard objectif. Puisque Dieu nous a donné le libre arbitre et le pouvoir de choisir, je crois fermement que nous n’avons pas le droit d’avancer l’excuse « je suis une victime ». Nous n’avons aucune raison d’être liés émotionnellement ou fanatiquement à nos anciennes croyances et idées préconçues. En confrontant et en étudiant minutieusement nos croyances, nous pouvons choisir d’adopter de nouveaux modes de croire et de penser, plus efficaces et plus réalistes.

Les exemples suivants donnent un aperçu sur le genre de réponses que je vois lorsque les personnes examinent leurs croyances :


Anciennes croyances

Nouvelles croyances
Le travail :
Ce qui mérite d’être fait mérite d’être bien fait.
Le travail :
Certaines choses méritent d’être faites correctement. Pour d’autres, nous les faisons uniquement parce qu’il faut qu’elles soient faites… et ensuite il y a les choses que nous ne faisons que pour le plaisir.


L’image de soi :
Je suis tout à fait comme mon père.
L’image de soi :
J’ai les mêmes yeux que mon père et son sens de l’humour mais je suis différent dans d’autres aspects, comme…


Dieu :
Dieu ne m’aime que si je suis bon.
Dieu :
Dieu m’aime toujours et veut que je sois heureux. Je suis plus heureux lorsque je suis bon.


La vie :
Les bonnes choses ne durent jamais.
La vie :
Les choses changent mais même ainsi je peux apprécier ce moment.


La sexualité :
La sexualité est dans un but de procréation.
La sexualité :
La sexualité est beaucoup de choses : la communication, forger des liens, une expression d’amour et la procréation.


Prenez le temps aujourd’hui de faire cet exercice. Écrivez toutes les croyances que vous pouvez identifier et passez le temps qu’il faut pour les analyser et décider de votre point de vue actuel lesquelles devraient être reformulées et changées. Vous serez étonné du sentiment de liberté que vous ressentirez.


Chapitre 5 : Vous avez combattu pour le libre arbitre – Maintenant profitez-en !

Le libre arbitre est un principe intégrant et critique que nous avons le devoir d’honorer. Bien que souvent il ne soit pas facile d’accepter ce principe, nous devenons démoniaques si nous ne l’honorons pas. Essayer de prendre le contrôle de toute autre personne que soi-même ne reflète pas la volonté de Dieu mais celle de Satan.

Nous avons combattu une grande guerre dans les cieux pour la liberté des choix. Nous devons nous souvenir de cela lorsque nous ressentons le besoin de contraindre quelqu’un à agir ou à penser d’une certaine manière. Nous avons la responsabilité d’encourager, d’avertir et d’enseigner des principes corrects mais au final, c’est le droit personnel et l’obligation de chaque individu de faire ses propres choix.

Lors de la grande guerre dans les cieux, un tiers des esprits s’est rangé du côté de Lucifer et voulait retirer le libre arbitre à l’homme. Prendre position contre Dieu et vouloir retirer le libre arbitre à l’homme peut paraitre illogique mais d’après mon expérience en qualité de thérapeute, j’ai commencé à comprendre la raison pour laquelle un si grand nombre d’esprits avait agi ainsi. Je crois qu’ils ont choisi le plan de Satan par peur des responsabilités que le libre arbitre engendrerait. Ils craignaient d’avoir la liberté de faire des mauvais choix et les conséquences qui en découleraient.

Aider – en opposition à commander

Lorsque j’observe le comportement des parents avec leurs enfants, les conjoints entre eux et les amis entre amis, je perçois le désir inné de commander la vie des autres (peut-être un aspect de l’homme naturel).

Cependant, si nous prenons les commandes de la vie d’autres personnes, nous en devenons également responsables. Peut-être que cette prise de conscience nous aidera à maîtriser notre désir de domination. Notre but sur terre n’est pas de déresponsabiliser les autres qui ont besoin de se charger de leurs propres responsabilités pour croître et se développer. Nous sommes sur terre pour encourager, enseigner des principes corrects, tendre une main serviable et suivre des principes corrects nous-mêmes. Nous devons éviter avec prudence les tendances de codépendance qui créent un sentiment malsain de responsabilité pour les autres, au détriment de nos propres responsabilités.

Il existe un équilibre délicat entre aider à l’excès et ne pas suffisamment aider, entre laisser le principe de « cause à effet » se réaliser lorsque des personnes s’autodétruisent et intervenir dans un effort pour stopper cette destruction. Quand il s’agit de familles, de gouvernements, de systèmes légaux ou sociaux, trouver un équilibre est un défi constant. Nous devons nous rappeler que Dieu lui-même n’intervient pas lorsque nous faisons des choix qui mettent en danger notre santé mentale ou notre propre vie, ou qui nous empêcheront de revenir en sa présence. Cette déclaration de Fritz Pearls exprime bien le libre arbitre : « Vous faites vos affaires et je ferai les miennes. Mon rôle n’est pas de répondre à vos attentes ni le vôtre de répondre aux miennes ».


Ce n’est pas une autorisation mais une responsabilité

Dieu nous a donné un plan pour le voyage de la vie mais sur ce plan il n’y a pas uniquement un chemin mais plusieurs qui ramènent à lui – tous étant bien sûr pavés des mêmes commandements, principes et ordonnances. Aucun de nous ne retournera à Dieu en empruntant le même chemin mais par l’accès à l’inspiration et la conscience que Dieu nous a donnés, nous pouvons trouver le chemin qui nous réussira.

Il n’est pas rare d’entendre les gens dirent des choses comme « Je suis fatigué de devoir prendre autant de décisions, de devoir réfléchir tout le temps, de devoir maîtriser ma parole et mes actions ». Réfléchir tout le temps, être courtois et consciencieux, tout cela fait partie intégrante de la maîtrise et des qualités que Dieu souhaite que nous acquérions. C’est bien de cela qu’il s’agit, utiliser notre libre arbitre pour apprendre à vivre les commandements. Cependant, ce n’est pas simple, la maîtrise de soi ne s’acquérant qu’après beaucoup de patience et de souffrance. Néanmoins, elle reste un de nos plus importants objectifs.


La maîtrise de soi

Et quand je conquérais mes ennemis,
Et entasserais marchandise et lucre,
Je serais un bien pauvre conquérant,
Si je ne me soumets pas.

Et quand je lirais et apprendrais par cœur
Des livres entiers pendant ma jeunesse,
Je serais un linguiste en disgrâce,
Si je ne sais garder ma langue.

Et quand j’excellerais sur le terrain,
Victorieux dans les rencontres et les combats,
Si entraîné et efficace, je ne suis toujours pas capable
De contrôler un appétit.

Et quand mon nom serait inscrit, vénéré,
En haut du tableau d’honneur,
Élu, j’aurais raté le fondamental,
Si je n’ai pas appris le contrôle de soi.

Et quand je serais diplômé et gravirais les échelons,
Et que la vie serait généreuse envers moi,
Mon cœur me dirait que je suis un raté,
Tant que je n’aurais pas acquis la maîtrise de soi.
-Auteur inconnu-

La maîtrise de soi repose sur des choix et ne s’acquiert que par nos propres efforts et la prise de responsabilité de nos propres choix. Beaucoup de membres de l’Église veulent davantage que des orientations générales ; ils veulent des absolus. Ces membres ont besoin de comprendre qu’il ne peut pas y avoir d’absolus dans une quête aussi personnelle.

Les choix sont la clé et les enjeux sont élevés

Alexandre Soljenitsyne a dit :

Durant les 300 années de la civilisation occidentale, on a assisté à l’anéantissement des devoirs et des responsabilités et à l’expansion des droits. Mais nous avons deux poumons. Nous ne pouvons pas respirer avec un seul poumon sans utiliser l’autre. Nous devons faire usage des droits et des devoirs dans la même mesure…
La seule chose que nous ayons développée sont les droits, les droits, et encore plus de droits, au détriment des devoirs.

Le mot « choisir » révèle une puissance énorme. Il est presque synonyme de responsabilité et de libre arbitre. En revanche, le mot « ne pas pouvoir » est affaiblissant et souvent le signal que quelqu’un n’est pas disposé à assumer la responsabilité de ses décisions. Lorsqu’une personne dit « C’est ce que j’ai choisi de faire », elle reconnait son contrôle de la situation. Lorsqu’elle dit « Je n’en peux plus et il n’y a rien que je puisse y faire », elle ne fait preuve d’aucune puissance et peut même s’instaurer en victime.

J’ai reçu un jour un homme admis en psychiatrie en raison d’une dépression sévère. Son épouse avait décidé de le quitter pour un autre homme. Il se plaignait que depuis plusieurs années elle était malheureuse avec lui et l’avait harcelé excessivement au sujet de son manque d’accomplissement. Il était un professionnel qui travaillait de longues heures et assurait largement le bien-être financier de sa famille. Lorsque son épouse fut partie dans son univers fantaisiste avec un autre homme, il a essentiellement dit : « je ne peux pas le supporter. Je préfèrerais être mort ». Cet homme s’est senti une victime sans défense. Son divorce était inévitable ; son épouse a refusé toute intervention et il n’avait aucun contrôle sur les choix qu’elle avait faits.

Durant les séances de thérapie, je l’ai poussé à se poser la question du pourquoi il avait choisi de rester dans une relation aussi négative. Pourquoi avait-il supporté le dénigrement constant de son épouse ? J’ai demandé « Êtes-vous masochiste ? » Il a fini par réaliser que l’expérience qu’il avait tolérée n’était pas nécessaire. En réalisant cela, il a pu redevenir lui-même et se détacher émotionnellement de son épouse. Il a décidé que tout comme elle avait choisi de lui faire subir des abus et de le quitter, il pouvait choisir de la laisser partir et de commencer une nouvelle vie.


Avoir fait ce choix a eu deux conséquences. Tout d’abord, il commença à avoir une meilleure estime de soi. Il ne considérait plus le divorce comme l’équivalent de la mort mais comme une décision à laquelle il avait contribué et qu’il partageait. Plus tard, son épouse s’est demandée quelle était la source de cette nouvelle force. Elle lui a posé des questions sur sa thérapie et a fini par venir elle-même consulter. Puis, ils ont recommencé à communiquer entre eux. Reconnaissant sa meilleure estime de soi, elle aussi s’est mise à mieux le respecter.

Les gens me disent constamment : « je serais plus heureux si seulement mon conjoint faisait ceci… ou si mon chef faisait cela… si mes enfants étaient comme ceci… ». Mais nous sommes chacun responsable de relever le défi de notre propre vie – et non pas de changer la vie des autres. Avec cette prise de conscience, nous pouvons choisir de changer nos comportements et prendre une autre direction lorsque la situation le demande. Le schéma de développement de la sensibilisation envers nos responsabilités est illustré graphiquement dans la pièce suivante :

Autobiographie en cinq courts chapitres

Chapitre 1

Je marche dans la rue.
Il y a un trou profond dans le trottoir.
Je tombe… Je suis perdu… Je suis sans défense…
Ce n’est pas de ma faute.
Il me faut une éternité pour trouver une voie de sortie.

Chapitre 2

Je marche dans la même rue.
Il y a un trou profond dans le trottoir.
Je fais semblant de ne pas le voir.
Je retombe dedans. Je n’arrive pas à croire que je suis encore dans ce même endroit.
Mais ce n’est pas de ma faute. Il me faut encore longtemps pour en sortir.

Chapitre 3

Je marche dans la même rue.
Il y a un trou profond dans le trottoir. Je vois qu’il est bien là.
Je tombe encore dedans… c’est une habitude… mais mes yeux sont ouverts.
Je sais où je suis. C’est ma faute, ma responsabilité.
J’en sors immédiatement.

Chapitre 4

Je marche dans la même rue.
Il y a un trou profond dans le trottoir.
Je le contourne.

Chapitre 5

Je prends une autre rue.

-Portia Nelson-


Chapitre 6 : Découvrir le papillon dans votre cocon

A la recherche de la santé mentale, bien se connaître est la tâche la plus importante à accomplir. Une fois que vous saurez qui vous êtes et ce que vous voulez, vous vous rendrez peut-être compte que les autres relations se mettent en place d’elles-mêmes. Il est important de connaitre les croyances et les présomptions que vous nourrissez à votre égard et d’être activement engagés à les cultiver selon les directions que vous souhaitez donner à votre vie. Quand vous découvrez votre « soi essentiel », que vous l’acceptez et l’enrichissez, un soi plus calme, plus stable et plus assuré émergera. Grâce à la confiance et à l’acceptation de soi que cela apporte, la vie a un sens et du bonheur, la dépression et la détresse sont tenus à distance.

L’individualité étant un élément essentiel de la confiance en soi, je fais souvent des enregistrements pour mes patients afin de leur donner un sentiment de leur spécificité unique. Ci-dessous un exemple :

Je m’appelle John Doe et je suis unique et différent. Il n’existe personne comme moi parmi les milliards de combinaisons de variables dans le monde. Il se peut qu’une poignée de personnes ait certains de mes attributs mais au final, personne n’est exactement comme moi. Par conséquent, je constate que tout ce qui provient de moi est unique et authentique et a un caractère exceptionnel et rare.

Le plus important est le fait que je m’appartiens. Mes yeux sont à moi, avec tout ce qu’ils voient. Mes oreilles sont à moi, avec tous les sons et les paroles qu’elles entendent. Mes sentiments m’appartiennent, avec toutes mes émotions – que ce soit la joie, l’amour, la colère ou l’enthousiasme. Mes comportements m’appartiennent, qu’ils soient axés sur moi-même ou vers les autres. Mes victoires m’appartiennent, mes échecs aussi.

Je sais qu’au cours de ma vie, il y aura des choses que j’ignore sur moi-même. Mais dans la mesure où je choisis d’être complaisant et dans l’acceptation de moi-même, je peux trouver le courage d’examiner ces choses et d’apporter tous les changements nécessaires. Quelles que soient mes attitudes et mes paroles, quoi que je dise ou fasse, quoi que je pense ou ressente à un moment donné, c’est bien de moi qu’il s’agit. Lorsque j’examine plus tard mes attitudes et mes paroles, mes pensées et mes actions, je peux décider qu’elles ne me conviennent pas. Mais comme elles m’appartiennent, j’ai le pouvoir de modifier ou de me débarrasser de celles qui ne sont pas correctes ou pas bonnes pour moi. De plus, je peux les remplacer par d’autres façons d’être, nouvelles et créatives. Je garde ce qui s’est avéré bon et juste.

En tant que propriétaire de ma vie, je suis son ingénieur et son architecte. Je prends de plus en plus conscience de l’importance du libre arbitre et du pouvoir de choisir. Lorsque Dieu m’a donné le pouvoir de choisir, il m’a également promis que si j’en faisais usage avec justice et créativité, je serais une personne productive.


Je ne peux pas me contenter de survivre, je peux faire une différence. Je constate que la perfection est un processus, tout comme la vie. Et lorsque je commence à considérer la vie comme un processus et non pas comme une simple destination, j’apprends à apprécier de plus en plus mon chemin de vie et à me sentir de mieux en mieux.

Nous ne pouvons pleinement apprécier les avantages d’une auto-évaluation honnête, sans avoir découvert notre individualité. L’image de nous-mêmes que nous renvoient les différentes personnes ou institutions n’est qu’un reflet déformé, tout comme les images que nous renvoient les miroirs dans les fêtes foraines de notre société moderne, nous affichant plus grands, plus gros et plus bêtes ou moins gentils que ce que nous sommes réellement. Nous devons être préparés à chercher et à être mis à l’épreuve. En tant que membres de l’Église, nous avons une aide spéciale dans cette recherche : la bénédiction patriarcale et d’autres bénédictions nous apportent souvent un aperçu de la façon dont le Seigneur nous voit, la seule perception qui soit totalement juste.

Analyse transactionnelle

L’analyse transactionnelle (AT) impose un cadre à l’auto-évaluation. C’est un outil précieux de catalogage et d’évaluation de nos comportements et sentiments et pour la compréhension de la dynamique de nos interactions avec les autres et nous-mêmes. L’AT porte sur l’interaction de la dynamique interne (différents états du moi) en chacun de nous. L’approche transactionnelle de l’analyse dit qu’il y a différents états du moi en chaque personne et que nous devrions essayer d’établir un équilibre entre eux.

Les états du moi ne sont pas des personnalités mais plutôt un ensemble de sentiments, d’émotions, de suppositions et de conclusions. Chaque état du moi comporte des sentiments et des pensées différents, souvent conscients les uns des autres. Le conflit entre les différents états du moi sont bien réels et quelquefois intenses. Lorsque des personnes disent des choses comme « il me semble qu’un combat a lieu en mon for intérieur », il est possible qu’elles soient en train de vivre un conflit entre leurs différents états du moi.


Il est utile de savoir que nous avons des états du moi différents et que chacun de ces états a des orientations, des préférences, des peurs, des valeurs, des croyances et même des comportements divers. Beaucoup de gens ignorent que les sentiments des autres peuvent varier selon leurs états du moi. Il arrive souvent qu’un patient me demande des choses comme « Est-ce que c’est réellement ce que ma femme (mon fils, mon supérieur) pense de moi ? » Je réponds habituellement qu’à ce moment précis et dans cet état du moi, ces personnes pensaient probablement ainsi. Ceci n’implique pas nécessairement qu’elles pensent ainsi tout le temps, mais uniquement dans cet état du moi et à ce moment précis.

Pour nous aider à comprendre la dynamique du moi, je pense qu’il serait intéressant de regarder l’illustration suivante qui identifie quatre états principaux du moi : le parent normatif, le parent nourricier, l’enfant (rebelle et avec ses capacités d’adaptation) et l’adulte équilibré. Le but ultime de cette approche est d’arriver à l’état de l’adulte équilibré.

Modèle transactionnel

Le parent normatif : Craintif, prudent, s’exprime en absolus, met des doubles contraintes, toujours juste sur le fond, critique, rigide, négatif

Le parent nourricier : Totalement dévoué, aimant, éduquant

L’adulte équilibré : Objectif, rationnel, similaire à un ordinateur, impassiblement pratique

L’enfant libre : Curieux, amusant, spontané, agréable, franc, perfectionniste

L’enfant soumis : craintif, réprimé, en colère, offensant, rebelle, souvent déprimé

Regardons maintenant certaines des caractéristiques de ces états du moi. Par souci de clarté, je nommerai les états du moi « Parent », « Enfant » et « Adulte ».

Commençons par le Parent.


L’état du moi Parent, présent dans chacun de nous, aime axer son argument sur les principes. Étant donné que l’argumentation sur les principes est considérée comme une activité pour les sages, le Parent donne l’apparence d’avoir toujours raison. Mais avoir « raison » peut quelquefois être injuste et dégradant pour l’enfant. Le Parent en nous pourrait dire « Si tu allais à la réunion de Sainte Cène dans un meilleur état d’esprit, tu retirerais davantage des réunions de l’Église ». « Si tu lisais les Écritures plus régulièrement, tu comprendrais mieux l’Évangile ». « Si tu travaillais à l’histoire familiale, tu comprendrais mieux l’œuvre du temple ».

Toutes ces choses sont justes mais si notre Parent interne utilise ces vérités pour nous combattre et nous démolir nous-mêmes, ces commentaires deviennent si écrasants que nous voulons littéralement abandonner. Plutôt que des mots d’encouragement, ils deviennent des exigences qui nous accablent et engendrent rébellion et découragement.


L’état du moi Parent normatif peut également être doublement contraignant, de sorte que quoi que nous fassions, c’est mal. Prenons comme exemple la consultation chez un thérapeute. Le Parent normatif en nous pourrait dire à l’Enfant en nous « Eh bien, tu as toujours été un faible. Tu es le genre de personne qui a toujours été dépendante des autres et je pense que les gens faibles comme toi devraient consulter ». Si vous n’allez pas consulter le thérapeute mais que vous avez réellement besoin d’aide, le Parent normatif pourrait alors dire « Eh bien, tu as toujours été têtu ; tu n’acceptes jamais les conseils des autres et tu rejettes toute aide ». Quel que soit le choix que nous fassions, le Parent en nous peut avoir tendance à être sévèrement critique et doublement contraignant.

L’état du moi Parent normatif peut rendre impossible que nous acceptions des éloges de quelque nature que ce soit. Lorsque nous sommes complimentés d’une quelconque façon, le Parent en nous peut écarter l’éloge. Évidemment, ceci a une grande incidence sur nos relations interpersonnelles car les autres peuvent se lasser de voir leurs compliments discrédités.

Inversement, dans certains cas l’état du moi Parent normatif peut harceler le moi Enfant, et le pousser non pas vers l’isolation mais vers la dépendance. Ceci arrive lorsqu’il y a une critique constante de l’état du moi Parent qui conduit une personne à rechercher en compensation le soutien des autres de manière extrême, compulsive ou malsaine.

Cependant, si l’état du moi Parent nourricier en nous peut prendre en charge une forme de soutien, la dépendance des autres peut être évitée. Le Parent nourricier est aimant, gentil et dans l’acceptation ; il donne un amour inconditionnel. Ceci peut paraître merveilleux mais un bon équilibre est néanmoins essentiel car si le Parent nourricier en nous est hyperactif, il a tendance à soigner les autres au détriment de soi. Si votre Parent nourricier devient dominant, vous serez facilement exploité et vous risquerez de vous éreinter, tout en ressentant que vous n’en faites jamais assez pour les autres. (C’est sans aucun doute un des facteurs qui contribue à la codépendance). Agir ainsi du point de vue du Parent nourricier, sans l’équilibre de la logique et de la raison qu’apporte l’Adulte constitue une faiblesse personnelle.

Par exemple, je connais une veuve qui a dépensé les économies de toute une vie en combats juridiques pour sauver son fils de la prison alors qu’il était un criminel endurci. Le Parent nourricier chez cette femme exerçait un tel contrôle qu’elle était incapable de regarder la réalité en face et de surmonter son désir d’aller au secours de son fils. Typiquement, le Parent nourricier est poussé par un sentiment de culpabilité et une complaisance excessive dans une zone d’excès malsain, ce qui peut par la suite amener les enfants à être trop complaisants envers eux-mêmes.

J’ai récemment vu un exemple de cela lorsqu’une mère a jugé nécessaire de faire admettre son fils adolescent à l’hôpital, dans le service de psychiatrie. Son fils était totalement incontrôlable. Il arpentait les corridors en courant, en insultant sa mère et en donnant des coups de pieds dans les portes. Au lieu de quitter les lieux comme suggéré afin que les docteurs puissent plus facilement calmer le garçon, la mère restait là et s’excusait encore et encore auprès de son fils de l’avoir fait entrer à l’hôpital.

Lorsqu’elle finit par partir, le garçon se calma. Cette mère était tellement rongée par la culpabilité, alimentée par son état du moi Parent nourricier déséquilibré, qu’elle n’était pas capable de réagir rationnellement. On voit clairement que l’état du moi Parent nourricier, potentiellement bon, peut devenir dangereux si la logique de l’état du moi Adulte n’est pas intégrée.


Par contre, si l’état du moi Parent normatif devient dominant, il est courant d’entendre des messages du genre « Les sentiments négatifs doivent être supprimés et oubliés », « Le corps et ses fonctions sont sales » et « Tu ne devrais te soucier que des autres et pas de toi-même ».

L’état du moi Parent normatif a tellement tendance à donner à l’Enfant un sentiment d’oppression et d’infériorité que beaucoup veulent l’attaquer et tentent de le chasser de leur esprit. Au lieu de cela, nous devrions laisser intervenir autant que possible l’état du moi Adulte équilibré, sans menacer l’état du moi Parent normatif.
L’état du moi Parent normatif est comparable à une mère ourse dans les bois. Si nous nous interposons entre elle et ses oursons, elle nous mettra en morceaux. De la même façon, l’état du moi Parent normatif attaquera férocement s’il est menacé d’éradication.

Je constate souvent que des thérapeutes essaient d’utiliser les états du moi Enfant ou Adulte pour attaquer l’état du moi Parent normatif en lui disant « Sors de ma vie, je ne veux rien avoir affaire avec toi ». Bien qu’en surface, cela puisse paraître une bonne chose, l’état du moi Parent reviendra en force et de manière plus subtile. Tout parent constate qu’il n’y a pas de mission plus écrasante ou qui apporte un tel sentiment d’impuissance et d’inadéquation que le rôle de parent. Si nous ajoutons des menaces, des accusations ou une aliénation, à la peur d’inadéquation d’un parent, ce dernier va habituellement riposter. C’est ce que fera l’état du moi Parent.

Lorsqu’il est menacé, l’état du moi Parent chez un patient sabotera tout effort thérapeutique, que ce soit explicite de la part du thérapeute ou caché de la part du patient. En établissant et en clarifiant de bonnes valeurs fondées sur une logique solide et en travaillant sur un modèle de respect, nous devons rassurer calmement l’état du moi Parent en lui signifiant que nous acceptons pleinement les principes en lesquels il croit. Cette partie de notre mental est en fait très importante. Lorsqu’elle est nourrie de données exactes et adéquates, elle peut jouer un rôle majeur dans notre conscience.

L’état du moi Parent essaie de faire de son mieux pour nous garder sur le droit chemin. Des problèmes surgissent parce que, comme on l’a vu au chapitre 1, un grand nombre des directives que nous avons introduites dans nos « ordinateurs » du moi Parent sont basées sur des traditions, des opinions et des préférences individuelles qui ne cadrent pas avec nos besoins personnels et peuvent entraver notre parcours. Notre état du moi Adulte équilibré a la capacité de raisonnement permettant d’écarter des croyances inutiles, il peut aider l’état du moi Parent dans ses responsabilités mais ne peut pas assumer ces responsabilités en se « débarrassant » du moi Parent.


Comme indiqué, l’Enfant a deux états du moi. Le premier est l’Enfant soumis qui n’en fait jamais assez pour se conformer et essayer de s’adapter continuellement à tous les souhaits du Parent normatif. Cet Enfant est en nous constamment mais passivement, il intègre tous les problèmes, la culpabilité et les frustrations de l’état du moi Parent. Donc l’Enfant apaise en reconnaissant et exprimant la culpabilité ; mais après avoir fait preuve suffisamment longtemps de docilité dans la culpabilité et que le Parent ne relâche toujours pas sa pression, l’état du moi Enfant peut encourager le retrait, le désespoir, la dépression et même des pensées suicidaires.

La compréhension de ce concept peut nous donner une motivation supplémentaire pour examiner nos croyances, éliminer nos espoirs irréalistes, notre perfectionnisme et toutes autres fausses croyances qui contribuent à ce cycle déprimant.


Le second état du moi Enfant (l’Enfant rebelle) surgit une fois que l’état du moi Enfant soumis a tenté de faire plaisir à l’état du moi Parent et de l’apaiser mais n’y a pas réussi. Cette période d’insoumission conduit habituellement l’état du moi Parent à se réaffirmer avec force ; le résultat prévisible est une culpabilité renouvelée. Le cycle continue bien sûr, avec encore plus de rébellion qui se manifeste par des accès de colère, des comportements passifs agressifs, des troubles du comportement, de la toxicomanie ou le suicide. Le pouvoir destructeur flagrant de la dernière possibilité, le suicide, est symbolique des puissances destructrices des autres phases de ce type de rébellion. Les victoires de ces batailles sont des victoires à la Pyrrhus (victoire à tout prix) où en fait tous sont perdants.

Chacun de ces états du moi peut devenir problématique si poussé à l’extrême – l’équilibre n’étant possible qu’avec l’intervention de l’état du moi Adulte équilibré.
Afin de mieux comprendre le fonctionnement interne de ces différents états, j’ai conçu une illustration qui examine quatre enjeux, du point de vue de chacun des états du moi.


Enjeu n° 1 : Consultation d’un thérapeute

Parent normatif Enfant soumis ou rebelle Adulte équilibré
Tu es malade et dois consulter un thérapeute. Tu as toujours été faible et dépendant. Il vaut mieux que j’aille voir un thérapeute pare que je suis si faible. Voir un psychologue pourrait m’aider. Je vais étudier le coût et la disponibilité de bons services professionnels.
ou ou
Donc maintenant tu as décidé de ne pas y aller ! Tu es vraiment têtu. Laisse-moi tranquille ! Je hais la façon dont tu essaies toujours de me faire passer pour malade.


Enjeu n° 2 : Aller à l’Église

Parent normatif Enfant soumis ou rebelle Adulte équilibré
Si tu ne vas pas à l’église, tu vas décevoir Dieu et déshonorer ta famille. Dieu ne t’aimera plus si tu n’y vas pas. Si je n’y vais pas, je n’obtiendrai aucun privilège : pas de voiture, pas d’amis, etc. Quelques heures par semaine est un petit prix à payer pour avoir la paix dans ma vie.
ou ou
Il vaut mieux que tu y ailles afin qu’il ne t’arrive pas malheur. Tu me fais détester l’Église. Je ne ferai que la haïr et tu ne peux pas me la faire aimer.


Enjeu n° 3 : Prendre des médicaments

Parent normatif Enfant soumis ou rebelle Adulte équilibré
Étant donné que tu es faible et défaillant, tu dois prendre des médicaments. Il vaut mieux que je prenne mes médicaments parce que je suis malade et faible. Il est utile en ce moment que je prenne des médicaments - mon docteur estime que c’est mieux et je recherche son avis et opinion.
ou ou
Je ne sais pas pourquoi tu dois t’appuyer sur des médicaments. Je présume que tu as toujours été un faible. Je ne me laisserai empoisonner par personne. Tu veux simplement prendre le dessus sur moi.

Enjeu n° 3 : Acheter une voiture

Parent normatif Enfant soumis ou rebelle Adulte équilibré
Tu veux acheter une voiture neuve ? Es-tu fou ? La dépréciation, les remboursements et l’assurance vont te mettre dans la précarité. Je ne peux vraiment pas me permettre de faire une erreur. Qu’arrivera-t-il si je perds mon emploi ou choisis la mauvaise voiture ? Je vais évaluer les prix, l’assurance, le financement et les garanties en fonction de mes revenus et de mes besoins et ensuite je prendrai la meilleure décision possible.
ou ou
Tu vas acheter une voiture d’occasion ? Tu es vraiment bête d’acheter les soucis d’un autre. J’achèterai ce que je veux. Tu n’as pas le droit de me dire ce que je dois faire.

Selon moi, le but est de fonctionner la plupart du temps dans l’état du moi Adulte équilibré, c’est-à-dire dans la rationalité et l’objectivité, en conjugaison avec les bons sentiments d’amour et le don de soi du Parent nourricier ainsi que l’amusement et la curiosité de l’Enfant libre. Il est important de reconnaitre que les attributs de l’Enfant libre et du Parent nourricier sont vitaux dans l’équilibre de la personnalité. Sans eux, l’état du moi Adulte équilibré est ennuyeux, car vide de sentiments et d’émotions.

L’Adulte pur et simple ne regarde la vie que de façon objective, logique et rationnelle. Il est certain que si nous n’avions qu’un côté Parent nourricier ou bien un côté amusant et un esprit libre, mais sans logique ou objectivité à mettre dans la balance, nous serions rapidement en difficulté. Le but est de minimiser la dynamique négative entre le Parent normatif et l’Enfant rebelle ou l’Enfant soumis par une activité et une participation accrues de l’état du moi Adulte équilibré.


Sally, une femme mariée à la fin de sa trentaine, m’a consulté pour de nombreuses doléances. Outre ses problèmes de dépression et sa confusion sur ce qu’elle devrait faire et être dans la vie, elle avait des plaintes d’ordre physique. Dans l’espoir de corriger ses problèmes physiques, elle s’était faite opérée plusieurs fois, en particulier au niveau de la zone abdominale. Cependant, après les interventions chirurgicales, ses douleurs perduraient et semblaient même devenir plus mystiques et difficiles à définir. Les docteurs ne trouvant aucune raison d’ordre physique à ses douleurs, ils en déduisirent qu’elle souffrait d’un trouble somatique. De telles personnes vivent avec des confits non résolus qu’elles ont tendance à internaliser ; Par conséquent, leurs anxiétés, inquiétudes et peurs se manifestent physiologiquement.
 

De par ses expériences passées, Sally recevait certains messages erronés de son état du moi Parent normatif : « je dois bien travailler à l’école », « je ne supporte pas quand ma maison est en désordre », « qu’est-ce que les gens vont penser si… ? » et « chacun reçoit ce qu’il mérite ».
 
De plus, les messages provenant de son moi Parent reflétaient certains dictons et opinions excessifs qui sont quelquefois mis en avant comme doctrine dans les réunions de l’Église. Au lieu de se sentir édifiée et encouragée, elle les ressassait, les entretenait et avait un sentiment d’inadéquation. Ensuite, elle a commencé à s’imposer des exigences perfectionnistes qui l’ont conduite à se considérer en contraste total avec « L’intelligence est la gloire de Dieu », « La propreté va de pair avec la piété » et « Soyez donc parfait comme votre Père céleste est parfait ». Même des écritures édifiantes étaient utilisées non pas comme inspiration ou encouragement mais comme matraque et dénigrement.

L’état du moi Enfant de Sally réagissait avec des ripostes telles que « Je n’y arriverai jamais », « Si seulement je pouvais être aussi bien que les autres », « Pourquoi est-ce que je n’arrive pas à en faire plus ? », « Je ne mérite pas mes bénédictions ».

Il a fallu du temps à Sally pour affronter son moi Parent et soulager son moi Enfant des lourds fardeaux dont il était chargé. Certains des commandements, des règles et des croyances situés dans son moi Parent et Enfant étaient tellement ancrés dans sa personnalité qu’ils avaient atteint le statut de « vaches sacrées ».

Une fois que Sally a été capable de redéfinir les circonstances de sa vie un peu plus en termes d’Adulte équilibré, ses symptômes ont commencé à s’alléger. Alors qu’elle a été en mesure de remanier une grosse partie de ses commandements, en les regardant d’un point de vue plus réaliste et en les acceptant de façon plus adulte et rationnelle, elle a commencé à réussir beaucoup mieux dans son mariage, sa vie sociale et sa vie de famille.

Elle a commencé à transformer des idées comme « Ce qui mérite d’être fait mérite d’être bien fait » en « Certaines choses méritent d’être bien faites, d’autres méritent seulement d’être faites, et d’autres ne méritent absolument pas d’être faites », et a pu trouver ainsi un équilibre bien plus heureux dans sa vie.

Sally avait essayé de retourner à l’université mais elle était tellement perfectionniste qu’elle renonçait périodiquement à ses cours par peur de ne pas être capable d’obtenir la plus haute note. Elle abandonnait ses cours habituellement au milieu du semestre, en se servant comme excuse de petits problèmes de santé et de situations familiales qu’elle pouvait interpréter comme des crises.

Une fois qu’elle a compris qu’il valait mieux réussir un examen avec une note un peu moins bonne plutôt que de renoncer à ses études et n’avoir aucun diplôme attestant de son travail, sa pression interne a semblé tomber.

Lorsque Sally s’est habituée à l’idée qu’il valait mieux un peu nettoyer sa maison plutôt que de ne pas la nettoyer du tout, elle a commencé à se sentir plus efficace. Une autre découverte a été la réalisation qu’elle n’avait pas à se comparer aux autres mais seulement à elle-même. Ceci lui a permis de soulager l’esprit de compétition qu’elle entretenait.

En bref, non seulement les symptômes physiques de Sally se sont calmés mais elle est devenue une personne plus agréable en société. Son sens de l’humour s’est développé, elle a commencé à sourire plus souvent et son attitude et apparence en général semblaient beaucoup moins austères et sévères.

Le modèle transactionnel (AT) fournit un argumentaire convaincant sur l’importance d’un solide respect de soi. La plupart des personnes qui luttent dans des difficultés connaissent la dynamique négative et souvent subtile entre le Parent normatif et l’Enfant. Ces personnes n’ont jamais réellement fait l’évaluation de l’ensemble de leurs propres valeurs et croyances. Elles réagissent comme des enfants soumis ou rebelles face aux valeurs, principes, règles et lois imposés par des parents critiques, sans les avoir jamais analysés eux-mêmes. Sans le respect de soi, pour nos propres valeurs et croyances dûment réfléchies, nous sommes voués à une vie de vulnérabilité, de désespoir, de colère et de ressentiment.

Peu de temps après son mariage avec un homme qu’elle adorait, Jill s’est trouvée en situation de grand conflit. Ayant eu recours à des séances de consultation, elle a été enseignée au sujet des différents états du moi et a été capable de déceler que son Parent normatif s’acharnait en critiques contre l’homme qu’elle avait choisi, alors que l’Enfant en elle était grandement enthousiaste et ravi de lui. Bien que son époux incarnât un bon nombre des caractéristiques qu’elle appréciait, telles que l’honnêteté, la franchise et l’aptitude à aimer, il ne répondait pas littéralement à la « liste des lois » que l’enseignement qu’elle avait reçu l’incitait à rechercher et à apprécier.

Elle a décidé de trier les divergences entre ses propres valeurs et préférences et celles qui lui étaient imposées. En respectant son propre droit de choisir et de prioriser les valeurs, elle a pu calmer le conflit dans lequel elle était engagée et elle a rassuré son état du moi Parent normatif par le fait qu’elle ne tournait pas le dos aux valeurs primordiales.


Modèle d’estime de soi

Un modèle AT peut nous aider à inventorier et par conséquent à évaluer la manière dont nous agissons, pensons et ce que nous ressentons afin que nous puissions fonctionner de plus en plus souvent dans l’état du moi Adulte équilibré. Mais toutefois, au final, nous avons besoin de développer un modèle d’estime de soi qui nous permette de le faire.

Il est généralement enseigné : « Vous connaîtrez la vérité et la vérité vous affranchira ». L’estime et le respect de soi devraient être solidement ancrés dans notre recherche de la vérité qui ne doit pas être fondée sur des malentendus, des idées fausses, des déformations, des assertions mensongères ou sur toute autre égarement déformé ou imaginaire auquel nous nous accrochons souvent de façon obstinée. L’estime et le respect de soi ne sont pas directement mesurables et ne devraient pas être considérés en termes analytiques directs. Au contraire, ils viennent de l’acceptation, de la compréhension et de l’indépendance fermes et tranquilles de ce que nous représentons en réalité.
 
Selon mon expérience, les personnes qui ont une véritable estime de soi se conforment à un ensemble de buts individuels et pertinents, enracinés dans la vérité. Tout aussi important, l’individu est disposé à travailler, à faire des sacrifices (souffrir, endurer, retarder la satisfaction de ses désirs, faire des efforts) et à respecter les exigences requises pour atteindre ces buts et valeurs.

Ces personnes sont tellement engagées et zélées qu’elles ne se concentrent pas sur les sacrifices requis et ne s’en plaignent pas. Alors qu’il existe de nombreuses mises en scène cinématographiques de personnages historiques qui ont donné toute leur vie à une cause, il y a autour de nous ceux qui sans bruit font l’œuvre du Seigneur, avec un dévouement extrême et sans se préoccuper du regard des autres.

Un tel dévouement transparaît chez ce vieil homme de quatre-vingt-six ans qui argumente au centre missionnaire de l’Église qu’il est capable de servir une mission et qui est prêt à lutter contre quiconque lui refuse ce privilège. D’autres personnes âgées se lèvent à 2h30 du matin pour aller au temple et tout préparer pour les usagers qui arrivent tôt. Lorsque les personnes ont réellement l’estime et le respect de soi, ils jouissent d’une vie qui a un but, une signification, un équilibre, de l’espoir et de l’acceptation de soi.



Chapitre 7 : Apprenez à reconnaître ce qui est et ce qui n’est pas

Quelquefois, la perception que nous avons de nous-mêmes n’est pas fondée sur la réalité – ce qui fait que l’auto-évaluation est un défi énorme. Le défi devient encore plus compliqué si nous utilisons le Nouveau Testament comme outil de mesure – la perfection – qui peut nous paraitre si accablant. Pourtant, si nous nous jugeons nous-mêmes selon un modèle d’estime de soi que nous acquérons par la maturité, la compréhension, la prière et l’engagement vis-à-vis d’un ensemble de valeurs basé sur la réalité, nous commencerons à mieux nous aimer nous-mêmes.

Lorsque nous lisons les paroles de Jésus « Soyez donc parfaits, comme votre Père céleste est parfait » (Mt 5:48), nous devons nous souvenir que notre Père céleste est devenu parfait. La note de bas de page dans les nouvelles Écritures nous dit que parfait signifie « fini, complet, pleinement développé ». La perfection n’est pas arrivée d’un seul coup pour lui et cela n’arrivera pas pour nous non plus. La perfection est un processus étape par étape qui ne se termine jamais pendant la vie mortelle.

La santé et le bonheur mentaux sont subordonnés en grande partie à l’estime de soi, cette dernière résultant d’une auto-évaluation précise grâce à laquelle nous pouvons jouir d’une solide estime de soi.

Je rencontre beaucoup de patients qui se sont aliénés d’eux-mêmes. La différence entre ce qu’une personne aimerait être et ce qu’elle perçoit être est un indicateur fiable de son niveau d’insatisfaction envers elle-même. Bien que peu de personnes ne correspondent à leur soi idéal, il n’est pas possible de gérer la situation si nous en sommes trop éloignés. Il est évident que les idéaux que se fixent certaines personnes sont bien trop élevés. Ces personnes doivent évaluer honnêtement leurs efforts et leurs aptitudes, et comprendre que si elles continuent à aspirer à l’inaccessible, elles en subiront les conséquences désastreuses.

Nous devons prêter attention à ne pas nous définir négativement. Trop parmi nous se discréditent et se dévalorisent. Nous devons nous rendre compte que nous avons des attributs d’exception qui répondent à nos missions et responsabilités uniques sur cette terre.

Un aspect important de l’estime de soi est l’image que nous pensons que les autres ont de nous. Presque tous voudraient que les autres les apprécient et les acceptent. Dans la mesure où il s’agit d’un désir d’ordre général, ceci peut être acceptable. Mais lorsque nous décidons qu’obtenir tout le temps les suffrages de tous est une ultime nécessité ou un besoin absolu, nous nous préparons à beaucoup de douleurs et de souffrances car ce but est impossible – il y aura toujours des personnes qui auront tendance à se montrer critiques envers nous.

Réfléchissez à ceci : quelle proportion de votre respect de soi repose sur la façon dont les autres vous voient ? Si votre « modèle » du respect de soi vous impose une double contrainte ou a un effet réducteur sur vous, il se peut bien qu’il soit basé sur une contrevérité – vous avez tout simplement grandi avec et l’avez assimilé, peut-être comme une opinion ou une affirmation que les professeurs ou vos parents vous ont imposées. Par exemple, ils ont pu vous dire que vous aviez les deux pieds dans le même sabot et vous l’avez accepté comme une réalité à cause de votre manque d’expérience à évaluer vos propres capacités. De tels jugements pouvaient même avoir été vrais à l’époque mais parce que vous les avez crus, il est possible qu’ils deviennent partie intégrante de votre respect de soi, à moins que vous les contestiez.

Il n’est pas rare que des personnes subissent des changements importants dans le niveau de leur respect de soi selon les situations. Un neurochirurgien peut se sentir bien et important lorsqu’il fait une opération de chirurgie cérébrale. D’autres peuvent avoir « la pêche » tandis qu’ils sont impliqués dans la campagne de bienfaisance annuelle et se sentir nuls les 51 semaines restantes de l’année. Un modèle sain de respect de soi est constant et ne doit pas dépendre de notre performance ou de l’opinion des autres. Il nous aide à nous sentir bien même si nous avons fait des erreurs ou si nos performances ne sont pas des mieux. Une perception approfondie de nous-mêmes peut contribuer à une bonne santé mentale.

En fin de compte, une bonne santé mentale exige que nous vivions selon notre propre modèle de respect. Beaucoup de gens sont trop occupés à tenter de plaire à tous, en essayant d’être ce que les autres veulent qu’ils soient. C’est une bonne chose d’avoir des modèles et d’accepter les encouragements mais si nous ne sommes que des caméléons, nous finirons malheureux et déprimés. À terme, nous ne pouvons pas rendre tout le monde heureux.

Notre première responsabilité est envers nous-mêmes.
Nous devons comprendre qu’un « modèle de respect de soi » est bien plus que la simple somme de ses parties. C’est vraiment une question de bons sentiments vis-à-vis d’un ensemble de critères, de valeurs et de croyances. L’élément clé est le sentiment de pouvoir dire « je vais dans la bonne direction. Je me sens bien et ce sentiment vient du plus profond de mon être et pas des autres ».

Épreuves de réalité

Aider des personnes à faire ce que nous appelons des épreuves de réalité est probablement le principal objectif de la santé mentale. Comme son nom l’indique, ces épreuves consistent à s’assurer que nos jugements, estimations et hypothèses cadrent avec la réalité.
 

Nos estimations et interprétations, qu’elles soient positives ou négatives, sont liées à de nombreux facteurs : l’estime de soi, les préjugés, les attitudes et les orientations. Un volet important de mon travail de thérapeute est d’aider les gens à définir leurs réalités différemment ou du moins plus précisément. Stephan J. Hall a dit : « Votre jugement et votre interprétation sont proportionnels aux informations que vous détenez ». Beaucoup de troubles psychiatriques et de la personnalité sont le reflet d’informations insuffisantes et de la difficulté dans la perception de la réalité.

Par exemple, une personne que vous connaissez plutôt bien vous croise dans l’allée d’un magasin, regarde droit vers vous mais continue son chemin sans accorder aucune attention à votre présence. Il est probable que vous jugerez ce comportement insultant et déconcertant. Il est facile d’observer un comportement mais quelquefois difficile de l’interpréter. La plupart d’entre nous sauteraient immédiatement à une conclusion ou une autre mais nous savons tous que sauter à des conclusions ou faire des suppositions hâtives met souvent les gens en grande difficulté. Prenons cet exemple concret, analysons ce que nous avons observé et tirons certaines interprétations possibles. Supposons que la personne qui vous a croisé est votre évêque. Voici quelques interprétations possibles :
  1. L’évêque est une personne dénuée de toute sensibilité et je lui importe peu.
  2. Je suis une personne qui ne vaut pas la peine d’être prise en considération.
  3. L’évêque est dans un mauvais jour et il n’est pas conscient de son environnement.
  4. L’évêque est gêné d’être près de moi.
  5. L’évêque est conscient de mon état de pécheur et par conséquent il ne veut pas me reconnaître.
  6. L’évêque m’ignore car il sait que quelque chose ne va pas dans ma famille.
  7. L’évêque est préoccupé par quelque chose.

Laquelle de ces interprétations est juste ? C’est trop tôt pour le dire et il n’est pas approprié de parvenir à une conclusion sans avoir des informations complémentaires. Les conclusions hâtives peuvent être dévastatrices pour ceux qui sont jugés de façon inappropriée et pour la personne qui émet ce jugement. Beaucoup de ces suppositions incorrectes sont faites par des gens qui ont tendance au négativisme, à la culpabilité ou doutant d’eux-mêmes. Ces personnes projettent leurs sentiments sur d’autres, en tirant rapidement des conclusions souvent totalement fausses sur une situation donnée.

Par exemple, un homme qui m’a consulté par le passé dirigeait la succursale d’une grande banque. Au 1er janvier, lorsque les hausses salariales ont été attribuées, cet homme a découvert qu’il n’avait que 5% d’augmentation. Il s’était attendu à beaucoup plus. Depuis qu’il avait pris la direction de cette succursale trois ans auparavant, sa succursale avait statistiquement largement dépassé les performances des autres succursales. Il y avait eu moins de pertes, de meilleurs prêts et plus de bénéfice. Il estimait que foncièrement la qualité de son travail n’avait pas été reconnue et il était déçu et en colère. Son interprétation de la situation était que « personne ne lisait les rapports statistiques », « faire un bon travail ne compte pas » et « les salaires sont sujets à des considérations politiques ».

Je lui ai dit que je n’étais pas en mesure de dire si ses interprétations étaient correctes. Je n’avais pas les informations nécessaires mais je l’ai encouragé à mettre ses pensées sur le papier et à aller voir un des vice-présidents de la banque pour lui faire part avec tact de ses observations et interprétations. Je lui ai rappelé de suivre les directives favorables à la résolution de problèmes, avec l’emploi du « message-je », sans lever la voix, etc. Cet homme a finalement pris son courage à deux mains et s’est adressé à un des vice-présidents.

Pendant cet entretien, il a appris que la banque n’avait pas obtenu de bons résultats cette année-là et qu’une augmentation de 5% était bien plus que ce que tous les autres directeurs de succursales avaient obtenu. Certains des directeurs avaient même perdu le bénéfice d’une voiture de fonction. Lorsque cet homme est ressorti de son entretien, sa situation n’avait pas changé, il n’avait toujours que 5% d’augmentation, mais sa définition de la réalité et donc ses sentiments étaient radicalement modifiés. Bien que rien n’ait changé mis à part sa compréhension des faits, il ne se sentait plus en colère ni mal reconnu.

Pour optimiser les épreuves de réalité, j’incite les personnes à analyser elles-mêmes leurs impressions en les examinant sous quatre perspectives différentes. Pour ceci, je leur demande d’établir quatre listes différentes d’adjectifs qui représentent leur quatre différents Moi (voir la liste des adjectifs/expressions à la fin du livre). Tout d’abord, je leur demande de remplir la liste qui correspond à leur vrai Moi, c’est-à-dire à la personne qu’ils pensent être. Ensuite, ils choisissent les adjectifs qui représentent leur Moi idéal, la personne qu’ils aimeraient devenir. Puis je leur fais choisir les adjectifs qui décrivent le Moi redouté, la personne qu’ils ont peur de devenir. Enfin, ils choisissent les adjectifs correspondant à leur perception de la présentation de leur Moi, le Moi qu’ils présentent au monde.

Beaucoup de patients ont des difficultés avec ce dernier « Moi ». Nous pouvons appeler ceci le masque ou l’image que nous permettons au monde de voir. Quelquefois, pour les aider avec ce « Moi », je leur demande de faire remplir cette liste par plusieurs personnes qui les connaissent.

Curieusement, la plupart des évaluations faites par leurs connaissances sont assez cohérentes et homogènes. Une fois que toutes les listes sur les différents Moi sont complétées, nous nous réunissons pour les examiner. Si la personne est dépressive, il est intéressant de noter que son vrai Moi - c’est-à-dire la personne qu’elle perçoit être - et la personne que les autres ont décrite diffèrent habituellement fortement. La plupart des adjectifs dans la liste du vrai Moi sont beaucoup plus négatifs que ceux du Moi que l’on présente aux autres.

Beaucoup de personnes, en particulier celles qui sont en dépression, ont des difficultés à ignorer les commentaires négatifs des autres, même si ces évaluations sont extrêmement isolées. Je leur demande de s’imaginer qu’ils font un sondage auprès de trente-et-une personnes au sujet d’un nouveau restaurant. Ces personnes doivent évaluer le service, la nourriture et l’ambiance du restaurant sur une échelle de zéro à cinq.

Supposons que trente des personnes donnent des notes de quatre ou cinq, laissant entendre que tous les aspects évalués sont très bons ou excellents. Cependant, une personne n’a donné que des zéros, jugeant tous les aspects mauvais ou très mauvais. Comment rédigerions-nous les conclusions ? Généralement, nous dirions aux restaurateurs qu’ils font du bon travail. Nous n’inclurions peut-être même pas la mauvaise évaluation ou nous la dévaloriserions fortement car un seul échantillon n’est pas très représentatif. Nous devrions faire la même chose avec les commentaires négatifs des autres.

Les épreuves de la réalité déficientes peuvent avoir des conséquences désastreuses. Je me souviens d’une situation où les parents d’un jeune missionnaire ont appris que leur fils rentrait à la maison dans des circonstances déshonorables. Il avait été excommunié. Les parents se sont rendus au comptoir de l’aéroport et ont déposé de l’argent dans une enveloppe et une note disant qu’ils ne supporteraient pas de le voir. Ils ont ajouté qu’ils auraient préféré le voir revenir mort plutôt que dans ces circonstances. Ils ont évalué la situation bien pire que ce qu’elle n’était en réalité. Leur inhabilité à comprendre que leur fils avait juste fait une erreur et avait besoin de leur aide et non pas de leur condamnation a entraîné des conséquences bien plus tragiques. Ce jeune homme a fini par se suicider.

Les personnes mentalement saines sont en mesure de tester la validité de leurs jugements et suppositions en collectant continuellement des renseignements. Les professionnels de la santé mentale sont formés pour aider les personnes qui, pour une raison ou une autre, sont devenues incapables de discerner que leurs propres perceptions ne correspondent pas à la réalité. Leurs suppositions et hypothèses, toutes erronées qu’elles soient, peuvent être devenues leur réalité, causer des difficultés dans leur vie et devenir source de grand mécontentement et malheur si rien n’est fait.

Une des erreurs que font les gens est de comparer leur réalité à l’imaginaire. Les fantasmes sont parfaits, la réalité ne peut les concurrencer. Par conséquent, c’est une erreur de comparer sa vie avec celle d’une héroïne de feuilleton ou de comparer son conjoint ou ses enfants avec les gens formidables sur les photos des magazines et dans les romans sentimentaux. Faire cela nous amène à mal évaluer ce qui se passe dans ce monde. Rappelez-vous, il est facile d’observer des comportements mais c’est bien plus compliqué de les interpréter et d’agir en conséquence.

Clarification des valeurs et établissement de buts

Ce qu’on appelle la clarification des valeurs est une autre méthode utilisée pour analyser et donner une base au respect et à l’estime de soi. Par contraste avec un objectif, une valeur est ample et pas directement mesurable. Certaines choses conservent une valeur mais celle-ci peut augmenter ou diminuer dans la priorité accordée selon l’âge ou la situation de la personne. La santé par exemple est toujours une valeur mais nous lui donnerons vraisemblablement beaucoup plus d’importance si nous venons de faire l’objet d’un diagnostic de cancer ou d’un problème cardiaque majeur. La sécurité financière pourrait toujours être une valeur mais elle parait plus critique à soixante ans qu’à vingt-deux ans.

Viktor Frankl, un psychiatre reconnu, emprisonné dans les camps nazis durant la seconde guerre mondiale, voulait comprendre pourquoi certaines personnes abandonnaient et mourraient alors que d’autres survivaient face aux mêmes circonstances terribles. Il en a conclu que les survivants conservaient leur vie car ils avaient maintenu leurs valeurs et avaient des buts.

Frankl a écrit un ouvrage sur ses conclusions « Man’s Search for Meaning » (L’ouvrage a été traduit « Découvrir un sens à sa vie »). Il a décrit quatre valeurs primordiales qu’il a découvertes chez ceux qui ont survécu : (1) le sentiment d’une œuvre ou d’un but à accomplir dans leur vie, (2) un amour puissant pour leur famille qu’ils croyaient revoir à l’avenir, (3) le sens du patriotisme et l’importance de la liberté et (4) une foi profonde en Dieu. En contact avec le spirituel, la croyance en leur survie était accrue.

Il est intéressant de noter que ces quatre valeurs sont étroitement liées à des objectifs. C’est pourquoi je suggère que vous essayiez de faire un exercice de clarification des valeurs qui conduit directement à l’établissement effectif de buts. Ce n’est pas un projet qui se fait en cinq minutes. L’élément clé dans cet exercice est la précision et la spécificité.

Si vous vous mettiez en contact avec un entrepreneur en bâtiment pour construire votre maison, vous auriez probablement des idées sur vos priorités : vous pourriez vraisemblablement évaluer le degré de vos préoccupations en ce qui concerne la maintenance, l’économie, l’utilité, la flexibilité, la surface et l’esthétique de la maison. De même, si nous clarifions nos valeurs personnelles, nous pouvons résoudre les sentiments qui proviennent de valeurs confuses. Tout comme pour les plans d’une maison, le plus spécifique nous sommes, le plus facile ce sera de planifier comment obtenir ce que nous voulons.

Il est sage de reporter l’établissement de buts et leur planification jusqu’au moment où nos valeurs sont définies, comprises et classées. Posez-vous la question : « quel genre de vie veux-je construire ? » En d’autres termes, quelle est la base ou l’orientation fondamentale sur laquelle je construis ? L’objectif de la clarification des valeurs est de définir et clarifier ce que nous essayons de construire. Une fois que le format des valeurs est posé et priorisé (c’est-à-dire les activités dans lesquelles nous voulons nous engager, les personnes que nous voulons y associer), des buts à long terme peuvent être établis.

Tout d’abord, écrivez les choses auxquelles vous tenez le plus et classez-les par ordre de priorité. Bien que l’ordre dans lequel elles sont rangées puisse varier énormément, certaines se retrouvent dans beaucoup de listes :

Santé mentale Sécurité financière
Santé spirituelle Activités de loisirs
Santé physique Famille proche
Mariage Famille élargie
Parentalité Voisins

Vous voudrez peut-être rajouter à votre liste des attributs spécifiques de la personnalité, tels que la patience ou la tolérance.

Ensuite, sous forme de colonne, faites la liste des personnes, des lieux, des choses et des activités qui « rehaussent » ces valeurs et les rendent réalisables. Tout comme les différents éléments d’une maison bien construite se consolident mutuellement, les valeurs principales favorisent d’autres valeurs. Par exemple, beaucoup jugent important d’avoir un esprit ouvert et amical pour leur propre bien mais cette attitude apporte naturellement ses fruits professionnellement car les gens l’apprécient. A son tour, ceci multiplie les chances de réussite et contribue à la sécurité financière. Des valeurs principales équilibrées engendrent une structure solidaire et intégrée des valeurs chez l’individu.

Enfin, une fois que vous avez fait la liste de vos valeurs fondamentales et des choses qui y contribuent, des objectifs mesurables à court et à long termes peuvent être établis. Si ces objectifs sont enracinés dans un système de valeurs solide, vous les trouverez plus significatifs et serez plus engagés à les atteindre.

Quel que soit leur nombre, des activités peuvent rehausser une valeur en particulier. Mais tout comme nous mettons un accent spécifique sur des valeurs fondamentales, nous pouvons aussi avoir des préférences radicales pour certaines combinaisons de perfectionnement des valeurs. Cet exercice peut aider à donner une direction à votre vie, précisément parce qu’il montre comment nos buts peuvent être enracinés dans nos systèmes de valeurs primordiaux. Le tableau suivant est mon propre projet d’améliorations et de buts concernant une de mes valeurs : la santé physique.


Amélioration

Objectif à court terme Objectif à long terme
  1. Parole de sagesse.
  1. Perdre 5 kg ce mois-ci.
  1. Peser 97 kg d’ici janvier.

  1. Un poids normal et du repos.
  1. Réduire la viande rouge à 1 fois par semaine.

  1. Faire de l’exercice 3 heures par semaine.
  1. Loisirs (tennis, la chasse).
  1. Aller au club sportif 3 fois par semaine.

  1. Jouer en finale dans l’année.
  1. Santé mentale.
  1. Jouer au tennis 3 fois par semaine avec Stan.


  1. Spiritualité




Quelques exemples de valeurs qui peuvent être importantes pour vous :


Amour de la famille
Amour de Dieu 
Amour de votre pays 
Amitié
Créativité
Être un bon parent
Générosité
Honnêteté
Intégrité
Mariage
Responsabilité
Santé
Sécurité financière 
Service 
Spiritualité
Un travail agréable


Choisissez ceux qui vous conviennent et ajoutez à ceux-ci tous les autres auxquels vous pouvez penser qui sont pertinents. Ensuite, classez-les par ordre d’importance pour vous.

Il est essentiel de mentionner à ce stade qu’un but qui représente une amélioration des valeurs pour une personne n’améliorera pas cette même valeur chez une autre. Par exemple, la sécurité financière peut être évaluée de même importance par deux personnes différentes, mais une d’entre elles considèrera l’éducation comme but et élément clé d’amélioration, alors que l’autre choisira d’accumuler de l’or. La lecture des Écritures peut faire grandir la spiritualité d’une personne, alors qu’une autre jugera qu’écouter les discours des autorités générales lui est plus profitable.

Remarquez également qu’un but peut renforcer plusieurs valeurs, ce qui rend ce but d’autant plus important. Par exemple, le but de perdre du poids améliorera la valeur de la santé physique mais il aura aussi une incidence positive sur l’estime de soi, la vie sociale et peut-être même la vie spirituelle de la personne.

L’importance de clarifier nos valeurs fondamentales est évidente. Un fois que nous avons fait cela, nous sommes prêts pour le processus d’établissement des buts.

Établissement des buts

Plusieurs points clés à garder à l’esprit lors de l’établissement des buts :
  1. Un but devrait être mis par écrit, d’abord au crayon, ensuite à l’encre. Cela permet de cristalliser vos pensées et intentions.
  2. Le but doit être réaliste et mesurable. À moins de pouvoir dire quand vous avez atteint votre but, ce n’est pas réellement un but mais uniquement un désir.
  3. Déterminez si vous allez avoir besoin du soutien d’autres personnes. Identifiez les personnes, les groupes et les organisations dont la coopération et l’aide vous seront nécessaires pour atteindre votre but. Ensuite, déterminez ce que vous pouvez donner ou comment vous pouvez servir, contribuer ou indemniser ces personnes afin d’obtenir l’aide dont vous avez besoin.
  4. Déterminez les valeurs qui seront améliorées par ce but. Si votre but a une incidence positive sur plusieurs valeurs fondamentales, il est certainement la volonté du Seigneur pour vous, ce qui est l’élément le plus essentiel de tout but.
  5. Faites-vous une image mentale claire de votre but, comme s’il avait déjà été atteint. Projetez cette image sur votre écran mental chaque fois que vous en avez la possibilité.
  6. Déterminez quelle connaissance sera nécessaire pour atteindre votre but et comment procéder pour l’obtenir.
  7. Identifiez les obstacles que vous devrez surmonter. Écrivez-les. Ils semblent toujours gigantesques tant qu’ils ne sont pas sur le papier.
  8. Croyez que vous avez la capacité d’atteindre votre but.
  9. Évaluez votre engagement vis-à-vis du but. Sur une échelle de 1 à 10, quel est votre taux d’engagement ? Si vous n’êtes pas en mesure de vous donner un 8 ou plus, modifiez votre but. Fixez-vous un but pour lequel vous pensez en toute honnêteté avoir la capacité et la détermination nécessaires pour l’atteindre.
  10. Décomposez votre but en petits morceaux et tâches.
  11. Planifiez vos journées de façon à y inclure les tâches que vous devez accomplir pour atteindre votre but.

L’enjeu est d’établir des buts qui sont cohérents avec votre structure de valeurs parce que vous acquerrez du pouvoir pour atteindre vos buts lorsque vos actions sont en accord avec vos valeurs. Cette assurance vous permet de demander l’aide du Seigneur en toute confiance. En conséquent, assurez-vous que chacun de vos buts est basé sur une valeur qui vous tient à cœur.

Les buts sont cruciaux pour la plupart de ceux qui réussissent le mieux mais beaucoup d’entre nous ne s’assurent pas de leur plein engagement envers leurs buts ni si ces derniers sont profondément ancrés dans une structure solide de valeurs. Pour qu’une structure de valeurs soit solide, il faut que nous soyons disposés à nous y consacrer, à souffrir et à faire des sacrifices pour elle et à y croire totalement. Personne ne peut ébranler un véritable engagement envers un bon système de valeurs. Ni la dérision, le désaccord ou le questionnement des autres n’aura un effet négatif sur nous et nous serons en mesure d’établir des buts constructifs, tous basés sur ces valeurs.

La procédure d’établissement des buts prend du temps et demande du travail mais elle est un outil puissant pour donner plus d’orientation à votre vie. Vous voudrez peut-être essayer ce qui suit : prenez trois feuilles de papier (ou un carnet spécifique pour noter vos buts). Mettez en titre de la première feuille : « Les valeurs et buts de toute ma vie ». Inscrivez toutes les choses que vous aimeriez faire, apprendre, être, acquérir ou expérimenter dans votre vie. À ce stade, ne vous préoccupez pas de ce qui semble possible ; réfléchissez en termes de tout ce que vous aimeriez vraiment si absolument tout était possible. Qu’est ce qui ferait que votre vie mérite d’être vécue ? Écrivez tout ce qui vous traverse l’esprit.

Sur une autre feuille intitulée « Mes buts à cinq ans », choisissez dans la première liste les choses qui vous importent le plus à accomplir, expérimenter, apprendre ou acquérir dans les cinq années à venir. Encore une fois, n’hésitez pas sur le nombre.

Sur la troisième feuille intitulée « Mes buts à six mois », faites la liste des choses que vous aimeriez faire si vous n’aviez que six mois à vivre. Comment occuperiez-vous votre temps s’il ne vous restait que six mois à passer sur cette terre ? Maintenant, examinez les trois listes. Est-ce que les buts à cinq ans sont une préparation à vos buts de toute une vie ? Et qu’en est-il des buts à six mois ? Est-ce que vos deux autres listes se coordonnent avec celle-là ? Est-ce que vous investissez votre énergie dans les buts les plus importants à ce stade de votre vie ? Si ce n’est pas le cas, que devriez-vous changer ?

Établir des buts qui sont cohérents avec nos valeurs, y penser continuellement et y travailler va renforcer l’image que nous avons de nous-mêmes et nous faire avancer vers l’état du moi «Adulte équilibré », vers la performance optimale et la pleine réalisation de notre potentiel. Alors, pourquoi sommes-nous si nombreux à éviter de se fixer des buts ?

Il y a sept raisons majeures :
  1. Nous ne comprenons peut-être pas l’importance des valeurs et des buts.
  2. Nous ne savons peut-être pas comment nous consacrer à des valeurs et nous fixer des buts.
  3. Nous avons peut-être peur de l’engagement.
  4. Nous craignons peut-être les changements.
  5. Nous avons peut-être peur d’échouer.
  6. Nous avons peut-être même peur de réussir.
  7. Au final, « l’homme naturel » est simplement totalement paresseux. Nous aurons probablement à contrer notre tendance à suivre la voie de la moindre résistance. Gardez à l’esprit que l’entropie – désordre et absence d’organisation - et la paresse sont les fléaux principaux auxquels nous devons faire face.

Est-ce que certains de ces obstacles à la réussite vous retiennent ? Écrire vos buts et suivre les étapes que j’ai présentées peut vous aider à être acteur de votre vie et convertir vos rêves en réalité.


Chapitre 8 : Remodeler la vie avec les principes de la joie

Lorsque les dix commandements ont été remis à Moïse, je crois qu’ils avaient été volontairement écrits dans une forme très concise. Néanmoins, ces commandements simples déclenchent des émotions et des idées complexes. Il ne faut que quelques instants pour les lire mais le nombre de pensées qu’ils génèrent est à la fois vaste et interpelant. Apprendre à vivre complètement leurs enseignements peut prendre une vie entière mais cela mérite tous nos efforts. La même chose s’applique aux dix principes que nous étudions dans ce chapitre.

Principe n°1 : La perfection est un processus et non un statut

Une autre façon d’épeler le perfectionnisme dans la vie courante est P-A-R-A-L-Y-S-I-E. Si nous sentons que nous devons tout faire de manière parfaite, nous finirons immobilisés. « Je ne vais pas le faire tant que je ne peux pas le faire parfaitement bien » est une recette vers la paralysie. La perfection est une attente irréaliste dans la mortalité. Une attente réaliste est de faire selon nos « meilleures possibilités actuelles » et nous en satisfaire.

Beaucoup d’entre nous doivent comprendre qu’il y a beaucoup d’aspects dans la vie où l’excellence n’est tout simplement pas requise. Assouplir les hauts niveaux d’exigences irréalistes nous aidera toujours à nous sentir mieux vis-à-vis de nos performances.

Malheureusement, beaucoup pensent que l’âge adulte requiert la perfection. Ils se sentent dépassés par les responsabilités perçues. Ceux qui souffrent de symptômes de sevrage, d’anorexie ou de boulimie peuvent retomber au statut d’enfant. Les femmes peuvent se décharner au point de ne plus avoir leurs menstruations et voir disparaitre leur poitrine et autres caractéristiques sexuelles secondaires. Il n’est pas surprenant que ces femmes espèrent souvent échapper aux pressions et responsabilités de l’âge adulte, en particulier celles d’ordre sexuel. En d’autres mots, elles veulent juste redevenir des petites filles, sans les contraintes des problèmes et responsabilités liés à l’âge adulte.

Il est normal que des adultes matures puissent aussi connaître le désir de fuir l’âge adulte et ses responsabilités. Mais bien que la gravité des engagements puisse effectivement paraître écrasante, c’est encore plus compliqué pour ceux qui pensent que chaque étape doit être parfaite. Cette paralysie est regrettable car comme pour tout système correctement intégré, la compétence d’un adulte est assimilée étape par étape, précepte par précepte.

Le perfectionnisme peut être utilisé comme une excuse pour ne pas essayer. Il y a de nombreuses années, un de mes amis a dit que s’il ne pouvait pas obtenir son doctorat d’une université réputée, il n’essaierait pas de l’avoir du tout. Bien qu’il donnât l’impression d’avoir de grands idéaux, sa décision semblait réellement être une tentative d’éviter la décision difficile de prolonger son cursus de quatre ans.

Je tiens à souligner la nature graduelle de la croissance personnelle. Garder à l’esprit la loi de la progression éternelle est très utile. Nous aspirons à être parfaits mais nous ne le sommes pas. La perfection est un processus éternel qui continuera même dans la vie après la mort.

Le « mythe de Sisyphe » est un exemple classique de la crainte que la croissance personnelle devienne une forme de paralysie. Dans la mythologie grecque, Sisyphe a été condamné par Zeus à rouler un énorme rocher le long d’une montagne jusqu’à son sommet. Mais chaque fois qu’il s’approchait du sommet avec sa charge, des nuées de démons le mordaient et attaquaient ses jambes jusqu’à ce qu’il se tourne pour les chasser à coups de pied. À ce moment-là, le rocher redescendait la pente. Après s’être un peu reposé, Sisyphe recommençait de nouveau. C’était sa damnation éternelle.


Je suis incapable de vous dire le nombre de fois où j’ai rencontré des gens qui disent que l’objectif de leur thérapie est « être mince » ou « être actif dans l’Église » ou « se marier au temple » ou « obtenir un emploi administratif dans leur société ». Cependant, ces personnes - une fois qu’elles sont en marche - sabotent leurs propres efforts consciemment ou inconsciemment. J’en conclus que malgré leurs buts, elles ont peur d’amener leurs fardeaux jusqu’en haut de la montagne et craignent la réussite.

Un de ces démons qui bloque le progrès de beaucoup de ceux qui ont peur de la réussite est la façon dont ces personnes pensent et parlent de ce qu’elles font. C’est facile de se persuader d’arrêter le progrès et la réussite dans un langage tout à fait ordinaire. Le mot parlé et la pensée peuvent être des motivations ou des entraves puissantes à nos efforts.

Il nous arrive de dire des choses telles que « ça va être trop compliqué », « je ne peux pas faire cela », « vous ne comprenez pas combien ce problème est complexe pour moi », « cela pourrait être effrayant », « c’est plus facile à dire qu’à faire ». De manière prévisible, les gens n’aiment pas être confrontés à la possibilité qu’ils sabotent leurs propres buts. Ils ne sont pas disposés à croire qu’ils puissent avoir la volonté d’échouer. Occasionnellement, j’essaie de les provoquer avec des conversations comme suit :
Ils peuvent alors demander :
Je réponds :
Pour certains, la réponse est un « non » catégorique ou « pas encore ». Ma tâche est de leur faire comprendre cela et de les aider à gérer cette situation.

Une des choses que nous pouvons faire est de modifier nos attitudes et pensées à propos d’une situation et de changer la façon dont nous nous adressons à nous-mêmes. Nous pouvons changer notre dialogue intérieur négatif en positif, même si nous ne croyons pas en nos déclarations au début. Je cite deux bonnes déclarations de dialogue intérieur : « C’est peut-être difficile mais je peux y arriver. Les tâches complexes ne me font pas peur » et « Peut-être que ce sera effrayant mais j’ai déjà fait des choses effrayantes par le passé et une fois que j’aurai essayé, ma crainte s’envolera ».

Dans toutes ces situations, la vraie question est « Est-ce que je vais laisser ma peur d’échouer ou ma crainte de progresser personnellement me paralyser et me contraindre à l’inaction ? Ou bien vais-je me rappeler que la perfection est un processus et non un statut ? »

Le processus du perfectionnement personnel est laborieux mais les gratifications sont inconcevables. Les saints des derniers jours comprennent que le but de l’existence mortelle est de retourner auprès de notre créateur pour recevoir l’exaltation – un état dans lequel l’homme prend littéralement les responsabilités et les pouvoirs de la Divinité. Comme l’a dit Joseph Fielding Smith, « Le Père a promis par l’intermédiaire du Fils que tout ce qu’il a sera donné à ceux qui obéissent à ses commandements. Ils progresseront en connaissance, en sagesse et en pouvoir de grâce en grâce jusqu’à ce que la plénitude du jour parfait jaillisse sur eux. » (Doctrines du salut, volume 2, page 44).

Je tiens à souligner ceci pour une bonne raison : Certains croient fermement que la joie dans l’alpinisme se trouve dans l’escalade même et que le sommet de la montagne n’est qu’un lieu froid et venteux. Je considère qu’il s’agit d’une attitude saine dans beaucoup de situations de la vie sur terre mais en ce qui concerne l’éternité, cette façon de penser ne concorde pas avec mes convictions spirituelles. Non seulement j’aime le voyage de la vie mais je regarde aussi vers le sommet qui est la divinité pour les saints des derniers jours.

L’ouvrage de Scott Peck « The Road less Traveled » (Le chemin le moins fréquenté) donne une émouvante explication sur les conséquences naturelles d’avoir un créateur aimant :


« Si nous supposons que notre capacité d’aimer et ce besoin de croître et de se développer sont d’une certaine manière ' insufflés ' en nous par Dieu, alors nous devons nous poser la question dans quel but et avec quelles finalités. Pourquoi est-ce que Dieu veut que nous croissions ? Croître vers quoi ? Qu’est-ce que Dieu attend de nous… Peu importe le temps que nous passerons à tergiverser à ce sujet, tous ceux d’entre nous qui postulent un Dieu rempli d’amour et y réfléchissent sérieusement arriveront à l‘unique conclusion terrifiante que Dieu veut que nous soyons comme lui… Nous croissons vers la divinité…

« Si nous croyions possible que l’homme puisse devenir Dieu, cette croyance, par sa nature, placerait sur nous l’obligation d’atteindre ce possible. Mais nous ne voulons pas de cette obligation. Nous ne voulons pas avoir à travailler aussi dur. Nous ne voulons pas les responsabilités de Dieu. Nous ne voulons pas la responsabilité de devoir penser tout le temps. Aussi longtemps que nous croirons que la divinité est une réalisation impossible pour nous, nous n’avons pas à nous soucier de notre croissance spirituelle, nous n’avons pas à aller au bout de nous-mêmes pour atteindre des niveaux de conscience et d’amour de plus en plus élevés ; nous pouvons nous relâcher et être juste des êtres humains.

« Si Dieu est dans les cieux et nous ici-bas et que les deux parties ne se rencontreront jamais, nous pouvons lui laisser toute la responsabilité de l’évolution et de la direction de l’univers. Nous pouvons faire notre part en nous assurant un vieil âge confortable, en espérant avoir des enfants et petits enfants en bonne santé, heureux et reconnaissants ; mais au-delà de cela, nous n’avons pas à nous inquiéter.

« Ces buts sont suffisamment compliqués à atteindre et on peut difficilement les dénigrer. Néanmoins, dès que nous croyons possible que l’homme puisse devenir un Dieu, nous ne pouvons plus vraiment nous reposer longtemps ou dire ' C’est bon, ma tâche est accomplie, mon travail est terminé '. Nous devons constamment nous pousser pour atteindre une sagesse et une efficacité de plus en plus grandes. Cette croyance nous rend captifs, au moins jusqu’à la mort, d’un parcours d’auto-perfectionnement et de croissance spirituelle. La responsabilité de Dieu doit être la nôtre. Il n’est pas étonnant que la croyance en la possibilité de la divinité soit repoussante. L’idée que Dieu travaille activement à notre perfectionnement afin que nous puissions devenir comme lui nous met face à notre propre paresse. »

Le défi du plan de salut est énorme, mais lorsque Dieu a dit « Soyez donc parfaits comme votre Père céleste est parfait », nous devons nous rappeler que Dieu est devenu parfait. Il espère que nous ferons la même chose mais nous devons être patients avec nous-mêmes, tout comme il est patient avec nous. Un travail acharné et une auto-évaluation honnête nous aideront à nous préparer et à accepter le processus du repentir et le sacrifice expiatoire car ils sont le chemin du progrès et, en définitive, de la perfection.

Principe n°2 : Ne pas se dévaloriser ou se discréditer par des comparaisons

La parabole des talents suggère sans ambiguïté que Jésus Christ jugera les personnes selon leur performance, en tenant compte de leurs capacités et circonstances et sans les comparer aux autres. Au lieu de nous comparer à d’autres, nous ferions mieux de nous poser la question d’où nous en sommes avec ce qui nous a été donné et quelle a été notre progression récemment.

Par ailleurs, si nous devons faire des comparaisons, faisons-les sur la base de plusieurs critères et non pas seulement sur un ou deux critères.

Laissez-moi vous donner un exemple comment se passe une comparaison basée sur un seul critère à l’Église. Supposons qu’une présidente de la société de secours ait besoin d’une sœur pour présenter une leçon sur l’embellissement de la maison. Elle va certainement demander à une femme qui a une maison joliment décorée et tenue impeccablement. La semaine suivante, la leçon portant sur la manière dont les Écritures peuvent aider dans la vie d’une personne, la présidente demandera à une sœur qui a une très bonne connaissance des Écritures. La semaine qui suit, désirant évoquer le sujet des réserves familiales, elle fera intervenir une sœur qui a des réserves suffisantes pour tenir toute la durée du millénium.


Si les autres sœurs choisissent de se comparer négativement à celles qui ont présenté les leçons, elles finiront par subir une baisse de leur estime de soi. Plutôt que de vivre les leçons de la société de secours comme une parole d’encouragement et un moyen d’obtenir de nouvelles connaissances ou des sources d’idées, certaines de ces femmes vont interpréter les leçons comme un reproche qu’elles devraient déjà posséder les qualités bien développées de toutes ces femmes. Elles ne tiennent pas compte de la possibilité qu’une généalogiste puisse être mauvaise dans la décoration de sa maison ou qu’une experte des Écritures puisse n’avoir aucune réserve de nourriture.

Je connais des sœurs qui sont rentrées chez elles, littéralement tombées en léthargie, après certaines leçons de la société de secours et d’y retourner la semaine suivante pour se sentir encore plus inadéquates !


Je ne critique pas la société de secours ; j’essaie de montrer que nous écoutons tous différemment les messages. Nous avons en nous le « Parent normatif » qui fait constamment des comparaisons négatives et nous amoindrit subtilement de façon destructive si nous n’apprenons pas à écouter correctement.

Ma recommandation est que vous vous compariez à vous-même uniquement. Si vous ressentez le besoin de vous comparer à quelqu’un d’autre, faites-le sur la base d’au moins trente-cinq critères. Vous n’êtes peut-être pas aussi bonne pâtissière que Jeanne mais en utilisant les trente-cinq critères, vous vous rendrez compte qu’au final vous vous en sortez bien.

Nous devons également être prudents et faire la distinction entre se juger de manière absolue ou relative. Une de mes patientes m’a consulté alors qu’elle était déprimée, anxieuse et anhédonique (déficit de la capacité de ressentir du plaisir). Elle avait une tendance profonde à se comparer aux autres. Elle était devenue membre de l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours quand elle avait une vingtaine d’années et son mari s’était également joint à l’Église. Elle venait d’une famille économiquement, spirituellement et culturellement démunie.

Après s’être jointe à l’Église, elle s’était efforcée d’atteindre la perfection dans de nombreux domaines. Elle avait pris des cours de chant et de piano, elle s’était donné beaucoup de mal à développer les compétences ménagères sur lesquelles la société de secours avait mis l’accent. J’ai connu très peu de personnes qui s’étaient autant développées en si peu de temps. Alors, pourquoi souffrait-elle de dépression et d’une image de soi négative ? Au cours de plusieurs de nos conversations, il est apparu clairement qu’elle avait ciblé une autre sœur de sa paroisse comme modèle. Ceci aurait pu être une bonne chose si elle avait pris une autre femme en modèle pour s’encourager à s’améliorer, mais au lieu de cela, elle l’avait pris comme modèle de la perfection avec lequel elle se comparait. C’est une erreur dangereuse.

Un jour, désespérée, elle m’a dit combien cette femme était bien plus accomplie qu’elle, elle jouait du piano et chantait beaucoup mieux qu’elle et elle réalisait toutes sortes d’accomplissements ménagers. Après plusieurs séances, elle a compris qu’elle se comparait à quelqu’un qui s’était vu offrir beaucoup plus d’opportunités. Cependant, si on pouvait comparer la croissance personnelle sur les vingt dernières années, ma patiente s’était développée beaucoup plus que l’autre femme.

La femme avec qui elle se comparait avait grandi dans une famille membre de l’Église forte et nantie qui lui avait donné tout ce qu’il y a de mieux dans la vie. Je crois qu’il est important de comprendre que Dieu ne nous jugera qu’en fonction de ce que nous sommes devenus, en prenant en considération ces choses qui nous ont été offertes dans la vie. Il ne va pas nous demander « Comment se fait-il que vous ne soyez pas comme untel ou unetelle ? » Mais plutôt « « Comment avez-vous utilisé les outils et les capacités que vous avez reçus ? » Quelle sera votre réponse ?

Principe n°3 : La différence entre le remords et la culpabilité

De nombreuses références scripturaires décrivent la repentance comme une façon de mettre certaines choses derrière nous et de ne plus nous focaliser sur nos imperfections.

En qualité de conseiller professionnel et d’ancien évêque, je comprends que beaucoup refusent de souscrire personnellement à l’écriture que « les hommes sont pour avoir la joie ». Une des raisons pour cela est ancrée dans la croyance qu’ils ne sont peut-être pas dignes d’avoir du bonheur et que le bonheur finit de toute façon à causer de la tristesse. (« Tout va bien pour moi – touchons du bois ! »)

Ce raisonnement tire ses racines de la pensée nord européenne qui a influencé la pensée américaine. Il a été forgé par les dogmes de l’église chrétienne primitive qui considérait Dieu simplement tolérant envers l’homme. En raison de leur croyance que l’homme était irrémédiablement tombé en disgrâce à cause du péché originel, les gens considéraient leurs conditions de vie, que ce soit la pauvreté, la tristesse, la maladie physique ou mentale, comme une prédestination et la volonté de Dieu en réponse à leur état de pécheur. Dieu était considéré comme l’ultime Parent normatif nous condamnant. Si l’on retourne encore plus loin dans le passé, cette philosophie judéo-chrétienne avait ses racines dans l’ancien concept « qu’il ne faut jamais faire savoir au mauvais œil que tout va bien car il va alors intervenir pour que tout aille mal ».

Ces traditions ont toujours une grande influence sur les nombreux descendants de ceux qui avaient ces croyances. Ces personnes peuvent tenter de contrer l’amour, la bonté et l’acceptation de Dieu parce qu’elles ne se sentent pas dignes d’être heureuses. Elles s’inquiètent que si elles parviennent au bonheur, les choses vont rapidement mal tourner.


L’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours enseigne qu’il doit y avoir une opposition en toutes choses. Ceci ne signifie pas que le mal est causé par le bon. Le malheur frappe effectivement des bonnes personnes mais il n’y a pas de relation de cause à effet ; le malheur n’arrive pas en raison de leur bonté.

Pour comprendre pourquoi cette croyance est toujours actuelle et comment nous pouvons la gérer, nous devons connaitre le concept de la préemption. Permettez-moi d’abord d’expliquer ce que signifie la préemption dans un contexte civil.

Prenons en exemple une ville qui organise un référendum pour la ségrégation basée sur la race des personnes dans les salles de bal, c’est-à-dire que les blancs et les noirs ne pourraient pas utiliser les mêmes salles de bal. Supposons que dans cette communauté, soixante-dix pour cent des habitants votent « oui » pour ce décret mais qu’en appel la Cour Suprême décide que cette nouvelle loi est inconstitutionnelle. Les habitants diront alors « Un instant ! Nous avons choisi de faire à notre façon, ici dans notre communauté et nous refusons d’accepter la décision de la Cour Suprême ». La plupart des personnes conviendront que la ville prend le pas sur la constitution et fait préemption ; elle se met au-dessus de la loi suprême du pays.


Il n’est pas rare de voir des gens qui s’accrochent obstinément à leur culpabilité de la même manière que les habitants de cette ville s’accrochaient à ce qu’ils considéraient leurs droits.

J’ai reçu une femme qui avait eu une relation adultère de longues années auparavant. Bien qu’elle se soit confessée à d’autres évêques, elle m’a dit qu’elle était une personne horrible et qu’elle était certaine que Dieu ne pouvait pas l’aimer. Elle a continué en disant comment elle ressentait toujours la noirceur de son âme. Lorsque j’ai compris qu’elle avait changé de comportement et rectifié la situation au mieux de ses capacités, je lui ai conseillé de continuer à vivre en mettant sa culpabilité de côté qui ne lui était d’aucune utilité dans la vie. Elle a répondu que c’était faux et que la laideur (la culpabilité intériorisée et la honte) devrait rester en elle pour toujours.

Supposons que je l’ai dirigée vers le président de pieu et même, pour finir, vers le président de l’Église et qu’ils lui disent la même chose « Pardonnez-vous à vous-même et oubliez ce problème ». Si elle choisit de ne pas suivre ce conseil, elle fait préemption de façon très réelle en se mettant au-dessus du gouvernement de l’Église. Ce qu’elle dit est essentiellement, « je n’accepte pas le gouvernement de Dieu dans ma vie. Je n’accepte pas non plus son amour, son pardon et sa préoccupation pour moi ».

La culpabilité remplit son office uniquement lorsqu’elle nous encourage à nous repentir et à changer un comportement qui est incorrect, illégal ou immoral. Mais une fois que le processus du repentir a eu lieu, quel est le but d’une culpabilité persistante ?

Certains ont tendance à baigner dans la culpabilité. C’est comme s’ils étaient pourvus d’un mécanisme interne ne leur permettant pas de se sentir bien, de laisser partir la culpabilité et de poursuivre une vie pleine et heureuse. Et pourtant, une fois qu’une personne s’est repentie et a abandonné un comportement impropre, la culpabilité constante devient contre-productive et corrode l’image de soi.

Beaucoup continuent à mal agir car leur pauvre estime de soi leur donne l’impression de ne pas être dignes de l’amour de Dieu. Peut-être ont-ils pu éviter le comportement en cause, s’être repentis et confiés à l’autorité compétente de la prêtrise, mais s’ils s’accrochent à la culpabilité, ils peuvent choisir de revenir à leur ancienne conduite. Le message dans leur tête est « Je me suis repenti et ai renoncé à mes vieilles habitudes et pourtant je me sens toujours coupable et malheureux. À quoi donc a servi mon repentir ? » La réaction naturelle est de considérer ceci comme une excuse pour reprendre les vieilles habitudes.

Par cette tendance vouée à l’échec, ces personnes se sapent elles-mêmes et continuent à alimenter leur processus de chagrin. Il est certain que notre état du moi Parent normatif est plus que ravi de nous rappeler nos transgressions passées. Il nous rappelle le passé continuellement, nous punit à cause de lui et refuse de nous permettre de passer à autre chose. Les sentiments de culpabilité incessants finissent par nuire et causer toutes formes de dépressions.

Ces sentiments peuvent s’intérioriser et se développer au-delà de la culpabilité et du remords. La personne adopte un négativisme profond et une pauvre image de soi. Au lieu d’entendre que ce qu’elle a fait était stupide, idiot, erroné, un péché, ou toute autre mauvaise action, la personne entend « Je suis stupide, idiote, erronée, pécheur et une mauvaise personne ». Le négativisme, la dépréciation de soi et la détresse ne sont plus un simple sentiment mais deviennent partie intégrante de la personnalité et de l’identité de l’individu. Il devient alors complexe de changer et d’abandonner les tendances négatives et la culpabilité.

Il y a bien des choses dont nous ne sommes pas fiers, et pour cause. Mais nous sommes aussi innocents de beaucoup de choses que d’autres (et en particulier Satan et sa cohorte de démons) veulent que nous endossions. Si nous nous sommes repentis de nos erreurs, nous devrions alors ignorer la culpabilité qui ne nous appartient pas.

Peut-être que le plus grand exemple du pardon que nous pouvons lire, un pardon accepté et une culpabilité retirée, se trouve dans le Nouveau Testament lorsqu’une femme adultère a été amenée au Christ. Ses accusateurs ont demandé au Christ ce qu’ils devaient faire de cette femme. Le Sauveur s’est baissé, pensif, et a griffonné dans le sable. Puis il s’est relevé et a dit : « Que celui de vous qui est sans péché jette le premier la pierre contre elle ». Penauds, ils laissèrent tomber leur pierre et se retirèrent un à un. Après leur départ, le Maître regarda la femme et lui demanda : « Femme, où sont ceux qui t’accusaient ? Personne ne t’a-t-il condamnée ? » Elle répondit « Non, Seigneur ».
Et Jésus lui dit « Je ne te condamne pas non plus ; va et ne pèche plus » (Jn 8:7-11).

Pouvez-vous vous imaginer que le Seigneur dise « va et ne pèche plus mais d’abord marque ton front au fer rouge d’un grand ‘ P ‘ (pour péché), revêts-toi de sacs et verse des cendres sur ta tête, et ce jusqu’à la fin de ta vie afin que tous sachent combien tu as été mauvais ? » Non, l’enseignement que nous recevons est de nous pardonner à nous-mêmes et d’oublier nos péchés, de ne plus ruminer, couver ou nous appesantir sur le mal que nous avons fait.

La culpabilité peut aussi être utilisée comme un moyen de manipulation de soi-même et des autres. Le tribunal m’a un jour ordonné de me rendre à la prison du comté pour faire l’évaluation d’un pédophile multirécidiviste. Lorsque je me suis présenté en qualité d’évaluateur désigné par le tribunal, il a immédiatement éclaté en sanglots. Il m’a dit qu’il était quelqu’un d’épouvantable pour avoir fait tout ce mal à des enfants. Il a continué en disant qu’il ne valait pas la peine d’être sauvé.

Sa démonstration de culpabilité était impressionnante mais le message qu’il essayait réellement de me faire passer était vraiment perfide. Tout en me disant de voir combien il était affreux, il laissait entendre qu’en réalité il était une bonne personne, sinon il ne se sentirait pas aussi coupable. Je peux l’imaginer faire la même chose devant le juge qui occupe un rôle parental. Et si le juge n’écoute que la culpabilité et les larmes, il se pourrait qu’il entende « s’il vous plait, ayez pitié de moi parce que je suis une bonne personne, regardez combien je me sens terriblement mal » au lieu de « je suis responsable de tout cela ».


Si vous avez des enfants, vous pourrez peut-être comprendre ce que je dis ici. Si un enfant sur le point d’être grondé manifeste suffisamment de remords, nous nous abstenons quelquefois d’intervenir. Par contre, si l’enfant persiste, ne montre aucun remords ou même rejette la faute sur nous, nous aurons tendance à lui tomber dessus de façon encore plus dure.

Beaucoup de personnes ont appris à projeter leur propre culpabilité afin de gagner la sympathie, l’empathie et la clémence des autres. Ceci n’arrive pas uniquement dans les familles et dans la société, mais aussi dans notre propre tête. Le Parent normatif en nous libère tout un torrent d’abus à moins que nous confessions combien nous sommes horribles et que nous versions suffisamment de larmes pour que le Parent relâche son emprise. Cependant, le prix à payer en estime de soi est lourd et peut mener à la dépression pour ne pas avoir fait face à ses responsabilités dans la résolution du problème.

Le problème de la culpabilité persistante alors que le péché n’est plus, est ancien et répandu. Néphi a fait l’une des meilleures descriptions de l’angoisse qui nous étreint et de la connaissance qui est notre salut :

« Mon âme fait ses délices des choses du Seigneur, et mon cœur médite continuellement les choses que j’ai vues et entendues. Néanmoins, en dépit de la grande bonté du Seigneur, qui m’a montré ses œuvres grandes et merveilleuses, mon cœur s’exclame : Ô misérable que je suis ! Oui, mon cœur est dans l’affliction à cause de ma chair ; mon âme est dans la désolation à cause de mes iniquités. Je suis encerclé par les tentations et les péchés qui m’enveloppent si facilement. Et lorsque je désire me réjouir, mon cœur gémit à cause de mes péchés ;

« néanmoins, je sais en qui j’ai mis ma confiance.
Mon Dieu a été mon soutien ; il m’a conduit à travers mes afflictions dans le désert… Il m’a rempli de son amour… Voici, il a entendu mon cri le jour, et il m’a donné de la connaissance par des visions pendant la nuit…

« Oh ! alors, puisque j’ai vu de si grandes choses, puisque le Seigneur, dans sa condescendance pour les enfants des hommes, a visité les hommes avec tant de miséricorde, pourquoi mon cœur pleurerait-il et mon âme languirait-elle dans la vallée des larmes, et ma chair dépérirait-elle, et mes forces faibliraient-elles à cause de mes afflictions ?
Et pourquoi céderais-je au péché à cause de ma chair ? Oui, pourquoi succomberais-je aux tentations pour que le Malin ait place dans mon cœur pour détruire ma paix et affliger mon âme ? Pourquoi suis-je en colère à cause de mon ennemi ?

« Éveille-toi mon âme ! Ne languis plus dans le péché. Réjouis-toi, ô mon cœur, et n’accorde plus de place à l’ennemi de mon âme. (2 Néphi 4:16-21, 23, 26-28, italiques ajoutés).

Nous devons reprendre les paroles de Néphi à notre compte. Laissons à la culpabilité le rôle et le but qui lui reviennent : nous faire changer de comportement. Une fois que le changement est fait et que nous avons fait tout ce qui est en notre pouvoir, il n’est plus nécessaire de « languir dans le péché » ou de croupir dans la culpabilité. Dieu ne nous aime pas uniquement lorsque nous sommes justes, il nous aime tout le temps.

Principe n°4 : Évitez les absolus et les déclarations extrêmes

J’entends souvent des patients dire « Je ne peux plus supporter ceci », « Je vais en mourir si je n’obtiens pas cela… », « Je n’y parviendrai pas sans ceci… ». De telles déclarations sont extrêmes, elles laissent sous-entendre des circonstances équivalentes à la mort. Ces mots créent de la tension, de la pression, du désespoir et un genre d’hystérie, non seulement pour la personne qui les prononce mais aussi pour leurs proches. Peu importe la situation à laquelle vous êtes confronté, essayez de la décrire avec précision. Veillez à utiliser des adjectifs et des descriptions proportionnés aux évènements présents.

Il est quelquefois important d’aider des personnes à redéfinir leurs problèmes dans des termes moins radicaux. Non sans surprise, une personne extérieure qui intervient dans une crise la décrira avec des mots moins traumatisants ou moins dramatiques que ceux utilisés par la personne qui se trouve dans la « prétendue » crise.

Une femme me racontait que son mari était greffier dans leur paroisse et qu’ils devaient faire plusieurs kilomètres pour se rendre à leur église. Après les réunions, son mari devait rester à l’église trente à quarante-cinq minutes chaque dimanche. Elle m’a dit « C’est affreux d’attendre ; Je déteste cela. En fait, c’est un supplice. »

Un supplice ? J’associe cela avec de la torture. La torture, c’est quand on vous verse de l’acide dans le nez, qu’on écrase vos articulations ou qu’on vous met des éclats de bambou sous les ongles. Attendre n’est pas un supplice. Je peux accepter que ce soit ennuyeux ou même inconfortable pour elle, mais pas un supplice. Elle pourrait bien sûr repenser complètement la situation et la percevoir d’un point de vue positif, comme par exemple une opportunité de rendre visite à quelqu’un. Mais même si elle choisit de considérer l’attente de façon négative, elle ne devrait pas dramatiser la situation en utilisant des paroles aussi exagérées.

Si nous sommes dans une situation qui met notre vie en danger, la sécrétion d’adrénaline active le mécanisme du corps en mode « se battre ou s’enfuir ». C’est très utile si nous devons nous défendre ou nous enfuir pour sauver notre vie. Cependant, un vocabulaire construit sur des déclarations extrêmes, liées au contexte de la mort, font paraître des problèmes d’une moindre importance, beaucoup plus sérieux qu’ils ne le sont.

Chaque fois que j’entends des gens dire que quelque chose est « terrible », « horrible » « catastrophique » ou « un supplice », ou lorsqu’ils disent « je ne supporte pas cela », ou « je ne vais pas y arriver », je crains pour eux. Très peu d’évènements dans la vie justifient ces termes extrêmes. Que font ces personnes si une catastrophe
réelle a lieu ? Comment gèrent-ils la perte d’un membre de la famille immédiate ou toute autre tragédie bien réelle ?

Une des différences principales entre les hommes et les animaux est la capacité de l’homme à utiliser les symboles et le langage. Notre langage est comparable à un programme qui dit à l’ordinateur de notre cerveau comment interpréter une situation. Si nous disons à notre ordinateur que quelque chose est horrible, il nous croit et envoie des instructions pour agir de manière appropriée. Par conséquent, nous allons réagir de façon excessive et nous causer de la douleur et des traumatismes inutiles.

Si sur une échelle de « un à dix » (un étant le pire et dix le mieux), nous ne réfléchissons qu’en termes de « un et dix », notre esprit commencera à nous faire défaut car il ne peut pas gérer les « un et les dix » dans la durée. Si nous sommes dans ce cas de figure, il est utile de se rappeler que ces situations ont habituellement deux atouts : elles sont temporaires et ce sont des cas isolés. Pour ceux qui sont enlisés dans la catégorie des « un ou dix », voici une liste de mots suggérés pour chaque graduation de l’échelle de notation qui pourront aider à trouver un juste milieu plus stable.
  1. Terrible, affreux, dévastateur, catastrophique, de la torture, le pire qui puisse arriver, l’enfer.
  2. Humiliant, douloureux, inconfortable, énervant, problématique, troublant, embêtant, embarrassant, aggravant, stressant, régressif, dégradant, intense.
  3. Ennuyeux, fatigant, gênant, intempestif.
  4. Ordinaire, coutumier, médiocre, routinier, banal, pragmatique.
  5. Moyen, quotidien, journalier, commun.
  6. Au-dessus de la moyenne, bon, correct, encourageant, adéquat.
  7. Amusant, intéressant, agréable, surprenant.
  8. Passionnant, exaltant, stimulant, rafraichissant, joyeux.
  9. Excellent, délicieux, génial, super, sensationnel, formidable, extraordinaire, stupéfiant.
  10. Merveilleux, magnifique, fantastique, divin, spectaculaire, superbe.
Sans surprise, lorsque nous disons des choses qui décrivent notre situation plus « glorieuse » ou « fantastique » que ce qu’elle ne l’est réellement, l’ordinateur de notre cerveau en est dupe. Nous risquons de perdre notre aplomb et devenir moins efficace. Les jeunes gens ont souvent tendance à exagérer leur raisonnement. Suzy rencontre Johnny. Il est merveilleux, magnifique, divin – un vrai cadeau du ciel. Par conséquent, elle ne travaille plus ses maths et son anglais parce que ses pensées sont tournées vers cet évènement fantastique et paradisiaque qui lui arrive.

Puis un jour elle rencontre Johnny, main dans la main avec Jane. C’est une catastrophe. Elle ne le supporte pas. Et bien sûr, ça la bloque encore : elle ne peut pas faire ses maths ni son anglais, elle se replie sur elle-même et s’isole. Si cette situation perdure, elle peut devenir réellement dangereuse. Elle fait des montagnes d’un rien – une pratique qui affecte gravement sa vie. Si elle continue ainsi trop longtemps, elle pourrait rater ses études. Les conséquences pour les adultes qui font des montagnes avec des riens sont similaires.


« Ne pas pouvoir » est également lié au vocabulaire de la mort car la seule raison de ne pas pouvoir faire quelque chose est lorsque nous sommes morts ! Quand les gens disent ne pas pouvoir faire face à ceci ou cela, leur cerveau le croit et ces personnes arrêtent tout simplement d’essayer. Lorsque quelqu’un dit « Je trouve inconfortable de m’occuper de moi-même » ou « Suivre ce cours me contrarierait », je peux accepter cela. Mais dire « Je ne peux pas » est habituellement paralysant. Pour éviter de faire le point sur eux-mêmes et d’apporter les changements nécessaires dans leur vie, une des excuses que certains utilisent, est de dire « Je ne peux pas venir et parler de moi » ou bien « Je ne peux pas supporter d’écouter ces choses ».

L’attitude du « devoir avoir » est une autre équivalence à la mort qui cause énormément de problèmes dans la vie des gens. « Devoir avoir » quelque chose plutôt que « désirer avoir » engendre une crise émergente et c’est cette façon de penser qui peut nous catapulter dans des circonstances négatives. Il y a une différence importante entre vouloir quelque chose et considérer cette chose comme une nécessité absolue, essentielle à notre survie.
Quelques concepts communs qui entrent dans cette catégorie :
  1. Je dois avoir l’approbation, l’amour et le respect de tous.
  2. Je dois avoir des garanties. Si je vais tenter quelque chose, je dois savoir que ça réussira.
  3. Je dois le faire à ma façon.
  4. Les autres doivent penser, ressentir et agir tel que je pense qu’ils devraient le faire.
Vouloir ces choses n’est pas dangereux. En fait, vouloir tout cela est normal. Le danger est lorsque nous pensons qu’avoir ces choses est une nécessité absolue. Les quatre principes qui suivent traitent de la façon de vaincre ces attitudes dangereuses.

Principe n°5 : Ne vous attentez pas à recevoir une approbation

Peu importe ce que nous faisons, nous n’aurons jamais l’approbation de tous et pourtant, essayer de plaire à tous est un problème courant. Ceux qui le font deviennent des caméléons émotionnels et se prostituent intellectuellement. Dans un certain groupe, ils semblent adhérer à un système de valeurs et représenter un certain ensemble de sentiments et pensées. Mais dans un autre groupe, ils représentent des valeurs, sentiments et pensées totalement différents. Ils veulent s’attirer les bonnes grâces des autres au détriment de leurs propres valeurs et idées, dans une tentative désespérée d’être aimés de tous.

Mais si nous passons toute notre vie à devenir ce que les autres veulent que nous devenions, à essayer de faire ce que les autres veulent que nous fassions et à ne jamais défendre nos idées, nous finirons par prendre conscience que nous n’avons pas de valeurs stables, ce qui nous projette dans un état dépressif.

Principe n°6 : La vie ne donne pas de garantie

Demander des garanties est tout aussi paralysant que tenter d’être parfait d’un seul coup. Notre société est devenue tellement tournée vers la réussite que beaucoup ont peur de tenter quoi que ce soit sans la garantie que cela réussira. Bien que nous voudrions avoir des garanties, si nous pensons que nous devons les avoir, nous bloquerons la plupart des activités dans notre vie, paralysés par la peur.

Dans cette vie nous devons prendre des risques en pensées et en actions, en dépit d’un échec possible. Nous devons nous souvenir que l’échec peut effectivement être une réussite s’il nous enseigne une meilleure manière de penser et de faire. Aucun athlète n’est devenu excellent sans avoir d’abord échoué maintes fois. La vie serait beaucoup plus simple si nous avions des garanties mais on en trouve rarement au cours de notre vie. Si vous achetez une voiture neuve, prenez la garantie. Mais dans les autres domaines de votre vie, prenez conscience que la prudence et un jugement sain sont probablement vos seuls atouts.

Principe n°7 : Ne vous attendez pas à ce que le monde gravite autour de vous

Certaines personnes sont tellement égocentristes qu’elles ne supportent pas d’entendre le mot « non ». Si elles sont frustrées dans leurs activités, elles font une crise de colère ou boudent. Les personnes matures reconnaissent la nécessité de faire des concessions dans leur quotidien et comprennent que leurs valeurs doivent laisser la place à une certaine souplesse. Dans le cadre de leurs interactions avec les autres, les personnes matures savent que le compromis est la solution dans notre société.

Cependant, les névrosés ne sont pas disposés à faire des compromis. Non seulement ils veulent imposer leur volonté aux autres, mais ils veulent souvent leur imposer aussi leurs mythologies de la vie. Souvenez-vous de l’écriture : « Lorsque j’étais enfant, je parlais comme un enfant, je pensais comme un enfant, je raisonnais comme un enfant ; lorsque je suis devenu homme, j’ai fait disparaître ce qui était de l’enfant » (1 Co 13:11). Eh bien, de nombreuses personnes n’ont toujours pas mis de côté leurs enfantillages. Il est important de comprendre que nous avons été programmés dans l’enfance. Lors de cette programmation, nous étions naïfs. Nous n’avions pas l’expérience requise pour nous permettre de rejeter ou d’accepter ce qui nous était proposé.

Mais maintenant que nous sommes des adultes, nous devons « mettre de côté les enfantillages » et choisir les croyances et pensées que nous sommes en mesure d’accepter et maintenir en toute logique en tant qu’adulte.

Principe n°8 : Accordez aux autres la liberté de pensée et d’action

Comme déjà évoqué dans le chapitre sur le libre arbitre, nous nous sommes battus et avons gagné une grande guerre dans les cieux pour le droit au choix. Nous n’aimerons peut-être pas certains des choix que font les autres mais nous devons les laisser choisir de toute façon.

Nous avons la responsabilité d’encourager, d’exhorter et d’enseigner des principes corrects mais les autres ont la liberté et l’obligation de choisir par eux-mêmes.

Aucun pouvoir, aucune influence ne peuvent ou ne devraient être exercés en vertu de la prêtrise autrement que par la persuasion, par la longanimité, par la gentillesse et la douceur, et par l’amour sincère, par la bonté et la connaissance pure qui épanouiront considérablement l’âme sans hypocrisie et sans fausseté (D&A 121:41-42).

Principe n°9 : Apprenez à maîtriser votre colère

La colère est une des forces les plus destructrices que connaissent les hommes. La quantité d’énergie requise au maintien de la colère est inouïe. Dans le Sermon sur la Montagne, le Christ a indiqué clairement que « quiconque se met en colère contre son frère est passible de jugement » (Mt 5:22). Cet avertissement se trouve encore renforcé lorsqu’il dit : « Aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent, faites du bien à ceux qui vous haïssent et priez pour ceux qui vous maltraitent et qui vous persécutent (Mt 5:44). Ces exhortations devraient nous apporter des raisons supplémentaires d’apprendre comment gérer l’émotion de la colère.

En tant « qu’homme naturel », je serais malhonnête si je n’admettais pas que lorsque quelqu’un me blesse, ma tendance naturelle serait de lui faire du mal en retour. Je pense ne pas être le seul dans ce cas.

Un jour, j’ai entendu une histoire qui m’a profondément impressionné. Les boutiques de deux merciers se faisaient face dans une rue et au cours des années, ils étaient devenus des concurrents acharnés. Ils passaient beaucoup de temps debout devant leur porte pour surveiller les affaires de l’autre. Lorsqu’un client se présentait chez l’un deux, celui-ci souriait en triomphe à l’autre et faisait entrer son client dans sa boutique. Leur rivalité et leur colère n’ont cessé de s’accroître de façon incontrôlée au cours des années.

Un jour, un ange apparût en rêve à l’un de ces hommes. L’ange lui dit : « Dieu m’a envoyé pour t’enseigner une très grande leçon. Dieu t’accordera ce que tu désires mais tu dois comprendre que ce qu’il t’accordera sera donné en double à ton concurrent de l’autre côté de la rue. Tu demandes la richesse ? Tu pourras être plus riche qu’un roi mais il sera encore plus riche que toi. Tu voudrais des enfants dont tu peux être fier et qui seront célèbres ? Tu peux les avoir mais il en aura plus que toi et ils seront encore plus célèbres que les tiens. Est-ce que tu aimerais avoir une vie longue et en bonne santé ? Tu le peux mais il vivra plus longtemps que toi et en meilleure santé ». L’homme fronça les sourcils et médita longuement. Finalement, il dit à l’ange « je souhaite devenir aveugle d’un œil ».

La colère doit être maîtrisée, sinon elle nous détruira. Bien qu’il n’y ait qu’une seule gestion saine, il semblerait que les gens appliquent cinq méthodes de base pour maîtriser la colère, en utilisant souvent une combinaison des cinq.

  1. La passivité. Beaucoup ont le don de tout simplement refouler leur colère ; en jargon classique, ils la « répriment ». Ces personnes ont fréquemment des troubles somatiques ou physiques. La colère se manifeste souvent par des troubles de l’appareil gastro-intestinal, des maux de tête, de l’hypertension ou des palpitations cardiaques. Des études montrent que ces symptômes aggravent de nombreux autres troubles et peuvent même diminuer notre résistance à des maladies comme le rhume, la grippe ou le cancer.
  2. Explosivité et agressivité. Les gens manifestent souvent leur colère à travers un bombardement d’activités physiques ou verbales. Dans les cas extrêmes, ils finissent par détruire des relations ou mariages, perdant fréquemment leur emploi ou ayant des altercations avec la loi.
  3. Le mode cocotte-minute. Dans ce modèle, les personnes demeurent passives et serrent les dents jusqu’au point où elles n’en peuvent plus. Au final, leur colère se manifeste par de l’agressivité physique ou verbale. Je nomme ce système de gestion de la colère « à la mode des mouettes ». C’est comme le père de famille qui s’isole de sa famille en regardant la télévision ou en travaillant à ses propres petits projets jusqu’à ce que quelque chose dans la famille l’irrite suffisamment. Alors, il descend en piqué sur sa famille, piaillant fortement et attaquant tout le monde, pour ensuite s’isoler de nouveau. Le problème dans cet exemple est le manque de constance. Bien que le père puisse essayer d’enseigner une très bonne leçon, ceux qui sont sous les feux de l’attaque ne se rappelleront que du comportement imprédictible du père. La violence est un mauvais professeur.
  4. Le style passif-agressif. Tout comme les vieux merciers, certains se font littéralement du mal à eux-mêmes pour prendre leur revanche sur d’autres. Les personnes passives-agressives se sentent souvent impuissants. Leur comportement passif est une façon de se venger sans utiliser des moyens ouverts et hostiles. Par exemple, des enfants peuvent utiliser comme armes la procrastination, l’entêtement, la flânerie ou l’oubli.
Un employé en colère contre son supérieur peut utiliser ces mêmes méthodes pour se venger. Il fait des choses contre lesquelles son supérieur n’a pas d’emprise et reste ainsi en sécurité. De tels comportements créent de la colère et de la frustration pour tous ceux qui sont impliqués et peuvent lentement détériorer de bons environnements familiaux et professionnels.
  1. L’affirmation de soi. Ce schéma de réponse s’est avéré un tel succès que les étagères sont pleines d’ouvrages écrits sur le thème de « comment réagir avec assurance ». Certains de ces ouvrages sont plutôt efficaces pour enseigner aux gens de réagir en temps voulu avec des réponses mesurées face aux remous de leur vie.
En termes simples, l’affirmation de soi requiert une honnêteté constante. Lorsque des personnes sûres d’elles-mêmes sont en colère, elles manifestent leur colère de manière cohérente. Les directives pour la communication et la résolution des problèmes qui sont expliquées ailleurs dans cet ouvrage s’appliquent ici et pourraient nous aider à apprendre à gérer la colère de manière constructive. Soyez assurés cependant que les coups, les insultes et les attaques ne font pas partie de l’affirmation de soi ni des bons enseignements (voir chapitre 9).

Un de mes patients se plaignait amèrement de ses collègues de travail qui racontaient constamment des plaisanteries à caractère racial, ethnique ou religieux. Il était très sensible à ces sujets et angoissé de la situation. Cependant, au lieu de répondre de façon constante à leurs calomnies, en expliquant qu’il trouvait leurs plaisanteries inappropriées, il réagissait en mode cocotte-minute, demeurant passif jusqu’à ce qu’il n’en puisse plus et explosant ensuite en faisant une scène.

Je lui ai montré que cette inconstance montrait en fait une certaine acceptation de leurs comportements et que pour changer la donne, il fallait qu’il soit cohérent dans ses réactions, en quittant systématiquement la salle ou en faisant part chaque fois de ses sentiments. J’ai appris plus tard qu’après avoir réagi constamment avec des commentaires du style « Excusez-moi mais je n’écoute pas les plaisanteries à caractère ethnique » et « J’ai du mal avec les blagues à caractère raciste ou religieux. S’il vous plait, ne les racontez pas devant moi », les choses ont évolué de façon positive. Ses préoccupations ont été soulagées.


Une option des plus raisonnables en situation de colère est de s’éloigner tout simplement de la situation causant la colère. Lorsque les discussions et les accords ont échoué, une évasion temporaire pourrait être la meilleure solution.

Je me souviens d’avoir fait hospitaliser une femme qui était manifestement dans un accès de colère et de confusion. Elle sanglotait souvent et violemment. Entre ses larmes, les accusations fusaient : « Si seulement mon mari ne faisait pas ceci… », « Si seulement mes enfants faisaient cela… ». Elle m’a dit que j’avais placé la mauvaise personne à l’hôpital et qu’elle n’était que la victime. J’étais d’accord avec elle à de nombreux égards mais lui ai expliqué qu’il n’était pas rare d’hospitaliser les victimes, car comme dans son cas, il n’était pas pratique d’admettre dix personnes à l’hôpital à sa place. A l’hôpital elle était dans un environnement sécurisé où elle pouvait « débrancher » pendant un certain temps et faire le tri de ses sentiments. Plus tard, avec l’aide de consultations, sa situation familiale a pu s’améliorer.


Principe n°10 : Accepter les épreuves comme expériences d’apprentissage

J’ai récemment lu quelque chose qui résume bien mes sentiments à propos de ce principe :

Les branches dénudées de décembre

« Si un sourire peut persister sur les lèvres qui ont ri, de même une larme gonflera toujours dans l’œil qui a pleuré. Car l’esprit ne passe pas facilement à autre chose et les souvenirs ne s’estompent pas rapidement chez ceux qui acceptent l’amer comme le doux, le dernier comme le premier. Car qui se souvient de la floraison des arbres ou du lavis des fruits à maturité sans penser aussi aux branches dénudées de décembre ? De même, l’aurore n’est rien sans la nuit qui la précède et l’étoile ne peut pas exposer sa brillance sans les ténèbres environnantes.

« Et ainsi, il semble, est l’ordre des choses. En toutes choses il y a opposition, mais décembre passera, l’obscurité s’enfuira et rien ne durera éternellement. Car qui d’entre nous voit le soleil se lever et cependant ne jamais se coucher, la flamme brûler et pourtant ne pas consumer, le bourgeon fleurir et ne jamais se faner ? Et laquelle des saisons commence et n’a pas de fin ?

« Sommes-nous impliqués dans l’ordre de toutes choses ? Ne nous débattons-nous pas dans la recherche du bonheur ? Connaissons-nous l’amour sans aussi connaître la solitude, le succès sans l’échec ou la joie sans d’abord connaître le chagrin ? Ne souffrons-nous pas de maladies ? Ne nous lassons-nous jamais ?

« Et pourtant, devons-nous condamner nos difficultés ? La motte d’argile est travaillée, modelée et cuite à haute température – mais n’en ressort-t-il pas un objet puissant et beau ? La fleur d’automne meurt d’une mort amère aux prises des griffes gelées de l’hiver mais sème ses semences en mourant, assurant ainsi sa propre continuité. Est-ce que la fleur n’est pas victorieuse ?

« Et maintenant je pose la question, est-ce que l’argile condamne le feu du fondeur ou la semence le gel de l’hiver ? Car à nous, il est donné de savoir que les épreuves ne durent pas pour toujours, car la terre se déplace dans le ciel et le temps ne s’arrête pas. Ni la terre reste statique, ni tout ce qui y gravite. Est-ce qu’une semence dans la terre demeure une semence à jamais ? Est-ce qu’un petit ruisseau reste un ruisseau pour toujours ?

« Non, il suit son chemin vers un fleuve ; et le fleuve n’émerge pas non plus d’humbles commencements. Tout comme le ruisseau, nous grandissons et nous nous développons jusqu’à ce que finalement, semblablement au ruisseau qui rencontre le fleuve et la mer, nos chagrins passés ne soient plus qu’un simple grain de sable dans notre vie.


« Nous voyons donc qu’en tout commencement il y a une fin et que pour tout moment de tristesse, l’heure de la joie est programmée – aussi sûrement que la tempête est suivie du soleil et que la chaleur de la journée est apaisée par la fraicheur de la nuit. Sacrifierions-nous le soleil pour nous débarrasser de la tempête, ne savourerions-nous jamais la fraicheur pour nous épargner la chaleur ?

« Non, car un monde avec l’un mais sans l’autre est un monde non éprouvé et irréalisé. Ce serait les cieux avec le soleil mais sans la lune ni les étoiles, une chanson écrite jadis mais jamais chantée. Et que dire du doux sans l’amer, ou du premier sans le dernier ? Car qui se souvient de la floraison des arbres ou du lavis des fruits à maturité sans penser aussi aux branches dénudées de décembre ?
» — Janice A. Richardson

En grandissant et nous développant, nous prenons conscience que nous sommes dans un processus de polissage. Je suis convaincu que Dieu permet que nos « côtés rugueux » soient polis par friction et abrasion. Un autre mot pour « friction » est le mot « épreuves ».

Quelquefois, ces épreuves peuvent prendre l’envergure de vraies crises mais notre attitude face à ces épreuves peut en faire des opportunités de croissance ou des expériences qui bloquent notre progression. Dans beaucoup de langues, le mot crise sous-entend à la fois danger et opportunité. De par sa nature, une crise n’est pas un évènement neutre. Elle nous affectera toujours d’une façon ou d’une autre. Nous pouvons décider de quelle manière elle nous affectera et ce que nous en ferons. La façon dont nous utiliserons l’énergie de la crise en déterminera le résultat ultime. L’issue de la crise dépend de nous.


Une crise peut être un moment très créatif si nous adoptons la bonne attitude. Je crois que beaucoup de choses merveilleuses peuvent émerger des pires crises. Par exemple, supposez qu’une petite commune soit le site d’un meurtre odieux. Cette tragédie pourrait se révéler catastrophique si les habitants forment des groupes agressifs ou s’isolent dans des maisons barricadées. Par contre, si la commune réagit en installant un nouveau système d’éclairage des rues, recherche des solutions pour renforcer le maintien de l’ordre public et améliorer les systèmes de soutien communautaire, la crise pourrait de muter en une expérience créative et fonctionnelle.

Il a fallu une grande crise dans ma vie pour m’enseigner qu’une expérience dévastatrice peut aussi être une occasion d’apprentissage. Mes parents sont décédés alors que j’étais jeune. Mon frère et ma sœur ont été placés dans la famille tandis que je suis resté dans une famille d’accueil. A la fin de mon adolescence, je me suis intéressé à l’Évangile de Jésus-Christ et ensuite je suis parti en mission, un tournant majeur dans ma vie. De retour de mission, je me suis marié et avec mon épouse nous avons pris la garde de mon frère de quinze ans qui rencontrait quelques difficultés d’adolescent. Mon frère et moi sommes devenus très proches.

Lorsqu’il avait dix-sept ans, nous avons déménagé au Wyoming où je devais poursuivre mes études supérieures. Cinq semaines après notre arrivée, mon frère s’est rendu à une soirée dansante. Sur la piste de danse, quatre jeunes hommes l’ont battu à mort. Ils n’avaient pas l’intention de le tuer mais ceci n’a fait aucune différence – il n’en était pas moins mort. Un officier de police à l’intonation abrupte et coléreuse m’a appelé à 1h30 du matin et m’a demandé si j’étais Zane Nelson et si j’avais un frère du nom de Scott Nelson. J’ai répondu par l’affirmative. Il m’a dit « Je suis à l’hôpital Laramie Memorial avec votre frère. Il est tombé raide mort sur une piste de danse ».

Après avoir identifié le corps, je suis rentré de l’hôpital comme anesthésié, submergé par la confusion et le chagrin. Durant plusieurs jours je ressentais une paralysie psychique et suis parvenu, je ne sais comment, à traverser l’épreuve des funérailles et de l’enterrement. Mais de nombreuses nuits ont suivi où, écrasé par la douleur et la confusion, je criais ma colère à Dieu et à mes parents. J’avais l’impression qu’ils m’avaient tous abandonné avec un fardeau insoutenable.

J’étais hanté par la douleur. Je me suis mis en retrait de la vie sociale et m’apitoyais sur moi-même. Grâce à l’aide d’un de mes professeurs, j’ai fini par comprendre que j’étais en train de capituler psychologiquement et que je devais modifier mon comportement.

Après de nombreuses prières, nous avons décidé, mon épouse et moi, que le seul moyen de se débarrasser de cette dépression était de s’impliquer dans autre chose. Nous nous sommes engagés à ce moment-là à faire du travail missionnaire et à ce que je termine le programme d’études supérieures que j’avais commencé. Cette réorientation vers des buts positifs m’a permis de prendre de la distance par rapport à ma concentration unique fixée sur ma peine. J’ai arrêté de ressasser et d’être en colère à propos du décès de mon frère (un état futile qui n’a fait que m’entraîner dans un désespoir de plus en plus profond). Suite à ce réel engagement dans des buts créatifs, nous avons pu passer des moments joyeux et constructifs dans le travail missionnaire et j’ai vécu de bonnes expériences dans mes études supérieures.

Une crise majeure peut occulter tous les autres problèmes dans la vie des personnes affectées. Mais je n’insisterai jamais assez sur le fait que les crises nous paralyseront seulement si nous les laissons éclipser tous les autres aspects de notre vie. Lors de toute situation négative, les gens peuvent créer un tel monstre dans leur esprit qu’ils se convainquent eux-mêmes de l’impossibilité de pouvoir le gérer. Cette crainte se traduit par de la colère ou du désespoir, se terminant souvent en des conséquences tragiques.

Une telle situation m’est restée à l’esprit. Ma spécialité étant la suicidologie, je suis souvent convoqué par les médecins légistes lors de cas inhabituels. Il y a quelque temps, j’ai été appelé à une maison où un garçon de onze ans avait apparemment commis un suicide avec un fusil puissant. Il n’avait laissé aucun écrit et ce garçon semblait être un membre heureux au sein d’une famille intégrée.

Quelle avait pu être la cause pour que ce jeune garçon apparemment intelligent et bien adapté retourne le fusil contre lui ? Il s’est avéré qu’il avait dû rester chez lui au lieu d’aller à l’école et qu’il a fini pas s’ennuyer. À la recherche de quelque chose à faire, il a commencé à jouer avec le pistolet et le fusil de son père. Malencontreusement, le pistolet a fait feu et a percé un trou dans un meuble antique. En raison du contrecoup exagérément intense qui suit toujours ce genre d’accident et effrayé par ce qu’il avait fait, le jeune garçon s’est suicidé.


D’un autre côté, une crise peut fournir l’opportunité d’apporter des changements positifs si de bons choix sont faits. Je me souviens d’un de mes amis qui est devenu aveugle à cause du diabète. Il est venu me voir avec son épouse pendant son entraînement de réadaptation. Lorsqu’ils se sont levés pour partir, j’ai instinctivement tendu la main pour l’aider à trouver sa canne. Son épouse a secoué la tête et j’ai regardé alors qu’il marchait droit vers un bureau et s’est cogné. Son épouse a dit négligemment : « Il faut que tu fasses un peu plus attention où tu vas mon chéri ».

Elle résistait à la tendance naturelle de trop l’aider, l’aidant ainsi à devenir indépendant. Il est ensuite devenu une force significative dans l’éducation des aveugles en Idaho. Son épouse aurait pu choisir de le rendre dépendant d’elle-même et cet homme aurait pu rester à la maison et passer sa vie à se plaindre. Les choix qu’ils ont tous deux faits face à une crise majeure l’ont aidé à devenir une personne heureuse et productive.


Une situation de crise n’est certainement pas le seul moment où l’on peut grandir et changer. Nous aurons de nombreuses épreuves en dehors des périodes de crise, dans cette vie et dans celle qui suit. Ma préoccupation n’est pas seulement que nous soyons capables de surmonter les crises et les épreuves mais que nous le fassions dans l’estime de soi, l’humilité, la foi, la détermination, la ténacité et la compassion dont nous avons besoin pour découvrir la joie qui devrait être inhérente à notre parcours.

Chapitre 9 : Les gens sont fragiles : à manier avec précaution

Dans les romans sur son personnage de fiction Lazarus Long, Robert A. Heinlein a dit :

« Il est nécessaire de lubrifier les pièces mobiles en friction d’une machine pour éviter leur usure excessive. Les règles de politesse et de civilité assurent une lubrification parmi les gens qui sont en contact. Il arrive souvent que les très jeunes enfants, les personnes ayant peu voyagé, les naïfs et ceux qui ont une vision relativement simpliste des choses condamnent ces formalités, les jugent ' creuses, dénuées de sens ou hypocrites ' et dédaignent leur utilisation. Aussi purs que soient leurs motifs, ils jettent ainsi du sable dans la machine qui, dans le meilleur des cas, ne fonctionnera plus très bien. »

Les relations ont besoin d’huile dans les rouages mais elles reçoivent trop souvent du sable. Les gens viennent trop fréquemment me consulter en exprimant le désir d’aider à changer une certaine personne clé dans leur vie. Ils pensent que « si seulement » cette personne pouvait changer, ils en seraient tous deux plus heureux et leurs problèmes seraient résolus. Mais le seul moyen d’influencer les autres à changer de manière positive est d’initier un changement positif en nous-mêmes. Par exemple, c’est par l’apprentissage de nouvelles compétences de communication et le développement de notre habilité à régler les problèmes, que nous serons en mesure de traiter les personnes clés de notre vie de manière plus « lubrifiée » et moins « jets de sable », pouvant ainsi devenir un catalyseur puissant de changement dans leur vie.

Communiquer ses sentiments

Beaucoup de problèmes pourraient être résolus si nous savions communiquer efficacement à leur sujet et les gérer de façon appropriée. La communication efficace est compliquée et cependant elle est un outil essentiel pour découvrir, encourager ou changer des sentiments. Les personnes perçoivent le monde de différentes manières. L’huile dans les rouages utilisée par une personne peut être ressentie comme de l’hypocrisie par une autre. Pour communiquer, nous n’avons pas à accepter les avis des autres mais nous devons les respecter.

Il est courant que la communication, qu’elle soit bonne ou mauvaise, consiste en quelqu’un qui tente de faire part de ses sentiments. La personne veut exprimer ses émotions et il se peut qu’elle veuille trouver une catharsis. Elle ne veut pas une réponse mais seulement quelqu’un qui l’écoute. Dans d’autres situations, une personne peut réellement rechercher de l’aide pour résoudre un problème.

Il est intéressant de noter que les hommes ont souvent des difficultés à juste
écouter des sentiments. Ils ont plutôt tendance à venir me voir avec la croyance qu’ils sont supposés faire quelque chose lorsque des émotions leur ont été confiées. Étant donné qu’il est souvent impossible qu’ils fassent quoi que ce soit à propos des émotions de leur épouse, ils se sentent frustrés et aggravent ainsi la difficulté de la situation. Une épouse rendra service à son conjoint en l’aidant à comprendre que quelquefois elle ne demande qu’à être écoutée.

Directives de communication

Alors que je présente ici quelques directives de communication et de résolution de problèmes, gardez à l’esprit que je ne suis pas en train de dire qu’il faut toutes les appliquer lors de conversations normales ou de routine, bien qu’elles puissent être bénéfiques. Je peux dire sans équivoque que lorsque je suis suffisamment sage pour les suivre, ma capacité à comprendre les autres et à les aider à résoudre leurs différends et leurs problèmes s’accroît considérablement. Si nous choisissons de ne pas suivre ces directives, nous pourrions nous retrouver à saboter certains des merveilleux talents et bénédictions que Dieu nous a donnés.
  1. Parler au « Je » et éviter le « Vous » dans les allocutions.
Lorsque les gens entendent le mot « vous », ils se sentent souvent attaqués. En évitant de dire « vous », vous les aidez à faire tomber leurs défenses. Par exemple, j’ai eu une femme en consultation qui était une vraie pleurnicharde. Alors qu’elle me racontait son histoire, elle geignait comme une sirène de pompiers [tonalité montante et descendante que font les sirènes des véhicules de pompiers aux États-Unis, ndt]. Vous pouvez bien vous imaginer que si moi, son thérapeute, en était dérangé, son mari devait avoir une vie totalement impossible avec elle. L’homme « naturel » en moi mourait d’envie de dire « Ciel ! Madame ! Où avez-VOUS appris à parler ?  Lorsque VOUS montez et rabaissez ainsi le ton de VOTRE voix, VOUS êtes carrément rebutante ! »

Si je l’avais approchée avec ce type de message, je n’aurais pas été en mesure d’aider ce couple. Au lieu de cela, je lui ai dit : « En qualité de thérapeute, j’ai besoin de pouvoir réfléchir clairement ; cependant, j’ai remarqué que quelquefois mon esprit s’égare et je ne reste pas concentré sur ce que les gens sont en train de me dire. Lorsque quelqu’un monte et baisse le ton de sa voix avec moi, d’anciens épisodes de ma vie envahissent mes pensées ».

La femme comprit le message et elle parla correctement durant les vingt minutes qui suivirent. Puis elle recommença à geindre. Immédiatement, je lui dis : « Excusez-moi mais je me rends compte que je suis de nouveau distrait ». Ceci a résolu notre problème.
  1. Éviter de blâmer les autres.
Tout comme avec l’emploi du « vous », lorsque nous commençons à blâmer quelqu’un d’autre pour tout ce qui ne va pas et refusons d’assumer notre part de responsabilité, nous ne faisons qu’aggraver la situation. Le vrai danger en essayant de repousser la faute sur quelqu’un d’autre est que nous restions inconscients de nos propres comportements et attitudes qui pourraient bien être une partie du problème.
  1. Retour d’information, répétition et paraphrase.
Dans certaines situations, il est important de répéter ou paraphraser ce qui vient d’être dit. « Êtes-vous en train de dire que… », ou « En d’autres termes, ce que vous voulez dire est… ». Ceci est une manière directe de rassurer les personnes qu’elles sont écoutées et comprises.
  1. Éviter les formulations trop catégoriques : jamais, toujours, chaque fois…
Ces affirmations sont habituellement fausses et donc perturbantes. Par exemple, si une femme dit « Tu ne m’invites jamais à l’extérieur », généralement son mari ne va pas comprendre le message qu’elle tente de lui faire passer qui est : « J’aimerais que nous sortions ensemble plus souvent ». Au lieu de cela, il ne va retenir que le mot « jamais » et va répondre à peu près ainsi : « Il y a six semaines, je t’ai emmenée chez McDonald et maintenant tu dis que je ne t’emmène jamais nulle part ! » Il est clair que les deux interlocuteurs sont piégés par ces mots trop catégoriques.
  1. Utiliser la communication sur le mode « Parent normatif » modérément. Ce type de communication inclut habituellement des mots-clefs tels que « vous devez, vous ne devez pas ».
Si nous pouvions seulement écouter aussi bien que nous pouvons entendre, nous serions tellement plus avancés ! La plupart des gens n’aiment pas recevoir des ordres et les mots « devoir et ne pas devoir » sont parmi les plus efficaces pour tuer une conversation.
  1. Ne jamais dire à une tierce personne ce qu’elle pense ou ressent.
Cette attitude est absolument bloquante. Le plus souvent, les personnes seront en désaccord avec l’interprétation que vous faites de leurs sentiments et seront encore plus irritées et en colère. Le résultat prévisible est qu’elles cesseront tout simplement d’écouter.
  1. Ne pas polémiquer sur les faits mais essayer de comprendre les sentiments.
Comme je l’ai fait remarquer plus tôt, les faits ne sont pas aussi importants que les sentiments qui en découlent. Il est absurde de polémiquer sur le fait que quelqu’un soit en retard d’une heure ou de quarante-cinq minutes ou que quelqu’un sorte chaque soir de la semaine ou seulement quatre soirs. Les sentiments que ces faits engendrent sont ce qui compte réellement. Exprimez vos sentiments et voyez comment la conversation deviendra bien plus productive.
  1. Ne pas faire de menaces verbales ou physiques ni utiliser de mauvais traitements.
Les cris et les menaces sont des messages puissants à part entière, ils sont en fait si puissants qu’ils détournent l’attention du message recherché. L’utilisation du poing pour renforcer le message brise le cadre de la confiance et de la compréhension. Les cris brouillent les paroles.
  1. Éviter de jouer l’apaisement.
Ne vous contentez pas de dire aux gens ce qu’ils veulent entendre et ne contraignez pas les gens à être d’accord avec vous. Le fait d’encourager un alignement intellectuel et émotionnel chez les autres n’est pas une bonne méthode d’enseignement. Elle ne favorise pas la transparence et l’honnêteté dans une relation.
  1. Éviter les sarcasmes.
De façon idéale, l’humour devrait démontrer de nouvelles manières de résoudre les problèmes. L’humour peut également nous aider à mettre nos problèmes en perspective, sans détourner notre énergie pour les résoudre. Mais le sarcasme est de l’humour facile et bon marché qui n’accomplit aucun rôle.
L’humour met de l’huile dans les rouages de la vie. Lorsque nous perdons notre capacité de voir le côté comique de la vie, elle devient fastidieuse et morne. Le bon humour et le rire allègent les fardeaux de tous. Par contre, le sarcasme est de l’humour au détriment de quelqu’un d’autre et est rarement amusant. Il cause souvent de la mauvaise volonté chez les autres.
  1. Traiter un problème à la fois.
Ici le danger est double. Si nous faisons état de trop de problèmes à la fois, la conversation peut devenir si écrasante qu’une ou les deux parties se mettront sur la défensive et saboteront la discussion. D’autre part, la présence de plusieurs problèmes diluera la conversation, dans la mesure où aucun des problèmes ne sera réellement affronté et les sentiments sur la futilité de la discussion en sortiront renforcés.
  1. Être conscient des réactions non verbales.
La mâchoire contractée, le poing serré ou menaçant, les grimaces faciales, tout ceci nous transmet des messages. Le coup est l’équivalence non verbale du cri. Si vous atteignez ce stade, vous pouvez habituellement être certain que vous avez raté de nombreux messages subtils qui ont conduit à cette situation.
  1. Éviter d’interrompre.
Interrompre quelqu’un est la même chose que lui dire que nous n’écoutons pas. Lorsque vous avez l’envie d’interrompre, essayez de canaliser l’irrépressible impulsion en paraphrasant ce que la personne a dit. C’est plus poli et plus productif.
  1. Éviter de faire un cours.
Les gens ont tendance à devenir « sourds » lorsqu’un discours leur est adressé pendant trop longtemps. Laissez les beaux discours aux professeurs et aux politiciens.
  1. Éviter les arrière-pensées.
Toute communication devrait être honnête et ouverte. Les arrière-pensées devraient être évitées. Lorsqu’une personne tente délibérément d’amener la conversation là où elle le souhaite ou dans le but d’obtenir ce qu’elle veut dans une situation donnée, la communication devient malhonnête et créée de la suspicion et de la réserve chez les autres.
  1. Prendre le temps.
Durant une discussion, il arrive souvent que des personnes atteignent un stade où elles sont sur le point de dire quelque chose qu’elles regretteront. Si votre niveau d’adrénaline est élevé et votre cerveau s’échauffe, vous devriez vous retirer de la conversation et y revenir plus tard.

Quelquefois, les autres interlocuteurs ne permettent pas à une personne de se retirer de la discussion. Ils insistent sur le fait qu’il faut en parler « tout de suite ». Il est cependant important de comprendre qu’il est nécessaire d’attendre nos propres opportunités de communication. L’élément capital en se retirant dignement est que vous êtes disposé à réexaminer la question une fois que les esprits se seront apaisés.
  1. Ne pas dire « Je vous l’avais dit ! »
Personne n’aime recevoir la preuve qu’il a eu tort ou a été stupide.
  1. Prendre un rendez-vous pour parler des problèmes.
Il est judicieux de consacrer un moment particulier pour aborder les problèmes afin d’éviter d’en parler tout le temps.

Quelquefois, les couples sont tellement axés sur leurs problèmes que les deux conjoints ne prennent plus le temps de se divertir ou d’apprécier leurs qualités réciproques qui les ont incités à se marier : les problèmes commencent à dominer les conversations. Les seuls sujets de conversation deviennent la machine à laver, les pneus à changer sur la voiture, les trous dans la toiture, le budget et leur petit garçon Johnny qui mouille encore son lit. Ces discussions peuvent devenir très pénibles et écrasantes. Et bien qu’elles ne puissent pas être occultées, les relations ne peuvent pas s’épanouir si les problèmes sont en permanence en première ligne de mire.

Je recommande d’allouer un moment chaque semaine où les problèmes pourront être identifiés et abordés l’un après l’autre, et où la meilleure marche à suivre sera adoptée. Les problèmes devraient ensuite être mis de côté jusqu’au prochain rendez-vous programmé.

Enfin, souvenez-vous que si une personne a un problème de communication, vous avez tous les deux le problème – et il est contraire aux règles de dire à l’autre personne qu’elle enfreint ces règles.

Une approche contractuelle

La passation d’un accord est un autre élément efficace dans le cadre d’une stratégie de résolution interpersonnelle de problèmes. De façon négative, un accord peut être considéré comme un document antagoniste entre deux personnes qui ne se font pas confiance. Mais utilisé de façon positive, lorsque les parties ont une bonne attitude ou disposition et n’ont pas le désir de manipuler ou pinailler, un accord est un document très utile pour aider à clarifier les rôles et les attentes de chacun dans des situations non conflictuelles. Lorsqu’ils sont utilisés correctement, les accords assurent de la cohérence et de la prédictibilité dans les relations humaines.

La passation d’un accord dans le cadre des situations familiales peut considérablement réduire les discordes inhérentes aux relations interpersonnelles étroites. Mais je le répète, la qualité de l’accord est indissociable de la bonne attitude et disposition des parties concernées. Si une des parties décide de se montrer opaque, sournoise, rigide ou se plaint continuellement, l’accord ne fonctionnera pas. Effectivement, dans ces conditions, il peut devenir un instrument d’abus. Mais lorsque l’approche est faite avec un bon esprit et une attitude saine, lorsque toutes les parties concernées désirent succès et bonheur, les accords peuvent clarifier et contribuer à aplanir certaines des agitations courantes qui surgissent couramment dans les relations personnelles.

Les accords efficaces font généralement la distinction entre trois éléments majeurs : les droits, les privilèges et les règles.

Les droits sont quelque chose que nous avons en vertu du fait que nous sommes des êtres humains dans une société libre. Ils n’ont pas à être acquis ou justifiés. Dans la plupart des nations, les droits sont garantis par une constitution et ils ne peuvent pas être violés par la famille.

Les privilèges sont conférés à certaines personnes en vertu de leur statut, de leur bonne conduite ou de leurs accomplissements. Si une personne se montre indiscrète, ses privilèges peuvent lui être retirés. Dans le cadre d’un État, le permis de conduire est un privilège et non pas un droit. Au sein d’une famille, les privilèges comprennent des choses comme l’accès à une voiture et des possibilités de divertissement.

Une règle constitue une limite. Par exemple, dans votre pays, la vitesse de 40 km/h pourrait être la vitesse maximale à laquelle vous pouvez rouler en ville. Dans le cadre de la famille, les règles incluent généralement le respect de l’heure limite de la rentrée le soir, la durée et la fréquence des appels téléphoniques, les exigences en matière de travail et de tâches ménagères.

Quelques suggestions lors de la passation d’un accord :
  1. L’accord ne devra pas préciser les exigences pour une personne seulement. Pour que le document fonctionne, il devra s’adapter à toutes les parties. Alors que certains privilèges sont accordés selon l’âge et le statut, les parents devraient éviter d’établir des conditions qu’ils ne sont pas disposés à suivre eux-mêmes. Les parents invitent les problèmes lorsqu’ils attendent plus d’un enfant que d’eux-mêmes.
  2. Lors de la mise en œuvre d’accords, souvenez-vous : vivez dans l’esprit de la loi et ne vous faites pas prendre par la lettre de la loi. Par exemple, si un accord limite les appels téléphoniques personnels à trente minutes, ceci devrait être une ligne directrice générale et non pas quelque chose qui nécessite d’être mesuré avec un chronomètre.
  3. L’accord devrait être écrit de manière à ce qu’il s’applique à toutes les personnes du foyer, sans qu’aucune personne ne se sente particulièrement visée. La formulation devrait être choisie pour laisser entendre que « nous » ou « la famille » sont concernés, plutôt qu’une personne en particulier.
  4. Les récompenses et les conséquences devraient être explicitées. Les gens ont besoin de structures et veulent savoir à quoi s’attendre. Les sentiments doivent être clarifiés et gérés jusqu’au point où tous veulent faire fonctionner l’accord. Puis, la mise en œuvre de l’accord devra se faire avec amour afin que l’esprit de l’accord ne soit pas brisé.
Bien qu’il soit important de ne pas surcharger « l’esprit » de l’accord, les accords devraient être aussi spécifiques que possible. Plus ils sont spécifiques, plus ils seront faciles à respecter. Moins de différends surviendront si les parties ont rarement l’occasion de dire « ce point n’était pas clair ». Les accords clarifient les rôles et les fonctions, permettant ainsi d’anticiper les affrontements importants et, dans une certaine mesure, d’éviter des guerres qui aboutissent uniquement en des petites victoires.

La passation d’accords n’est pas exclusivement un instrument interpersonnel. Passer un accord avec soi-même peut également être productif. Chaque jour de l’an, les gens s’engagent à s’arrêter de fumer, de jurer ou d’agir de toute autre manière particulière. La plupart de ceux qui tiennent ces résolutions sont ceux qui utilisent un programme basé sur un exercice de clarification des valeurs.


La passation d’un accord est uniquement un outil à disposition de ceux qui recherchent des solutions aux discordes interpersonnelles et des façons d’aider ceux qu’ils aiment. Mais c’est un outil qui a deux avantages : il offre d’excellentes opportunités pour clarifier les préoccupations de chacun et il vise à un certain équilibre entre les récompenses et les responsabilités des parties concernées.

Enseigner efficacement des principes corrects

On nous a recommandé d’enseigner de bons principes et de laisser les personnes se gouverner elles-mêmes. Nous avons combattu dans les cieux pour le droit de nous gouverner nous-mêmes et nous exerçons maintenant ce droit ici-bas. Mais lorsque nous observons ceux qui sont en train de gâcher leur existence et celle des autres par l’exercice de leur libre arbitre, il est aisé de remettre en cause la sagesse de ce principe.

Je ne pense pas qu’il y ait quelque chose de plus frustrant que de devoir se retenir d’intervenir directement lorsque l’on voit quelqu’un qui choisit volontairement la voie de la destruction. Il y a des moments où une intervention peut être appropriée (comme dans certains cas d’addiction à des drogues ou à l’alcool), étant donné que ces personnes peuvent être en perte de contrôle et ne peuvent s’aider elles-mêmes. Néanmoins, ceci est l’exception et notre devoir principal reste d’enseigner des principes corrects, puis de laisser les gens se gouverner eux-mêmes.


Mais comment parvient-on à enseigner des principes corrects ? Quelquefois, nous enseignons très mal des principes corrects, en utilisant des tactiques immatures, voire brutales. Lorsque des parents explosent soudainement en un déluge de violences verbales ou physiques dirigé contre un enfant, ils apparaissent erratiques et incohérents. Au lieu d’enseigner des principes corrects, ces comportements enseignent seulement la peur, la colère et l’incohérence.

Après une tel déchaînement, la plupart des parents reconnaissent que le problème a surgi alors qu’ils étaient dans un état du moi Enfant ou Parent normatif. Mais cette seule prise de conscience n’aide habituellement pas à résoudre le problème. Ce n’est que lorsque les personnes sont ouvertes à la compréhension de la dynamique de l’enseignement et de l’apprentissage qu’elles seront en mesure d’interpréter leurs sentiments et de corriger leur comportement. Dans les moments où la colère et la frustration menacent de transformer une tentative d’enseignement ou la consolidation de bons principes en une guerre familiale, comment pouvez-vous négocier la paix ? Tout d’abord, vous devrez maîtriser votre état du moi Parent.

Alors qu’idéalement un parent devrait être un enseignant, le Parent normatif est par définition quelqu’un qui discipline. L’état du moi Parent est largement fondé sur des bons principes mais il souffre quelquefois d’une obsession écrasante du bien et du mal. Habituellement, l’état du moi Parent a raison sur le principe mais a tort en actions.

Il est possible d’atténuer le côté disciplinaire de l’état du moi Parent en l’aidant comme nous l’avons fait pour l’état du moi Parent normatif ordinaire. Tout d’abord, nous devons résister à la forte envie de chasser l’état du moi Parent disciplinaire. Permettez-moi d’utiliser un exemple : J’ai rencontré de nombreux mères et pères qui sont très reconnaissants et heureux d’avoir un conseiller détenteur de la prêtrise ou un évêque ou un instructeur qui leur dise « Laissez-moi vous aider à combler les problèmes de communication entre vous et votre fille ». D’autre part, j’ai également vu des dirigeants qui dans la même situation disent aux parents de laisser l’enfant tranquille et d’arrêter de faire ceci ou cela et qui essaient de prendre le contrôle. En réponse, les parents se mettent souvent sur la défensive et deviennent hostiles.

Nous devons traiter notre état du moi Parent disciplinaire comme un bon dirigeant traiterait les parents. Au lieu d’attaquer les parents, il s’assurerait qu’ils sachent qu’il est là pour les aider mais qu’il ne veut pas prendre la responsabilité de leurs enfants ni les supplanter. Il rassurerait les parents sur le bien-fondé de leurs principes et que son rôle consisterait uniquement à les aider à enseigner ces principes. Il ferait savoir aux parents combien il les comprend ainsi que les peurs et frustrations qu’ils ressentent. Si ceci est fait sincèrement, la menace est éloignée de l’état du moi Parent. Si nous sommes en mesure d’utiliser la même procédure avec notre état du moi Parent disciplinaire, nous serons plus susceptibles de développer des modèles de communication qui encourageront nos enfants au lieu de les décourager.

Étant donné que nous voulons enseigner et que l’enfant veut naturellement apprendre, s’il s’éloigne de nous, nous pouvons être certains que nos tactiques sont en cause. La chose la plus importante qu’un parent puisse faire est de protéger et d’encourager la curiosité, la croissance et le désir d’apprendre de l’enfant.


Un jour, mon fils de dix ans, Brock, était invité à la maison d’un de mes amis. Alors que mon ami essayait d’effectuer quelques tâches ménagères, Brock l’a harcelé de questions, telles que : « Qu’est-ce que ceci ? Comment ça marche ? Pourquoi en as-tu besoin ? » Finalement, mon ami étant fatigué de toutes ces questions, il répondit : « juste parce que. Voilà pourquoi ». Brock l’a regardé fixement et lui dit alors « Mon père dit que je ne peux pas apprendre avec des réponses en ‘parce que’. C’est juste que tu ne veux pas répondre à la question ». Mon ami, sachant qu’il s’était fait avoir, a souri.

Un parent a la responsabilité et le défi de prendre du temps et de faire des efforts pour enseigner, même lorsque c’est peu pratique. Quand nous saisissons les occasions d’enseigner, nous augmentons le désir de l’enfant d’apprendre. En tant qu’instructeurs de nous-mêmes et des autres, nous devons être attentifs à ces occasions d’enseignement productif – des moments où l’instructeur est prêt et l’élève est disposé. Il faut souvent un bon sens de l’observation, de la vigilance et une fondation de confiance mutuelle pour détecter ces occasions d’enseignement. Lorsque ces moments clés sont là, un bon instructeur est capable de partager, de manière positive et productive, ses pensées et commentaires les plus stimulants.

Le désir d’apprendre est l’un des facteurs de l’apprentissage ; la compréhension des choses en est un autre. Tout comme nos échecs inattendus peuvent rester une énigme pour nous-mêmes et les autres, nous pouvons également être perplexes ainsi que les autres au sujet de nos réussites imprévues. Pour la plupart d’entre nous, la compréhension des choses vient en posant les bonnes questions, bien qu’il soit vrai qu’elle n’est probablement pas une condition impérative pour réussir. Alors que la compréhension des choses n’est certainement pas requise pour dupliquer nos défaillances, il se pourrait bien qu’elle soit une condition primordiale pour dupliquer nos succès.

Un bon instructeur peut aider un étudiant volontaire à obtenir une meilleure compréhension. Malheureusement, comme tout professeur expérimenté peut en témoigner, les gens évitent souvent la compréhension et la connaissance (ayant laissé derrière eux l’empressement et l’honnêteté des jeunes enfants). La connaissance peut être un fardeau, comme Alma l’a remarqué lorsqu’il a demandé : « Et maintenant, n’est-il pas bien plus maudit, celui qui connait la volonté de Dieu et ne la fait pas, que celui qui croit seulement, ou qui a seulement lieu de croire, et tombe en transgression ? » (Alma 32:19). Nous pouvons croire sincèrement que Dieu veut nous voir tous progresser individuellement, tout en étant effrayés de découvrir la difficulté de la prochaine étape de notre progression.


Lorsque nous essayons d’enseigner de bons principes, nous devons nous souvenir que la connaissance apporte liberté et responsabilité – la libération de l’ignorance mais la responsabilité de réfléchir et d’agir à la lumière de cette connaissance. C’est la raison pour laquelle les professionnels de la santé mentale ne demande pas uniquement « Est-ce que cette personne a de la connaissance ? », mais aussi « Est-elle capable d’apprendre par expérience ? Est-ce qu’elle applique systématiquement ses connaissances ? »

La connaissance de la vérité ne peut nous libérer que si nous l’appliquons dans notre vie. Jésus a enseigné en paraboles de protéger du fardeau de trop de connaissances ceux qui n’ont pas un niveau spirituel leur permettant d’appliquer ses enseignements. Si nous insistons pour donner trop d’enseignements trop tôt à des enfants qui ne sont pas prêts ou capables d’appliquer ce qui leur est enseigné, il se pourrait que nous leur fassions du tort.


L’enseignement de principes corrects est un processus pas à pas qui requiert une bonne communication, de la patience et de la souffrance.
 
Il y aura souvent beaucoup de pleurs, de lamentations et de grincements de dents, aussi bien chez l’élève que chez le parent qui essaie de rester patient durant l’enseignement. Toute personne qui a côtoyé un ami ou un proche qui vient de subir une opération sait qu’à cause de la douleur, le malade peut être exigeant et égoïste. La douleur psychique entraîne les mêmes réactions. Nous devons être préparés à être patients et compréhensifs.

Lors de l’enseignement de bons principes, il est important d’éviter les jeux de guerre. Il n’y a pas de gagnant dans une guerre au sein d’une famille. J’ai vu trop de belles familles complètement déchirées parce que des individus se sont fait la guerre. La famille immédiate et élargie est frustrée et rendue amère par des questions accusatrices et égocentristes, telles que : « Ne penses-tu pas que les membres de la famille devraient se dire exactement où ils se trouvent ? », « Ne penses-tu pas que les gens devraient faire acte de fiabilité afin qu’on puisse leur faire confiance ? », « Les enfants ne devraient-ils pas respecter leurs parents ? », « Est-ce que les gens ne devraient pas rembourser ce qu’ils doivent ? »

De telles questions sont habituellement chargées de signification. Elles sont posées dans un esprit
négatif et aucune réponse ne peut être la bonne réponse qui amènera la paix dans une relation ou entre les individus concernés.

Je ne prends pas à la légère les valeurs et principes ci-dessus ; je veux simplement montrer que des principes formulés par des questions transforment un problème résoluble en une situation de crise, simplement parce que le problème est posé de manière subjective et rigide. Les différends familiaux deviennent des guerres. Au lieu de compréhension et d’effort de résolution, l’accent est mis sur la victoire. Ce sont la prudence, l’opacité, la fourberie, la suspicion, la colère et la surenchère qui l’emportent. Les guerres familiales, comme les guerres nucléaires n’ont pas de vainqueur.

La difficulté pour éliminer l’égocentrisme qui conduit à des guerres familiales est qu’il est la version extrême d’une auto-gouvernance saine et nécessaire. Il est crucial de se rappeler que le vrai objectif est que les personnes se gouvernent elles-mêmes, dans les familles et dans toutes les relations humaines.

Le Seigneur, connaissant les difficultés qui surgissent lors de l’enseignement de principes corrects, mais tout en nous laissant nous autogouverner, nous rappelle que ceci devrait être fait « … par la persuasion, par la longanimité, par la gentillesse et la douceur, et par l’amour sincère ; par la bonté et la connaissance pure » (D&A 121:41-42). Et ensuite vient un concept des plus importants pour faire face à toute forme d’opposition : « Réprimant avec vigueur en temps opportun, sous l’inspiration du Saint-Esprit ; et faisant preuve ensuite d’un redoublement d’amour envers celui que tu as réprimandé, de peur qu’il ne te considère comme son ennemi » (D&A 121:43, italiques ajoutés).

Je suis convaincu que beaucoup parmi nous « répriment avec vigueur » et je suis tout aussi convaincu que je ne suis pas le seul à avoir fait cela, sans l’inspiration du Saint-Esprit. La sorte de vigueur dont il est ici question n’a rien à voir avec de la dureté mais signifie une approche « ciblée ». Nous obtenons une image claire et nette lorsque le diaphragme de la caméra a la bonne ouverture. Nous obtenons un résultat positif si nous nous concentrons immédiatement sur le problème posé, refusons de l’ignorer ou de le laisser s’envenimer comme une ancienne blessure. Si nous suivons l’inspiration du Saint-Esprit, nous saurons quel genre de réprimande réglera la situation au lieu de l’entraver.

L’homme naturel ne montre pas un redoublement d’amour après avoir réprimandé une personne, il a tendance à la blesser et à porter atteinte à leur relation. Le verset trente-sept indique clairement que lorsque nous réprimandons sans
l’inspiration du Saint-Esprit – en d’autres termes, sous l’effet de la colère – « les cieux se retirent ; l’Esprit du Seigneur est attristé ». Alors, ceux que nous essayions d’enseigner nous perçoivent comme des ennemis. Il est important que les parents prient pour recevoir de l’aide et observent patiemment pour identifier ces moments d’enseignement propices au lieu d’imposer une « domination injuste » et des punitions à long terme qui causent du ressentiment et conduisent à davantage d’opposition et d’imbroglio.

Lorsque des jeunes ont recours à une guerre ouverte contre leurs parents et que les parents succombent à la tentation d’avoir recours à la force, tous finissent dans une situation de perdants. J’ai vu bien trop de cas de parents qui jouaient au chien de garde vigilant et au détective, renforçant de plus en plus les règles alors que les enfants devenaient de plus en plus retors, sournois et intrigants.

Vous pouvez donc vous demander s’il existe une manière efficace de contrôler les comportements dans les limites fixées par des principes corrects. Le contrôle des comportements passe par deux sortes de restrictions : externes et internes.

Les restrictions externes nous poussent à éviter de faire quelque chose par peur d’être attrapés. Par exemple, nous ne faisons pas de vol à l’étalage à cause des services de sécurité, des caméras et des miroirs d’observation. Cependant, si les restrictions externes sont les seules restrictions que nous ayons, nous finirons un jour par nous trouver dans une situation où nous aurons l’impression que personne ne nous observe et que nous pouvons donc agir sans nous faire attraper.

Ce sont les restrictions internes qui sont les vrais gardiens contre les écarts de conduite. Ces restrictions internes sont enracinées dans l’amour, l’estime de soi, l’autodiscipline, le respect, la conscience, l’honneur et le Saint-Esprit. Les parents avisés sont habiles à inculquer graduellement à leurs enfants des valeurs qui leur serviront de restrictions et les conduiront à vivre dans la joie.


Traiter avec des personnes qui ont des troubles oppositionnels

Il est difficile de s’entendre avec des personnes qui ont des troubles oppositionnels. Ils font souvent des choses qui les blessent eux-mêmes, uniquement par rancune ou méchanceté envers quelqu’un d’autre. Ces personnes génèrent en général de la suspicion, du ressentiment et de la colère chez ceux qui sont confrontés à leurs comportements.

Les personnes au comportement oppositionnel agissent souvent en mode passif-agressif, elles n’affrontent et n’attaquent pas ouvertement mais en secret. Des conjoints passifs-agressifs trouvent des manières détournées de blesser celui ou celle contre qui ils ressentent de la colère. Une épouse pourrait tout à fait, lors de ses emplettes, oublier volontairement d’acheter les choses qui feraient plaisir à son mari ou qui sont importantes pour lui. Le mari, à son tour, pourrait ne pas sortir la poubelle ou réparer la voiture si c’est ce que son épouse désirait. Il essaie ainsi de prendre sa revanche.

Avant l’âge de dix-huit ans, le diagnostic porte habituellement sur des troubles oppositionnels, plutôt qu’un comportement passif-agressif. Un jeune souffrant de troubles oppositionnels a des façons d’attaquer par derrière pour se venger de quelqu’un, mais en faisant cela il se fait souvent plus de mal à lui-même. Par exemple, un jeune peut fumer sur le parking de son école en se disant « si mes parents pouvaient me voir maintenant, ça leur apprendrait ! ». Ses parents ne peuvent pas le voir mais dans son esprit, ils le voient et sont blessés par son comportement. En fait, il se fait du mal à lui-même. Le plus grand danger de ce comportement est qu’il peut devenir un trait de personnalité passif-agressif.

Les personnes souffrant de troubles oppositionnels incitent souvent les autres à la confrontation. S’il y a une règle, ils essaient généralement de l’enfreindre. Si quelqu’un fait une suggestion, ils se prononcent contre. Si on leur demande de faire quelque chose, ils refusent. Si on leur demande de ne pas faire quelque chose, ils se sentent obligés de le faire. Paradoxalement, ces personnes ne se considèrent pas du tout dans l’opposition ; pour eux, le problème provient des demandes déraisonnables des autres. Cette situation cause habituellement plus de souffrance pour l’entourage que pour ces personnes elles-mêmes.

Il existe certaines façons de se protéger des personnes souffrant de troubles oppositionnels, et par la même occasion de les aider aussi. Dans les relations avec ces personnes, il y a seulement deux alternatives fondamentales. La première est de « patiner » (j’expliquerai ce terme dans un instant). Cette méthode est particulièrement utile lorsque des enfants ou des adolescents commencent à faire des remarques provocatrices, visant en particulier à dénigrer les valeurs de leurs parents. Ils ne sont pas intéressés en une opportunité d’apprentissage ; ils veulent juste provoquer et s’opposer à tout – au sujet de l’Église, à un de leurs parents, au sujet de leur maison, de leurs vêtements, du travail de leur père, etc.

Voici quelques exemples de provocations oppositionnelles :
  1. Nous aurions un meilleur style de vie si papa n’était pas aussi stupide.
  2. Un de mes amis à l’école m’a dit que Joseph Smith était un épileptique et qu’il n’était probablement qu’un malade mental.
  3. Quoi ? Que mes amis rencontrent mon père ? Vous me prenez pour qui ? Un imbécile ?
  4. Jean a le droit de sortir le soir aussi tard qu’il veut. Ses parents lui font confiance.
  5. Vous pouvez me forcer à aller à l’église mais je vais détester cela. Êtes-vous heureux à l’idée de me forcer à aller à l’église ?
  6. Le père de Jean n’a même pas fini ses études secondaires et pourtant regardez tout l’argent qu’il gagne !
Lorsque les jeunes font de tels commentaires, les parents doivent comprendre que leurs enfants essaient de se défaire de leur dépendance. Il est essentiel de ne pas pénétrer dans le ring de boxe avec eux lorsqu’ils se comportent ainsi. Il faut essayer de maintenir une relation aussi positive que possible avec eux pour éviter des disputes négatives et contreproductives.

Lorsque vous êtes incités à une dispute ou à une discussion intense alors que par expérience vous savez que cela ne mènera nulle part, « patinez ».

Les politiciens modernes ne prennent réellement position sur quoi que ce soit. Même lorsqu’ils sont harcelés ou provoqués par des gens sur un sujet, ils font du « patinage ». Si vous demandez à un politicien quelle est sa position sur les missiles MX, vous obtiendrez quelque chose du genre : « Certainement, nous ne pouvons faire abstraction de la défense nationale comme une de nos priorités mais nous devons prendre ceci en considération parmi de nombreux autres choix et essayer de prendre une décision rationnelle. Nous devons nous assurer que toutes nos priorités seront évaluées et dûment prises en considération ». Fondamentalement, le politicien a parlé pour ne rien dire.

Lorsque nous sommes face à quelqu’un que nous savons dans l’opposition, nous devrions nous aussi,
à ce moment-là, parler pour ne rien dire.

Il est difficile de ne pas mordre à l’appât et de ne pas succomber à la dispute que la personne dans l’opposition désire ardemment mais les dix commentaires et courtes phrases suivantes semblent adaptées pour « patiner » en éloignant la confrontation :

  1. Peu importe.
  2. Il semble qu’il y ait quelque sens en cela.
  3. C’est intéressant.
  4. Oui, effectivement c’est un problème/
  5. Ah oui !
  6. La réalité est souvent douloureuse.
  7. Oh, vraiment ?
  8. Merci d’avoir partagé cela avec nous.
  9. C’est une idée.
  10. C’est quelquefois compliqué.

Les personnes souffrant de troubles oppositionnels ont un esprit querelleur et rancunier. Peu importe la voie que vous choisirez de suivre, vous les trouverez du côté opposé. Vient un moment où la plupart des parents en arrivent à penser que l’écriture devrait être « Il y aura de l’opposition en toutes choses ». Tous les jeunes se battant pour leur indépendance auront à l’occasion quelques troubles oppositionnels. En fait, comme nous l’avons déjà souligné, ils ont besoin de s’affirmer personnellement et d’affirmer leur indépendance ; cependant, l’opposition ne devrait pas devenir leur seul mode de comportement. Nous pouvons les aider à éviter le tourbillon oppositionnel si nous ne cédons pas à la tentation de réagir à leurs incitations et pièges.

La deuxième alternative pour gérer des personnes ayant des troubles oppositionnels est plus complexe et requiert de la planification. L’expression psychologique pour cette méthode est « l’intention paradoxale », plus connue sous le nom de « psychologie inversée ».

J’ai utilisé cette technique avec un de mes fils lorsqu’il avait quinze ans et était dans un état constant d'opposition. Mon épouse et moi-même avions parlé depuis quelque temps de l’envoyer faire de la cueillette d’ananas à Hawaï. Nous pensions que ce serait une bonne expérience éducative pour lui et une bonne pause pour la famille. Un jour, mon épouse m’a appelé pour me dire que notre fils était en possession de brochures sur le travail dans les champs d’ananas et qu’il avait l’intention de m’en parler ce soir-là. Étant conscient de l’état d'opposion de mon fils, j’ai tiré avantage de l’avertissement de mon épouse et ai réfléchi à la situation.

Ce soir-là en entrant, il a déposé les brochures devant moi, et dit « Que penses-tu de cela ? » Je les ai examinées un moment et lui ai annoncé calmement que j’avais entendu parler de ce programme et avais de sérieuses réserves à son sujet. « Et quoi, qu’est-ce qui cloche ? » a-t-il demandé. Je lui ai dit que ça pourrait perturber la continuité de la vie familiale. Il a argumenté que ça rapprocherait la famille. Je lui ai fait remarquer que l’argent qu’il gagnerait serait certainement dilapidé. Il m’a assuré que la ferme appliquait une discipline qui forçait littéralement les jeunes à économiser leur argent. J’ai mentionné que la plupart des jeunes quittaient la ferme au bout d’une semaine ou deux. Il m’a répondu que cela ne lui arriverait jamais. Nous avons continué dans ce sens pendant quelque temps jusqu’à ce qu’il se soit convaincu lui-même de ce programme.


Rappelez-vous : l’intention paradoxale ne fonctionne que dans des cas isolés, lorsque le jeune n’est pas au courant de vos opinions sur un sujet et que vous avez eu du temps pour bien réfléchir à la situation.

En règle générale, il vaut mieux gérer les personnes au comportement d'opposition en « patinant ». Le but est de rester en dehors du terrain de combat où des progrès sont rarement atteints. Essayez d’éviter que vos sentiments prennent le dessus sur votre bon jugement. Éviter une dispute avec une personne à comportement oppositionnel signifie éviter de lui laisser prendre le contrôle ; passez à côté de l’appât et attendez une meilleure opportunité pour enseigner car en état d’opposition, personne n’apprend grand-chose.

Pour pouvoir apprendre, les personnes doivent être disposées à accepter des critiques. Mais lorsqu’elles sont en état d’opposition, leur unique tendance est la défensive. Si nous adoptons une approche douce avec nos enfants, il y aura des moments opportuns où nous pourrons leur glisser nos principes et faire connaître nos opinions.

Les bons instructeurs comprennent que le monde en dehors de leur classe n’est pas fait de vide mais les parents oublient quelquefois qu’ils ne sont pas la seule variable dans la vie de leurs enfants. Nos enfants ont de nombreux contacts que peu de parents peuvent contrôler. Nous n’avons pas le contrôle sur les enseignants de nos enfants, sur les dirigeants des jeunes, sur les amis du quartier ou les copains de classe. Il est important de comprendre qu’à cause de ces diverses influences, beaucoup d’enfants s’éloignent de l’Évangile un certain temps. Très souvent, s’ils ont reçu l’enseignement de principes corrects, ils reviendront.

Néanmoins, certains enfants semblent avoir depuis la plus tendre enfance une intention délibérée de désobéir aux règles et de ne pas suivre ce qui leur a été enseigné. J’ai rencontré de nombreux parents affligés qui venaient me voir avec des sentiments d’incompétence et une culpabilité totale. Compte tenu de la réalité du libre arbitre, il n’est pas sensé de se blâmer soi-même totalement pour les agissements d’un enfant. Cette attitude pourrait entraîner la dépression ou des sentiments d’échec.

Beaucoup de personnes ont mené une vie bonne et juste et ont fait du bon travail en tant que parents. Et malgré cela, leurs enfants se sont égarés. Mais Père céleste et Mère céleste ont perdu un tiers de leurs enfants. Même leur amour parfait n’a pas suffi à les garder sur la bonne voie. Ils en ont perdu un tiers à cause d’une différence philosophique sur la question du libre arbitre, Satan, cet esprit beau parleur, ayant convaincu beaucoup que le risque était trop important.

Influencer les autres

Lorsque nous voyons des personnes qui durant leur enfance ont souffert d’un appauvrissement émotionnel ou ont eu de très mauvais modèles adultes et qui pourtant semblent très bien s’en sortir dans la vie, nous devons nous poser la question pourquoi. Une explication pourrait être qu’ils ont apporté ces tendances de leur vie prémortelle. Mais invariablement dans de tels cas, nous pouvons trouver une ou deux autres personnes externes d’importance qui les ont influencées positivement. Un jeune se dit en lui-même : « Je veux être comme cet instructeur, cet évêque ou ce conseiller ».

Lorsque nous examinons nos relations avec les personnes qui ont eu une influence dans notre vie et nous ont aidés à forger nos convictions sur nous-mêmes et sur la vie en général, nous distinguons quatre variables principales qui ont eu un impact sur leur influence : la fréquence, la durée, l’intensité et le désir de changer. La fréquence d’association est importante et probablement la plus significative. Si une personne a des contacts fréquents avec une autre, la probabilité d’un impact ou d’une influence majeure augmente considérablement.

L’intensité est le second élément le plus déterminant. Je pense que le niveau d’énergie, les liens et l’identification avec l’autre sont en fait les facteurs les plus importants dans la relation avec l’autre. La plupart d’entre nous peuvent citer des personnes que nous connaissons depuis de nombreuses années et que nous voyons peut-être très fréquemment mais avec qui l’identification et le flux d’énergie ne sont tout simplement pas là. Parmi toutes les variables, l’intensité est celle qui va le plus loin dans la description de la qualité de la relation.

Pour utiliser un exemple dans l’Église, les dirigeants des jeunes sont habituellement choisis parmi ceux qu’on estime pouvoir être de bons modèles de rôle auxquels les jeunes pourront s’identifier. Ceci a quelquefois causé des problèmes à certains parents dont les enfants chantent constamment les louanges d’un conseiller. Assurément, nous en tant que parents serions sages de reconnaître nos sentiments de jalousie, de constater les grands avantages de modèles de rôle positifs dans la vie de nos enfants et pour finir d’admettre que durant certaines phases de la vie, il n’est pas « à la mode » de s’identifier à un parent.

Mes parents sont décédés lorsque j’étais très jeune et j’ai donc grandi dans une famille d’accueil. Un jour quand j’avais quinze ans, en rentrant à la maison j’ai trouvé toutes mes affaires emballées. On m’a dit que j’allais aménager ailleurs. Je n’étais pas très actif dans l’Église mais dans mon désarroi, j’ai ressenti que je pouvais avoir confiance dans les dirigeants de l’Église.

Je suis allé voir mon évêque, Lyle Peterson, qui après avoir entendu mon histoire est devenu mon tuteur légal. Je ne pouvais pas loger chez lui car il avait déjà une grande famille mais à partir de cet instant, je fus considéré comme un de ses fils et il supervisa et dirigea ma garde. Il devint si important pour moi que je modelais une grande partie de ma vie sur lui. C’était un homme très occupé et très souvent absent. Mais bien que la fréquence de nos rencontres ait été moindre, l’énergie, l’identification et le modèle de rôle étaient puissants et ont eu un impact significatif sur ma vie. Je lui serai toujours reconnaissant ainsi qu’à sa famille pour ce qu’ils ont fait à mon égard et de toute l’attention qu’ils m’ont apportée.


La troisième variable est la durée. Sans surprise, si nous côtoyons quelqu’un depuis longtemps, la probabilité de l’influencer est plus importante. Combien de fois avons-nous constaté qu’un homme et une femme mariés depuis de nombreuses années semblent avoir de nombreuses similitudes ?
Et finalement, le désir de changer est la variable la plus déterminante. J’aime beaucoup l’illustration suivante de ce point :

Question : Il faut combien de psychologues pour remplacer une ampoule électrique ? Réponse : Seulement un mais l’ampoule électrique doit vraiment vouloir changer.

J’ai déjà parlé de ma conviction que nous choisissons certains de nos propres modèles auxquels s’identifier. Cependant, il existe de nombreuses possibilités d’aider quelqu’un dans le processus de changement, même si cette aide n’est qu’une clarification d’options. Pour certains, seule une crise peut déclencher un changement. Une de mes plus belles expériences dans le champ de la mission en Suède en est l’exemple.

Mon compagnon et moi-même avons commencé à enseigner un homme qui était sévèrement alcoolique. Il était célibataire et se terrait souvent dans son appartement sale. En lui enseignant l’Évangile, nous lui avons montré d’autres nouvelles options de vie. Il s’est fait baptiser juste avant mon transfert vers une autre ville. Six mois plus tard, je suis retourné dans la ville où vivait cet homme. Quand je l’ai rencontré, je ne l’ai pas reconnu jusqu’à ce qu’il me prenne dans ses bras et m’étreigne. Les symptômes familiers de l’alcoolisme avaient disparu. Il était enjoué et entouré d’amis. Il avait choisi un tout autre nouveau style de vie. Le changement était de son propre fait. La seule chose que nous ayons faite a été de lui présenter un nouveau mode de vie qu’il ne connaissait pas. Il avait fait le reste car son désir de changer était suffisamment important.

Quand est-ce qu’aider est utile ?

Le Seigneur nous commande de nous tourner vers les autres. Cependant, la vraie question que nous devons nous poser lorsque nous aidons quelqu’un, que ce soit nos enfants ou d’autres personnes, est de savoir quelle doit être l’envergure de notre aide.

Il arrive souvent que nous favorisions la continuation de comportements inappropriés en apportant à des personnes trop de soutien, d’aide et d’attention. Il est possible de se fourrer dans une situation qui n’est pas la nôtre et de résoudre les problèmes des autres de telle manière qu’ils demeurent dans leur faiblesse. J’ai vu des personnes qui ont été secourues à un tel point qu’elles en sont littéralement handicapées. Même le programme de l’entraide de l’Église qui est merveilleux lorsqu’il est mis en place correctement, n’est pas à l’abri de ce problème.

Nous devons nous rappeler que la dépendance engendre l’hostilité. Chaque fois que des gens deviennent trop dépendants, que ce soit physiquement, émotionnellement ou financièrement, ils finissent par devenir hostiles. Cette hostilité s’adresse à ceux dont ils dépendent le plus.

Si nous examinons le cas des pays que l’Amérique a laissé devenir trop dépendants et assistés, nous remarquons que ce sont ceux qui nous en veulent le plus et qui manifestent souvent dans les rues contre nous. Nous, Américains, sommes très fâchés et en colère contre ces pays mais il faut que nous réalisions que nous avons créé une dépendance qui s’est transformée en hostilité et qui revient maintenant nous hanter. En tant que parents ou conseillers thérapeutiques, nous devons comprendre que si nous créons une trop grande dépendance chez nos enfants ou nos patients, cela finira par nous blesser ainsi que ceux-là même que nous essayons d’aider.

Pour éviter la création de dépendances, regardons trois phases d’approche avec les personnes : intervention, évaluation et thérapie. Ces trois phases ne sont pas complètement distinctes mais chacune a des caractéristiques uniques.

La phase de l’intervention, étape initiale du démarrage de la procédure d’aide, peut engendrer des sentiments mitigés ou paradoxaux. Par exemple, une femme peut apprécier l’aide consentie par l’évêque ou les repas que la présidente de la Société de Secours lui apporte mais elle peut en même temps se sentir embarrassée ou en colère de son incapacité de faire de même. Ce niveau de service est habituellement mis en place sur une courte durée de temps et dans le cadre de la gestion d’une crise immédiate. Durant cette période, la dynamique qui se dégage de l’intervention pourrait bien donner le ton aux interactions à suivre.

Dans des cas extrêmes, il est nécessaire à ce niveau de l’intervention que la personne qui intervienne trouve le courage d’être très directe. Les services de protection ou certaines circonstances juridiques pourraient avoir la préséance sur la bonne communication et la sauvegarde de la dignité de la personne. Bien qu’il soit important d’essayer de préserver les relations et le respect de l’autre, la vie et la protection des personnes sont prioritaires.

L’évaluation est la phase où nous explorons toutes les options essentielles des différents recours et ressources thérapeutiques vers qui la personne ayant besoin d’aide peut se tourner. Malheureusement, certains ne veulent que des mesures d’intervention temporaire et tentent de résister à toute voie qui pourrait faciliter un changement permanent. Ces situations sont des cauchemars pour les évêques et autres dirigeants de paroisses, ainsi que pour leurs conseillers. L’évaluation nous aide à déterminer si une personne ne veut qu’un pansement ou si elle recherche vraiment un changement permanent.

La phase thérapeutique a lieu si et lorsque la personne s’oriente vers un changement. Cette phase passe par l’établissement d’objectifs qui seront suivis activement. Ce n’est qu’à ce moment-là que les personnes sont véritablement en mesure de mettre en place une orientation tangible pour modifier leur façon de penser et d’agir.

La phase thérapeutique est également la source des dilemmes les plus complexes de la procédure d’aide aux autres. Primordialement, il faut aborder la question de comment aider quelqu’un sans augmenter sa dépendance. La dépendance commence à partir du jour de la conception mais il faut la limiter.

Avez-vous déjà observé l’éclosion d’un œuf de poule ? C’est un processus horrible. Le poussin doit donner des coups de bec, gratter et pousser avec ses ailes pour émerger de la coquille. Lorsqu’il parvient enfin à sortir, son état est tel qu’il semblerait préférable qu’il soit mort. Notre tendance naturelle nous pousserait à casser l’œuf pour aider le poussin dans sa bataille. Mais si nous le faisons, le poussin mourra probablement. La bataille pour se libérer de la coquille est une des choses qui rend le poussin suffisamment fort pour vivre. Sans cette force ainsi acquise, le poussin pourrait être trop faible et se faire tuer à coups de becs par les autres poulets. De la même façon, les gens doivent se battre contre les dépendances et doivent être autorisés à mener certains de leurs propres combats afin de gagner en force.


La nature des relations que les patients entretiennent avec leurs thérapeutes favorise souvent la dépendance. Les amis et les enseignants peuvent assurément avoir le même effet. Cependant, la création d’une relation de dépendance se produit lorsque des personnes tentent de contrôler les autres, l’hostilité étant le résultat inévitable qui en découle. Même dans les cas où la personne s’épanouit dans la dépendance et semble y trouver du plaisir, il existe un degré d’hostilité sous-jacente. Cette hostilité peut se manifester par des problèmes somatiques, comme des troubles gastro-intestinaux, un ulcère, des maux de tête ou de la tension. Mais elle peut aussi se manifester par un comportement passif-agressif. Peu importe la forme qu’elle prend, l’hostilité est bien là et elle sera manifeste.

L’hostilité provenant d’une relation de dépendance se manifeste souvent par une sorte de mécontentement silencieux de la personne, dirigé vers elle-même ou envers ceux dont elle dépend. Malheureusement, ce mécontentement ne faiblira pas nécessairement alors que nous essayons de réduire le niveau de la dépendance. Dans le cadre de l’entraide, les dirigeants de l’Église voient beaucoup de personnes qui se mettent en colère et s’énervent parce que leur dépendance à l’égard de l’Église dure depuis trop longtemps. Et pourtant, leur colère peut encore augmenter lorsque l’évêque les encourage à s’investir pour obtenir un emploi.

Certains d’entre vous pourraient trouver étrange que dans un chapitre sur le thème « Aider les autres » j’ai beaucoup écrit sur les dangers d’apporter une aide inappropriée. Je suis persuadé que la capacité de tendre la main aux autres est vitale pour notre salut. J’ai insisté sur la question de la dépendance car notre capacité à apporter de l’aide sans créer de situation de dépendance est tout aussi vitale pour notre salut. Nous devons tous apprendre comment aider les autres de manière à ce qu’ils acquièrent l’indépendance nécessaire pour avoir de la joie dans la vie.

Pour éviter la création d’une relation de dépendance chez les personnes que nous aidons, nous devons apprendre à lâcher prise de tout contrôle malsain. Il faut faire preuve de sensibilité et de compréhension pour savoir quand et comment aider. Peut-être que les recommandations ci-dessous nous aideront à comprendre quand et comment lâcher prise avec nos enfants et ceux que nous essayons d’aider :

Lâcher Prise

LÂCHER PRISE ne veut pas dire cesser d’être concerné,
Cela veut dire que je dois arrêter d’assumer les responsabilités de quelqu’un d’autre.

LÂCHER PRISE ne veut pas dire me couper des autres,
C’est comprendre que je ne peux pas contrôler les autres.

LÂCHER PRISE, ce n’est pas tout permettre aux autres,
Mais leur permettre de tirer des enseignements par des conséquences logiques.

LÂCHER PRISE, ce n’est pas essayer de changer l’autre ni le blâmer,
Car je ne peux que changer moi-même.

LÂCHER PRISE, ce n’est pas s’occuper de l’autre,
Mais d’y porter attention.

LÂCHER PRISE, ce n’est pas arranger les choses,
Mais offrir son soutien.

LÂCHER PRISE, ce n’est pas se mettre au centre pour tout organiser,
Mais c’est rester en marge et encourager.

LÂCHER PRISE, ce n’est pas protéger l’autre,
Mais lui permettre de faire face à la réalité.

LÂCHER PRISE, ce n’est pas être dans le déni,
Mais être dans l’acceptation.

LÂCHER PRISE, ce n’est ni harceler, ni critiquer ou argumenter,
Mais rechercher mes propres faiblesses et les corriger.

LÂCHER PRISE, ce n’est pas adapter tout ce qui m’entoure à mes souhaits,
Mais accueillir chaque jour comme il vient et chérir l’instant présent.

LÂCHER PRISE, ce n’est pas critiquer ou réglementer les autres,
Mais c’est être ce que je peux devenir.

LÂCHER PRISE, ce n’est pas regretter le passé,
Mais grandir et vivre pour le futur.

LÂCHER PRISE, c’est parfois admettre mon impuissance,
Ce qui signifie que le dénouement ne dépend pas uniquement de moi.

LÂCHER PRISE, c’est avoir moins peur,
Et aimer davantage.

En ce qui me concerne, le chemin de vie devient plus facile en me souvenant simplement de l’importance du LÂCHER PRISE.

Auteur inconnu

Ce poème est également porteur d’un message important :

La pointe de l’aube [il s’agit ici d’un extrait retravaillé en langue anglaise, inspiré du poème de Jorge Luis Borgès « Apprendiendo », traduit en français sous le titre « Tu apprendras la vie », ndt]

Après quelque temps tu apprendras la différence subtile
Entre tendre la main et enchaîner une âme,
Et tu apprendras qu’aimer ne signifie pas s’appuyer
Et que compagnie ne signifie pas toujours sécurité.
Tu commenceras à apprendre que les baisers ne sont pas des contrats,
Ni les cadeaux des promesses.
Tu commenceras à accepter tes échecs,
La tête et le regard hauts, avec la dignité d’un adulte,
Et non avec la tristesse d’un enfant.
Et tu apprendras à construire aujourd’hui tes chemins
Parce que le terrain de demain est incertain
Et ne garantit pas la réalisation des projets,
Et que le futur a l’habitude de ne pas tenir ses promesses.
Après un certain temps, tu apprendras que le soleil brûle
Si tu t’y exposes trop.
Tu dois cultiver ton propre jardin,
Et décorer ton âme,
Au lieu d’attendre que les autres
Te portent des fleurs.
Alors, et alors seulement, tu sauras ce que tu peux réellement endurer,
Que tu es vraiment fort,
Et que tu as réellement de la valeur.
Et tu apprends, et tu apprends…
Avec chaque adieu,
Tu apprends.

Auteur inconnu


Chapitre 10 : Atteindre un équilibre pondéré

Reinhold Niebuhr a écrit :

« Mon Dieu donne-moi la sérénité d’accepter les choses que je ne peux changer, le courage de changer les choses que je peux et la sagesse d’en connaître la différence.
Vivre un jour à la fois ; profiter de chaque moment,
Accepter les difficultés qui font partie de la route vers la paix.
Accepter, comme Jésus, le monde avec ses péchés tel qu’il est et non comme je le voudrais,
Avoir confiance qu’Il s’occupera de tout si je lui confie ma volonté́,
Que je serai raisonnablement heureux dans cette vie et absolument heureux avec Lui dans l’autre.
Amen. »

Je suis convaincu que le principe fondamental de la bonne santé mentale est de trouver un équilibre pondéré parmi les exigences de la vie. La bonne santé mentale est obtenue par le maintien d’un équilibre dans notre vie et dans nos relations. Il s’agit d’un processus, et non d’un statut. La plupart des gens estiment que préserver leur santé mentale est un défi permanent tout au long de leur vie.

Les adultes en bonne santé s’efforcent d’équilibrer le travail avec les divertissements et d’assumer en même temps d’autres responsabilités. Un adulte en bonne santé est semblable à une maison bien construite où de nombreux piliers assurent les systèmes de soutien. Si un des piliers devait faillir, les autres seraient en mesure d’absorber l’excès de contrainte. Cependant, il arrive souvent que lorsqu’un pilier lâche, la personne se décourage et abdique totalement.

Par exemple, si un jeune homme qui aimait le tennis se blesse au bras et ne peut plus jouer, il peut être tenté d’arrêter de voir ses amis, d’éviter d’aller à des matchs de tennis et même de stopper sa participation à toute autre activité. Un thérapeute l’encouragerait à s’appuyer un temps sur d’autres piliers, que ce soit sa religion ou des activités familiales et de se mettre à marcher ou faire tout autre chose qu’il puisse accomplir avec un bras accidenté.


En ce qui me concerne, le travail, la famille, la religion et les divertissements sont tous des piliers vitaux dans ma vie. Mais si l’un d’entre eux devait faillir, j’espère que je m’appuierais un peu plus sur les autres. Par exemple, si je devais perdre mon épouse, plutôt qu’abandonner mon implication dans l’église ou les activités familiales, je devrais être encouragé à m’appuyer plus fortement sur mon église et ma famille.

Une des conditions préalables pour parvenir à un équilibre dans la vie est d’avoir le sens des priorités. Nous devons comprendre la différence entre les piliers et couvrir nos systèmes de soutien de panneaux. Il y a très peu de choses dont nous avons réellement besoin dans la vie et très peu de choses que nous devons réellement faire. Notre liste de désirs est énorme mais la liste de nécessités est courte. C’est une simple question de perceptions et d’attitudes.

Un problème courant à mes yeux est de voir des gens qui se sentent totalement débordés en essayant de bien faire pour tout le monde et qui oublient de prendre du temps pour eux-mêmes. Je rencontre un grand nombre de personnes en colère et pleines de rancune qui disent « Je n’ai pas de temps libre pour moi. Tout mon temps est pris par les autres ». La rancune engendre de l’hostilité silencieuse. Si ces personnes arrivent à faire quelque chose pour elles-mêmes, elles se sentiront coupables et se puniront pour cela.

La privation et la culpabilité ne sont tout simplement pas en harmonie avec le but fondamental que Dieu a fixé pour nous : « Les hommes sont pour avoir la joie ». Par conséquent, nous devrions considérer le maintien d’un équilibre dans la vie qui nous permette de ressentir de la joie comme une tâche prioritaire – mais c’est une tâche impressionnante, aussi complexe à reconnaître qu’à accomplir.

Par exemple, je connais un homme qui est un mari et père incroyablement dévoué. Lorsque ses connaissances apprennent qu’il refuse de travailler au-delà de dix-sept heures en fin de journée parce qu’il veut prendre ses repas en famille, elles sont généralement impressionnées. Cependant, ce qu’elles ne réalisent pas, est que cet homme est souvent aidé par l’entraide de l’Église. Dans un monde économique exigeant, la flexibilité est essentielle pour assurer et maintenir un bon équilibre.

Comme beaucoup d’autres, j’ai trouvé une grande inspiration dans les pensées suivantes :

Si je devais recommencer ma vie


« Si je devais recommencer ma vie, j’oserais commettre davantage d'erreurs. Je garderais mon calme. Je me détendrais. Je ferais plus de folies que je n'en ai faites cette fois-ci. Il y a peu de choses que je prendrais au sérieux. Je prendrais plus de risques. Je vivrais moins sainement. Je gravirais davantage de montagnes et je nagerais dans un plus grand nombre de rivières et j’admirerais plus de couchers de soleil. Je mangerais plus de glaces et moins de haricots. J'aurais peut-être davantage de maladies réelles mais certainement moins de maladies imaginaires…

« Si je devais recommencer ma vie, j’irais en différents endroits et ferais des tas de choses. Je voyagerais plus léger que ce que je l’ai fait cette fois-ci. Si je devais revivre ma vie, je me promènerais pieds nus plus tôt au printemps et jusque tard en automne. Je ferais l’école buissonnière plus souvent. Je n’aurais pas d’aussi bonnes notes, sauf par accident. Je monterais plus souvent sur des manèges. J'irais plus souvent cueillir des marguerites. »

Nadine Stair
(âgée de quatre-vingt-cinq ans au moment d'écrire ce texte)

L’aptitude à distinguer entre les besoins et les désirs est un élément essentiel au maintien d’un bon équilibre. Une fois que vous aurez identifié vos besoins réels, c’est une attitude très saine que de dévouer du temps, de l’énergie et des ressources pour les satisfaire. Il est tout aussi important de soigner les relations les plus précieuses à votre bien-être, en particulier la relation avec vous-même.

Dans mon bureau j’ai un mobile – une de ces structures suspendues avec un poids central qui maintient l’ensemble en équilibre. Le poids en bas du mobile équilibre les objets (oiseaux, avions, etc.) qui tournent au-dessus de lui. J’utilise l’image du mobile pour suggérer aux gens qu’ils ont, dans leur propre identité, tout un environnement de relations : leur conjoint, leurs enfants, leurs beaux-parents… et ils ont une relation avec Dieu. La relation la plus importante est celle qu’ils ont avec eux-mêmes. Le mobile démontre ceci visuellement lorsque l’objet du bas est comparé à la relation avec soi-même.

Si le poids à la base du mobile est perturbé, tous les autres objets perdent rapidement leur équilibre et sont alors ballotés. De la même façon, si la relation avec soi-même n’est pas équilibrée, toutes les autres relations de la personne risquent également d’être déséquilibrées. La bonne santé mentale est un exercice d’équilibre – un exercice qui mérite d’être appris si nous voulons avoir de la joie dans cette vie.


Conclusion : Être réel

Dans votre quête du bonheur, ou quel que soit ce que vous recherchez, ne laissez pas de côté la recherche de la connaissance de vous-même. Vous êtes la réalisation la plus précieuse et la plus belle de Dieu et vous avez été créé pour avoir de la joie.

Les progrès et le changement prennent beaucoup de temps et d’effort mais vous pouvez apprendre et choisir de penser, sentir et agir différemment. Vous pouvez progresser régulièrement et parvenir à une cohérence de plus en plus grande avec votre moi spirituel, ce que l’on peut qualifier de « devenir réel ».

L’extrait suivant, tiré d’un livre pour enfants, est un bon résumé de ce que j’ai essayé de présenter dans ces pages. Il m’est précieux et j’espère qu’il vous parlera aussi.

– « C’est quoi être réel ? » demanda un jour le lapin de velours.
Ils étaient allongés par terre, près du coffre à jouets. Nana allait bientôt entrer pour ranger la chambre.
– « Est-ce que ça veut dire se mettre à vibrer quand quelqu’un appuie sur notre bouton ?
– « Non, répondit le cheval de cuir. D’abord, on n’est pas réel, on le devient. Quand un enfant t’aime, très, très longtemps, pas seulement pour jouer, non, mais quand il t’aime réellement, alors tu deviens réel.
– « Est-ce que ça fait mal ? demanda le lapin.
– « Parfois, répondit le cheval qui disait toujours la vérité. Mais quand tu es réel, ça ne te dérange pas qu’on te fasse mal.
– « Est-ce que ça arrive en une fois, comme d’être remonté, ou est-ce ça vient petit à petit ?
– « Non, ça n’arrive pas tout d’un coup dit le cheval de cuir. Tu le deviens. Ça prend beaucoup de temps. C’est d’ailleurs pour ça que ça n’arrive pas à ceux qui se cassent facilement ou qui ont des angles pointus, ou alors à ceux qu’on doit traiter avec précaution. En général, le temps que tu deviennes réel, presque tous tes poils ont été usés d’amour, tes yeux tombent, il y a du jeu dans tes articulations et tu es très défraîchi. Mais peu importe, car quand tu es réel, tu ne peux pas être moche, enfin à part pour les gens qui ne comprennent rien.
- « Je suppose que tu es réel ? dit le lapin. Aussitôt il regretta ce qu’il venait de dire, le cheval de cuir était peut-être susceptible, pensa-t-il. Mais le cheval de cuir se contenta de sourire.
- « L’oncle du petit garçon m’a rendu réel, dit-il. C’était il y a bien longtemps ; mais une fois que tu es réel, tu ne peux plus devenir irréel. C’est pour toujours. »

Margery Williams (Tiré du conte classique « Le lapin de velours » ou comment les jouets peuvent devenir réels)


Index des adjectifs et expressions descriptifs


actif

affectueux

agité

agressif

aimable

aimant

aléatoire

alerte

altruiste

ambitieux

amer

amical

amusant

anxieux

apathique

apitoyé

arrogant

artistique

assertif

astucieux

attentionné

attractif

atypique

audacieux

austère

auto-punissant

autoritaire

avare

avide

avisé

bavard

beau

belliqueux

bien élevé

bienveillant

bon

borné

boudeur

bouffon

bruyant

calme

capable

capricieux

capricieux

cervelle d'oiseau

chaleureux

charmant

circonspect

civilisé

clair

comique

compliqué

compliqué

compréhensif

confiant

confus

consciencieux

conservateur

constant

contradictoire

conventionnel

coopératif

coriace

courageux

craintif

crâneur

creux

crispé

critique

cruel

curieux

cynique

débrouillard

décent

déconcerté

décontracté

découragé

défensif

dépendant

désagréable

désinhibé

désintéressé

désobligeant

désordonné

détendu

déterminé

difficile

diplomate

discret

distant

distrait

docile

dominant

doué

douteux

doux

drôle

dur

économe

efféminé

efficace

égocentrique

égoïste

émotionnel

énergique

enfantin

enjoué

entêté

enthousiaste

entreprenant

équilibré

espiègle

évasif

excitable

exigeant

extraverti

faible

farfelu

farouche

fiable

fin

flegmatique

flexible

formel

fort

franc

frivole

froid

gai

gênant

généreux

gentil

glacial

grossier

hâtif

honnête

hostile

idéaliste

imaginatif

immature

impassible

impatient

impoli

imprévisible

imprudent

impulsif

indélicat

indépendant

indifférent

individualiste

indulgent

industrieux

influençable

informel

ingénieux

ingrat

inhabituel

inhibé

Inquiet

insatisfait


insensé

insensible

insouciant

instable

intact

intelligent

intéressé

interrogateur

intolérant

intrigant

introverti

inventif

irréaliste

irresponsable

irritable

joli

jouisseur

joyeux

judicieux

juste

lâche

lent

libre

logique

loquace

louangeant

loyal

lucide

lunatique

maîtrisé

maladroit

malin

masculin

mature

méchant

méfiant

mesquin

méthodique

minutieux

modeste

morne

morose

mou

narcissique

naturel

naturel

négligent

nerveux

odieux

opportuniste

optimiste

organisé

original

original

osé

ouvert

pacifique

paisible

paresseux

partial

patient

pensif

persévérant

persistant

pertinent

pessimiste

peu ambitieux

peu scrupuleux

peureux

plaisant

pleurnichard

pointilleux

pratique

précis

préoccupé

pressé

prétentieux

prévenant

prévoyant

progressiste

prudent

querelleur

raffiné

raisonnable

râleur

rapide

rationnel

réaliste

rebelle

reconnaissant

réfléchi

renfermé

renonçant

réservé

responsable

rigide

rigoureux

robuste

rusé

sage

sain

sarcastique

satisfait

sauvage

se plaignant

sensible

sentimental

sérieux

serviable

sévère

sexy

silencieux

simple

sincère

snob

sociable

songeur

sophistiqué

soumis

soupçonneux

sournois

spirituel

spontané

stable

subjectif

subtil

suffisant

superstitieux

sûr

susceptible

sympathique

tenace

tendre

tendu

timide

timoré

tolérant

tranquille

trompeur

versatile

vif

vindicatif