La foi

 

 

James E. Talmage (1862-1933)

 

Président de l'université d'Utah de 1894 à 1897

Membre du collège des Douze de 1911 à 1933

 

 

  

La nature de la foi


Le sens prédominant dans lequel le terme foi est employé dans toutes les Écritures est celui d'une confiance et d'une fidélité totales envers l'être, les buts et les paroles de Dieu. Une telle confiance, si elle est implicite, enlève tout doute à l'égard de ce que Dieu accomplit ou promet, même si ces choses ne sont pas apparentes aux sens ordinaires des mortels ni explicables par eux. De là cette définition de la foi donnée par Paul : « Or la foi est une ferme assurance des choses qu'on ne voit pas » (Hébreux 11:1). Il est clair qu'un tel sentiment de confiance peut varier en degré selon les personnes. En effet, la foi peut se manifester depuis la première phase qui n'est guère plus qu'une faible croyance, à peine exempte d'hésitation et de crainte, jusqu'à la force de la confiance inébranlable, qui défie le doute et les sophismes.

Croyance, foi et connaissance


Les termes foi et croyance sont parfois considérés comme synonymes ; néanmoins, chacun d'eux a un sens bien particulier dans notre langue, quoique l'on n'ait fait, autrefois, que peu de distinction entre eux ; c'est pourquoi les deux termes sont employés interchangeablement dans beaucoup de passages scripturaux. La croyance, dans un de ses sens reconnus, peut consister en un simple assentiment intellectuel, tandis que la foi implique le genre de confiance et de conviction qui poussent à l'action. La croyance est un assentiment mental à la véracité ou à la réalité d'une chose, cependant elle exclut, dans ce type d'assentiment, l'élément moral de responsabilité qui est inclus dans la foi. La croyance est, dans un sens, passive, un accord ou une acceptation seulement. La foi est active et positive, comprenant l'assurance et la confiance qui mènent aux oeuvres. La foi au Christ est la croyance en lui combinée à une confiance totale en lui. On ne peut pas avoir la foi sans la croyance ; cependant on peut croire et malgré tout manquer de foi. La foi est une croyance vivifiée, animée, vivante.

      Il existe certainement une grande différence de degré entre les deux, même si l'on n'admet pas une distinction essentielle en espèce. Comme nous allons maintenant le démontrer, la foi en la Divinité est essentielle au salut ; c'est, en vérité, un pouvoir sauveur qui mène celui qui le possède dans les sentiers de la sainteté, tandis que la simple croyance en l'existence et aux attributs de la Divinité ne possède pas ce même pouvoir. Notez les paroles de Jacques (voir Jaques 2:19), dans son épître générale aux saints où il réprimande ses frères pour certaines professions creuses. En substance, il dit : Vous vous complaisez avec orgueil à proclamer votre croyance en Dieu, vous vous vantez de ce que vous vous distinguez des idolâtres et des païens parce que vous acceptez un seul Dieu ; vous faites bien de le proclamer et de le croire ; mais, souvenez-vous-en, d'autres font de même ; même les démons croient ; et si fermement qu'ils tremblent à la pensée du sort que leur croyance leur fait voir clairement. Satan et ses disciples croient au Christ ; et leur croyance se monte à une connaissance de ce qu'il est, de ce qui constitue son rôle passé, présent et futur dans le plan divin de l'existence et du salut des hommes. Rappelez-vous le cas de l'homme possédé par des mauvais esprits, dans le pays des Gadaréniens, homme si cruellement tourmenté qu'il était la terreur de tous ceux qui l'approchaient. On ne pouvait ni le dompter ni le lier ; les gens avaient peur de s'approcher de lui. Cependant, lorsqu'il vit le Christ il courut l'adorer, et l'esprit pervers qui était en lui implora la miséricorde de ce Juste, l'appelant « Jésus, Fils du Dieu Très-Haut » (Marc 5:1-18 ; aussi Matt. 8:28-34). Une autre fois, dans la synagogue de Jérusalem, un esprit impur implora Jésus de ne pas employer son pouvoir, lui disant, dans son angoisse : « Je sais qui tu es : le Saint de Dieu » (Marc 1:24). Une autre fois, Jésus était suivi d'une foule composée de gens d'Idumée, de Jérusalem, de Tyr et de Sidon ; il y en avait beaucoup parmi eux qui étaient possédés de mauvais esprits, et ceux-ci, lorsqu'ils virent le Christ, se mirent à genoux devant lui, s'écriant : « Tu es le Fils de Dieu » (Marc 3:8-11). Y eut-il jamais croyant mortel qui confessa plus franchement sa connaissance de Dieu et du Fils de Dieu que le firent ces serviteurs de Satan ? Satan connaît Dieu et le Christ ; il se souvient peut-être du rang qu'il occupait jadis lui-même en tant que Fils du Matin (voir D&A 76:25-27) ; cependant, avec toute cette connaissance, il est toujours Satan. Ni la croyance, ni la connaissance réelle, qui lui est supérieure, ne suffisent pour sauver ; car aucune n'est la foi. Si la croyance est le fruit de l'esprit, la foi est le fruit du cœur ; la croyance est fondée sur la raison, et la foi, en grande partie, sur l'intuition.

      Nous entendons souvent dire que la foi est une connaissance imparfaite ; que la première disparaît lorsque la seconde prend sa place ; que maintenant nous marchons par la foi, mais qu'un jour nous marcherons à la lumière sûre de la connaissance.

      Dans un sens cela est vrai ; cependant il faut se rappeler que la connaissance peut être aussi morte et improductive en bonnes oeuvres que la croyance sans foi. Ces confessions des démons, que le Christ était le Fils de Dieu, reposaient sur la connaissance ; cependant cette grande vérité qu'il connaissaient, ne changea pas leur mauvaise nature. Quelle différence entre leur témoignage du Sauveur de celui de Pierre qui, à la question du Maître : « Qui dites-vous que je suis ? » répliqua en se servant pratiquement des mots employés par les esprits impurs, que nous avons cités plus haut : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant » (Matthieu 16:15,16 ; voir aussi Marc 8:29 ; Luc 9:20) ! La foi de Pierre avait déjà montré son pouvoir vivifiant ; elle l'avait fait quitter beaucoup de ce qui lui avait été cher, suivre son Seigneur au milieu des persécutions et des souffrances, et délaisser les attraits de la mondanité avec ses fascinations pour la piété pleine de sacrifice que sa foi rendait tellement désirable. La connaissance qu'il avait que Dieu était le Père et que le Fils était le Rédempteur, n'était peut-être pas plus grande que celle des esprits impurs ; mais, tandis que pour eux cette connaissance ne faisait qu'ajouter à leur condamnation, pour lui elle était un moyen de salut.

      La simple possession de la connaissance ne donne aucune assurance qu'il en résultera un bénéfice quelconque. On raconte qu'au cours d'une épidémie de choléra dans une grande ville, un savant prouva, à sa propre satisfaction, par des tests chimiques et microscopiques, que l'eau de distribution était infectée, et que c'était elle qui répandait la contagion. Il proclama le fait dans toute la ville et mit tout le monde en garde contre l'emploi d'eau non bouillie. Beaucoup de gens, bien qu'incapables de comprendre ses méthodes de recherche, et encore moins de répéter ses expériences eux-mêmes, eurent foi en ses paroles d'avertissement, suivirent ses instructions, et échappèrent à la mort, à laquelle succombèrent leurs concitoyens insouciants et incrédules. Leur foi était une foi salvatrice. Pour le savant lui-même, cette vérité, qui avait sauvé tant de vies était une affaire de connaissance. Il avait réellement perçu, sous le microscope, l'existence de germes mortels dans l'eau ; il avait prouvé leur virulence ; il savait de quoi il parlait. Néanmoins, dans un moment d'oubli, il but de l'eau qui n'avait pas été stérilisée ; il mourut peu après, victime de l'épidémie. Sa connaissance ne le sauva pas, aussi convaincante qu'elle fût, cependant d'autres, qui ne s'appuyaient que sur leur confiance ou leur foi en la vérité qu'il avait déclarée, échappèrent à la destruction qui les menaçait. Il avait la connaissance, mais était-il sage ? La connaissance est à la sagesse ce que la croyance est à la foi, l'une un principe abstrait, l’autre une application vivante. Ce n'est pas la possession seulement, mais bien le bon emploi de la connaissance qui constitue la sagesse.

La fondation de la foi


Fondamentalement, et dans le sens théologique, nous considérons la foi comme une confiance vivante et inspirante en Dieu et le fait d'accepter sa volonté comme notre loi et sa parole comme guide de notre vie. La foi en Dieu est possible seulement lorsque nous apprenons qu'il existe et en outre qu'il est un Être dont la personnalité et les attributs sont dignes.

      C'est sur une telle connaissance de l'existence de Dieu, de la dignité de sa nature et de la perfection de ses attributs, que se fonde la foi de l'homme en l'Être suprême. La foi en Dieu ne peut exister en l'absence de toute connaissance à son sujet. Cependant, même les païens enténébrés jouissent de certains fruits de la foi, car ils ont au moins la conviction innée qui provient de l'intuition naturelle de l'homme qu'il existe un pouvoir suprême. Dans chaque âme humaine, même dans celle du sauvage, se trouve une base pour la foi, quelque réduite et imparfaite que les ténèbres de l'hérédité ou du péché volontaire l'aient rendue. La foi du païen peut être faible et imparfaite, car ses capacités de reconnaître les preuves sur lesquelles repose la croyance en Dieu peuvent être bien limitées. Bien que les premiers élans de foi vers Dieu puissent être l'effet d'une intuition naturelle, le développement ultérieur de cette foi sera, en grande partie, le résultat d'un examen et d'une recherche de la vérité, effectués avec impartialité et dans l'esprit de prière.

      La vraie foi jaillira de preuves dignes de confiance correctement interprétées ; les faux raisonnements ne peuvent engendrer qu'une foi déformée et mal placée. Nos conclusions au sujet de toute question examinée seront influencées, dans une grande mesure, par le nombre et la crédibilité des témoins, ou par le poids des preuves lorsque nous nous livrons nous-mêmes à l'enquête. Aussi improbable qu'une déclaration puisse nous paraître, si des témoins, en qui nous avons confiance, en affirment la véracité, nous sommes enclins à l'admettre comme vraie, du moins provisoirement. Si de nombreux témoins dignes de foi apportent leur témoignage, et si, de plus, des preuves collatérales apparaissent, nous pouvons considérer le fait déclaré comme prouvé. Néanmoins, nous serons toujours incapables d'affirmer la véracité du fait en question par expérience personnelle jusqu'à ce que nous ayons vu de nos propres yeux et entendu de nos propres oreilles, jusqu'à ce que, en fait, chacun de nous soit devenu un témoin digne de foi par son observation personnelle. Illustrons : Relativement peu de citoyens des États-Unis ont visité le siège du gouvernement. Les masses ne connaissent rien du Capitole, ni de la Maison Blanche, ni des immeubles d'importance et d'intérêt national, de par leur observation personnelle. Très peu de gens ont rencontré personnellement le président des États-Unis, qui y réside. Comment tous ceux qui n'ont rien vu de tout cela connaissent-ils la ville de Washington, le Capitole et le président ? Par le témoignage des autres. Ils peuvent avoir, parmi leurs connaissances, des gens qui se sont rendus à Washington et dont ils acceptent les déclarations comme vraies. Ils ont certainement écouté ou lu les descriptions de ceux qui y sont allés eux-mêmes. Alors ils apprennent que des lois y sont créées et que des décrets sont émis du siège de la nation. Leurs études à l'école, les cartes géographiques et les livres qu'ils ont employés et beaucoup d'autres incidents ajoutent aux preuves, qui deviennent bientôt décisives. Leurs déductions se multiplient, et se développent en une conviction positive. Ils acquièrent la foi en l'existence d'un centre de gouvernement national et le respect envers les lois qui en émanent.

      Prenons une autre illustration : Les astronomes nous disent que la terre appartient, avec certaines étoiles, à un certain ordre ; qu'elle est l'une d'une famille de planètes qui tournent autour du soleil en orbites concentriques ; et que quelques-unes de ces planètes ont de nombreuses fois la dimension de notre globe. Nous pouvons ne pas être versés dans les méthodes de calcul et d'observation de l'astronomie et nous pouvons, par conséquent, être incapables de vérifier, par nos propres moyens, la véracité de ces déclarations. Mais nous trouvons une telle masse de preuves, résultats des témoignages concordants de ceux dont les connaissances et les talents scientifiques nous inspirent confiance, que nous acceptons leurs conclusions comme prouvées.

      De même, au sujet de l'existence, de l'autorité et des attributs de Dieu, les témoignages d'un grand nombre d'hommes saints dans les temps anciens et modernes - de prophètes dont la crédibilité est établie par l'accomplissement de leurs prédictions - nous sont parvenus, déclarant à l'unisson ces vérités solennelles, et la nature fournit, de toutes parts, un témoignage concordant. Rejeter une telle évidence sans la réfuter, c'est, ignorer les méthodes les plus approuvées d'examen et de recherche connues de l'homme. Le développement de la foi à partir de l'évidence est illustrée par ce qui se passa lors d'une certaine fête de Pentecôte, au cours de laquelle des milliers de Juifs, imbus de l'opinion préconçue que Jésus était un imposteur, entendirent le témoignage des apôtres et furent témoins des signes qui accompagnèrent ce témoignage. Trois mille d'entre eux furent convaincus de la vérité et devinrent disciples du Fils de Dieu, leur préjugé faisant place à la croyance, et la croyance se transformant en foi, avec les oeuvres qui l'accompagnent (voir Actes, chapitre 2). La fondation de la foi en Dieu est donc une croyance sincère en lui ou une connaissance de sa personne, croyance ou connaissance reposant sur les preuves et le témoignage.

La foi est un principe de pouvoir


Au sens large, la foi - l'assurance de choses que nous espérons et la démonstration de choses que nos sens ne peuvent discerner - est le principe moteur qui pousse les hommes aux résolutions et aux actes. Sans l'exercice de la foi, nous ne ferions aucun effort dont les résultats seraient futurs ; sans la foi qu'il récoltera en automne, l'homme ne planterait pas au printemps ; il n'essayerait pas non plus de bâtir s'il n'avait pas confiance qu'il terminerait le bâtiment et jouirait de son usage ; si l'étudiant n'avait pas la foi qu'il lui serait possible de poursuivre ses études avec succès, il ne suivrait pas ses cours. La foi devient ainsi pour nous la fondation de l'espérance, d'où jaillissent nos aspirations, nos ambitions, et notre confiance en l'avenir. Enlevez la foi de l'homme en la possibilité de tout succès désiré et vous le privez de ce qui le pousse à l'effort. Il n'étendrait pas la main pour saisir s'il ne croyait pas en la possibilité de se procurer la chose vers laquelle il tend la main. Ce principe devient donc la force motrice qui détermine les hommes à lutter pour exceller, et à supporter souvent des vicissitudes et des souffrances pour parvenir à leur but. La foi est le secret de l'ambition, l'âme de l'héroïsme, le pouvoir moteur de l'effort.

      L'exercice de la foi est agréable à Dieu, et c'est par cela que l'on peut obtenir son interposition. C'est par la foi que les Israélites, au cours de leur exode d'Égypte, suivirent leur chef sur le lit de la mer Rouge ; et par l'action protectrice de Dieu que cette foi attirait, ils furent sauvés, tandis que les Égyptiens rencontraient la destruction en essayant de les suivre (voir Exode 14:22-29 ; Hébreux 11:29). Avec une confiance pleine et entière dans les instructions et les promesses de Dieu, Josué et ses intrépides soldats mirent le siège devant Jéricho ; et les murs de cette ville pécheresse tombèrent devant la foi des assiégeants, sans l'usage de béliers ou d'autres engins de guerre (voir Josué 6:20 ; Hébreux 11:30). Par le même pouvoir, Josué reçut l'aide des luminaires du ciel tandis qu'il travaillait à sa victoire contre les Amorites (voir Josué 10:12). Paul nous cite également (voir Hébreux 11:32-34) les exemples de Gidéon (voir Juges 6:11), de Barak (voir Juges 4:6), de Samson (voir Juges 13:24), de Jephthé (voir Juges 11:1 ; 12:7), de David (voir 1 Samuel 16:1,13 ; 17:45), de Samuel (voir 1 Samuel 1:20 ; 12:20), et des prophètes « qui, par la foi, vainquirent des royaumes, exercèrent la justice, obtinrent des promesses, fermèrent la gueule des lions, éteignirent la puissance du feu, échappèrent au tranchant de l'épée, guérirent de leurs maladies ». C'est par la foi qu'Alma et Amulek furent délivrés de leur captivité lorsque les murs de leur prison s'écroulèrent (voir Alma 14:26-29 ; voir aussi Éther 12:13). C'est par la foi que Néphi et Léhi (voir Hélaman 5:20-52 ; voir aussi Éther 12:14), fils d'Hélaman, furent protégés de leurs ennemis lamanites par le feu, au milieu duquel ils furent préservés sans la moindre brûlure ; et un plus grand miracle encore s'accomplit dans le cœur de leurs persécuteurs, car ceux-ci reçurent la lumière et se repentirent. Sous l'action de la foi, les vagues mêmes de la mer peuvent être domptées (voir Matthieu 8:23-27 ; voir aussi Marc 4:36-41 ; Luc 8:22-25 ; Matthieu 14:24-32 ; Marc 6:47-51 ; Jean 6:16-21) ; les arbres sont soumis à la voix de celui qui commande par la foi (voir Matthieu 21:17-22 ; voir aussi Marc 11:12-14, 20-24 ; Luc 17:6 ; Jacob 4:6) ; les montagnes peuvent être déplacées pour l'accomplissement de buts justes (voir Matthieu 17:20 ; 21:21 ; voir aussi Marc 11:23,24 ; Éther 12:30 ; Jacob 4:6) ; les malades peuvent être guéris (voir Luc 13:11-13 ; 14:2-4 ; 17:11-19 ; 22:50,51 ; voir aussi Matthieu 8:2,3,5-13,14,15,16, etc.), les mauvais esprits chassés (voir Matthieu 8:28-32 ; 17:18 ; voir aussi Marc 1:23-26, etc.) et les morts ramenés à la vie (voir Luc 7:11-16 ; voir aussi Jean 11:43-45 ; 1 Rois 17:17-24 ; 3 Néphi 7:19 ; 19:4 ; 26:15). Tout s'accomplit par la foi (voir Matthieu 17:20 ; voir aussi Marc 9:23 ; Éphésiens 6:16 ; 1 Jean 5:4 ; D&A 35:8-11, etc.)

      On peut objecter que la foi, en elle-même, n'est pas une source de pouvoir ; que son effet est dû à l'intervention extérieure de l'aide divine, à laquelle la foi fait simplement appel. Et le sceptique peut ajouter qu'un Dieu omniscient, bon et aimant, agirait indépendamment et donnerait sans attendre l'appel de la foi et de la prière. On trouve une réponse suffisante dans les preuves abondantes fournies par les Écritures, que le Tout-Puissant agit en conformité avec la loi, et qu'il est contraire à sa nature d'agir arbitrairement et avec caprice. De quelque manière que les lois des cieux aient été formulées, l'application de leurs mesures bienfaisantes à l'humanité dépend de la foi et de l'obéissance des mortels.

      Considérez la défaite d'Israël par les hommes d'Aï ; une loi de justice avait été violée, et des choses qui étaient maudites avaient été introduites dans le camp du peuple de l'alliance. Cette transgression interposa de la résistance au courant de l'aide divine et le pouvoir ne fut rendu au peuple que quand il se fut sanctifié (voir Josué, chapitres 7 et 8). De plus, le Christ était influencé et, dans une certaine mesure, contrôlé dans ses miracles parmi les hommes par la foi ou le manque de foi du peuple. Cette bénédiction bien connue : « Ta foi t'a guéri », par laquelle il annonçait l'intervention salutaire, est une preuve de ce fait. Nous apprenons aussi qu'à une certaine occasion, dans son propre pays, il ne put pas accomplir d’œuvre puissante, en étant empêché par l'incrédulité du peuple (voir Matthieu 13:58 ; Marc 6:5,6).

Condition d'une foi efficace


Une condition essentielle à l'exercice d'une foi vivante, croissante et fortifiante en la Divinité est la conscience que possède l'homme qu'au moins il s'efforce de vivre conformément aux lois de Dieu, telles qu'il les a apprises. Le fait de savoir qu'il pèche volontairement et gratuitement contre la vérité le privera de la sincérité dans la prière et la foi et l'éloignera de son Père. Il doit sentir que la direction générale de sa vie est acceptable, et que, compte tenu des faiblesses humaines et de la fragilité des mortels, il jouit, dans une certaine mesure, de l'approbation du Seigneur ; sinon il lui est impossible de supplier le trône de grâce avec confiance. La conscience de l'effort sincère vers la sainteté est une puissance en elle-même qui fortifie celui qui la possède au milieu des sacrifices et des persécutions, et qui le soutient dans toutes ses bonnes oeuvres. C'est cette assurance que la communion était assurée entre Dieu et eux qui permit aux saints d'autrefois de persévérer comme ils le firent, bien que leurs souffrances fussent extrêmes. Nous lisons, à leur sujet, que certains « furent livrés aux tourments, et n'acceptèrent point de délivrance, afin d'obtenir une meilleure résurrection ; d'autres subirent les moqueries et le fouet, les chaînes et la prison ; ils furent lapidés, sciés, torturés, ils moururent tués par l'épée, ils allèrent ça et là, vêtus de peaux de brebis et de peaux de chèvres, dénués de tout, persécutés, maltraités - eux dont le monde n'était pas digne - errant dans les déserts et les montagnes, dans les cavernes et dans les antres de la terre » (Hébreux 11:35-38). Aujourd'hui comme autrefois, les saints ont été soutenus dans toutes leurs souffrances par la connaissance sûre qu'ils étaient approuvés de Dieu ; et la foi des justes a toujours grandi à cause du fait qu'ils étaient conscients de la sincérité et de la dévotion de leurs efforts.

La foi, essentielle au salut


Étant donné que le salut ne peut s'obtenir que par la médiation et l'expiation du Christ, et que cela ne s'applique au péché individuel que dans la mesure où il y a obéissance aux lois de la justice, il s'ensuit que la foi en Jésus-Christ est essentielle au salut. Mais personne ne peut vraiment croire en Jésus-Christ et, en même temps, douter de l'existence, ou du Père, ou du Saint-Esprit ; c'est pourquoi, la foi en la Divinité tout entière est essentielle au salut. Paul déclare que sans la foi il est impossible d'être agréable à Dieu « car il faut que celui qui s'approche de Dieu croie que Dieu existe et qu'il est le rémunérateur de ceux qui le cherchent » (Hébreux 11:6). Les Écritures abondent en assurances que ceux qui font preuve de foi envers Dieu et qui se conforment aux exigences que cette foi rend claires, seront sauvés. Les paroles du Christ à ce sujet sont définitives : « Celui qui croira et sera baptisé sera sauvé, mais celui qui ne croira pas sera condamné » (Marc 16:16). Et encore : « Celui qui croit au Fils a la vie éternelle ; celui qui ne croit pas au Fils ne verra point la vie, mais la colère de Dieu demeure sur lui » (Jean 3:36 ; voir aussi Jean 3:15 ; 4:42 ; 5:24 ; 11:25 ; Galates 2:20 ; 1 Néphi 10:6,17 ; 2 Néphi 25:25 ; 26:8 ; Énos 1:8 ; Mosiah 3:17 ; Hélaman 5:9 ; 3 Néphi 27:19 ; D&A 45:8). Après sa mort, ses apôtres enseignèrent des doctrines similaires tous les jours de leur ministère (voir Actes 2:38 ; 10:42 ; 16:31 ; Romains 10:9 ; Hébreux 3:19 ; 11:6 ; 1 Pierre 1:9 ; 1 Jean 3:23 ; 5:14). Un résultat naturel de la foi implicite en la Divinité sera la confiance croissante dans les Écritures qui contiennent la parole de Dieu et dans les paroles et les oeuvres de ses serviteurs autorisés qui sont ses oracles vivants.

La foi, un don de Dieu


Bien qu'étant à la portée de tous ceux qui s'efforcent diligemment de l'acquérir, la foi est néanmoins un don divin (voir Matthieu 16:17 ; Jean 6:44,65 ; Éphésiens 2:8 ; 1 Corinthiens 12:9 ; Romains 12:3 ; Moroni 10:11). Comme il convient à une perle si précieuse, elle n'est donnée qu'à ceux qui montrent, par leur sincérité, qu'ils en sont dignes et qui promettent de se conformer à ses inspirations. Bien que la foi soit appelée principe de l'Évangile du Christ, bien qu'elle soit, en réalité, le fondement de la vie religieuse, cependant même la foi est précédée par la sincérité des intentions et par l'humilité de l'âme, grâce auxquelles la parole de Dieu peut faire impression sur le cœur (voir Romains 10:17). Aucune coercition n'est employée pour amener les hommes à la connaissance de Dieu ; cependant, aussitôt que nous ouvrons notre cœur à l'influence de la droiture, la foi qui mène à la vie éternelle nous est donnée par notre Père.

La foi et les oeuvres


La foi dans un sens passif, ou la simple croyance, dans le sens plus superficiel du terme, est inefficace comme moyen de salut. Cette vérité fut exposée clairement par le Christ et ses apôtres et il se peut que la vigueur avec laquelle elle fut déclarée indique qu'une doctrine extrêmement pernicieuse naquit très tôt celle de la justification par la croyance seule. Le Sauveur enseigna que les oeuvres étaient essentielles à la validité de la profession de la foi et à son efficacité. Notez bien ses paroles : « Ceux qui me disent: Seigneur ! Seigneur ! n'entreront pas tous dans le royaume des cieux, mais celui-là seul qui fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux » (Matthieu 7:21).

      « Celui qui a mes commandements et qui les garde, c'est celui qui m'aime ; et celui qui m'aime, sera aimé de mon Père ; je l'aimerai, et je me ferai connaître à lui » (Jean 14:21). L'exposé suivant, de Jacques, est particulièrement explicite : « Mes frères, que sert-il à quelqu'un de dire qu'il a la foi, s'il n'a pas les oeuvres ? La foi peut-elle le sauver ? Si un frère ou une sœur sont nus et manquent de la nourriture de chaque jour, et que l'un d'entre vous leur dise : Allez en paix ! Chauffez-vous et vous rassasiez, et que vous ne leur donniez pas ce qui est nécessaire au corps, à quoi cela sert-il ? Il en est ainsi de la foi : si elle n'a pas les oeuvres, elle est morte en elle-même. Mais quelqu'un dira : Toi, tu as la foi et moi j'ai les oeuvres. Montre-moi ta foi sans les oeuvres et moi je te montrerai ma foi par mes oeuvres » (Jaques 2:14-18). Et on peut ajouter à cela les paroles de Jean : « Si nous gardons ses commandements, par là nous savons que nous l'avons connu. Celui qui dit : Je l'ai connu, et qui ne garde pas ses commandements est un menteur, et la vérité n'est point en lui. Mais celui qui garde sa parole, l'amour de Dieu est véritablement parfait en lui : par là nous savons que nous sommes en lui » (1 Jean 2:3-5).

      On peut ajouter à ces enseignements beaucoup de paroles inspirées extraites des Écritures néphites (voir 1 Néphi 15:33 ; 2 Néphi 29:11 ; Mosiah 5:15 ; Alma 7:27 ; 9:28 ; 37:32-34 ; 41:3-5) et des révélations modernes (voir D&A en entier), affirmant toutes la nécessité des oeuvres, et niant l'efficacité salvatrice de la croyance passive. Cependant en dépit de la clarté de la parole de Dieu, les hommes ont érigé en dogme l'idée que le salut peut s'obtenir par la foi seule, et qu'une profession de foi verbale ouvre les portes du ciel au pécheur (voir Vitality of Mormonism, du même auteur, l'article « Knowing and Doing », p. 282). Les Écritures citées et le sens de la justice inhérent à l'homme suffisent à réfuter ces fausses assertions (voir Vitality of Mormonism, l'article « Obedience is Heaven's First Law », p. 75).
 
 

Source : James E. Talmage, Articles of Faith, Salt Lake City, 1890