À
la manière du Seigneur
Dallin H. Oaks
Titre de l'édition
d'origine : The Lord's Way
©1991 Dallin H. Oaks
Préface
Introduction :
Les voies de Dieu et les voies de l’homme
Chapitre
1 : L'apprentissage
Chapitre
2 : La raison et la révélation
Chapitre
3 : Les signes et la science
Chapitre
4 : Prendre soin des pauvres
Chapitre
5 : La querelle
Chapitre
6 : Les procès
Chapitre
7 : La critique
Chapitre
8 : L'action disciplinaire de l'Église
PRÉFACE
Certains
croient que la fin justifie les moyens. Si le résultat semble
bon, les moyens par lesquels il a été obtenu ne leur
importent guère. Cette mentalité est la répétition
d'un modèle ancien qui apparaît dans le tout premier
conflit décrit dans les Écritures.
Il
vint un temps où les enfants d'esprit de Dieu le Père
eurent besoin de faire l'expérience de la condition mortelle
pour progresser vers leur destinée ultime. Dieu fournit un
plan. À l’opposé, Lucifer (Satan) fit une
proposition radicalement différente. La différence
entre le plan de Dieu et la proposition de Satan perdure dans les
nombreuses alternatives que nous rencontrons dans la condition
mortelle.
Le
but du plan du Père était de « réaliser
l'immortalité et la vie éternelle »
(quelquefois appelée le salut) de tous ses enfants d'esprit
(Moïse 1:39). Il créerait un monde dans lequel ses
enfants deviendraient mortels et exerceraient le libre arbitre (le
pouvoir de choisir) qu'il leur avait donné (Moïse 4:3).
Ils seraient mis à l'épreuve pour voir s'ils feraient
tout ce que le Seigneur, leur Dieu, leur commanderait (voir Abraham
3:25).
Les
choix des enfants de Dieu dans l'exercice de leur libre arbitre
seraient faits en dépit de l'opposition (2 Néphi
2:16 ; D&A 29:39). Certains feraient de mauvais choix et
seraient entachés par le péché. L'éventualité
de les perdre en raison de leurs mauvais choix serait le prix de la
progression.
Le
plan de Dieu était coûteux et lent, mais il offrait
vraiment la possibilité à ses enfants d'esprit
d'accomplir ce qu'il désirait pour eux - l'immortalité
et la vie éternelle. Pour assurer l'immortalité et
offrir la possibilité de se qualifier pour la vie éternelle,
le plan de Dieu comportait un Sauveur qui nous rachèterait
tous de la mort et qui paierait le prix nécessaire pour que
tous soient purifiés du péché selon les
conditions qu'il prescrirait (voir 2 Néphi 9:19-24).
Dans
l'alternative qu'il proposait, Lucifer prétendait atteindre le
même résultat, mais avec des moyens différents
(Lucifer prétendait atteindre le même résultat.
Contrairement à Jésus-Christ [le Fils Bien-aimé
prémortel, qui cherchait à accomplir l'oeuvre pour la
gloire de Dieu], Lucifer cherchait à s'approprier le pouvoir
du Père pour sa propre gloire [Moise 4:1-3 ; D&A
29:36]). En éliminant la possibilité du péché,
il sauverait tous les enfants d'esprit de Dieu. C'est en leur ôtant
la possibilité de choisir qu'il s'assurerait de ce résultat
(voir Moïse 4:3).
La
proposition de Lucifer ne pouvait pas être acceptée car
les moyens proposés pour atteindre son but étaient
répugnants. Les fins sont inexorablement façonnées
par les moyens. Pour les enfants de Dieu, la vie éternelle ne
pourrait être obtenue que par les méthodes que Dieu
approuverait. Comme il l'a dit dans un autre cas : « Il
faut que cela se fasse à ma façon » (D&A
104:16).
La
méthode de Lucifer ne permettrait pas d'atteindre l'objectif
de Dieu. Elle le corromprait. Sauver tout le monde au prix du libre
arbitre de chacun empêcherait la progression des enfants de
Dieu vers la vie éternelle – que depuis la création
du monde ils étaient supposés recevoir –
ainsi que leur voyage dans la condition mortelle. L'adversaire,
Satan, est encore actif. À l'image du conflit dans le monde
prémortel, son action prétend souvent rechercher une
fin honorable, mais il utilise un moyen autre pour l'atteindre. Et la
plupart du temps, comme dans le monde prémortel, la méthode
de Satan corromprait l'objectif plutôt qu'elle ne permettrait
de l'atteindre A moins que nous ne soyons vigilants, nous sommes
facilement trompés par ceux qui mettent en avant un but
honorable et prétendent le poursuivre, mais qui restent vagues
quant aux moyens de l'atteindre. Quand il s'agit de l'oeuvre du
Seigneur et de la réalisation de ses objectifs, le fait
d'obtenir un bon résultat n'est pas suffisant - il doit être
obtenu de la bonne manière.
Cet
ouvrage présente quelques exemples où la manière
du Seigneur, telle qu'elle est révélée dans les
Écritures et dans les enseignements des prophètes
modernes, diffère de la manière du monde, du moins
telle que cette dernière est vécue dans les nations
occidentales que je connais. Cet ouvrage est centré sur les
moyens – les procédures ou les méthodes –
spécifiés par le Seigneur pour que nous parvenions à
la destination qu'il a indiquée à ses enfants.
Quelques-uns des concepts présentés dans les chapitres
1 et 2 ont été brièvement exposés dans la
deuxième moitié de mon discours de la conférence
générale publiée dans l'édition de
juillet 1989 du magazine de l’Église L’Étoile.
La partie du chapitre 1 décrivant les formes et les fonctions
de la révélation a été publiée
précédemment dans l’édition de décembre
1983 de L’Étoile. Le chapitre 7, « La
critique », est une version plus complète d'un
discours publié dans l'édition de février 1987
du magazine de l’Église Ensign. Je suis reconnaissant
aux éditeurs de m'avoir permis d'utiliser ces documents et de
citer les auteurs des diverses publications présentées
en fin de chapitre. Je suis également reconnaissant pour
l'autorisation officielle ou tacite des auteurs des diverses lettres
citées. J'ai choisi d'omettre leur nom, la plupart du temps
pour protéger leur vie privée.
Je
suis reconnaissant envers mes amis qui ont relu les différents
chapitres de ce livre et qui ont émis des suggestions
judicieuses. Je remercie particulièrement ma secrétaire,
Virginia Archer, qui a tapé avec précision et bonne
humeur les brouillons sans fin de ces chapitres. Enfin et surtout,
j'exprime mon appréciation à mon épouse pour
l'éternité, June, pour son soutien et sa patience
pendant le long processus de création de ce livre. Bien que
j'apprécie toute l'aide précieuse que j'ai reçue,
je dois, bien entendu, assumer la responsabilité de tout ce
que j'ai écrit. Ce livre est l'expression de mon point de vue
et n'est pas une déclaration officielle des doctrines ou des
procédures de l'Église de Jésus-Christ des
saints des derniers jours.
INTRODUCTION :
LES VOIES DE DIEU ET LES VOIES DE L’HOMME
Il
y a quelques années, un ancien président de mission me
fit un aveu instructif. Il était éducateur de
profession. Quand il quitta son poste et prit en charge ses devoirs
de président de mission, il amena une grande quantité
de documents professionnels sur la formation et sur l'art de diriger.
Il avait l'intention de les utiliser pour aider ses missionnaires.
Lors de la première réunion des dirigeants de la
mission, il demanda à plusieurs dirigeants de zone de
présenter quelques-uns de ces outils aux missionnaires
présents.
Alors
que la réunion suivait son cours, le président de
mission sentit que quelque chose d'important manquait. Il réalisa,
me dit-il plus tard, qu'il essayait de former les dirigeants de sa
mission en suivant un modèle professionnel au lieu de le faire
à la manière du Seigneur. Il interrompit un
missionnaire au milieu de sa présentation, s'excusa auprès
de lui et auprès du groupe pour leur avoir donné des
tâches inappropriées, et demanda à un
missionnaire de rendre son témoignage. Alors qu'ils
poursuivaient dans cette nouvelle voie, ils ressentirent fortement
l'Esprit du Seigneur. Les témoignages et les résolutions
étaient fortifiés, et la formation nécessaire
dans l'art de diriger était donnée. Le président
de mission avait appris l'importance d'accomplir l'oeuvre du Seigneur
à la manière du Seigneur. Chacun d'entre nous devrait
apprendre cette leçon.
Les
Écritures déclarent et démontrent que les
pensées de Dieu ne sont pas les pensées de l’homme
et que les voies de Dieu ne sont pas les voies de l’homme. Le
Seigneur enseigna ce principe par l'intermédiaire du prophète
Ésaïe : « Car mes pensées ne sont
pas vos pensées, et vos voies ne sont pas mes voies, dit
l'Éternel. Autant les cieux sont élevés
au-dessus de la terre, autant mes voies sont élevées
au-dessus de vos voies, et mes pensées au-dessus de vos
pensées. » (Ésaïe 55:8-9)
Par
l'intermédiaire du roi-prophète Benjamin, le Seigneur a
commandé à son peuple de croire en Dieu et de croire
« qu'il est souverainement sage... que l'homme ne comprend
pas toutes les choses que le Seigneur peut comprendre »
(Mosiah 4:9). De même, l'apôtre Paul s'exclama : « Ô
la profondeur de la richesse, de la sagesse et de la science de
Dieu ! Que ses jugements sont insondables, et ses voies
incompréhensibles ! » (Romains 11:33 ;
voir aussi D&A 76:2)
Joseph
Smith, le prophète, nous a rappelé que « Dieu
habite dans l'éternité, et ne voit pas les choses comme
nous les voyons » (Enseignements du prophète Joseph
Smith, p. 288). Cette idée nous aide à comprendre
pourquoi le Seigneur fait référence à sa grande
oeuvre des derniers jours en ces termes « [faire] mon
oeuvre, mon oeuvre étrange et [exécuter] mon oeuvre,
mon oeuvre étrange » (D&A 101:95). Cela nous
aide aussi à comprendre ce que le Seigneur a dit à
propos de la construction de Sion : « Sion ne peut
être édifiée que sur les principes de la loi du
royaume céleste ; autrement je ne puis la recevoir en
moi. » (D&A 105:5)
En
précisant comment les saints devaient prendre soin des
pauvres, le Seigneur a averti : « Mais il faut que
cela se fasse à ma façon » (D&A 104:16).
Une autre révélation nous assure que les promesses de
Dieu s'accompliront mais « ce sera au moment qu'il a
choisi, à sa façon, et selon sa volonté »
(D&A 88:68).
Le
Seigneur a appliqué ce principe dans une instruction donnée
au prophète après la perte des 116 pages manuscrites
traduites à partir du Livre de Mormon: « On ne peut
faire échouer les oeuvres, les desseins, et les intentions de
Dieu, ni les réduire à néant... souviens-toi,
souviens-toi que ce n'est pas l'oeuvre de Dieu qui échoue,
mais celle des hommes. » (D&A 3:1, 3)
Ces
principes sont éternels et prescrivent la manière dont
l'oeuvre de Dieu doit s'accomplir.
Ceux
qui croient en Dieu ne devraient pas avoir de difficultés à
accepter ces concepts – que ses pensées sont plus
élevées que nos pensées, qu'il comprend les
choses que nous ne comprenons pas, que ses voies sont plus élevées
que nos voies, et que son oeuvre se fera « au moment qu'il
a choisi et à sa façon ». Mais, dans la
pratique, ces concepts deviennent des concessions apparemment
difficiles à faire pour certains et des principes difficiles à
appliquer pour d'autres.
Beaucoup
ont une vue très limitée des pouvoirs et de la position
de Dieu. Comme le frère de Jared l'a observé, le grand
pouvoir même de Dieu « paraît petit à
l'entendement des hommes » (Éther 3:5). En vérité,
beaucoup de personnes – et même quelques membres de
l'Église de Jésus-Christ des saints des derniers
jours – ont une vue si réduite qu'elles prétendent
juger ce qui se rapporte à Dieu par leur propre raisonnement.
Comme Neal A. Maxwell l'a observé : « Oui,
nous pouvons reconnaître son plan en général mais
critiquer son style, parce qu'il fait les choses à sa
manière... Nous préférerions que les choses se
fassent à notre manière, même si nos voies sont
beaucoup moins élevées que les siennes. »
(Neal A. Maxwell, A Wonderful Flood of Light, Salt Lake City,
Bookcraft, 1990, p. 67)
Un
jour, j'aidais ma femme à laver la vaisselle (elle dirait une
des rares fois) ; elle avait fait du pain aux noix ; quand
nous en sommes arrivés aux casseroles, elle a dit :
« N'essaie pas de laver ces casseroles avant de les faire
tremper. Les restes sont collés ». Beaucoup de nos
idées erronées sur ce qui se rapporte à Dieu et
sur les procédures que nous devrions suivre pour atteindre ses
objectifs sont « collées » par la
chaleur et la pression des traditions du monde et par les usages
professionnels. Ces idées ne céderont pas tant qu'elles
n'auront pas été immergées dans l'eau vive des
principes de l'Évangile.
Certaines
personnes supposent que Dieu est sujet aux limites humaines. Une
telle supposition limite leur compréhension. Les hommes
peuvent modifier leur horloge ou leur calendrier, mais ils ne peuvent
pas altérer les mouvements du système solaire. Ils
peuvent changer le langage par lequel ils décrivent Dieu ou
s'adressent à lui, mais ils n'ont pas le pouvoir d'altérer
la nature ou les objectifs de Dieu. Ils peuvent essayer d'imposer
leur propre calendrier aux actions divines, mais ce sera en vain.
Comme cela fut expliqué à Abraham, le Seigneur Dieu
d'Israël a sa propre méthode d'estimation du temps
(Abraham 3:4, 9 ; 5:13 ; voir aussi Alma 40:8). Les
promesses de Dieu et ses paroles « sont certaines et ne
périront pas » (D&A 64:31), mais toutes choses
doivent venir en leur temps (D&A 24:16 ; 64:32).
Certains
s'attendent à ce que les pratiques et les procédures de
l'Église se conforment aux usages et aux procédures de
leur profession (voir Boyd K. Packer, The Mantel is Far, Far Greater
Than the Intellect, dans Let Not Your Heart Be Troubled, Salt Lake
City, Bookcraft, 1991, p. 101-122). D'autres s'attendent à ce
que les pratiques de l'Église suivent les coutumes du monde.
D'autres cherchent même à rapprocher l'Église et
le monde en assimilant les doctrines et les pratiques de l'Église
aux croyances et aux pratiques du monde.
Les
premiers membres de l'Église rétablie reçurent
des instructions à ce sujet. Après que les émeutes
avaient chassé les saints de leurs maisons dans le comté
de Jackson, le Seigneur révéla qu'il avait permis que
ces afflictions tombent sur son peuple « à cause de
leurs transgressions » (D&A 101:2). Il leur dit, par
l'intermédiaire de Joseph Smith, le prophète, qu'à
cause de ces transgressions ils devaient être châtiés,
ajoutant, « Celui qui s'exalte sera abaissé, celui
qui s'abaisse sera exalté » (D&A 101:42).
Ensuite
le Seigneur leur donna une parabole pour les aider à
comprendre sa volonté « concernant la rédemption
de Sion. » Il leur parla d'un noble qui donna à ses
serviteurs certains commandements puis qui les laissa en charge d'une
vigne. Pendant un temps, ils suivirent ses instructions, mais ensuite
ils commencèrent à mettre en cause les commandements du
Seigneur, et finalement ils leur substituèrent leur propre
jugement à propos de ce qui serait le mieux pour le Seigneur
et sa vigne. En conséquence, un ennemi fit irruption et
dévasta la vigne. Après cela, le Seigneur de la vigne
appela ses serviteurs et dit : « Eh bien !
Quelle est la cause de ce grand mal ? N'auriez-vous pas dû
faire ce que je vous avais commandé de faire ? » Le
noble enseigna ensuite à ses serviteurs comment, en suivant
ses commandements, ils auraient pu éviter la destruction de la
vigne. Il conclut par un nouveau commandement : « Va
directement faire tout ce que je t'ai commandé »
(D&A 101:43-60).
Après
avoir donné cette parabole, le Seigneur dit : « De
plus, en vérité, je vous le dis, je vous montrerai ma
sagesse concernant toutes les églises [branches], si elles
sont disposées à se laisser guider d'une manière
correcte et convenable pour leur salut. Afin que l'oeuvre du
rassemblement de mes saints continue, que je leur édifie en
mon nom des lieux saints, car le moment de la moisson est venu et ma
parole doit s'accomplir » (D&A 101:63-64). En bref,
les serviteurs du Seigneur doivent s’occuper des affaires du
Seigneur à la manière du Seigneur, sinon leurs efforts
seront réduits à néant.
De
même qu'il existe une différence entre la manière
d'agir des hommes et la manière d'agir du Seigneur, les êtres
humains doivent procéder à des changements
significatifs dans leur manière d'agir quand ils passent des
occupations terrestres à leurs responsabilités dans
l'Église. J'ai vécu cela quand j'ai été
appelé à servir à plein temps dans l'Église.
L'appel
vint alors que j'étais juge à la cour suprême
d'Utah. En tant que fonctionnaire chargé de responsabilités
publiques permanentes, je ne pouvais pas quitter mes responsabilités
judiciaires immédiatement après avoir été
appelé. Sensible à cela, la Première Présidence
dit que je pourrais prendre le temps de régler mes
responsabilités publiques avant de commencer à remplir
mes devoirs d'apôtre. Il me fallut environ trois semaines pour
traiter les dossiers qui m'avaient été confiés
et pour participer aux décisions sur d'autres cas en attente.
Pendant ce temps, avant que je ne prétende à des
responsabilités dans l'Église, j'avais amplement le
temps de faire la différence entre mon travail qui se
terminait et le travail que je ferais le restant de ma vie.
Mes
trois années à la faculté de droit incluses,
j'avais été membre du corps judiciaire pendant trente
ans. Pendant ce temps, j'avais travaillé dans presque tous les
domaines de la profession: en tant que libéral, en tant
qu'avocat du gouvernement, en tant que professeur, en tant
qu'administrateur, et en tant que juge. J'avais une expérience
étendue dans l'apprentissage, les systèmes de pensée
et les procédures de ma profession. Tout au long de mon
parcours, j'avais aussi travaillé à la direction
générale de grandes sociétés (à
but lucratif ou non) et, pendant cinq ans, j'avais travaillé
en qualité de président du conseil d'administration du
Public Broadcasting Service. En conséquence, je m'étais
familiarisé avec les fonctions nécessaires dans les
grandes organisations : finances, gestion de propriétés,
personnel, planification, communication, etc.
De
par mes nombreux contacts avec les Autorités générales
de l'Église pendant les neuf ans où j'ai travaillé
en qualité de président de l'université Brigham
Young, je savais que les membres du Collège des douze apôtres
avaient pour mission d'aider à l'administration de l'Église
en accomplissant de nombreuses tâches avec lesquelles je
m'étais déjà familiarisé - le genre de
fonctions que remplissent les dirigeants de grandes sociétés.
Et je savais qu'il me serait peut-être demandé de
remplir des tâches de nature juridique. Mais je savais aussi
que ces tâches étaient seulement occasionnelles dans le
ministère d'apôtre. Les responsabilités uniques
et vitales de ce ministère – être un témoin
spécial du Seigneur Jésus-Christ, détenir et
exercer l'autorité de la prêtrise sacrée, et être
dirigeant dans les activités ecclésiastiques de
l'Église – étaient des domaines dans
lesquels je n'avais pas d'expérience particulière, ni
de qualification.
Pendant
cette période d'introspection, considérant la manière
dont je passerais le reste de ma vie, je me suis demandé quel
genre d'apôtre je serais. Serais-je un avocat qui avait été
appelé à être apôtre, ou serais-je un
apôtre qui avait été avocat ? Je conclus que la
réponse à cette question dépendait du choix
suivant : essayer d'adapter mon ministère à mes
qualifications personnelles et à mon expérience, ou
entreprendre le processus pénible d'essayer de m'adapter à
mon ministère.
Est-ce
que j'essaierais d'accomplir mes tâches à la manière
du monde, ou est-ce que je tenterais d'identifier et d'adopter les
voies du Seigneur ?
Je
décidai que j'essaierais de changer pour m'adapter à
mon ministère et d'être à la hauteur des
qualifications et de la stature spirituelle d'un apôtre, ce qui
est le défi du reste de ma vie.
Ce
principe s'applique à nous tous. Partout dans l'Église,
des hommes et des femmes merveilleux luttent pour s'adapter aux
dimensions de l'appel à servir qu'ils ont reçu dans
l’Église, effectuant les changements nécessaires
pour être à la hauteur des responsabilités qui
sont les leurs dans le royaume de notre Seigneur et Sauveur,
Jésus-Christ.
À
l’opposé, nous connaissons tous des exemples de
personnes qui n'ont pas voulu s'adapter à leur nouvel appel à
servir dans l’Église mais qui ont persisté à
essayer de le rendre conforme à leur expérience, à
leurs préférences, ou à leur confort. Nous avons
vu des instructeurs dans les classes de l'Église qui n'ont pas
enseigné les sujets désignés, mais qui y ont
substitué ce à quoi ils étaient le plus
familiarisés dans leur profession ou leurs lectures récentes.
Nous avons observé des officiers dans diverses organisations
de l'Église qui ont persisté à agir dans leurs
responsabilités en appliquant les procédures de leur
profession. Nous avons vu des orateurs ou d'autres membres ayant des
tâches dans l'Église qui ont utilisé leur poste
pour servir leur intérêt personnel (comme se faire
valoir) plutôt que d'agir en serviteurs du bon Berger, qui nous
a appelés à nourrir le troupeau de Dieu.
« Je
ne changerai pas. Vous devrez vous adapter à moi » :
il s'agit là d'une idéologie qui s'impose partout.
C'est une manière de faire qui est familière du monde.
Elle ne résiste pas seulement au changement, elle résiste
à l'apprentissage, à la réforme et au repentir.
Elle représente « l'auto-indulgence »,
voire l'adoration de soi. Elle démontre de l'indifférence
envers les autres et peut mener à l'oppression. En effet, elle
est à l'opposé des qualités que sont l'humilité,
la soumission, la patience, la tempérance, la longanimité,
la bonté fraternelle, la foi, l'espérance, la charité
et l'amour qui nous qualifient pour l'oeuvre du Seigneur (voir Alma
7:23-24 ; D&A 4:5-6).
Le
président Ezra Taft Benson a donné une autre
explication puissante de la différence entre la manière
du Seigneur et la manière du monde : « Le
monde travaille de l'extérieur vers l'intérieur. Le
monde voudrait sortir les gens des taudis. Le Christ fait sortir ce
qu'il y a de sordide chez les gens, et ensuite ils se sortent
eux-mêmes des taudis. Le monde façonne les gens en
changeant ce qui les entoure. L'Évangile change les hommes,
qui à leur tour changent ce qui les entoure. Le monde veut
modifier le comportement humain, mais le Christ peut changer la
nature humaine. » (Ezra Taft Benson, A Witness and a
Warning, Salt Lake City, Deseret Book, 1988, p 64 ; voir aussi
L’Étoile, 1986, n° 2, p. 4)
Jésus
enseigna à ses disciples que leurs voies devaient être
différentes de celles du monde. « Vous êtes
le sel de la terre... » leur dit-il, « Vous
êtes la lumière du monde... » (Matthieu 5:13,
14). Sans cesse il enseigna à ses disciples qu'ils devaient
être différents.
Dans
un État vassal tenu en esclavage par le pouvoir militaire de
l'empire romain, le Seigneur enseigna que les débonnaires
hériteraient la terre (voir Matthieu 5:5).
À
un peuple qui était habitué à voir les « princes
des Gentils exercer de la domination sur eux, et ceux qui sont grands
exercer de l'autorité sur eux », Jésus
enseigna : « Il n'en sera pas de même au milieu
de vous. Mais quiconque veut être grand parmi vous, qu'il soit
votre serviteur ; et quiconque veut être le premier parmi
vous, qu'il soit votre esclave. C'est ainsi que le Fils de l'homme
est venu, non pour être servi, mais pour servir et donner sa
vie comme la rançon de plusieurs. » (Matthieu
20:26-28)
Afin
que ce concept soit bien compris, le Christ leur rappela à une
autre occasion que « Le plus grand parmi vous sera votre
serviteur. » (Matthieu 23:11 ; Marc 10:42-45 ;
Luc 22:25-26)
Dans
les derniers jours de son ministère, il dit à ses
apôtres : « Si vous étiez du monde, le
monde aimerait ce qui est à lui ; mais parce que vous
n'êtes pas du monde, et que je vous ai choisis du milieu du
monde, à cause de cela le monde vous hait » (Jean
15:19). Et encore « Je leur ai donné ta parole ;
et le monde les a haïs, parce qu'ils ne sont pas du monde, comme
moi je ne suis pas du monde. » (Jean 17:14)
Aux
disciples qui rechercheraient les louanges du peuple, Jésus
déclara : « Malheur, lorsque tous les hommes
diront du bien de vous, car c'est ainsi qu'agissaient leurs pères
à l'égard des faux prophètes » (Luc
6:26).
Moins
d'un an après que six membres ont organisé l'Église
de Jésus-Christ, le Seigneur déclara par
l'intermédiaire de son prophète : « C'est
pourquoi je fais appel aux choses faibles du monde, à ceux qui
ne sont pas instruits et qui sont méprisés, pour qu'ils
châtient les nations par le pouvoir de mon Esprit. »
(D&A 35:13)
Quelle
différence avec la manière du monde qui consiste à
procéder par pouvoir, prééminence,
professionnalisme et prestige !
Il
y a de nombreuses différences entre la manière d'agir
du monde et les instructions que le Seigneur a données à
l'Église rétablie et à ses membres.
La
plupart des saints des derniers jours vivent dans des pays où
ceux qui gouvernent sont élus démocratiquement et qui
agissent grâce à des coalitions politiques et à
des compromis. À l’opposé, le Seigneur a commandé
à son Église de rester « indépendante
par-dessus toutes les autres créations en dessous du monde
céleste. » (D&A 78:14)
Quand
il commanda aux saints des derniers jours de construire un temple, le
Seigneur déclara qu'il ne devait pas être construit « à
la manière du monde, car je ne vous donne pas de vivre à
la manière du monde. » (D&A 95:13)
Juste
quelques générations après que la souveraineté
populaire et la règle de la majorité avaient été
établies dans une constitution de gouvernement civil
divinement inspirée (la constitution des États-Unis),
le Seigneur décréta que les décisions des
collèges gouvernants de son Église devaient être
prises en droiture et à l'unanimité (voir D&A
107:27-30). Le gouvernement de l'Église est théocratique,
pas démocratique. Comme James E. Faust l'a expliqué :
« Cette condition d'unanimité... assure que Dieu
dirige par l'Esprit, et non pas l'homme par la majorité ou le
compromis. » (L’Étoile, janvier 1990,
p. 9)
Aux
saints des derniers jours préoccupés par les biens
matériels, le Seigneur a dit : « Qu'ils se
repentent... de tous leurs désirs cupides devant moi, dit le
Seigneur, car que sont les biens pour moi ? » (D&A
117:4)
À
un Joseph Smith souffrant, retenu dans une prison répugnante
par le pouvoir sauvage de ses ennemis, le Seigneur donna ces conseils
apparemment incongrus sur l'exercice du pouvoir : « Aucun
pouvoir, aucune influence ne peuvent ou ne devraient être
exercés en vertu de la prêtrise autrement que par la
persuasion, la longanimité, la gentillesse, l'humilité
et l'amour sincère ; par la bonté et la
connaissance pure qui élèveront considérablement
l'âme sans hypocrisie et sans fausseté. »
(D&A 121:41-42)
Plus
tard, le Seigneur réaffirma que son pouvoir doit être
obtenu et exercé d'une manière différente du
pouvoir terrestre : « Et si quelqu'un cherche à
s'agrandir et ne recherche pas mon bon conseil, il n'aura aucun
pouvoir, et sa folie sera manifestée. » (D&A
136:19)
De
dispensation en dispensation, le Seigneur a choisi ses propres
porte-parole et a établi ses propres méthodes pour
accomplir son oeuvre. Un commentateur des Écritures a dit :
« Le Seigneur préfère les prophètes
aux érudits, la docilité à la richesse, et la
simplicité à la magnificence et à la splendeur
du monde. Le Christ est né dans une étable, pas dans un
palais romain ; ses apôtres, à l'exception de
Judas, étaient des pêcheurs peu instruits de la Galilée,
leurs lieux de dévotion les collines et les plaines de
Palestine. » (Joseph Fielding McConkie et Robert L.
Millett, Doctrinal Commentary on the Book of Mormon vol. 1, Salt Lake
City, 1987, p. 208)
L'apôtre
Jacques a conclu : « Ne savez-vous pas que l'amour du
monde est l'inimitié contre Dieu ? Celui donc qui veut être
ami du monde se rend ennemi de Dieu. » (Jacques 4:4)
Les
idées opposées sur le pouvoir illustrent les
différences entre ce qui relève de l'humain et ce qui
relève du divin. L'homme a tendance à penser au pouvoir
en terme de ce qui peut affecter les choses terrestres, comme
transférer les titres d'un terrain, abattre des arbres ou
tracer des pistes dans la nature. Le pouvoir de Dieu peut faire tout
cela, mais il contrôle aussi les choses souvent invisibles mais
toujours durables de l'éternité. Rudyard Kipling a
saisi la différence entre la nature temporaire du pouvoir de
l'homme et la nature pérenne du pouvoir de Dieu dans ces mots
prophétiques, adressés à l'empire britannique :
Appelée
au loin, notre marine s'est désintégrée ;
Sur
la dune et le cap se meurt le feu.
Voyez,
toute notre splendeur d'hier
Ne
fait plus qu'une avec Ninive et Tyr !
Juge
des nations, épargne nous malgré tout,
De
peur que nous n'oubliions, de peur que nous n'oubliions.
(Rudyard
Kypling, God of Our Fathers, Known of Old, Hymns of the Church of
Jesus Christ of Latter-day Saints, Salt Lake City, The Church of
Jesus Christ of Latter-day Saints, 1985, n° 80, 3ème
couplet)
Les
chapitres de ce livre illustrent la volonté du Seigneur que
son travail soit fait à sa manière. Ils opposent les
voies ou les méthodes du Seigneur et de son Église aux
voies ou aux méthodes du monde.
Les
chapitres 1 et 2 traitent de l'apprentissage par l'étude (la
raison) et par la foi (la révélation) qui toutes deux,
sont nécessaires. La raison venant en premier, elle peut
servir de critère de contrôle de l'authenticité.
La révélation authentique a le dernier mot à
propos de ce qui se rapporte à Dieu, car « nul ne
connaît [les] voies [de Dieu] si cela ne lui est révélé »
(Jacob 4:8). La révélation revêt plusieurs formes
et remplit de nombreuses fonctions. Les principes de l'apprentissage
par la révélation sont la foi, l'humilité, la
recherche par la prière, l'obéissance aux
commandements, le repentir, les bonnes oeuvres et l'étude des
Écritures.
Le
chapitre 3 oppose les preuves scientifiques aux signes que le
Seigneur nous a demandé de ne pas rechercher. Bien que les
signes et les miracles ne doivent pas être utilisés pour
convertir un incroyant, ils sont appropriés pour fortifier un
converti. « Les signes suivent ceux qui croient. »
(D&A 63:9)
Le
Seigneur a commandé que nous prenions soin des pauvres et des
nécessiteux à sa manière (voir D&A 104:16).
Le chapitre 4 explique les voies du Seigneur en matière
d'entraide et décrit comment ces principes ont été
appliqués dans l'Église depuis son rétablissement.
Le
chapitre 5 présente les avertissements du Seigneur à
propos des querelles. « En vérité, en
vérité, je vous le dis, celui qui a l'esprit de
querelle n'est pas de moi, mais il est du diable qui est le père
des querelles. » (3 Néphi 11:29) Les hommes sont
souvent procéduriers. Les saints des derniers jours devraient
éviter la querelle parce qu'elle les éloigne du
Seigneur et de son Esprit. Les voies du Seigneur sont l'harmonie et
l'unité.
Dans
le chapitre 6 sont présentés les principes directeurs
de la participation légitime d'un disciple de Jésus-Christ
à un litige. Ces principes mettent l'accent sur les
responsabilités plutôt que sur les droits. Ils incluent
le fait de pardonner, de régler les différends,
d'éviter la vengeance et de tenir compte des effets du litige
envisagé sur ceux qui pourraient en être affectés.
Le
chapitre 7 passe en revue les enseignements de l'Évangile
contre la critique. En opposition à l'esprit de chicane
couramment répandu dans la vie moderne, le Seigneur a commandé
aux fidèles de toutes les époques de s'abstenir de
rechercher les défauts et de médire. Ce commandement
inclut la critique des dirigeants de l'Église, mais cela ne
signifie pas que les saints des derniers jours n'ont pas la
possibilité de présenter leur différence de
point de vue aux dirigeants de l'Église ; cinq façons
correctes de le faire sont décrites.
Le
chapitre 8 explique l'action disciplinaire de l'Église, en
opposant les différents principes et les procédures qui
la régissent aux poursuites et aux procédures
judiciaires avec lesquelles on la confond parfois. L'action
disciplinaire de l'Église est fondée sur les doctrines
et les principes de l'Évangile, y compris le repentir qui est
nécessaire pour se qualifier afin d'obtenir la miséricorde
rendue possible par l'expiation. L'action disciplinaire de l'Église
aide au repentir et aux changements dans la vie qui sont essentiels
au salut.
La
différence entre les voies du Seigneur et celles du monde qui
apparaît dans un épisode rapporté dans l'évangile
de Jean est symbolique de toutes les autres. Alors qu'il traversait
la Samarie, Jésus se reposait au puits de Jacob. Une
Samaritaine vint pour puiser de l'eau, à qui il demanda à
boire. Alors qu'elle s'étonnait qu'un Juif lui adressa la
parole, il lui répondit que si elle savait qui il était,
elle lui demanderait de l'eau vive. Voyant qu'il n'avait aucun
ustensile pour tirer de l'eau du puits profond, elle lui demanda
comment il pourrait lui en donner.
Avant
de rappeler la réponse du Christ, voyons de quelle manière
cette situation est semblable à celle de ses disciples fidèles
dans le monde. Le Sauveur est avec nous, parfois personnellement,
fréquemment par l'intermédiaire de ses serviteurs, et
toujours par son Esprit. Son pouvoir est tel qu'il pourrait obtenir
toute chose sur cette terre. Il n'a pas besoin de l'eau du puits, de
la dîme et des offrandes de l'Église ou des services
individuels dans les autres oeuvres de son royaume. Il nous les
demande, comme il demanda à boire à la Samaritaine au
puits de Jacob, afin qu'il puisse nous donner en bénédiction
beaucoup plus que ce que nous lui donnons. Voilà la manière
de faire du Seigneur.
En
réponse à la question de savoir comment il pourrait
donner de l'eau vive à la Samaritaine sans aucun moyen pour en
tirer du puits, Jésus répondit : « Quiconque
boit de cette eau aura encore soif ; mais celui qui boira de
l'eau que je lui donnerai n'aura plus jamais soif, et l'eau que je
lui donnerai deviendra en lui une source jaillissante jusque dans la
vie éternelle. » (Jean 4:13-14)
Nous
pouvons comparer les diverses méthodes du monde aux
instruments qui permettent de tirer de l'eau d'un puits. Nous avons
besoin de ces instruments. Nous pouvons les utiliser et nous les
utilisons pour notre cheminement terrestre.
Mais
en même temps dans nos activités, dans nos
responsabilités civiques, et dans notre participation au sein
d'autres organisations, nous ne devons jamais oublier les paroles du
Sauveur, « Quiconque boit de cette eau aura encore soif ».
C'est seulement par l'intermédiaire de Jésus-Christ, le
Seigneur et le Sauveur de ce monde, que nous pouvons obtenir l'eau
vive grâce à laquelle ceux qui en prennent n'auront plus
jamais soif, et pour lesquels elle sera « une source
jaillissante jusque dans la vie éternelle ». Nous
ne pouvons obtenir cette eau par des moyens terrestres.
Jésus
nous enseigna comment obtenir l'eau vive. La leçon qu'il donna
à la Samaritaine nous rappelle ceci : quelle que soit
notre maîtrise des talents, des connaissances et des méthodes
de ce monde pour puiser l'eau, ce que nous obtenons du puits de Jacob
apporte seulement un secours temporaire. L'eau du puits de Jacob,
bien qu'essentielle dans la satisfaction des besoins temporaires, a
une valeur insignifiante à côté de ce que nous
pouvons puiser dans les paroles de Jésus et recevoir de son
sacrifice expiatoire. Et quand nous cherchons à obtenir ou à
partager cette eau vive, nous devons le faire à la manière
du Seigneur.
CHAPITRE
1 : L'APPRENTISSAGE
L'exemple
le plus simple à propos des différences entre les voies
du Seigneur et les voies du monde se trouve dans notre façon
d'apprendre. Dans la condition mortelle nous avons à apprendre
des choses concernant la terre et ses créatures. Nous devrions
aussi en apprendre sur Dieu : sa nature, son Évangile et
les commandements donnés à ses enfants.
Dans
la révélation moderne, le Seigneur nous a dit de
« [chercher] la science par l'étude mais aussi par
la foi » (D&A 109:7). En cherchant la science par
l'étude, nous utilisons la raison. En cherchant la science par
la foi, nous devons nous appuyer sur la révélation.
Pour obéir à la loi céleste, nous devrions
chercher la science par le raisonnement et par la révélation.
Tout
d'abord, je vais définir ce que j'entends par raisonnement et
par révélation. Le raisonnement est un processus de
pensée utilisant les faits et la logique qui peuvent être
communiqués à une autre personne et vérifiés
grâce à des critères objectifs (c'est à
dire mesurables). La révélation est une communication
de Dieu à l'homme. Elle ne peut pas être définie
ni vérifiée comme l'est le raisonnement. Ce dernier
implique la pensée et la démonstration. La révélation
implique l'écoute, la vision, la compréhension ou le
sentiment. Le raisonnement peut être collectif. La révélation
est toujours individuelle. Le raisonnement est un processus. La
révélation est un moment vécu.
Tels
que définis ici, le raisonnement et la révélation
ne représentent pas toutes les façons d'acquérir
la connaissance. Par exemple, je sais que j'aime ma femme et je sais
que je préfère certaines couleurs et certains sons. Je
n'attribue cette connaissance ni au raisonnement ni à la
révélation tels que je les définis.
Je
ne définirai pas ces autres moyens de connaissance ni ne
décrirai leur relation avec les deux méthodes que je
présente. Certains pourraient trouver à redire sur des
définitions incomplètes, mais elles servent mon propos
qui n'est pas de donner une liste exhaustive des divers processus ou
méthodes d'acquisition de la connaissance, mais seulement de
mettre en évidence la différence qui existe entre une
méthode humaine répandue et un précieux don
céleste.
Dans
ce chapitre et dans le suivant je vais décrire la nature du
raisonnement et de la révélation et la relation entre
eux, en mettant l'accent sur leur utilisation pour acquérir de
la connaissance spirituelle.
L'apprentissage
par l'étude et par le raisonnement
Ma
connaissance des processus d'apprentissage par l'étude et par
le raisonnement vient de mon expérience personnelle d'étudiant
dans deux universités, de professeur dans trois facultés
de droit, de directeur d'une fondation interdisciplinaire sur la
recherche juridique, de président de l'université
Brigham Young, et de juge à la Cour Suprême d'Utah.
En
recherchant la connaissance par l'étude et par le
raisonnement, nous examinons la sagesse accumulée dans divers
domaines, nous employons des techniques empiriques pour rassembler de
nouveaux indices et nous utilisons le pouvoir de la raison mis en
nous par notre Créateur. Il s'agit là de moyens
courants pour acquérir des connaissances. Des millions
d'hommes et de femmes sont engagés dans cette recherche de la
connaissance dans tous les domaines imaginables, de la pratique de
l'agriculture et de l'hygiène personnelle de base aux
techniques actuelles les plus avancées de la science médicale
et de l'exploration de l'espace, pour ne citer que quelques exemples.
La civilisation moderne a une dette incalculable à l'égard
de la recherche par l'étude et par le raisonnement.
L'étude
et le raisonnement sont également essentiels pour acquérir
des connaissances à propos de Dieu et de son Évangile.
L'expérience du jeune Joseph Smith illustre cela. De la même
manière que Joseph étudia la Bible et comprit par le
raisonnement la manière dont ses promesses s'appliquaient à
lui, chacun d'entre nous peut utiliser cette méthode pour
commencer sa recherche de la connaissance sacrée. Ensuite,
comme ce garçon croyant, nous devons prier et chercher à
recevoir une communication divine (la signification de cette séquence
– étude et raisonnement suivis de la révélation –
est présentée dans le chapitre 2).
Le
raisonnement est aussi utilisé dans la communication aux
autres de ce que nous avons appris dans le domaine spirituel.
L'apôtre Pierre enseigna : « Sanctifiez le
Seigneur Dieu dans votre cœur ; et soyez prêts à
toujours donner une réponse avec douceur et respect à
tout homme qui vous demande raison de l'espérance qui est en
vous. » (1 Pierre 3:15, traduction de Joseph Smith) En
d'autres termes, les croyants devraient s'efforcer de donner aux
incroyants une raison de leur foi, en essayant de communiquer la
connaissance sacrée en des termes compréhensibles pour
ceux qui semblent s'appuyer exclusivement sur le raisonnement. C'est
peut-être ce que signifient d'autres Écritures sur le
raisonnement entre les hommes à propos du divin (Voir, par
exemple, D&A 49:4 ; 66:7 ; 68:1).
Finalement,
la majeure partie de la connaissance sacrée - ce que nous
appelons quelquefois « les vérités de
l'Évangile » - peut être approchée,
expliquée et comprise grâce au raisonnement. Ainsi, nous
lisons dans Ésaïe : « Venez et plaidons,
dit l'Éternel » (Ésaïe 1:18) ;
s'ensuit une explication des conséquences du sacrifice
expiatoire. Dans la révélation moderne cette même
invitation à « raisonner ensemble... comme un homme
raisonne avec un autre » est suivie d'un exposé
logique sur l'opposition entre les méthodes et les effets de
la proclamation de l'Évangile « par l'Esprit de
vérité » et par « quelque autre
moyen » (D&A 50:10-11, 17).
En
dépit de l'importance de l'étude et du raisonnement, si
nous cherchons à connaître Dieu par cette seule méthode,
nous sommes certains de ne pas atteindre notre but. Nous pourrons
même prendre une mauvaise direction. Pourquoi en est-il ainsi ?
Parce que Dieu a prescrit une autre méthode. Pour connaître
Dieu, nous n'avons pas besoin de plus d'étude ou de
raisonnement, de plus de technologie ou d'éducation, mais
davantage de foi et de révélation.
L'apprentissage
par la foi et par la révélation
Les
saints des derniers jours proclament la réalité et
l'efficacité de l'apprentissage par la foi et par la
révélation.
La
manière du Seigneur de se révéler et de
communiquer la compréhension des doctrines et des ordonnances
de son Évangile est la révélation par le
Saint-Esprit, l'Esprit de Dieu. En effet, le prophète Jacob a
déclaré qu'il est impossible à un homme non
inspiré de comprendre Dieu : « Et nul ne
connaît ses voies, si cela ne lui est révélé ;
c'est pourquoi, mes frères, ne méprisez pas les
révélations de Dieu » (Jacob 4:8). De même,
l'apôtre Paul enseigna : « Aucun homme ne
connaît les choses de Dieu, si ce n'est celui qui a l'Esprit de
Dieu » (1 Corinthiens 2:11, traduction de Joseph
Smith).
Gordon
B. Hinckley, président de l'Église, explique :
« Bien sûr, nous croyons à l'importance de se
ultiver, mais l'intellect n'est pas la seule source de connaissance.
Nous avons une promesse, donnée sous l'inspiration du
Tout-Puissant, présentée en ces nobles termes :
'Dieu vous donnera la connaissance par son Saint-Esprit, oui, par le
don indicible du Saint-Esprit' (D&A 121:26) » (Gordon
B. Hinckley, Faith, the Essence of True Religion, Salt Lake City,
Deseret Book, 1989, p. 78).
Se
référant aux révélations reçues
dans les plus hauts conseils de l'Église, James E. Faust dit
que « ces lumière et vérité dépassent
l'intelligence et le raisonnement humains » (James E.
Faust, Reach Up for the Light, Salt Lake City, Deseret Book, 1990, p.
115).
Toute
personne ayant reçu le don du Saint-Esprit est en droit de
recevoir cette même lumière et vérité.
Le
Sauveur a souligné l'importance de l'acquisition de la
connaissance par la révélation et a décrit
comment cela se passe. Il a demandé à ses disciples :
« Qui dites-vous que je suis ? » Simon Pierre
répondit : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu
vivant ». Jésus répondit : « Tu
es heureux, Simon, fils de Jonas ; car ce ne sont pas la chair
et le sang qui t'ont révélé cela, mais mon Père
qui est dans les cieux. » (Matthieu 16:15-17)
D'autres
passages du Nouveau Testament enseignent que la révélation
est le moyen d'acquérir de la connaissance à propos de
Dieu et des vérités de son Évangile.
L'apôtre
Jean enseigna aux humbles disciples du Christ que, ayant « reçu
l'onction de la part de celui qui est saint » (le
Saint-Esprit), « vous n'avez pas besoin qu'on vous
enseigne » puisque « son onction [que vous avez
reçue de lui] vous enseigne toutes choses, et qu'elle est
véritable » (1 Jean 2:20, 27).
L'apôtre
Paul rappela aux Corinthiens qu'il ne les avait pas enseignés
par les « discours persuasifs de la sagesse ».
Ses enseignements reposaient « sur une démonstration
d'Esprit et de puissance » afin que leur foi « fût
fondée, non sur la sagesse des hommes, mais sur la puissance
de Dieu ». Il avait enseigné « la
sagesse de Dieu », que Dieu avait révélée
« par l'Esprit. » Il expliqua que l'homme
n’acquiert pas la connaissance spirituelle si ce n'est par
l'Esprit de Dieu, et il affirma : « nous... avons
reçu... l'Esprit qui vient de Dieu, afin que nous connaissions
les choses que Dieu nous a données par sa grâce ».
Concluant
son enseignement, Paul dit qu'il parlait « non avec des
discours qu'enseigne la sagesse humaine, mais avec ceux qu'enseigne
l'Esprit ». Il opposa cette méthode d'acquisition
de la connaissance (ce qu'un apôtre contemporain a appelé
« la méthodologie de l'Esprit » ;
voir Neal A. Maxwell, A Wonderful Flood of Light, Salt Lake City,
Bookcraft, 1990, p. 75) aux attentes et aux attitudes du monde :
« Mais l'homme animal ne reçoit pas les choses de
l'Esprit de Dieu, car elles sont une folie pour lui, et il ne peut
les connaître, parce que c'est spirituellement qu'on en juge. »
(1 Corinthiens 2:4-14).
Les
révélations de cette dispensation contiennent de
nombreux avertissements sur l'importance de s'appuyer sur Dieu quand
nous cherchons à apprendre ce qui le concerne. Dans la préface
à ses révélations le Seigneur dénonça
« ceux qui ne veulent pas écouter sa voix, ni celle
de ses serviteurs... chacun suit sa propre voie selon l'image de son
Dieu, dont l'image est à la ressemblance du monde et dont la
substance est celle d'une idole ». « C'est
pourquoi », continue la révélation, Joseph
Smith, le prophète, a été appelé et le
Seigneur a parlé des cieux, et « les choses faibles
du monde s'avanceront pour abattre les puissantes et les fortes, afin
que l'homme ne conseille pas son semblable et ne place pas sa
confiance dans le bras de la chair. » (D&A 1:14, 16,
19)
Cette
révélation fait écho à l'avertissement
d'Ésaïe cité dans le Livre de Mormon (Ésaïe
8:10 ; 2 Néphi 18:10). Le prophète Néphi
enseigna l'importance de se fier à la révélation
plutôt qu'aux « préceptes des hommes » :
« Maudit celui qui met sa confiance en l'homme, ou qui
fait de la chair son bras, ou écoute les préceptes des
hommes, à moins que leurs préceptes ne soient donnés
par le pouvoir du Saint-Esprit. » (2 Néphi
28:31)
Les
premiers dirigeants de l'Église rétablie ont dû
apprendre que la valeur du raisonnement humain venait en second après
les révélations de Dieu. À plusieurs reprises,
le Seigneur a réprimandé Joseph Smith, David Whitmer et
d'autres pour ne pas s'être souciés de ce qui le
concerne, pour avoir cédé « aux persuasions
des hommes » (D&A 3:6 ; 5:21), et pour s'être
« laissé persuader par ceux à qui [le
Seigneur n'avait] pas donné de commandements » (D&A
30:2). Comme certains membres de l'Église aujourd'hui, ces
premiers dirigeants ont dû apprendre que l'Évangile
englobe « beaucoup de grandes choses, difficiles à
comprendre si l'on n'a point recours au Seigneur. »
(1 Néphi 15:3)
Dans
l'acquisition de la connaissance sacrée, la raison doit céder
le pas à la révélation. Je crois que c'est ce
que le Seigneur a enseigné quand il parla de sa seconde venue
et de l'accomplissement de la parabole des dix vierges : « Ceux
qui sont sages, ont accepté la vérité, ont pris
le Saint-Esprit pour guide et n'ont pas été séduits
– en vérité, je vous le dis, ils ne seront
pas abattus et jetés au feu, mais supporteront le jour. »
(D&A 45:57)
Bruce
R. McConkie a toujours affirmé la prédominance de la
foi et de la révélation dans l'étude de
l'Évangile. Par exemple : « La vraie religion
vient de Dieu par révélation. Elle est manifestée
à ceux qui ont un talent pour la spiritualité et qui la
comprennent. Elle est cachée, inconnue et mystérieuse
pour tous les autres. Pour comprendre les choses du monde, on doit
être éclairé intellectuellement ; pour
appréhender et comprendre ce qui se rapporte à Dieu, on
doit être éclairé spirituellement. Une des
grandes erreurs de la chrétienté moderne est de s'en
remettre à ceux qui sont particulièrement doués
intellectuellement pour être guidé en matière de
religion, plutôt que de se tourner vers ceux qui comprennent
les choses de l'Esprit, qui reçoivent la révélation
personnelle du Saint-Esprit. » (Bruce R. McConkie,
Doctrinal New Testament Commentary, Salt Lake City, Bookcraft, 1973,
3:83-84)
J'en
dirai davantage à ce sujet dans le chapitre 2.
Les
formes et les fonctions de la révélation
Pour
comprendre comment nous pouvons apprendre par la révélation,
il est nécessaire de connaître les différentes
formes et les diverses fonctions de la révélation.
L'expérience
que nous appelons révélation peut revêtir
différentes formes. Quelques prophètes, comme Moïse
et Joseph Smith, ont parlé avec Dieu face à face.
Quelques personnes ont eu des communications face à face avec
des anges. D'autres révélations sont venues, comme
James E. Talmage l'a décrit, « par les songes du
sommeil ou par des visions de l'esprit à l'état de
veille » (James E. Talmage, Articles de foi, Église
de Jésus-Christ des saints des derniers jours, 1983, p. 280).
Dans
ses formes les plus familières, la révélation
vient par des paroles, des pensées ou des sentiments
communiqués à l'esprit. « Voici »,
dit le Seigneur à Oliver Cowdery, « je parlerai à
ton esprit et à ton coeur par le Saint-Esprit »
(D&A 8:2). C'est l'expérience décrite par Énos
quand il dit : « la voix du Seigneur se fit entendre
dans mon [esprit] » (Énos 1:10). C'est l'expérience
décrite par Néphi quand il rappela à ses frères
égarés que le Seigneur leur avait souvent parlé
d'une petite voix douce, mais qu'ils avaient perdu toute sensibilité
de sorte qu'ils ne pouvaient pas ressentir ses paroles (voir 1 Néphi
17:45).
Nous
appelons souvent inspiration ces formes les plus familières de
la révélation. Les incitations et les pensées
inspirées peuvent se manifester de différentes façons :
notre intelligence est éclairée (D&A 6:15), nous
recevons des sentiments positifs ou négatifs au sujet de plans
d'action proposés, ou même nous sommes édifiés
par des émotions suscitées par des réalisations
inspirantes, dans le domaine artistique par exemple. Boyd K. Packer a
expliqué : « L'inspiration vient davantage
sous la forme d'un sentiment que sous la forme d'un son. »
(L’Étoile, mai 1980, n° 5, p. 34)
Toutes
ces formes de révélation sont réelles, et toutes
répondent au désir d'apprendre de la personne qui les
reçoit.
L'expérience
de la révélation est accessible à tout le monde.
Le président Lorenzo Snow a déclaré que c'est
« le grand avantage de tout saint des derniers jours...
d'avoir accès à des manifestations quotidiennes de
l'Esprit » (Lorenzo Snow, Conference Report, avril 1899,
p. 52). Le président Harold B. Lee a enseigné :
« Chaque homme a le droit d'exercer ces dons et ces droits
dans la conduite de ses propres affaires, en élevant ses
enfants dans la bonne voie, dans la pratique de son métier ou
dans tout autre domaine. C'est son droit de jouir de l'esprit de
révélation et d'inspiration pour être sage et
prévoyant, juste et bon en tout ce qu'il fait. »
(Harold B. Lee, Stand Ye in Holy Places, Salt Lake City, Deseret
Book, 1974, p. 141-142)
Quelle
qu'en soit la forme, la révélation peut remplir
diverses fonctions. J'en décrirai huit : témoigner,
prophétiser, réconforter, inspirer, informer, retenir,
confirmer et déterminer.
1.
Le témoignage du Saint-Esprit que Jésus est le Christ
et que l'Évangile est la vérité est une
révélation de Dieu. De même que la révélation
donnée à l'apôtre Pierre (voir Matthieu 16:17),
cette connaissance peut faire partie de l'expérience
personnelle de chacun de ceux qui recherchent la vérité.
Une fois reçue, cette révélation devient un
principe directeur pour nous guider dans toutes les activités
de la vie.
2.
La prophétie est une autre fonction de la révélation.
Sous l'influence du Saint-Esprit, un membre fidèle de l'Église
peut être inspiré à pressentir un événement
le concernant, tel qu'un appel à servir dans l'Église.
Après la naissance de notre cinquième enfant, ma femme
a cessé d'avoir des enfants. Après plus de dix ans,
nous conclûmes que notre famille ne s'agrandirait plus, ce qui
nous chagrina. Puis un jour où ma femme était au
temple, l'Esprit lui murmura qu'elle aurait un autre enfant. Cette
révélation prophétique s'est accomplie un an et
demi plus tard avec la naissance de notre sixième enfant que
nous avions attendu pendant treize ans.
3.
Une autre fonction de la révélation est de réconforter.
C'est cette sorte de révélation que reçut Joseph
Smith, le prophète, quand il était dans la prison de
Liberty. Après de nombreux mois dans des conditions
déplorables, il en appela au Seigneur, de douleur et de
solitude, le suppliant de se souvenir de lui et de ses saints
persécutés. La réponse de réconfort fut
la suivante : « Mon fils, que la paix soit en ton
âme ! Ton adversité et ton affliction ne seront que
pour un peu de temps ; Et alors, si tu les supportes bien, Dieu
t'exaltera en haut ; tu triompheras de tous tes ennemis »
(D&A 121:7-8). Dans une révélation suivante, le
Seigneur déclara que quelles que soient les tragédies
ou les injustices qui arriveraient au prophète, « sache,
mon fils, que tout cela te donnera de l'expérience et sera
pour ton bien » (D&A 122:7-8).
Chacun
d'entre nous connaît d'autres exemples de révélations
de réconfort. Certains ont été réconfortés
parce qu'ils ont vu des personnes qu'ils aimaient et qui étaient
parties ou parce qu'ils ont senti leur présence. La veuve d'un
de mes amis m'a dit qu'elle avait ressenti la présence de son
mari décédé qui l'assurait de son amour et de
son intérêt pour elle. D'autres ont été
réconfortés en s'adaptant à la perte d'un
emploi, à une promotion en affaires ou même à un
mariage brisé. Une révélation de réconfort
peut aussi venir en relation avec une bénédiction de la
prêtrise, soit par des paroles ou simplement par le sentiment
éprouvé en relation avec la bénédiction.
Une
autre sorte de révélation de réconfort, c'est
l'assurance qu'un péché peut être pardonné.
Après avoir prié avec ferveur pendant un jour et une
nuit, un prophète du Livre de Mormon, Énos, écrit
qu'il entendit une voix qui lui disait : « tes péchés
te sont [pardonnés] et tu seras béni ».
Ainsi, écrit Énos « ma culpabilité
était balayée » (Énos 1:5-6). Cette
assurance, qui vient quand quelqu'un a rempli toutes les étapes
du repentir, confirme que le pécheur repentant a été
pardonné. Alma a dit que dès lors il ne fut « plus
torturé du souvenir » de ses péchés.
« Et ô, quelle joie, quelle lumière
merveilleuse je vis ; oui, mon âme était remplie
[de] joie... il ne peut rien y avoir d'aussi exquis et d'aussi doux
que ma joie. » (Alma 36:19-21)
4.
En relation étroite avec le sentiment de réconfort, le
quatrième objectif ou la quatrième fonction de la
révélation est d'élever. À certains
moments de notre vie, nous avons tous besoin d'être tirés
de la dépression, d'un sentiment de peur ou d'incapacité
ou simplement d'un état de médiocrité
spirituelle. Parce que cela nous ennoblit l'esprit et nous aide à
résister au mal et à chercher le bien, je crois que le
sentiment d'être édifié qui nous est donné
par la lecture des Écritures ou par la bonne musique, l'art ou
la littérature de qualité est un objectif distinct de
la révélation.
5.
Le cinquième objectif de la révélation est
d'informer. Cela peut consister en une inspiration qui donne à
quelqu'un les mots à dire en une certaine occasion, telle la
bénédiction patriarcale ou les discours ou autres
paroles prononcées sous l'influence du Saint-Esprit. Le
Seigneur a commandé à Joseph Smith et à Sidney
Rigdon d'élever la voix et de prononcer les pensées
mises dans leur coeur : « Car ce que vous devrez dire
vous sera donné sur l'heure, oui, au moment même »
(D&A 100:5-6 ; voir aussi D&A 84:85).
En
certaines occasions sacrées, les renseignements ont été
donnés dans des conversations face à face avec des
personnages célestes, comme dans les visions rapportées
dans les Écritures anciennes et modernes. En d'autres
circonstances, les renseignements nécessaires sont communiqués
par le murmure tranquille de l'Esprit. Un enfant perd quelque chose
qu'il aimait, prie pour avoir de l'aide et reçoit
l'inspiration nécessaire pour le trouver ; un adulte
rencontre un problème professionnel, familial, ou dans ses
recherches généalogiques, il prie et est conduit vers
le renseignement nécessaire pour le résoudre ; en
suivant fidèlement le conseil inspiré d'un dirigeant de
l'Église, un membre obtient la réponse à ses
prières pour être guidé ; un dirigeant dans
l'Église prie pour savoir qui le Seigneur voudrait qu'il
appelle pour remplir un poste, et l'Esprit lui murmure un nom ;
un membre étudie les Écritures dans un esprit de prière
et reçoit une nouvelle compréhension des doctrines de
l'Évangile éternel.
Dans
ces exemples que nous connaissons tous, le Saint-Esprit agit en sa
qualité de pédagogue et de révélateur en
communiquant les renseignements et les vérités
nécessaires à l'édification et à la
direction de celui qui les reçoit.
6.
La sixième fonction de la révélation consiste à
nous retenir de faire quelque chose. Ainsi, au milieu d'un grand
discours sur la puissance du Saint-Esprit, Néphi déclare
soudain : « Et maintenant... je ne puis en dire
davantage ; l'Esprit arrête ma parole. »
(2 Néphi 32:7)
La
révélation qui retient est l'une des formes les plus
fréquentes de la révélation. Elle vient souvent
par surprise, quand nous n'avons pas demandé de révélation
ni de directives sur un sujet particulier. Mais si nous gardons les
commandements de Dieu et si nous vivons en accord avec l'Esprit, une
force nous retiendra et nous écartera de ce que nous ne
devrions pas faire. Bien que n'étant pas liée de façon
évidente aux processus conventionnels de l'étude, cette
fonction de la révélation donne un message qui fait
partie des leçons les plus importantes que nous puissions
apprendre.
L'une
des premières fois où j'ai été retenu par
l'Esprit est arrivée peu de temps après avoir été
appelé conseiller dans une présidence de Pieu à
Chicago. Lors de l'une de nos premières réunions de
présidence de pieu, notre président de pieu proposa que
notre nouveau centre de pieu fût construit à un certain
endroit. Je vis aussitôt quatre ou cinq bonnes raisons pour
dire que ce n'était pas le bon endroit. Quand on me demanda
mon avis, je refusai la proposition, en donnant chacune de ces bonnes
raisons. Le président de pieu nous proposa avec sagesse de
prier chacun à ce sujet pendant une semaine et d'en discuter
plus tard dans notre prochaine réunion. Presque avec
indifférence je priai à ce propos et j'eus
immédiatement la forte impression que j'avais tort, que je
faisais obstacle à la volonté du Seigneur et que je
devais cesser de m'opposer à ce projet. Inutile de dire que
j'étais retenu et que j'ai rapidement donné mon accord
pour la construction projetée. D'ailleurs, il ne tarda pas à
devenir évident qu'il était sage de construire le
centre de pieu à cet endroit, même à mes yeux.
Les raisons pour lesquelles j'avais fait obstruction s'avérèrent
manquer de portée et je fus bientôt reconnaissant
d'avoir été retenu de m'y fier.
Quelques
années plus tard, j'écrivis un livre de droit. Cette
publication consistait à réunir plusieurs centaines
d'arrêts de cour ainsi que de la documentation explicative
rédigée par le rédacteur. Mon assistant et moi
avions presque fini le travail sur ce livre, y compris les recherches
nécessaires pour nous assurer que ces arrêts de cour
n'avaient pas été abrogés ni cassés.
Juste avant de l'envoyer à l'éditeur, je feuilletai le
manuscrit et un arrêt de cour en particulier attira mon
attention. En me penchant dessus, je ressentis quelque chose de très
désagréable. J'ai demandé à mon assistant
de vérifier à nouveau cet arrêt pour voir si tout
était en ordre. Il me dit que oui. À la révision
suivante du manuscrit complet, je fus à nouveau arrêté
par ce cas, encore avec une forte sensation de malaise. Cette
fois-là, je me rendis moi-même à la bibliothèque
de droit. Dans certaines publications récentes, je découvris
que ce cas venait juste d'être cassé en appel. Si cet
arrêt avait été publié dans mon livre,
cela aurait causé une grande gêne professionnelle. J'en
avais été épargné grâce à la
faculté de l'Esprit à nous freiner.
7.
Un moyen courant de rechercher la révélation consiste à
proposer un certain mode d'action puis de prier pour recevoir une
confirmation par l'inspiration. Le Seigneur a expliqué ce
genre de révélation quand Oliver Cowdery ne réussissait
pas à traduire le Livre de Mormon malgré ses efforts :
« Mais voici, tu n'as pas compris ; tu as pensé
que je te le donnerais, tandis que ton seul souci, c'était de
me le demander. Mais voici, je te dis que tu dois l'étudier
dans ton esprit ; alors tu dois me demander si c'est juste, et
si c'est juste, je ferai en sorte que ton sein brûle au-dedans
de toi ; c'est ainsi que tu sentiras que c'est juste. »
(D&A 9:7-8)
De
même, le prophète Alma compare la parole de Dieu à
une semence et dit aux personnes qui étudient l'Évangile
que si elles veulent faire la place à la semence pour qu'elle
puisse être plantée dans leur coeur, la semence leur
épanouira l'âme et leur éclairera l'intelligence
et commencera à leur être délicieuse (voir Alma
32). Ce sentiment est la confirmation par le Saint-Esprit de la
vérité de la parole.
Dans
un discours sur le libre arbitre et l'inspiration, Bruce R. McConkie
a mis l'accent sur notre responsabilité de faire tout notre
possible avant de rechercher la révélation. Il a donné
un exemple très personnel: Quand il décida de choisir
son épouse éternelle, il n'alla pas trouver le Seigneur
pour lui demander qui il devait épouser. « Je suis
allé trouver la jeune fille que je voulais, »
a-t-il dit. « Elle me plaisait ;... on aurait dit que
cela devait être. Puis tout ce que j'ai fait, a été
de prier le Seigneur et de lui demander qu'il me guide et me dirige à
propos de la décision que j'avais prise. »
(L’Étoile, mai 1978, p. 17-24)
Bruce
R. McConkie résuma son conseil sur l'équilibre entre le
libre arbitre et l'inspiration de la manière suivante :
« Nous sommes censés utiliser les dons, les
talents, les capacités, le bon sens, le jugement et le libre
arbitre que nous avons reçus... Si nous demandons avec foi, il
est implicite et indispensable que nous fassions auparavant tout en
notre pouvoir pour atteindre le but que nous recherchons... Nous
sommes censés faire tout notre possible, puis rechercher une
réponse du Seigneur, un signe confirmant que nous sommes
arrivés à la bonne conclusion. » (op. cit.)
C'est
la méthode que les autorités générales
suivent habituellement lorsqu'elles cherchent la révélation
pour l'appel d'un président de pieu. Elles ont une entrevue
avec les personnes résidant dans le pieu qui ont acquis une
certaine expérience dans l'administration de l'Église,
leur posant des questions et écoutant leurs réponses.
Pendant ces entretiens, elles prient à propos de chaque
personne qui a eu un entretien avec elles et qui a été
mentionnée. Enfin, elles proposent une décision à
propos du nouveau président de pieu. Cette proposition est
ensuite soumise au Seigneur dans une prière. Si le choix est
alors confirmé, l'appel est fait. S'il n'est pas confirmé
ou si les autorités générales sont retenues, la
proposition est ajournée et le processus continue jusqu'à
ce qu'une nouvelle proposition prenne forme et qu'une révélation
vienne la confirmer.
Il
arrive parfois que ce soient des révélations de
confirmation et de retenue ensemble. Par exemple, pendant que je
travaillais à l'université Brigham Young, j'avais été
invité à faire un discours devant l'association
nationale des juges. Comme cela demandait des jours de préparation,
c'était le genre de tâche que je déclinais
habituellement. Mais quand j'ai commencé à dicter une
lettre pour refuser l'invitation particulière, je me suis
senti retenu. Je me suis interrompu et j'ai reconsidéré
la chose. J'ai ensuite envisagé comment je pourrais accepter
cette invitation. Vu sous cet angle, j'ai ressenti l'assurance de
l'Esprit et j'ai su que c'était ce que je devais faire.
Le
discours que je donnai et les contacts noués à cette
occasion furent à l'origine de nombreuses invitations
importantes pour l'université Brigham Young. Le discours a eu
pour résultat que l'université s'est fait des amis qui
ont contribué à susciter une coalition importante pour
s'opposer à une ingérence illégale ou excessive
du gouvernement envers les universités. Je ne doute pas,
rétrospectivement, que cette invitation à parler que
j'ai failli décliner fut l'une des occasions où un acte
apparemment insignifiant fit une grande différence. C'est à
ces occasions qu'il nous est indispensable de recevoir la direction
du Seigneur, et c'est à ces occasions que la révélation
viendra pour nous aider si nous voulons l'écouter ou y prêter
attention.
8.
La huitième fonction de la révélation regroupe
les cas où l'Esprit pousse quelqu'un à l'action. Dans
ce cas, la personne concernée ne propose pas une action en
particulier que l'Esprit confirme ou restreint. La révélation
vient quand on ne la recherche pas et pousse à une action qui
n'a pas été proposée. Ce genre de révélation
est évidemment moins commun que les autres types, mais sa
rareté ne lui en donne que plus d'importance.
On
en trouve un exemple dans les Écritures dans le premier livre
de Néphi. Quand Néphi eut obtenu les précieuses
annales à Jérusalem, l'Esprit du Seigneur lui commanda
de tuer Laban alors qu'il était étendu, ivre, dans la
rue. Cet acte répugnait tant à Néphi qu'il
hésita et lutta contre l'Esprit mais il reçut à
nouveau le commandement de tuer Laban et il finit par obéir à
la révélation (voir 1 Néphi 4).
Les
étudiants de l'histoire de l'Église se rappelleront le
récit de Wilford Woodruff : une nuit, il se sentit poussé
à déplacer son chariot et ses mules loin d'un grande
arbre. Il le fit, et sa famille et ses animaux furent sauvés
quand l'arbre fut abattu par une tornade qui se déchaîna
trente minutes plus tard (voir Matthias F. Cowley, Wilford Woodruff :
History of His Life and Labors, Salt Lake City, Bookcraft, 1964, p.
331-332).
Lorsqu'elle
était jeune, ma grand-mère, Chasty Olsen, vécut
une expérience semblable. Elle s'occupait d'enfants qui
jouaient dans le lit d'une rivière à sec près de
chez eux à Castle Dale, en Utah. Soudain, elle entendit une
voix qui l'appelait par son nom et qui lui demandait de sortir les
enfants du lit de la rivière et de regagner les rives. C'était
une journée ensoleillée, et il n'y avait aucun signe de
pluie. Elle ne vit pas la raison de faire attention à la voix
et continua à jouer. La voix lui reparla avec urgence. Cette
fois, elle fit attention à l'avertissement. Rassemblant
rapidement les enfants, elle se précipita vers la rive. Juste
au moment où elle l'atteignait, une énorme vague qui
avait été causée par une averse dans la montagne
à de nombreux kilomètres de distance dévala le
canyon en mugissant, passant par l'endroit où jouaient les
enfants. Sans cette révélation compulsive, elle et les
enfants auraient été perdus.
J'ai
vécu une expérience précieuse de révélation
de persuasion quelques mois après avoir commencé à
travailler à l'université Brigham Young. En tant que
nouveau président sans expérience, j'avais de nombreux
problèmes, de nombreuses décisions à prendre. Je
dépendais beaucoup du Seigneur. Un jour d'octobre 1971, je me
rendis en voiture dans un endroit retiré du Canyon de Provo
pour méditer sur un problème particulier. Bien que je
fusse seul et à l'abri des interruptions, je me trouvai
incapable de penser au problème à résoudre. Une
autre question en suspens que je n'étais pas encore prêt
à considérer me venait constamment à l'esprit :
Devrions-nous modifier le calendrier académique de
l'université Brigham Young pour terminer le trimestre
d'automne avant Noël ?
Après
dix ou quinze minutes d'efforts infructueux pour exclure ce sujet de
mes pensées, je compris ce qui se passait. Le problème
du calendrier ne me semblait pas de circonstance et je ne cherchais
certainement pas la direction de l'Esprit à ce propos, mais
l'Esprit essayait de communiquer avec moi à ce sujet.
Immédiatement, j'accordai toute mon attention à cette
question et je commençai à noter mes pensées sur
un morceau de papier. En quelques minutes j'avais noté les
détails d'un calendrier de trois trimestres, avec tous ses
avantages de taille. Je suis retourné à toute allure
vers le campus, j'ai revu cela avec mes collègues et j'ai
trouvé qu'ils étaient enthousiastes. Quelques jours
plus tard, le comité directeur approuva notre proposition de
nouveau calendrier et nous publiâmes ses dates, juste à
temps pour qu'elles puissent entrer en vigueur pour l'automne 1972.
Depuis
ce temps j'ai relu ces paroles de Joseph Smith, le prophète et
j'ai compris que j'avais vécu l'expérience qu'il
décrivait : « Une personne peut profiter
beaucoup en faisant attention au premier appel de l'Esprit de
révélation. Par exemple, lorsque vous sentez
l'intelligence pure couler en vous, elle peut vous donner des
inspirations soudaines... et ainsi, en apprenant à connaître
et à comprendre l'Esprit de Dieu, vous pourrez progresser dans
le principe de révélation. » (Enseignements
du prophète Joseph Smith, p. 118)
Dans
toutes ses formes et ses fonctions, la révélation se
distingue de l'étude et du raisonnement. La révélation
est une expérience et le plus souvent elle est communiquée
par un sentiment. C'est la manière par laquelle Dieu
communique avec ses enfants. C'est un moyen essentiel pour acquérir
de la connaissance de Dieu et sur Dieu.
Conditions
nécessaires pour recevoir la révélation
Les
Écritures indiquent sept conditions nécessaires pour
recevoir la révélation divine. Ces conditions sont
spécifiques de la manière prescrite par le Seigneur
pour l'acquisition de la connaissance par la révélation.
Elles n'ont pas d'équivalent dans la façon d'apprendre
à la manière du monde, par l'étude et par le
raisonnement.
1.
Avoir la foi
Comme
dans l'Évangile, le premier principe en est la foi. Le frère
de Jared nous sert de modèle. À cause de sa grande foi,
il vit le Dieu d'Israël en personne et « il ne
pouvait lui être interdit de regarder au-dedans du voile »
(Éther 3:9, 19).
Néphi
enseigna à ses frères la nécessité de la
foi, leur rappelant la promesse de l'Éternel : « Ne
vous souvenez-vous pas de ce que le Seigneur a dit ? - Si vous ne
vous endurcissez point le coeur, si vous demandez avec foi, croyant
que vous recevrez, et si vous gardez mes commandements avec
diligence, assurément, ces choses vous seront dévoilées. »
(1 Néphi 15:11)
En
mentionnant les nombreuses révélations reçues
par les justes de son temps, Jarom fit ce commentaire : « Et
tous ceux qui ne sont pas obstinés et qui ont la foi sont en
communion avec le Saint-Esprit, qui se manifeste aux enfants des
hommes selon leur foi. » (Jarom 1:4)
2.
Être humble
Pour
recevoir la révélation - pour être enseignée
par le Saint-Esprit - une personne doit être humble. Un des
meilleurs enseignements des Écritures à ce sujet figure
dans la seule révélation donnée au prophète
Brigham Young qui ait été publiée dans Doctrine
et Alliances : « Que celui qui est ignorant apprenne
la sagesse en s'humiliant et en invoquant le Seigneur son Dieu, afin
que ses yeux soient ouverts pour qu'il voie et que ses oreilles
soient ouvertes pour qu'il entende. Car mon esprit est envoyé
dans le monde pour éclairer ceux qui sont humbles et contrits
et pour la condamnation des impies. » (D&A 136:32-33 ;
voir aussi Éther 12:27 ; D&A 1:28 ; 112:10)
À
l’opposé, si nous luttons « contre la parole
du Seigneur », le Seigneur nous a avertis qu'il ne nous
montrera pas « de plus grandes choses » (Éther
4:8).
3.
Demander
Comme
le jeune Joseph Smith l'a appris, ce sont ceux qui prient Dieu pour
être éclairés qui reçoivent des conseils
personnels et des connaissances évangéliques. « C'est
pourquoi » dit le Seigneur, « si vous voulez me
demander, vous recevrez ; si vous voulez frapper, l'on vous
ouvrira » (D&A 6:5 ; voir aussi D&A 88:63).
Recherchez la sagesse, dit le Seigneur, « et voici, les
mystères de Dieu vous seront dévoilés, et alors
vous deviendrez riches » (D&A 6:7). « Et si
tu veux m'interroger, tu connaîtras des mystères grands
et merveilleux » (D&A 6:11).
L'expérience
du président Joseph F. Smith nous sert d'exemple. Il lisait et
méditait le sens des Écritures relatives au monde des
esprits lorsque le Seigneur lui ouvrit le voile et révéla
les grandes vérités maintenant publiées dans la
section 138 de Doctrine et Alliances. De la même manière,
chacun de nous devrait prier pour que le Seigneur dévoile les
Écritures à son entendement (D&A 32:4). Dieu a
promis que si nous le lui demandons, nous recevrons « révélation
sur révélation, connaissance sur connaissance, afin que
[nous connaissions] les mystères et les choses paisibles – ce
qui apporte la joie, ce qui apporte la vie éternelle. »
(D&A 42:61)
4.
Garder les commandements
Il
n'y a pas de révélation sans droiture. S'émerveillant
des enseignements du Maître, ses ennemis demandèrent :
« Comment connaît-il les Écritures, lui qui
n'a point étudié ? Jésus leur répondit :
Ma doctrine n'est pas de moi, mais de celui qui m'a envoyé. Si
quelqu'un veut faire sa volonté, il connaîtra si ma
doctrine est de Dieu, ou si je parle de mon propre chef. »
(Jean 7:15-17)
Par
ailleurs, Jean dit : « Si nous gardons ses
commandements, par là nous savons que nous l'avons connu.
Celui qui dit : Je l'ai connu et qui ne garde pas ses
commandements, est un menteur, et la vérité n'est point
en lui. » (1 Jean 2:3-4)
Après
avoir enseigné que nous devrions avoir la vertu, la
tempérance, la patience, la piété, la bonté
fraternelle et la charité, l'apôtre Pierre ajouta cette
promesse à propos des effets de telles vertus : « Car
si ces choses sont en vous, et y sont en abondance, elles ne vous
laisseront point oisifs ni stériles pour la connaissance de
notre Seigneur Jésus-Christ. » (2 Pierre 1:7)
De
nos jours, le Seigneur a promis : « Mais je donnerai
à celui qui garde mes commandements les mystères de mon
royaume, et ils seront en lui une source d'eau vivante, jaillissant
jusque dans la vie éternelle. » (D&A 63:23 ;
voir aussi 1 Néphi 15:1 ; D&A 93:23).
5,
6. Le repentir et les bonnes oeuvres
Deux
autres conditions pour acquérir la connaissance de l'Évangile
par la révélation du Saint-Esprit sont exprimées
avec une clarté exemplaire dans le Livre de Mormon :
« Oui, celui qui se repent, fait preuve de foi, produit de
bonnes oeuvres et prie sans cesse - à celui-là, il est
donné de connaître les mystères de Dieu »
(Alma 26:22). De la même manière, un chapitre précédent
d'Alma enseigne que « le plan de rédemption »
a été révélé aux hommes « selon
leur foi, leur repentir et leurs saintes oeuvres » (Alma
12:30).
7.
Lire les Écritures
Bruce
R. McConkie a dit un jour : « Quelquefois, je pense
qu'un des secrets du royaume le mieux gardé est que les
Écritures ouvrent la porte à la révélation »
(Bruce R. McConkie, Doctrines of the Restoration, éd. et arr.
Mark L. McConkie, Salt Lake City, Bookcraft, 1989, p. 243). Ceci est
vrai particulièrement en ce qui concerne la promesse de
recevoir le témoignage que le Livre de Mormon est la vérité
et l'aide que nous cherchons et que nous recevons de l'Esprit pour
interpréter les Écritures. Cela s'applique aussi aux
révélations dans d'autres domaines. Bruce R. McConkie a
expliqué :
« Nous
avons tous droit à l'esprit de prophétie et de
révélation dans notre vie, à la fois dans nos
affaires personnelles et dans le ministère. L'étude
dans un esprit de prière et la méditation des saintes
Écritures feront autant sinon plus que toute autre chose pour
amener cet esprit, l'esprit de prophétie et l'esprit de
révélation, dans notre vie. » (op. cit., p.
244)
« Quels
que soient les talents d'un homme dans les questions administratives,
quelle que soit son éloquence pour exprimer son point de vue,
quelle que soit l'étendue de ses connaissances profanes, les
doux murmures de l'Esprit qu'il aurait pu recevoir lui seront refusés
à moins qu'il n'en paie le prix en étudiant, en
méditant et en priant à propos des Écritures. »
(op. cit., p. 238)
Quand
on ne reçoit pas de révélation
Que
dire de ces moments où nous recherchons une révélation
et où nous n'en recevons pas ? Nous ne recevons pas toujours
l'inspiration ou la révélation quand nous la demandons.
Parfois la révélation se fait attendre et parfois nous
sommes laissés libres de juger et de comprendre sur la base de
notre étude et de notre raisonnement. Nous ne pouvons pas
forcer ce qui est spirituel. Il en est ainsi. L'objectif de notre vie
qui est d'obtenir de l'expérience et de développer
notre foi ne serait pas atteint si notre Père céleste
nous éclairait immédiatement à chaque question
que nous lui posons ou s'il nous dirigeait dans chacun de nos actes.
Nous devons arriver à nos propres conclusions, prendre des
décisions et en vivre les conséquences de sorte que
nous développions notre autonomie et notre foi.
Même
pour des décisions que nous jugeons très importantes,
nous ne recevons pas toujours de réponse à nos prières.
Cela ne signifie pas que nos prières n'ont pas été
entendues mais que nous avons prié à propos d'une
décision que, pour une raison ou une autre, nous devons
prendre sans l'aide de la révélation.
Peut-être
avons-nous demandé d'être guidés dans le choix
entre plusieurs possibilités qui sont tout aussi valables les
unes que les autres. Il n'y a pas qu'une seule bonne ou qu'une seule
mauvaise réponse à chaque question. Dans de nombreux
cas, il peut y avoir deux bonnes ou deux mauvaises réponses.
Ainsi, il est peu probable que ceux qui cherchent les conseils divins
sur la manière de réagir contre ceux qui les ont
offensés, soient guidés par la révélation.
Il en est de même pour ceux qui cherchent à être
conseillés dans des choix qu'ils n'auront pas à faire à
cause d'un événement futur, par exemple une troisième
solution qui s'avère de loin préférable.
À
une certaine occasion, ma femme et moi priâmes sincèrement
pour être guidés dans un choix qui nous semblait très
important. Aucune réponse ne vint. Nous fûmes laissés
à notre propre jugement. Nous ne pouvions pas comprendre
pourquoi le Seigneur ne nous avait pas fait ressentir son approbation
ou sa désapprobation. Mais peu de temps après, nous
comprîmes que nous n'avions pas de décision à
prendre à ce sujet car quelque chose survint qui rendait cette
décision inutile. Le Seigneur ne nous guiderait pas dans un
choix qui ne ferait aucune différence.
Il
est probable que la personne qui demande à être guidée
entre deux possibilités tout aussi acceptables l'une que
l'autre pour le Seigneur ne recevra aucune réponse. Ainsi il y
a des moments où nous pouvons agir efficacement dans l'une ou
l'autre possibilité. Chacune de ces réponses est bonne.
De même, il est peu probable que l'Esprit du Seigneur nous
accorde des révélations sur des sujets insignifiants.
J'ai entendu, pendant une réunion de témoignage, une
jeune femme louer la spiritualité de son mari, en disant qu'il
soumettait toutes les questions au Seigneur. Elle expliqua qu'il
allait avec elle faire ses courses et qu'il ne voulait même pas
choisir entre deux marques différentes de conserves de légumes
sans prier auparavant. Cela me paraît incorrect. Je crois que
le Seigneur attend de nous que nous utilisions l'intelligence et
l'expérience qu'il nous a données pour faire ce genre
de choix. Quand quelqu'un demanda à Joseph Smith, le prophète,
des conseils sur un sujet particulier, le prophète déclara :
« C'est une chose très sérieuse que
d'interroger Dieu ou de venir en sa présence, et nous
craignons de l'interroger sur des sujets de peu d'importance. »
(Enseignements du prophète Joseph Smith, p. 15)
Bien
sûr, nous ne pouvons pas toujours juger ce qui est sans
importance. Si quelque chose semble n'avoir que peu ou pas
d'importance, nous devons agir d'après notre jugement. Si le
choix est important pour des raisons qui nous sont inconnues, comme
les invitations à parler que j'ai mentionnées plus tôt
ou comme un choix entre deux conserves de légumes quand l'une
contient un poison caché, le Seigneur interviendra et nous
dirigera. Nous pouvons avoir l'assurance que là où un
choix fera une réelle différence dans notre vie, d'une
manière évidente ou pas, et si nous vivons en accord
avec l'Esprit et recherchons ses directives, nous recevrons la
direction dont nous avons besoin pour atteindre notre but. Le
Seigneur ne nous laissera pas sans aide quand un choix est important
pour notre bien-être éternel. Et quand nous prions pour
être éclairés, quand nous cherchons à
apprendre par la foi et par la révélation, il nous
donnera la connaissance par son Saint-Esprit, à sa manière
et au moment qu'il aura choisi.
Les
fruits de la révélation
À
la fin de son ministère terrestre, le Sauveur a promis à
ses disciples que Dieu le Père leur donnerait « un
autre consolateur » qui « vous enseignera
toutes choses » (Jean 14:16, 26). Des siècles plus
tard, le prophète Moroni parlait de ce même instructeur
quand il promit que « par le pouvoir du Saint-Esprit, vous
pouvez connaître la vérité de toutes choses »
(Moroni 10:5). Cette promesse d'être enseigné par
l'Esprit s'applique à tous ceux qui recherchent la vérité
divine, qui ont reçu le don du Saint-Esprit et qui sont
réceptifs à ses instructions.
Le
principe sur lequel repose cette promesse s'applique aussi à
l'enseignement de l'Évangile. Le président John Taylor
donna cette explication sur la manière dont le Seigneur
enseigne l'Évangile : « Il n'y a pas d'homme
au monde, et il n'y en a jamais eu, qui soit capable d'enseigner les
choses de Dieu à moins qu'il ne le fasse de la manière
dont il a été lui-même enseigné, instruit
et dirigé, à savoir par l'esprit de révélation
venant du Tout-Puissant. » (John Taylor, Journal of
Discourses, vol. 17, p. 369)
Quand
nous essayons d'enseigner les vérités de l'Évangile
qui nous ont été révélées par le
Saint-Esprit, c'est sous l'influence de cet Esprit que nous devons
les enseigner et que les autres doivent les apprendre.
Au
début du Rétablissement, le Seigneur instruisit ses
serviteurs : « Et l'Esprit vous sera donné par
la prière de la foi ; et si vous ne recevez pas l'Esprit,
vous n'enseignerez pas. » (D&A 42:14) Le président
Harold B. Lee a déclaré que « l'enseignement
par l'Esprit » est une des quatre « qualités
essentielles pour le service dans le royaume de Dieu ». Ce
faisant, il nous rappela le principe scripturaire que « lorsqu'un
homme parle par la puissance du Saint-Esprit, la puissance du
Saint-Esprit porte ses paroles au coeur des enfants des hommes »
(2 Néphi 33:1). (Harold B. Lee, Stand Ye in Holy Places,
Salt Lake City, Deseret Book, 1974, p. 202)
Bruce
R. McConkie a donné cette illustration mémorable de
l'importance d'enseigner par l'Esprit. Dans la section 50 des
Doctrine et Alliances, le Seigneur enseigna aux anciens de son Église
qu'ils avaient été ordonnés à prêcher
l'Évangile « par l'Esprit, à savoir le
Consolateur qui a été envoyé pour enseigner la
vérité » (D&A 50:14). Ensuite il leur
demanda s'ils « [prêchaient] par l'Esprit de vérité,
... ou de quelque autre façon ».
Il
ajouta : « Si c'est d'une autre façon, ce
n'est pas de Dieu. » (D&A 50:17-18)
Dans
un discours au personnel du séminaire et de l'institut de
religion, Bruce R. McConkie expliqua la signification de cette
révélation :
« Si
vous enseignez les paroles de vérité – notez
bien qu'il s'agit de quelque chose de vrai, que tout ce que vous
dites est exact et vrai – par un autre moyen que l'Esprit,
ce n'est pas de Dieu. Quelle est donc l'autre manière
d'enseigner si ce n'est pas par l'Esprit ? C'est par le pouvoir de
l'intellect.
« Supposez
que je vienne ce soir vous faire un grand discours sur
l'enseignement, et que je le fasse par le pouvoir de l'intellect,
sans l'Esprit de Dieu. Supposez que chaque mot que je prononce soit
juste, sans aucune erreur, mais que ce soit une démonstration
intellectuelle. La révélation dit : « Si
c'est d'une autre façon, ce n'est pas de Dieu. »
(D&A 50:18)
« Cela
signifie que parce que j'ai utilisé le pouvoir de l'intellect
au lieu du pouvoir de l'Esprit, Dieu n'a pas présenté
le message par mon intermédiaire. Ce qui touche à
l'intellect - le raisonnement et la logique - peut apporter du bon et
nous préparer à recevoir l'Esprit sous certaines
conditions. Mais la conversion se produit et la vérité
se répand dans le coeur des gens quand celle-ci est enseignée
par le pouvoir de l'Esprit. » (Bruce R. McConkie,
Doctrines of the Restoration, éd. et arr. Mark L. McConkie,
Salt Lake City, Bookcraft, 1989, p. 332)
Nous
apprenons ici que même si c'est la vérité qui est
enseignée, à moins que ce ne soit fait à la
manière du Seigneur, cela ne vient pas de Dieu. Les grandes
vérités de l'Évangile ne doivent pas être
enseignées dans des endroits inappropriés, par des
personnes indignes, accompagnées par une musique inappropriée,
ou enseignées avec d'autres moyens qui ne sont pas en accord
avec l'esprit des vérités de l'Évangile. Nous
devons être dignes pour que se réalise la promesse que
« celui qui prêche et celui qui écoute se
comprennent l'un l'autre et tous deux sont édifiés et
se réjouissent ensemble », seulement quand « la
parole de vérité » est enseignée et
reçue « par l'Esprit de vérité »
(D&A 50:19, 22). C'est là la manière prescrite par
le Seigneur pour enseigner et pour apprendre l'Évangile.
La
révélation moderne promet que le Saint-Esprit
manifestera « tout ce qui est nécessaire »
(D&A 18:18). « [Mettez votre] confiance en cet
Esprit », dit le Seigneur, qui promet : « Je
[vous] donnerai de mon Esprit, ce qui éclairera [votre]
intelligence et remplira [votre] âme de joie ; et alors
[vous connaîtrez], ou par là [vous connaîtrez]
tout ce que [vous] désirez de moi, qui est juste, croyant avec
foi en moi que [vous recevrez]. » (D&A 11:12-14)
Les
Écritures traitant de l'Évangile et de Dieu utilisent
souvent le mot mystères. Le président Harold B. Lee a
expliqué : « Un mystère peut être
défini comme une vérité qui ne peut être
comprise que par la révélation. » (Harold B.
Lee, Ye are the Light of the World, Salt Lake City, Deseret Book
1974, p. 211) Quelques-uns de ces mystères sont ce que les
Écritures appellent « des choses ineffables qu'il
est interdit d'écrire » (3 Néphi
26:18). Mais beaucoup d'Écritures sur les mystères ont
trait à ce qui n'est ni secret, ni incompréhensible,
mais se rapportent simplement aux précieuses vérités
doctrinales révélées par Dieu pour expliquer le
plan de l'Évangile. L'apôtre Paul utilisa ce terme dans
ce sens-là quand il dit qu'il enseignait « le
mystère de l'Évangile » (Éphésiens
6:19). Obéissant au commandement du Sauveur « ne
jetez pas vos perles devant les pourceaux » (Matthieu
7:6), nous ne devons pas essayer d'expliquer ces mystères à
ceux qui ne sont pas prêts spirituellement à les
recevoir (voir Matthieu 7:9-11, traduction de Joseph Smith). Mais
nous sommes désireux de partager ces vérités
avec tous ceux qui cherchent sincèrement à connaître
la doctrine. Ainsi, Joseph Smith et Sidney Rigdon reçurent le
commandement d'interpréter « les mystères
[de l'Évangile] dans les Écritures » (D&A
71:1). Le Livre de Mormon enseigne à ceux qui cherchent
diligemment que « les mystères de Dieu [leur]
seront dévoilés, par la puissance du Saint-Esprit. »
(1 Néphi 10:19 ; voir aussi 1 Corinthiens
2:4-16 ; Alma 18:35)
En
réponse aux questions d'un sceptique à propos de la
résurrection, le prophète Alma donna ce grand
enseignement sur les mystères de Dieu :
« Il
est donné à beaucoup de connaître les mystères
de Dieu ; cependant ce leur est un ordre strict de ne dévoiler
que la portion de sa parole qu'il donne aux enfants des hommes selon
l'attention et la diligence qu'ils lui apportent.
« Par
conséquent, celui qui s'endurcit le coeur reçoit la
plus petite part de la parole ; quant à celui qui ne
s'endurcit point le coeur, il lui est donné la plus grande
part de la parole, jusqu'à ce qu'il lui soit donné de
connaître les mystères de Dieu dans leur plénitude.
« Et
ceux qui s'endurcissent le coeur, la plus petite part de la parole
leur est donnée jusqu'à ce qu'ils ne sachent rien de
ses mystères ; alors ils sont emmenés captifs par
le diable et conduits, selon sa volonté, à la
perdition. Voilà ce qu'on entend par les chaînes de
l'enfer. » (Alma 12:9-11)
Nous
enseignons et nous apprenons les mystères de Dieu par la
révélation de son Saint-Esprit. Si nous nous
endurcissons le coeur à la révélation et si nous
limitons notre compréhension à ce que nous pouvons
obtenir par l'étude et par la raison, nous sommes restreints à
ce qu'Alma appelait « la plus petite part de la parole ».
Apprendre
les mystères de Dieu et atteindre ce que l'apôtre Paul
appelait « la mesure de la stature parfaite de Christ »
(Éphésiens 4:13) nécessite beaucoup plus que
d'acquérir la connaissance d'un ensemble de faits précis.
Cela nécessite que nous apprenions certains faits, que nous
pratiquions ce que nous avons appris, et en fin de compte que nous
devenions ce que, en tant qu'enfants de Dieu, nous sommes appelés
à devenir. Le professeur Robert L. Millett commente la
première partie de ce processus :
« Nous
sommes sûrement mis sur terre pour apprendre autant que nous le
pouvons dans les sciences, les arts, les langues, l'histoire, la
géographie, etc. Et plus nous maîtrisons certaines de
ces matières, plus nous sommes capables de présenter
les vérités de l'Évangile de manière à
ce que davantage de gens l'acceptent (voir D&A 88:78-80). Mais il
y a une hiérarchie dans ces vérités.
Quelques-unes ont plus d'importance que d'autres. S'il est important
de connaître les lois de la gravité et du mouvement, il
est vital de connaître la réalité d'un
Rédempteur. Si cela nous aide de connaître les lois de
la thermodynamique, il est essentiel que nous sachions comment nous
repentir et nous adresser à Dieu au nom de son Fils pour
obtenir le pardon. » (Robert L. Millet, An Eye Single to
the Glory of God, Salt Lake City, Deseret Book, 1991, p. 113)
Joseph
Smith, le prophète, enseigna en des termes inspirés qui
font à présent partie des Écritures des saints
des derniers jours : « Quel que soit le principe
d'intelligence que nous atteignions dans cette vie, il se lèvera
avec nous dans la résurrection. » (D&A 130:18)
L'intelligence ne signifie pas seulement la connaissance acquise par
n'importe quel moyen. Ceci est mis en évidence dans la phrase
suivante : « Et si, par sa diligence et son
obéissance, une personne acquiert plus de connaissance et
d'intelligence qu'une autre, elle en sera avantagée d'autant
dans le monde à venir. » (D&A 130:19)
Notez
que l'intelligence est plus que la connaissance. Et notez aussi
l'implication que la connaissance est obtenue par la diligence et que
l'intelligence est obtenue par l'obéissance. Il faut admettre
que les deux méthodes ne s'excluent pas mutuellement. Mais
nous touchons à un mystère important de l'Évangile
quand nous comprenons que l'intelligence que Dieu désire que
nous obtenions est beaucoup plus que de la connaissance et qu'elle ne
peut être obtenue sans l'obéissance et la révélation.
Telles sont les voies du Seigneur ; elles sont bien au-dessus
des voies du monde.
CHAPITRE
2 : LA RAISON ET LA RÉVÉLATION
Les
connaissances à propos de la terre et de ses différentes
formes de vie progressent si rapidement qu'on a du mal à les
répertorier. Mais le monde en général ne connaît
pas une progression comparable dans la connaissance de Dieu et de son
plan pour ses enfants. Pour obtenir ce genre de connaissance, nous
devons comprendre et suivre les voies que Dieu a prescrites pour y
parvenir. Nous parvenons à la connaissance de Dieu et des
vérités de son Évangile par l'étude et la
raison ainsi que (toujours pour ce genre de connaissance) par la foi
et la révélation.
La
raison et la révélation sont des méthodes
d'apprentissage accessibles à ceux qui recherchent la
connaissance dans n'importe quel domaine. L'Église de
Jésus-Christ des saints des derniers jours a toujours
encouragé ses membres à poursuivre des études
dans tous les domaines et à y exceller, en acquérant de
la connaissance par l'étude et la raison ainsi que par la foi
et la révélation. Le président Harold B. Lee a
exprimé ce conseil en ces termes : « Le
système éducatif de l'Église a été
créé afin que toute connaissance pure soit obtenue par
notrepeuple, transmise à notre postérité et
donnée à tous les hommes. Nous donnons la
responsabilité à nos professeurs de stimuler
constamment nos jeunes scientifiques et nos chercheurs dans tous les
domaines et de les inciter à avancer toujours plus loin dans
le royaume de l'inconnu. » (Harold B. Lee, Ye Are the
Light of the World, Salt Lake City, Deseret Book, 1974, p. 117)
Ceux
qui recherchent la connaissance profane et qui en ont payé le
prix par un effort personnel sont souvent éclairés ou
élevés par ce que quelques-uns appellent l'intuition et
ce que d'autres appellent la révélation. Je crois que
beaucoup de grandes découvertes et de grandes réussites
dans les sciences et les arts sont le résultat d'illuminations
données par Dieu.
Malheureusement,
certains des partisans de l'étude et de la raison sont
méprisants, voire hostiles à l'égard de la
religion et de la révélation, soutenant que la vérité
peut être découverte et l'apprentissage se faire
seulement par les méthodes auxquelles ils sont habitués.
Ils ne peuvent pas concevoir l'existence d'un processus d'acquisition
de la connaissance qui admette l'existence de Dieu et la réalité
de la communication par son Esprit. La seule et unique autorité
qu'ils peuvent concevoir est la raison, la parole de ce dieu étant
la rationalité, telle qu'ils la définissent. Ils ne
peuvent pas accepter l'existence d'un Dieu au-dessus d'eux et de leur
propre faculté de raisonnement. Brigham Young a noté
cette attitude lorsqu'il s'est exclamé : « Combien
il est difficile d'instruire l'homme naturel, qui ne comprend rien de
plus que ce qu'il voit de ses yeux naturels ! »
(Brigham Young, Journal of Discourses, vol. 1, p. 2)
Le
Livre de Mormon décrit cette attitude chez un peuple qui se
reposait uniquement sur sa propre force et sa propre sagesse et sur
ce qu'il pouvait voir de ses « propres yeux »
(Hélaman 16:15, 20). Sur le fondement de la raison, ce peuple
a rejeté les prophéties, disant : « Il
n'est pas raisonnable qu'il vienne un être tel que le Christ »
(verset 18). Ayant la même attitude, un éminent
professeur a rejeté le Livre de Mormon en prétendant :
« On ne reçoit pas de livre par des anges. C'est
aussi simple que cela ». Ceux qui recherchent la
connaissance de l'Évangile uniquement par l'étude et
par la raison sont particulièrement susceptibles d'adopter une
attitude de suffisance et d'égocentrisme que l'on observe
parfois chez ceux qui font des études supérieures.
Comme l'apôtre Paul l'observa pendant son ministère :
« La connaissance enfle, mais la charité édifie ».
Il mit en garde les érudits : « Prenez garde,
toutefois, que votre liberté [connaissance] ne devienne une
pierre d'achoppement pour les faibles... Et ainsi, le faible périra
par ta connaissance, le frère pour lequel Christ est mort ! »
(1 Corinthiens 8:1, 9, 11)
L'apôtre
Pierre prédit cette mentalité à notre époque :
« Dans les derniers jours, il viendra des moqueurs avec
leurs railleries, marchant selon leur propre convoitise et disant :
Où est la promesse de ton avènement ? Car, depuis que
nos pères sont morts, tout demeure comme dès le
commencement de la création. » (2 Pierre
3:3-4)
Un
prophète du Livre de Mormon a décrit l'origine et les
conséquences de cette attitude : « Ô le
subtil plan du malin ! Ô la vanité et la folie des
hommes ! Quand ils sont instruits, ils se croient sages, et ils
n'écoutent pas les conseils de Dieu, ils les laissent de côté,
s'imaginant tout savoir par eux-mêmes. C'est pourquoi leur
sagesse est folie, et elle ne leur sert de rien, et ils périront. »
(2 Néphi 9:28).
L'accomplissement
de ces prophéties est évident de nos jours.
La
raison face à la révélation dans l'Histoire
Beaucoup
d'écrivains ont analysé ce que le professeur Hugh
Nibley appelle « la vieille lutte entre le réalisme
entêté et la sainte tradition ». Il oppose ce
qu'il appelle le sophisme, « les actions de l'esprit
humain laissé à lui-même », à
la mantique, « les oracles prophétiques ou
inspirés, venant de l'autre monde ». Il date
l'arrivée du sophisme au début du sixième siècle
avant Jésus-Christ et accorde à Saint Augustin
« l'accomplissement du processus d'éradication de
la mantique de la culture antique » (Hugh Nibley, Three
Shrines: Mantic, Sophic and Sophistic, The Ancient State, Salt Lake
City, Deseret Book et Foundation for Ancient Research and Mormon
Studies, 1991, p. 315, 333, 354)
Moins
d'un siècle après Jésus-Christ, l'influence de
la philosophie grecque amena dans les doctrines et les pratiques
quelques compromis qu'un expert a caractérisés comme
étant la « négation du principe de la
révélation au profit de l'intelligence humaine »
(Stephen E. Robinson, Ensign, janvier 1988, p. 39). Le
professeur Nibley cite la conclusion de Leclerq : « À
partir du cinquième siècle, l'Église devint une
'entité intellectuelle' et depuis on voit dans l'Église
un être de raison. » (Hugh Nibley, Paths That Stray,
Some Notes on Sophic and Mantic, The Ancient State, p. 443)
Goethe
soutint que « le plus profond, le seul thème de
l'histoire humaine, qui rend tous les autres futiles, est le conflit
entre le scepticisme et la foi. » (cité par H.
Curtis Wright dans Scholar and Educator, automne 1988, p. 52)
Pour
certains, ce conflit fut résolu pendant le « grand
débat médiéval » que Richard M.
Weaver a qualifié d' « événement
crucial dans l'histoire de la culture occidentale ». Ce
débat incluait une question, celle de savoir si les vérités
éternelles étaient réelles. Weaver explique :
« Le fond de la question, en fin de compte, est de savoir
s'il existe une source de vérité plus grande que
l'homme et indépendante de lui ; et la réponse à
cette question est décisive pour notre façon de
percevoir la nature et la destinée de l'humanité. Le
résultat pratique de la philosophie nominaliste est de bannir
la réalité qui est perçue par l'intelligence [je
dirais, « par la révélation »] et
de poser comme réalité [seulement] ce qui est perçu
par les sens. Avec ce changement dans l'affirmation de ce qui est
vrai, toute l'orientation des connaissances change et nous sommes sur
la route de l'empirisme moderne. » (Richard M. Weaver,
Ideas Have Consequences, Chicago et Londres, University of Chicago
Press, 1948, p. 3)
Dans
un discours à un public universitaire, Bruce L. Christensen,
président du Public Broadcasting Service, a décrit les
conséquences de cette philosophie : « En
d'autres termes, il n'y avait pas de bien absolu. Il n'y avait pas de
mal absolu, en fait, rien n'était absolu. Tous les absolus
étaient seulement une convenance de l'esprit - ils existaient
seulement de nom (nominativement) mais pas réellement. « Le
premier principe du nominalisme était qu'il n'y a pas de
source de vérité plus élevée que l'homme,
ou indépendante de lui. Ce qui en découlait était
de nier le fait que la connaissance pouvait être obtenue par un
autre moyen que par la perception raisonnée des sens de
l'homme. La révélation n'était plus un moyen
acceptable d'accéder à la vérité. »
(Bruce L. Christensen, First Principles First, Forum Address at Ricks
College, Rexburg, Idaho, 19 novembre 1987)
L'écrivain
russe et prix Nobel Alexandre Soljenitsyne a exprimé la même
idée :
« L'erreur
[dans la pensée occidentale] doit être à la
racine, à la base véritable de la pensée humaine
des siècles passés. Je fais référence à
la façon occidentale prédominante de voir le monde qui
est née pendant la Renaissance et qui a trouvé son
expression politique à partir du siècle des Lumières.
Elle devint la base du gouvernement et des sciences sociales et
pourrait être définie comme de l'humanisme rationnel ou
de l'autonomie humaniste : l'autonomie proclamée et
renforcée de l'homme face à toute autre force au-dessus
de lui... Cette nouvelle façon de penser, qui nous a imposé
son influence, n'admettait pas l'existence intrinsèque du mal
dans l'homme et ne voyait pas de plus grand dessein que de parvenir
au bonheur sur terre. Elle a basé la civilisation occidentale
moderne sur la dangereuse tendance à adorer l'homme et ses
besoins matériels... Nous avons placé trop d'espoirs
dans les réformes politiques et sociales, pour réaliser
qu'en fin de compte, nous étions privés de notre
possession la plus précieuse : notre vie spirituelle. »
(Alexandre Soljenitsyne, Commencement Address, Harvard University
Gazette, 8 juin 1978)
Malgré
le conflit apparent entre la raison et la révélation,
les points de vue rationnels et religieux du monde ne sont pas
opposés. Le point de vue de la religion (du moins de la
religion qui n'est pas édulcorée par l'apostasie)
inclut les méthodes de raisonnement et les vérités
déterminées par elles. En revanche, la perspective
rationnelle exclut ce qui est surnaturel. Cette exclusion a été
réalisée par la fusion de la religion et de la
philosophie. Hugh Nibley explique que la nécessité
perçue de cette fusion était « de surmonter
les objections de la raison face à la révélation.
C'est la fameuse réconciliation de Saint Augustin entre la
recherche classique et la recherche chrétienne de la
connaissance ». Il continue en décrivant les effets
de cette fusion : « Mais comment pouvez-vous
l'appeler réconciliation quand c'est toujours l'Église
qui fait des concessions ? C'est toujours la raison qui doit être
satisfaite et la révélation qui doit être
manipulée de manière à apporter satisfaction ;
il n'y a pas de compromis, mais une soumission totale. »
(Hugh Nibley Three Shrines: Mantic, Sophic and Sophistic, The Ancient
State, Salt Lake City, Deseret Book et Foundation for Ancient
Research and Mormon Studies, 1991, p. 367)
Le
professeur H. Curtis Wright décrit les effets d'une longue
interaction entre la religion et les sciences rationnelles :
« La tendance générale de leur interaction
est toujours à sens unique – vers la naturalisation
de la religion, et non pas vers la surnaturalisation des sciences ou
de l'éducation » (Scholar and Educator,
automne 1988, p. 53). Ce qui est appelé ici la
« naturalisation de la religion » a pour effet
de nier l'existence de toute vérité ou valeur qui ne
peut pas être démontrée par lesdites méthodes
scientifiques ou naturelles. L'attachement fondamental et exclusif à
la raison qui résulte de cette négation est à
l'origine de nombreux débats publics. Ceux-ci comprennent la
controverse actuelle des valeurs de l'enseignement dans les écoles
publiques et la vieille controverse toujours d'actualité de
savoir si les universités peuvent être simplement
engagées dans la diffusion de la connaissance ou si elles
doivent prendre part à la responsabilité d'une
utilisation possible de cette connaissance (par exemple les armes
atomiques).
La
source du conflit traditionnel entre (1) la raison ou l'intelligence
et (2) la foi ou la révélation est le rejet de la
révélation par l'enseignant, et non pas le rejet de la
raison par le prophète. La réalité et une
meilleure compréhension de l'expérience religieuse
devraient empêcher son rejet par les hommes raisonnables, mais
de par sa nature, la révélation est difficilement
acceptable dans le cadre des catégories proposées par
les partisans de la raison. Le professeur Obert C. Tanner explique :
« Nous parlons d'un fait établi qui cependant défie
l'analyse intellectuelle. C'est une chose étrange qu'une
expérience si décisive qui influence l'engagement et
toute la vie d'une personne puisse être décrite comme
ineffable, indescriptible et inexprimable. Il n'est pas étonnant
que les universités... soient incapables d'aborder la religion
si ce n'est par une approche superficielle - les idées sur la
religion, et non pas l'expérience privée et personnelle
de la religion. Il n'y a pas de doute que les Églises et les
universités privées sont respectueuses mais réservées
les unes vis à vis des autres. » (Obert C. Tanner,
One Man's Search, Salt Lake City, University of Utah Press, 1989, p.
151)
Dans
un discours adressé récemment à l'université
Brigham Young, Boyd K. Packer a fait une différenciation
pertinente entre la raison et la révélation appliquées
au contexte universitaire :
« Il
y a deux postulats opposés dans l'environnement universitaire.
D'un côté, 'voir c'est croire' ; d'un autre côté
'croire c'est voir'. Les deux sont vrais ! Chacun à sa
place. La combinaison des deux, individuellement ou en tant
qu'institution, est le défi de la vie...
« Chacun
de nous doit s'accommoder de l'association de la raison et de la
révélation dans sa vie. Non seulement l'Évangile
le permet mais il le requiert. Un individu qui se concentre sur un de
ces aspects seulement perdra à la fois l'équilibre et
la perspective. L'Histoire confirme le fait que le contexte
universitaire favorise toujours la raison, au détriment du
travail de l'Esprit, ce qui crée un malaise. Je ne connais pas
d'exemple du contraire. »
Frère
Packer a ensuite plaidé pour « la fusion de la
raison et de la révélation [qui] produira un homme ou
une femme de valeur éternelle. » (Boyd K. Packer, I
Say unto You, Be One, Devotional Address at Brigham Young University,
12 février 1991)
La
raison seule ?
Quand
des personnes tentent de comprendre ou commencent à critiquer
l'Évangile de Jésus-Christ ou les doctrines et les
pratiques de son Église par le raisonnement seul, le résultat
est connu d'avance. Personne ne peut trouver Dieu ou comprendre ses
doctrines ou ses ordonnances sans utiliser les moyens qu'il a
prescrits pour recevoir les vérités de son Évangile.
C'est la raison pour laquelle les vérités de l'Évangile
ont été corrompues et que les sacrements ont été
transformés lorsque leur signification et leur mise en
application ont été laissées à
l'interprétation et à l'enseignement d'érudits
qui ont rejeté les révélations et n'avaient pas
l'autorité divine.
Je
crois que c'est la raison pour laquelle le Seigneur a souvent appelé
ses porte-parole - ses prophètes - parmi les gens peu
instruits, ceux qui n'étaient pas affectés par le
raisonnement des hommes et qui par conséquent étaient
réceptifs aux révélations de Dieu. Le président
Spencer W. Kimball a expliqué : « Le Seigneur
semble n'avoir jamais encouragé l'ignorance, et pourtant, dans
de nombreux cas, les plus érudits se sont révélés
hermétiques à la spiritualité, et il a dû
se servir de géants spirituels moins instruits pour mener à
bien son oeuvre. » (The Teachings of Spencer W. Kimball,
éd. Edward L. Kimball, Salt Lake City, Bookcraft, 1982, p.
388-389)
L'apôtre
Paul expliqua cela aux saints de Corinthe. Il leur dit qu'il n'allait
pas prêcher l'Évangile « avec la sagesse des
mots », parce que « la prédication de la
croix » était « une folie »
pour les sages de ce monde (1 Corinthiens 1:17-18). Mais les
sages de ce monde seraient détruits car il a été
écrit que le Seigneur détruira « la sagesse
des sages, et [anéantira] l'intelligence des intelligents »
(1 Corinthiens 1:19). À l’opposé, ceux qui
placeraient leur foi dans ce que Paul appela crûment « la
folie de la prédication » seraient sauvés
(1 Corinthiens 1:21). Il expliqua :
« Car
la folie de Dieu est plus sage que les hommes, et la faiblesse de
Dieu est plus forte que les hommes. Considérez, frères,
que parmi vous qui avez été appelés il n'y a ni
beaucoup de sages selon la chair, ni beaucoup de puissants, ni
beaucoup de nobles. Mais Dieu a choisi les choses folles du monde
pour confondre les sages ; Dieu a choisi les choses faibles du
monde pour confondre les fortes ; et Dieu a choisi les choses
viles du monde et celles qu'on méprise, celles qui ne sont
point, pour réduire à néant celles qui sont,
afin que nulle chair ne se glorifie devant Dieu »
(1 Corinthiens 1:25-29 ; voir aussi 1 Corinthiens
3:18-20).
Ceux
qui s'appuient exclusivement sur l'étude et la raison
rejettent tous les absolus qui ne peuvent être établis
par les cinq sens ou restent soupçonneux à leur égard,
y compris à l'égard du bien et du mal et de l'existence
et de l'omniscience de Dieu. Ils rejettent aussi toutes les autres
méthodes pour acquérir la connaissance, y compris la
révélation. Ils ont tendance à être
suffisants et imbus d'eux-mêmes et de leurs opinions. La raison
est leur dieu et l'intellectualisation est leur credo. Ils sont dans
« le vaste et spacieux édifice » qui,
dans la vision d'un ancien prophète, représente la
« sagesse » et « l'orgueil du
monde » (1 Néphi 11:35-36). On peut dire
d'eux, comme Etienne dit des enfants d'Israël qui avaient
fabriqué un veau d'or à l'époque d'Aaron :
« ils se réjouirent de l'oeuvre de leurs mains »
(Actes 7:41). Cette adoration de soi et cette autosuffisance sont
sûrement condamnées par le commandement éternel :
« Tu n'auras pas d'autres dieux devant ma face. »
(Exode 20:3)
La
dépendance exclusive de l'apprentissage par l'étude et
la raison a exercé une influence au-delà des domaines
temporels. Elle a aussi affecté la théologie
chrétienne. Le professeur baptiste Dr. Ben C. Fisher a écrit :
« Pendant
plus de cent ans, la théologie moderne a dévié à
un rythme accru vers le temporel. La vue surnaturelle traditionnelle
de l'homme a été supplantée par une vision
entièrement rationnelle de son comportement, de sa place et de
ses activités dans le monde... L'Évangile centré
sur le Christ et ses exigences éthiques simples mais sans
compromis a été affaibli, jusqu'au nom même du
Christ, qui, à quelques exceptions près, a disparu du
centre des écrits et des pensées théologiques...
Le retour de l'autorité des Écritures ne requiert pas
le renoncement à l'éducation, mais il requiert la
réaffirmation de la primauté de la révélation. »
(Ben C. Fisher, The Idea of a Christian University in Today's World,
Macon, Georgia, Mercer University Press, 1989, p. ix-x)
Ceux
qui rejettent la révélation et qui approchent Dieu et
l'étude de son Évangile seulement par les méthodes
de la recherche, de la délibération et du débat
d'experts sont comme les dirigeants qui ont persécuté
Jésus pour avoir accompli une guérison le jour du
Sabbat. En réponse à leurs attaques, le Sauveur
enseigna cette leçon à propos des méthodes de
Dieu et de celles du monde : « Je suis venu au nom de
mon Père, et vous ne me recevez pas ; si un autre vient
en son propre nom, vous le recevrez. Comment pouvez-vous croire, vous
qui tirez votre gloire les uns des autres, et qui ne cherchez point
la gloire qui vient de Dieu seul ? » (Jean 5:43-44)
Jésus
enseigna cette même leçon à Pierre. Lorsque le
Sauveur dit à ses disciples qu'il devait aller à
Jérusalem pour souffrir beaucoup de choses, être mis à
mort et ressusciter, le chef des apôtres déclara que ces
choses n'arriveraient pas. Jésus le réprimanda, en
disant : « Arrière de moi, Satan ! tu
m'es en scandale ; car tes pensées ne sont pas les
pensées de Dieu mais celles des hommes. » (Matthieu
16:23)
Dans
chacun de ces exemples le Sauveur a proclamé la suprématie
des affaires de Dieu sur celles des hommes. En une autre occasion il
a appliqué ce principe pour enseigner à ses critiques
endurcis la prééminence du prophète sur
l'érudit. Jésus faisait face à un groupe
d'hypocrites qui avaient érigé des monuments à
la mémoire des prophètes que leurs prédécesseurs
avaient assassinés, alors qu'eux-mêmes rejetaient les
prophètes que Dieu leur envoyait. Dans ce que je comprends
comme étant une condamnation de leur rejet de la compréhension
de la plénitude de l'Évangile par la révélation,
le Seigneur maudit les docteurs de la loi : « Car
vous avez enlevé la clef de la connaissance, la plénitude
des Écritures ; vous n'entrez pas vous-mêmes dans
le royaume, et ceux qui y entraient, vous les avez empêchés. »
(Luc 11:47-49, 53 ; traduction de la Bible par Joseph Smith)
Jésus
enseigna aussi la prééminence des méthodes du
Seigneur sur celles des hommes en donnant un avertissement contre les
intérêts personnels de ces érudits qui proclament
leur propre connaissance : « Celui qui parle de son
chef recherche sa propre gloire ; mais celui qui cherche la
gloire de celui qui l'a envoyé, celui-là est vrai, et
il n'y a point d'injustice en lui. » (Jean 7:18)
Ce
même thème revint quand Jésus expliqua pourquoi
quelques dirigeants convertis ne voulaient pas avouer qu'ils
croyaient en lui de crainte d'être chassés de la
synagogue : « Car ils aim[ent] la gloire des hommes
plus que la gloire de Dieu. » (Jean 12:43)
La
manifestation moderne de l'éducation « à la
carte » fut prophétisée par Néphi :
« Les Gentils ont édifié de nombreuses
Églises. Cependant, ils nient le pouvoir et les miracles de
Dieu, et ils se prêchent leur propre sagesse et leur propre
science pour en obtenir du gain et pour écraser les pauvres. »
(2 Néphi 26:20)
La
prophétie de Néphi vise certainement ceux qui utilisent
les études supérieures comme leur Église, qui
vivent leur dévotion « religieuse » dans
les bibliothèques et les laboratoires, et qui avancent une
explication rationnelle à tous les miracles de Dieu. Comme
Néphi l'expliqua :
« Car
il arrivera en ce temps-là, que... les Églises qui se
sont établies, et qui ne le sont point dans le Seigneur... se
disputeront l'une avec l'autre ; et leurs prêtres se
disputeront les uns avec les autres et ils enseigneront avec leur
science et renieront le Saint-Esprit qui donne le pouvoir de
s'exprimer.
« Et
ils nient la puissance de Dieu, le Très-Saint d'Israël ;
et ils disent au peuple : Ecoutez-nous, et entendez notre
précepte ; car voici, il n'y a point de Dieu
aujourd'hui ; le Seigneur et le Rédempteur a fini son
oeuvre, et il a donné son pouvoir aux hommes ; écoutez
donc mon précepte ; s'ils vous disent : Un miracle a
été fait par la main du Seigneur, ne le croyez pas ;
car aujourd'hui il n'est plus un Dieu de miracles ; il a fini
son oeuvre. » (2 Néphi 28:3-6)
Cette
erreur a pour conséquence ce que Néphi a défini
en disant : « Ils s'égarent en bien des cas,
parce qu'ils sont instruits par les préceptes des hommes. »
(2 Néphi 28:14)
De
tels enseignements nous montrent l'authenticité et la valeur
du Livre de Mormon. Ecrit sous l'inspiration, il est un antidote
infaillible face à la confusion doctrinale et aux attitudes
excessives d'aujourd'hui. Néphi en donna la raison lorsqu'il
exposa le but de ses écrits qui devinrent la première
partie du Livre de Mormon : « C'est pourquoi, je
n'écris point les choses qui plaisent au monde, mais celles
qui plaisent à Dieu et à ceux qui ne sont point du
monde. » (1 Néphi 6:5)
À
notre époque, le conseil nous mettant en garde contre le fait
d'acquérir la connaissance spirituelle à la façon
des hommes nous a été répété :
« Ne nie pas l'esprit de révélation, ni
l'esprit de prophétie car malheur à celui qui les nie »
(D&A 11:25 ; voir aussi 1 Thessaloniciens 5:19-20).
Bruce R. McConkie expliqua ce principe et nous donna des exemples :
« Un degré particulier de jugement est requis pour
prouver quoi que ce soit dans le domaine spirituel. Aucune recherche
scientifique ou intellectuelle, aucun processus d'enquête connu
de l'homme ne peut démontrer que Dieu est une personne, que
tous les hommes se lèveront dans l'immortalité, et que
les âmes pénitentes sont nées de l'Esprit... Les
vérités spirituelles ne peuvent être prouvées
que par des moyens spirituels. » (Bruce R. McConkie, The
Millennial Messiah, Salt Lake City, Deseret Book, 1982, p. 175)
Il
est impossible d'acquérir des connaissances spirituelles
uniquement par l'étude et le raisonnement. Pour s'approcher de
Dieu et comprendre les doctrines de son Évangile, l'étude
et le raisonnement sont insuffisants malgré leur valeur
essentielle et bénéfique. Nous ne pouvons arriver à
la connaissance du divin alors que nous rejetons ou n'utilisons pas
la méthode indispensable que Dieu a prescrite pour y parvenir.
Les connaissances spirituelles doivent être acquises à
sa manière, c'est à dire par la foi en Dieu et la
révélation du Saint-Esprit.
Au
cours des années, les intellectuels ont publié des
revues et organisé des conférences et des symposiums
pour étudier l'histoire de l'Église, la raison d'être
des principes de l'Évangile, et pour partager des points de
vue sur la façon d'appliquer les principes de l'Évangile
aux problèmes contemporains. Il m'a quelquefois été
demandé : « Qu'est-ce qui ne convient pas dans
de telles démarches ? » À mon avis, tant que
ces démarches sont privées et individuelles et qu'elles
n'impliquent pas l'aide ou l'approbation de l'Église, il n'y
rien à redire, dans la mesure où ceux qui y participent
comprennent et acceptent les limites de l'étude et du
raisonnement dans une telle entreprise. Malheureusement, beaucoup ne
le font pas.
Le
défaut que j'ai observé dans de telles activités
est que pour certains participants, ces démarches ne sont pas
une introduction ou un complément à la foi et à
la révélation mais en sont (ou en deviennent) des
substituts. Ceci n'est pas à la manière du Seigneur.
Il
existe un danger et un principe qui, tels que je les vois, peuvent
être exprimés en comparant la révélation
(qui est vitale pour la connaissance de l'Évangile et la
continuation de la vie spirituelle) à l'action de l'oxygène.
Pour les besoins de cette analogie, nous allons comparer le
raisonnement à l'action du méthane. Dosé
correctement, le méthane fournit la lumière et le
combustible pour des tâches utiles. Mais si le méthane
vient à envahir l'atmosphère, il chasse l'oxygène.
Ceux qui se trouvent dans une pièce envahie par le méthane
peuvent mourir par manque d'oxygène, et ceci sans signe
avant-coureur pour les victimes.
Comme
le méthane dans cette analogie, les discussions savantes à
propos de l'Évangile peuvent être utiles, mais elles ne
peuvent pas à elles seules, fournir la nourriture nécessaire
à la vie spirituelle. De plus, elles ont tendance, si elles ne
sont pas attentivement encadrées et contrôlées, à
devenir à un tel point prépondérantes dans
l'atmosphère qu'elles peuvent détruire la vie
spirituelle.
En
résumé, mon souci pour ceux qui dirigent les revues,
les conférences et les symposiums, n'est pas l'excès de
discussions ou de raisonnement, mais le manque de révélation
dans la mesure où ils auront négligé (ou en
viendront à négliger) la prière, l'étude
des Écritures, l'humilité et la foi. Et, comme Neal A.
Maxwell l'a remarqué : « Sans la foi réelle
et la soumission qui en découle, tôt ou tard les gens
trébucheront sur une chose ou une autre. » (Neal A.
Maxwell, Not My Will, But Thine, Salt Lake City, Bookcraft, 1988, p.
32)
Les
membres de L'Église de Jésus-Christ des saints des
derniers jours devraient respecter la différence entre la
manière d'acquérir et de comprendre ce qui est
spirituel et la manière d'acquérir et de comprendre ce
qui est temporel. L'instruction, les conférences, les
symposiums et la confrontation de points de vue opposés dans
un débat contradictoire sont des moyens acceptables pour
acquérir davantage de connaissance et de compréhension,
mais ils ne sont pas appropriés pour acquérir et
comprendre ce qu'il y a de plus sacré, la connaissance de Dieu
et des mystères de son Évangile. Les vérités
et le témoignage de l'Évangile sont donnés par
le Saint-Esprit grâce à la recherche dans un esprit de
prière, à la foi, à l'étude des
Écritures, à une vie de justice, à l'écoute
des indications et des conseils inspirés, à des
conversations édifiantes avec ceux qui ont la foi, à
une étude personnelle dans un esprit d'humilité et à
une méditation sereine.
La
relation entre la raison et la révélation
Ceux
qui font des recherches dans le domaine spirituel par l'étude
et le raisonnement, ainsi que par la foi et la révélation,
rencontreront toujours la difficulté d'établir une
relation entre ces deux méthodes. Ce sujet a intrigué
les hommes de raison et les hommes de foi depuis les temps les plus
anciens. Je vais présenter trois des nombreux exemples
d'application de cette relation dans l'acquisition de la connaissance
du divin.
1.
Partenaires égaux
Après
avoir donné un discours sur l'importance de la révélation
dans l'étude de l'Évangile, un ami m'a fait part de son
analyse sur la relation entre le raisonnement et la révélation
(qu'il appelait l' « Esprit »). Il avançait
l'idée qu'ils étaient des partenaires égaux,
chacun permettant de contrôler l'autre. Avec son autorisation,
je le cite :
« Les
deux peuvent ou devraient agir pour se compléter l'un l'autre,
être un contrôle et s'équilibrer mutuellement. Les
propositions honnêtes de l'un sont soumises à l'examen
de l'autre. S'appuyer exclusivement sur l'un des deux conduit à
un excès destructeur. L'Histoire a démontré que
trop s'appuyer sur l'Esprit à l'exclusion de la raison mène
au fanatisme, à l'intolérance et à l'effusion de
sang, et, en général, à d'autres manifestations
d'une subjectivité extrême. De même, trop
s'appuyer sur la raison ou l'intelligence a souvent détruit la
foi et conduit à un cynisme stérile...
« Votre
thèse implique-t-elle que le mode de contrôle ou
d'équilibre entre la raison et l'Esprit dont j'ai parlé
est mal conçu ? L'Esprit et la raison ne peuvent-ils pas
travailler comme des partenaires égaux, ou, du moins, ne
pouvons-nous pas les faire travailler ensemble harmonieusement, et en
fait n'est-ce pas ce que nous devrions rechercher ? Et quand ils ne
s'harmonisent pas ou ne semblent pas pouvoir le faire (pour moi,
habituellement, ils le font), ne sommes-nous pas justifiés en
mettant de côté notre jugement ? en ne déclarant
pas l'un juste et l'autre faux ? en attendant patiemment ou en
recherchant une meilleure explication ? » (Lettre à
l'auteur en date du 19 avril 1989)
J'ai
répondu :
« Bien
que je croie que chacun se réfère au raisonnement et à
l'Esprit (et, évidemment, que certains utilisent mieux le
raisonnement que d'autres et que certains entendent [ressentent]
mieux l'Esprit que d'autres), je ne crois pas qu'ils sont des
« partenaires égaux » et que là
où ils « ne s'harmonisent pas », nous
sommes « justifiés de mettre de côté
notre jugement ». La raison pour laquelle je ne crois pas
cela, c'est que je ne connais pas de moyen de prouver par le
raisonnement quelques-unes des réalités fondamentales,
telles que l'existence de Dieu et le pouvoir de l'expiation. C'est
pourquoi, à moins que nous ne donnions la priorité à
l'Esprit (dans l'exercice de la foi qui est le premier principe de
l'Évangile), nous deviendrons agnostiques pour toujours.
« J'ai
vécu de nombreuses expériences où la raison me
conduisait à une conclusion, tandis que l'Esprit et la foi me
montraient un autre chemin. À mon avis, la mesure dans
laquelle quelqu'un peut entendre [ressentir] l'Esprit et a la foi de
suivre ses incitations dans le cadre des sujets dont je parlais dans
mon discours, est un des meilleurs indicateurs de foi et de
spiritualité. Ceci laisse évidemment beaucoup de place
à la raison pour intervenir, mais ne lui confère pas un
rôle équivalent dans le domaine de la connaissance de
Dieu, dans l'étude de ses commandements, et dans la
compréhension de la doctrine du Royaume. » (Lettre
de l'auteur en date du 27 avril 1989)
Si
ma conviction est correcte, à savoir que le raisonnement et la
révélation ne sont pas des partenaires égaux, la
question se pose de savoir si l'un domine toujours l'autre ?
Quelques-uns ont suggéré que la raison est toujours
dominante. De ceci résulte que nous perdons foi en tout ce qui
ne peut être prouvé par la raison. D'autres ont insisté
sur le fait que ce qu'on appelle « révélation »
doit toujours prévaloir, quoi que dicte le raisonnement.
Personnellement, je n'aime pas ces deux extrêmes. Il y a
certainement une meilleure explication de la relation entre le
raisonnement et la révélation, plus proche de la
vérité.
2.
Une souveraineté partagée
Une
autre approche consisterait à dire que dans certains sujets le
raisonnement est la manière la plus plausible d'acquérir
de la connaissance et que d'en d'autres, c'est la révélation.
Cette idée suppose une ligne de séparation dans le
monde de la connaissance. D'un côté la priorité
est donnée au raisonnement, de l'autre, à la
révélation. Cette conception a été
adoptée à la fois par les hommes d'Église et les
philosophes, bien qu'ils ne soient pas nécessairement d'accord
quand il s'agit de situer cette ligne.
Les
propos suivants du philosophe Mortimer J. Adler, parus dans un
article récent, illustrent cette idée. En décrivant
la religion comme « un acte pur de foi, qui ne peut être
soutenu ou défié par l'analyse rationnelle ou la
connaissance empirique du monde », il conclut :
« Dans toute l'étendue de notre compréhension
scientifique du monde telle qu'elle est acceptée actuellement,
je ne trouve rien qui amène une seule difficulté
nouvelle dans notre pensée à l'égard de Dieu, ou
qui présente un obstacle intellectuel à notre
affirmation de l'existence de Dieu. En résumé, ... rien
que je puisse apprendre par la science n'a d'incidence sur ma manière
de penser lorsque je me pose la question de savoir si Dieu, tel qu'il
est conçu, existe ou non. » (Mortimer J. Adler
Concerning God, Modern Man and Religion, Aspen Quarterly, hiver 1990,
p. 100, 110)
Sa
définition de la religion reposant sur sa foi permet à
Adler de rendre hommage à la religion tout en rejetant comme
simples « superstitions » des croyances et des
pratiques religieuses qui vont à l'encontre de ce qu'il
considère comme des faits scientifiquement prouvés. Son
analyse est un défi pertinent pour ceux dont la conviction
religieuse est principalement fondée sur l'héritage ou
sur les affinités culturelles. Il explique :
« En
voyant la croissance apparente de la laïcité ou de
l'irréligion dans notre société occidentale, je
suggère l'idée que les hommes et les femmes qui ont
abandonné la religion à cause de l'influence sur leur
esprit de la science et de la philosophie modernes n'étaient
pas, initialement, vraiment croyants, mais seulement superstitieux.
La prédominance de la science dans notre culture a remplacé
un grand nombre de croyances superstitieuses qui faisaient partie de
leur conviction religieuse... La progression de la laïcité
et de l'irréligion dans notre société n'est pas
le reflet de la diminution du nombre de personnes vraiment pieuses,
mais de celles qui sont faussement pieuses, c'est-à-dire qui
sont tout simplement superstitieuses. » (op. cit., p. 112)
De
nombreux croyants font aussi une distinction entre le domaine de la
foi et celui des sciences, mais quelques uns seraient sûrement
en désaccord sur l'emplacement et la manière dont Adler
trace la ligne de séparation entre ces deux domaines. Par
exemple, Robert J. Matthews, ancien doyen de l'Enseignement Religieux
à l'université Brigham Young, fait une distinction très
nette « entre ce que nous appelons la vérité
naturelle ou profane et la vérité spirituelle ».
Il explique :
« Jacob
dénonce vigoureusement le fait de placer sa confiance dans la
sagesse et les sciences du monde, en particulier lorsque ces
dernières empêchent quelqu'un de parvenir à une
connaissance de l'Évangile et de l'accepter, ou en détournent
ceux qui l'ont déjà. Le Livre de Mormon traite
fréquemment de l'antagonisme entre les sciences du monde et ce
qui vient de Dieu (voir, par exemple 2 Néphi 26-29 ;
Jacob 4:14)... Le Livre de Mormon fait donc une distinction
importante entre le profane et le spirituel. » (Robert J.
Matthews, A Bible ! A Bible !, Salt Lake City, Bookcraft,
1990, p. 165, 162)
Bien
qu'ils reconnaissent l'existence d'une séparation entre les
domaines profane et spirituel, le professeur Matthews et le
philosophe Adler ne s'entendraient sûrement pas sur
l'emplacement de la ligne qui les sépare. Adler part de ce que
la science a prouvé selon lui et il ne concède la
suprématie à la religion, que dans ce qui reste. Adler
insiste :
« Les
vérités de la religion doivent être compatibles
avec les vérités de la science et de la philosophie. Au
fur et à mesure que la connaissance scientifique progresse et
que l'analyse philosophique s'affine, la religion est progressivement
débarrassée des superstitions qui se sont accumulées
au gré des circonstances. Ceci étant, il est donc
aujourd'hui plus facile que jamais de croire en une religion plus
pure, précisément en raison des progrès qui ont
été faits par la science et la philosophie. Autrement
dit, c'est plus facile pour ceux qui veulent avoir une vision claire
et une pratique pure de la religion, mais pas pour ceux dont la
dépendance envers la religion n'est guère plus qu'une
adhésion servile à une tradition superstitieuse. Depuis
les origines, un petit nombre seulement est parvenu à une
religion pure. La vaste majorité de ceux qui donnèrent
à leur époque et à leur société
l'apparence d'être religieux, étaient principalement et
essentiellement superstitieux. » (Mortimer J. Adler
Concerning God, Modern Man and Religion Aspen Quarterly, hiver 1990,
p. 112-113)
En
revanche, le professeur Matthews attribue la suprématie du
raisonnement ou celle de la révélation en fonction du
domaine traité : « Des vérités
différentes sont perçues de différentes manières
par l'esprit de l'homme. Nous percevons la plupart des vérités
auxquelles nous sommes soumis dans la condition mortelle par nos sens
naturels, mais nous percevons certaines des vérités
nécessaires à la rédemption de notre âme
par la révélation, par l'intermédiaire du
Saint-Esprit. Nous comprenons ces vérités non seulement
par nos facultés intellectuelles mais grâce au
discernement spirituel. » (Robert J. Matthews, A Bible !
A Bible !, Salt Lake City, Bookcraft, 1990, p. 162)
En
accord avec le professeur Matthews, je rejette bien sûr la
suggestion émise par Adler que chaque croyance ou pratique
religieuse allant à l'encontre de ce qu'il appelle « les
vérités de la science » est une superstition
qui doit être rejetée. Le monde des religions a
manifestement ses superstitions, mais, de la même manière,
le monde de la science a ses théories non valides et ses
preuves erronées. De même que la superstition peut se
déguiser en vérité religieuse, les théories
scientifiques et les preuves erronées peuvent se déguiser
en fait scientifique. Comme un commentateur saint des derniers jours
a remarqué :
« La
science est merveilleuse, mais reste limitée. Les théories
scientifiques changent, portant presque toujours la marque des
querelles entre factions. C'est la nature même de la
théorisation scientifique, à laquelle on ne peut
échapper. Il me semble essentiel que nous ne perdions pas de
vue cette limite, de crainte que la science n'en arrive à
'tromper même les élus'. À propos des étudiants
de l'université Brigham Young qui ont perdu leur témoignage
à cause de la théorie habile sur 'l'évolution de
l'homme' (répandue il y a une vingtaine d'années et
maintenant en complet désarroi, comme le montre la controverse
Leakey-Johanson), Nibley déplore : 'Il est triste de
constater combien de ces assertions qui ont éloigné de
l'Évangile quelques-uns de nos meilleurs étudiants se
sont avérées être complètement fausses ! »
(Charles L. Boyd, Forever Tentative, Dialogue, 22, hiver 1989, p.
149, citant Hugh Nibley, Old Testament and Related Studies, Salt Lake
City, Deseret Book et Foundation for Ancient Research and Mormon
Studies, 1986, p. 57)
Beaucoup
parmi ceux qui se sont égarés faute d'avoir su
discerner entre la science et la religion ont été
influencés par l'un ou l'autre des protagonistes qui essaie
d'occuper et de contrôler le terrain au-delà des limites
de sa spécialité : les hommes d'Église qui
se prononcent sur la science et vice versa. À mon avis, ces
deux genres d'extraterritorialité sont inappropriés.
Je
me souviens très bien du ressentiment que j'ai éprouvé
lorsqu'un acteur de renom, invité à l'université
Brigham Young pour faire part de ses idées à propos des
arts, fit un sermon sur la pollution de l'air causée par le
chauffage au charbon de l'université. Je ressens la même
chose chaque fois que quelqu'un utilise sa réussite ou son
expérience dans un domaine de connaissance pour donner de
l'ampleur et du poids à ses déclarations dans un tout
autre domaine.
Tous
les experts sont tentés de revendiquer leur savoir dans un
domaine qui n'est pas le leur, tel ce professeur de droit que
quelqu'un a décrit comme un expert en droit britannique quand
il était aux États-Unis et un expert en droit des
États-Unis quand il était en Grande Bretagne. Quiconque
prétend utiliser le savoir acquis dans un domaine pour émettre
des déclarations qui font autorité dans un autre
domaine, laisse supposer l'existence d'une unité de principes
entre ces domaines qu'il est facile d'avancer mais pas de démontrer.
La
manière de faire la distinction entre l'acquisition des
connaissances profanes et l'acquisition des connaissances
spirituelles m'est familière. Elle est à la base de mes
références fréquentes au caractère
essentiel de la révélation dans l'acquisition de la
connaissance spirituelle. Bien sûr, ces domaines ne sont pas
mutuellement exclusifs, la révélation étant
possible dans l'acquisition de la connaissance profane, et le
raisonnement étant essentiel dans l'acquisition de la
connaissance spirituelle. S'il est vrai que nous comprenons les
vérités profanes essentiellement par l'étude et
par le raisonnement, dans l'acquisition de la connaissance
spirituelle c'est la révélation qui a le dernier mot.
3.
La chronologie
Une
autre relation entre le raisonnement et la révélation
dans l'acquisition de la connaissance sacrée a été
décrite par la révélation moderne. Cette
relation est chronologique. L'étude et le raisonnement
viennent en premier. La révélation en second.
Nous
voyons cela dans la tentative d'Oliver Cowdery de traduire les
annales anciennes. Après qu'il ait échoué, le
Seigneur lui dit quelle en était la raison : il avait eu
« pour seul souci » de demander à Dieu.
Il aurait dû l'étudier dans son esprit et demander
ensuite si c'était juste. Ce n'est qu'après s'être
appliqué à étudier et à raisonner que le
Seigneur aurait confirmé ou infirmé la justesse de la
traduction qu'il proposait. Le texte n'aurait pu être rédigé
qu'après qu'il eut reçu cette révélation,
parce que, dit le Seigneur : « tu ne peux écrire
ce qui est sacré que si cela t'est donné de moi »
(D&A 9:7-9).
Cette
révélation enseigne que dans l'acquisition de la
connaissance spirituelle, le raisonnement n'est pas une alternative à
la révélation. L'étude et le raisonnement
peuvent permettre de trouver la vérité dans de nombreux
domaines, mais seule la révélation peut la confirmer.
L'étude et le raisonnement sont un moyen en vue d'une fin, et
cette fin est la révélation venant de Dieu.
Cette
relation chronologique est quelque peu comparable à la
procédure scientifique que j'ai apprise étant jeune. Je
travaillais en tant que technicien dans une petite station de radio.
Je possédais une licence de transmetteur-radio. Je savais que
le démarrage des amplificateurs était délicat.
D'abord, nous faisions préchauffer les filaments des lampes.
Ces filaments, semblables à ceux des ampoules électriques,
atteignaient la température requise au bout de trente
secondes. Alors seulement nous pouvions tourner l'interrupteur pour
passer en alimentation à haute tension, ce qui plaçait
le signal du transmetteur amplifié en « passage à
l'antenne ». Chaque étape était essentielle,
et chacune devait se faire dans un ordre correct. Autrement, il n'y
aurait pas de signal radio, et les lampes pourraient même être
sérieusement endommagées.
Cette
analogie avec la radio peut être appliquée au dispositif
de réception dont le Créateur a doté chacun
d'entre nous. D'abord, nous préchauffons le mécanisme
par l'étude et par le raisonnement. Puis nous sollicitons le
pouvoir de la révélation de façon à
recevoir la communication désirée.
La
relation chronologique entre le raisonnement et la révélation
Dans
la relation chronologique entre le raisonnement et la révélation,
il est important que le raisonnement ait le « premier
mot » et que la révélation ait le « dernier
mot ».
Dans
cette chronologie, le raisonnement peut fonctionner au maximum et
proposer une solution. De plus, alors que nous recherchons une
certitude ou d'autres conseils par la révélation, le
raisonnement peut servir d'étalon pour filtrer les
contrefaçons de la révélation et pour
authentifier la révélation véritable. Cette
recherche est nécessaire car, de même qu'il y a de
mauvais raisonnements, il y a également de fausses
révélations.
Les
premiers membres de l'Église rétablie furent mis en
garde à propos des dons spirituels, afin qu'ils ne soient pas
trompés (D&A 46:8). Le Seigneur définit les sources
de la tromperie par ces mots : « ...afin de ne pas
être séduits par des esprits mauvais, par des doctrines
de démons ou par les commandements des hommes, car certains
viennent des hommes et d'autres des démons. » (D&A
46:7)
Boyd
K. Packer explique : « Toutes les inspirations ne
viennent pas de Dieu (voir D&A 46:7). Le malin a le pouvoir
d'interférer dans les canaux de la révélation et
d'envoyer des signaux conflictuels qui peuvent nous égarer et
apporter de la confusion. Il y a des incitations qui proviennent des
sources du mal et qui sont si parfaitement contrefaites qu'elles
trompent même les élus (voir Matthieu 24:24) »
(Boyd K. Packer, Let Not Your Heart Be Troubled, Salt Lake City,
Bookcraft, 1991, p. 212)
Le
résultat est que nous avons besoin du raisonnement pour
établir l'authenticité de la révélation.
Ensuite, une fois qu'elle est authentifiée, la vraie
révélation peut être communiquée sous ses
diverses formes et remplir ses diverses fonctions.
Par
ce moyen et dans cette chronologie, le raisonnement filtre la
révélation, puis la révélation confirme
ou rejette le raisonnement. En ce qui concerne la connaissance
sacrée, le fait que le raisonnement ait le premier mot a
autant d'importance que le fait que la révélation ait
le dernier mot. Je crois que ceci est une des significations du
commandement du Seigneur à son peuple de chercher « la
science par l'étude mais aussi par la foi » (D&A
88:118).
La
raison authentifie la révélation
Il
y a au moins trois tests que la raison peut utiliser comme étalon
pour vérifier l'authenticité de la révélation.
La vraie révélation passera avec succès les
trois tests et la fausse révélation (dont la source
provient « des hommes » et « du
diable ») échouera au moins à l'un d'entre
eux.
1.
La vraie révélation édifie celui qui la reçoit.
En conséquence elle doit être formulée par des
mots qui sont cohérents ou par un sentiment dont le message
peut être compris par celui qui est spirituellement réceptif.
L'apôtre
Paul enseigna ce principe à ceux qui comparaient le don des
langues au don de prophétie. « Puisque vous aspirez
aux dons spirituels, que ce soit pour l'édification de
l'Église que vous cherchiez à en posséder
abondamment... Que tout se fasse pour l'édification »
(1 Corinthiens 14:12, 26).
Dans
une révélation moderne donnée pour instruire les
saints sur la manière de faire la distinction entre les
révélations du Seigneur et celles des « faux
esprits qui s'en sont allés parcourir la terre pour séduire
le monde » (D&A 50:2), le Seigneur déclara :
« Ce qui n'édifie pas n'est pas de Dieu et est
ténèbres » (D&A 50:23). De même,
Joseph Smith, le prophète, enseigna aux membres : « Ne
parlez pas en langues s'il n'y a pas d'interprète présent »
(Enseignements du prophète Joseph Smith, p. 199). Les
glossolalies et autres communications incohérentes ne peuvent
pas être des révélations de Dieu.
Le
test de l'édification comme moyen de filtrer les révélations
fausses et trompeuses de Satan a été réaffirmé
à Joseph Smith, le prophète, dans une révélation
ultérieure. Cette révélation précise
également d'autres tests qui ont un lien entre eux : la
prière, l'esprit contrit, le langage doux, le respect des
ordonnances de l'Évangile et le contrôle de soi.
« De
plus, je vais vous donner un exemple en toutes choses afin que vous
ne soyez pas séduits ; car Satan est en liberté
dans le pays et il s'en va, séduisant les nations – C'est
pourquoi, celui qui prie, dont l'esprit est contrit, celui-là
est accepté de moi, s'il obéit à mes
ordonnances.
« Celui
qui parle, dont l'esprit est contrit, dont le langage est humble et
édifiant, celui-là est de Dieu, s'il obéit à
mes ordonnances. Et de plus, celui qui tremble sous mon pouvoir sera
rendu fort et produira des fruits de louange et de sagesse, selon les
révélations et les vérités que je vous ai
données. Et de plus, celui qui est vaincu et ne porte pas de
fruits, à savoir selon cet exemple, n'est pas de moi. »
(D&A 52:14-18)
L'application
de ces tests pour évaluer et authentifier la révélation
ou l'inspiration implique bien sûr que la personne qui reçoit
la révélation doit utiliser les techniques de l'étude
et du raisonnement.
2.
Le contenu d'une vraie révélation doit être en
fonction du poste occupé dans l'Église et des
responsabilités de la personne qui la reçoit. Le
Seigneur enseigna ce principe à l'Église au début
du rétablissement par une révélation qui
expliquait à Oliver Cowdery que personne n'était nommé
pour recevoir des révélations et des commandements pour
l'Église entière excepté Joseph Smith, le
prophète : « Car tout doit se faire avec
ordre. » Les révélations reçues par
un membre de l'Église, Hiram Page, étaient des
tromperies de Satan. « Car, voici, il n'a pas été
chargé de faire cela. » (D&A 28:13, 12)
Quelques
mois plus tard, une autre révélation réaffirma
aux anciens de l'Église que « les révélations
et les commandements » seraient reçus uniquement
par le prophète que le Seigneur avait nommé, et que
« nul autre ne sera nommé à ce don si ce
n'est par son intermédiaire ». Ceux qui seraient
choisis par le Seigneur pour exercer ce don « entrer[ont]
par la porte et ser[ont] ordonné[s] comme je vous l'ai dit
précédemment » - excluant ainsi la
possibilité de nominations ou d'appels secrets pour recevoir
la révélation. « Et ceci sera une loi pour
vous, pour que vous n'acceptiez pas comme révélations
et commandements les enseignements de quiconque viendra devant vous.
Et ceci, je vous le donne, afin que vous ne soyez pas séduits
afin que vous sachiez qu'ils ne sont pas de moi. » (D&A
43:2-7)
Selon
ces principes, les révélations pour une paroisse
viennent à l'évêque ; celles pour une
famille viennent à son chef ; et celles destinées
à une personne lui viennent directement. Quelqu'un ne reçoit
pas de révélation pour son voisin, et celui qui n'a pas
été publiquement appelé et mis à part
selon le gouvernement et les procédures de l'Église ne
reçoit pas de révélations pour commander ou
guider l'Église ou un groupe de ses membres. Un des indices
les plus sûrs pour identifier les fausses révélations
(celles émanant d'hommes ou du diable) est que leur contenu,
analysé par le raisonnement, est transmis par des canaux
autres que ceux prescrits par le Seigneur.
3.
La vraie révélation doit être en accord avec les
principes de l'Évangile tels qu'ils sont révélés
dans les Écritures et dans les enseignements des prophètes.
Le Seigneur ne donnera pas de révélation en
contradiction avec les principes de l'Évangile. Sa maison est
une maison d'ordre.
Des
révélations peuvent s'ajouter à l'ensemble de la
connaissance de l'Évangile déjà reçu
(« ligne sur ligne, précepte sur précepte »,
D&A 98:12), guider les dirigeants dans l'exercice de leur
responsabilité dans l'Église, ou aider les membres de
l'Église à mettre en pratique les principes de
l'Évangile dans des situations particulières. Le
Seigneur peut, de lui-même, ou par l'intermédiaire de
son porte-parole désigné, changer les ordonnances et
les pratiques de son Église. Le Sauveur révoqua
personnellement la loi des offrandes et des sacrifices par effusion
de sang (3 Néphi 15:3-9), et commanda à son peuple
d'offrir le sacrifice d'un coeur brisé et d'un esprit contrit
(3 Néphi 9:19-20 ; D&A 59:8). Pierre reçut
une révélation l'informant que l'Évangile
devrait dorénavant être prêché aux Gentils
(Actes 10). Joseph Smith et Brigham Young furent guidés pour
introduire et mettre en pratique le principe du mariage plural, puis
Wilford Woodruff fut guidé pour le retirer. Mais le Seigneur
ne donnera jamais aux membres individuels de révélations
qui contrediront les doctrines de son Église ou les
instructions données par l'intermédiaire de ses
dirigeants. Le président Spencer W. Kimball a déclaré :
« Si quelqu'un reçoit des révélations,
ce à quoi chacun peut s'attendre s'il en est digne, elles
seront toujours en plein accord avec le programme de l'Église ;
elles n'iront jamais à son encontre. » (The
Teachings of Spencer W. Kimball, éd. Edward L. Kimball, Salt
Lake City, Bookcraft, 1982, p. 458)
Les
limites de l'évaluation par le raisonnement
Bien
que le raisonnement puisse, de manière appropriée,
évaluer certains aspects de la révélation, sa
fonction devrait se limiter à établir la véracité
ou l'authenticité (la source) d'une révélation.
Si le test du raisonnement va au-delà, il peut devenir un
frein à l'acceptation des commandements de Dieu. Ainsi, quand
l'apôtre Paul enseigna la résurrection aux Athéniens,
certains se moquèrent de lui, visiblement parce qu'ils
croyaient que les conclusions du raisonnement ne pouvaient pas être
remises en question (Actes 17:32). De ce point de vue, qu'il n'est
pas rare de trouver parmi les intellectuels, la philosophie a le pas
sur la prophétie et le raisonnement sur la révélation.
Tout
comme nous devons mettre des limites à l'utilisation du
raisonnement pour contrôler l'authenticité de la
révélation, nous devons aussi être conscients de
ces limites dans l'évaluation du comportement des personnes
suite à une révélation. Comme Boyd K. Packer l'a
observé : « On ne peut pas parler de façon
précise et objective de l'histoire de l'Église, sans
tenir compte des pouvoirs spirituels qui soutiennent cette oeuvre »
(Packer, Let Not your Heart Be Troubled, p. 104). Si nous essayons
d'évaluer un comportement motivé par la foi uniquement
en termes rationnels, nous déformons la réalité.
On constate cette erreur dans quelques écrits sur l'histoire
du mormonisme.
Le
président Gordon B. Hinckley parla de cette erreur lorsqu'il
répondit à la critique qui dit que l'Église est
opposée au raisonnement et au rationalisme dans les récits
de son histoire : « Ils n'ont pas compris que la
religion concerne le coeur tout autant que l'intelligence. Ceux qui
nous critiquent ont perdu de vue la gloire et le miracle de cette
oeuvre. Dans leur recherche de la moindre erreur, ils ne voient pas
la majesté du grand déroulement de cette cause. Ils ont
perdu de vue l'étincelle qui fut allumée à
Palmyra et qui maintenant anime la foi à travers le monde,
dans de nombreux pays et dans de nombreuses langues. Regardant à
travers les lunettes de l'humanisme, ils ne comprennent pas que les
émotions spirituelles, renforcées par la connaissance
qu'elles viennent du Saint-Esprit, avaient influencé tout
autant les actions de nos prédécesseurs que leurs
facultés intellectuelles. » (Gordon B. Hinckley,
Faith, the Essence of True Religion, Salt Lake City, Deseret Book,
1989, p. 76)
En
résumé, les dirigeants de l'Église ne se sont
pas opposés à l'utilisation du raisonnement dans les
récits de l'histoire de l'Église mais à
l'omission de la révélation.
La
révélation surpasse le raisonnement
Tout
comme le raisonnement a le premier mot en matière de
connaissance sacrée, c'est la révélation qui a
le dernier mot. Nous ne pouvons pas recevoir la connaissance de Dieu
sans l'Esprit de Dieu (1 Corinthiens 2:11).
Comme
le président Harold B. Lee l'a dit : « Les
révélations divines sont les critères par
lesquels nous mesurons toute connaissance, et si quelque chose n'est
pas conforme aux révélations nous pouvons être
certains qu'il ne s'agit pas de la vérité »
(Harold B. Lee, Stand Ye in Holy Places, Salt Lake City, Deseret
Book, 1974, p. 143). Je crois que c'est ce que le prophète du
Livre de Mormon voulait dire quand il déclara : « Être
instruit est une bonne chose si on écoute les conseils de
Dieu. » (2 Néphi 9:29)
Ceux
qui s'appliquent à l'étude et au raisonnement dans le
domaine du sacré, mais qui ensuite ignorent ou rejettent la
conclusion de l'étape primordiale qu'est la révélation,
peuvent être comme les prêtres que le prophète
Abinadi dénonça pour « avoir perverti les
voies du Seigneur » parce qu'ils ne s'appliquaient point
le « coeur à comprendre » (Mosiah 12:26,
27). En parlant de telles personnes le Seigneur a dit : « Ils
ne voient pas la lumière et détournent leur coeur de
moi à cause des préceptes des hommes. » (D&A
45:29)
Conclusion
Il
nous est commandé de rechercher la connaissance par l'étude,
c'est à dire le raisonnement, et par la foi, c'est à
dire en s'appuyant sur la révélation. Les deux méthodes
sont approuvées par Dieu. Il utilise ces deux méthodes
pour révéler la lumière et la connaissance à
ses enfants. Mais quand on en vient à la connaissance de Dieu
et des principes de son Évangile, nous devons donner la
priorité à la révélation car cela est la
voie divine.
Les
saints des derniers jours aiment à citer la déclaration
de Joseph Smith, le prophète : « L'homme n'est
pas sauvé plus vite qu'il n'acquiert de la connaissance. »
(Enseignements du prophète Joseph Smith, p. 175) Cette
citation est quelquefois utilisée pour suggérer que
l'acquisition de la connaissance est, par elle-même une
activité qui sauve, et que tous les hommes doivent apprendre
toutes choses pour être sauvés. Ce n'est pas ce que le
prophète a dit. Dans le contexte de cette déclaration,
elle faisait référence à une connaissance
précise, obtenue d'une manière précise.
Dans
la suite de sa phrase, le prophète explique que sans la
connaissance, un homme sera « conduit en captivité »
par quelque mauvais esprit qui aura « plus de connaissance
et par conséquent plus de pouvoir ». La phrase
suivante résume la pensée du prophète :
« Il faut par conséquent la révélation
pour nous aider et nous donner la connaissance des choses de Dieu. »
(op. cit. ; voir aussi D&A 130:19) Cette déclaration
nous éclaire sur le genre de connaissance qui sauve et sur la
méthode par excellence que nous devons utiliser pour
l'obtenir.
L'étude
et le raisonnement jouent aussi un rôle important dans
l'acquisition des connaissances spirituelles. Ceux qui recherchent la
vérité commencent par étudier la parole de Dieu
et les enseignements de ses serviteurs et essaient de les comprendre
par le raisonnement. Le raisonnement peut établir
l'authenticité de la révélation et de
l'inspiration en les évaluant par les questions tests :
est-ce qu'elles édifient, rentrent-elles dans le cadre du
poste détenu dans l'Église et sont-elles conformes aux
principes de l'Évangile ? Mais le raisonnement n'a pas sa
place dans le fait d'évaluer, selon certains critères
supposés raisonnables, le contenu de la révélation
en vue de l'accepter ou de le rejeter. La révélation a
le dernier mot.
Malheureusement,
certains partisans de l'acquisition de la connaissance par le
raisonnement rejettent la méthode de la révélation.
Quand les hommes apprirent qu'ils pouvaient acquérir la
connaissance par le raisonnement, c'est-à-dire par
l'observation et l'expérimentation, certains en tirèrent
la conclusion logique mais erronée que la connaissance ne
pouvait être acquise que par ce moyen. Leurs disciples
persistent encore aujourd'hui dans cette idée, rejetant la
réalité de tout ce qu'ils ne peuvent mesurer par leurs
méthodes.
À
l’opposé, le Seigneur a déclaré que « nul
ne connaît [les voies de Dieu] si cela ne lui est révélé »
(Jacob 4:8). Puis il a exposé dans les grandes lignes les
conditions de l'apprentissage par la révélation :
avoir la foi, être humble, chercher par la prière,
garder les commandements, se repentir de ses péchés,
faire de bonnes oeuvres et lire les Écritures. Ceux qui sont
capables d'apprendre par cette méthode peuvent se qualifier
pour ce qui peut être appelé la révélation
par excellence.
Dans
la révélation moderne, le Seigneur a promis que « les
clefs du mystère de ces choses qui ont été
scellées... depuis la fondation du monde » (la
plénitude de l'Évangile) seront données « par
le Consolateur, le Saint-Esprit qui connaît toutes choses »
(D&A 35:18-19). Il s'agit de la révélation par
excellence. Elle viendra par le Saint-Esprit, et non par l'étude
intellectuelle ni par le raisonnement humain. Quand elle viendra,
elle révélera à ceux qui craignent Dieu et qui
le servent « tous les mystères, oui, toutes les
choses de mon royaume tenues secrètes depuis les temps
anciens, et, pendant les âges à venir » (D&A
76:7). « Oui, en vérité, je vous le dis, ce
jour où le Seigneur viendra, il révélera tout »
(D&A 101:32). Ce jour-là, tel que l'a prédit Ésaïe,
« la terre sera pleine de la connaissance du Seigneur. »
(Ésaïe 11:9 ; 2 Néphi 21:9 ; voir
aussi D&A 84:98)
Ceux
qui reçoivent cette révélation sont ainsi
décrits : « Leur sagesse sera grande et leur
intelligence atteindra les cieux ; et devant eux la sagesse des
sages périra, et l'intelligence des hommes intelligents
disparaîtra. Car je les éclairerai de mon Esprit et je
leur ferai connaître par ma puissance les secrets de ma
volonté, oui, même ce que l'oeil n'a point vu, que
l'oreille n'a point entendu, et qui n'est pas encore entré au
coeur de l'homme. » (D&A 76:9-10)
Après
avoir reçu la grande révélation sur les trois
degrés de gloire, Joseph Smith et Sidney Rigdon écrivirent
ces paroles inspirées : « Grandes et
merveilleuses sont les oeuvres du Seigneur et les mystères de
son royaume qu'il nous a montrés et qui surpassent tout
entendement en gloire, en puissance et en domination ; Qu'il
nous a commandé de ne pas écrire pendant que nous
étions encore dans l'Esprit et qu'il n'est pas permis à
l'homme d'exprimer. Et l'homme n'est pas à même de les
faire connaître ; car ils ne peuvent être vus et
compris que par le pouvoir du Saint-Esprit que Dieu accorde à
ceux qui l'aiment et se purifient devant lui. » (D&A
76: 114-116)
En
des termes inspirés, Joseph Smith, le prophète,
décrivit le Seigneur déversant « la
connaissance des cieux sur la tête des saints des derniers
jours » (D&A 121:33). Tel est le fruit de la
révélation : l'enseignement du Saint-Esprit. Tel
est l'héritage du fidèle qui cherche « la
science par l'étude et aussi par la foi » (D&A
88:118).
CHAPITRE
3 : LES SIGNES ET LA SCIENCE
Pour
avancer dans la connaissance, la science utilise les méthodes
de l’expérimentation et de la constatation, telles que
l’observation, la mesure et l’analyse. À l’opposé,
les Écritures donnent un avertissement à ceux qui
recherchent des signes pour déterminer la vérité
religieuse. Ceci est un autre exemple des différences
significatives qui existent entre les voies du Seigneur et celles du
monde.
Les
signes dont il s’agit dans ce chapitre sont ceux recherchés
ou donnés comme preuve de l’existence de Dieu, de
l’autorité de ses serviteurs ou des vérités
de son Évangile (les Écritures utilisent aussi le mot
signe dans d’autres sens, comme le sabbat, signe de l’alliance
entre Dieu et Israël, [Exode 31:13, 17 ; Ézéchiel
20:12, 20], les signes de la naissance et de la mort du Messie [Luc
2:12 ; 1 Néphi 19:10 ; Hélaman 14:20],
les signes les signes de la Seconde Venue [D&A 45:16, 39] et les
signes des temps [Matthieu 16:3 ; D&A 68:11]).
Vues
dans leur ensemble, les Écritures contiennent des
enseignements et des exemples apparemment opposés à
propos des signes qui peuvent être utilisés comme
preuve. Mais les instructions données à l’Israël
moderne sont simples : les signes ne sont pas acceptables pour
convertir ; ils sont acceptables – et même promis –
pour apporter une confirmation aux convertis.
Les
signes dans la Bible
L’Ancien
Testament contient des exemples mémorables de miracles qui
sont considérés comme des signes. C’est le cas
des divers fléaux que le Seigneur a infligés aux
Égyptiens par l’intermédiaire du prophète
Moïse (voir Exode 7-10). Ces signes et ces miracles furent
rappelés plus tard aux enfants d’Israël pour
augmenter leur foi (Deutéronome 6:22 ; 26:8). Gédéon
demanda et reçut un signe lui prouvant qu’il était
choisi pour délivrer Israël (Juges 6:17).
Un
autre exemple de miracle bien visible donné sous la forme d’un
signe fut l’affrontement entre Élie et les 450 prêtres
de Baal. L’évidence de ce signe est manifeste dans le
défi d’Elie : « Invoquez le nom de votre
Dieu ; et moi, j’invoquerai le nom de l’Éternel.
Le dieu qui répondra par le feu, c’est lui qui sera
Dieu. Et tout le peuple répondit disant : C’est
bien ! » (1 Rois 18:24). Le feu céleste
qui consuma le sacrifice vint en réponse à la prière
d’Élie. Les prêtres de Baal défaits, non
seulement échouèrent dans leur défi, mais
perdirent aussi la vie.
Les
signes semblent être considérés différemment
dans le Nouveau Testament. Malgré les nombreux miracles que
Jésus accomplit pendant son ministère, dans la plupart
des cas les récits sacrés ne présentent pas les
miracles comme des signes prouvant l’autorité ou la
vérité religieuse.
À
deux reprises, au début de son ministère, le Sauveur
fut tenté par Satan qui le défia de faire un miracle
pour prouver qu’il était le Fils de Dieu. Les deux fois,
Jésus refusa (Matthieu 4:1-11 ; Luc 4:1-13).
Pendant
le ministère du Sauveur, les scribes et les Pharisiens lui
dirent : « Maître, nous voudrions te voir faire
un miracle » (Matthieu 12:38 ; voir aussi
1 Corinthiens 1:22). Les Pharisiens et les Sadducéens
« lui demandèrent de leur faire voir un signe
venant du ciel » (Matthieu 16:1). À chaque fois, il
refusa de leur donner un signe, déclarant que c'était
une génération méchante et adultère qui
« demande un miracle » (Matthieu 12:39 ;
16:4 ; voir aussi Marc 8:11,12 ; Luc 11:29).
La
plupart des auteurs des évangiles, même lorsqu'ils
décrivent les miracles de Jésus, rapportent ses
instructions ou ses actions qui ont pour objet d’empêcher
que ses miracles ne soient utilisés comme preuve de son appel
divin, de son autorité ou de la véracité de son
message. Quand Jésus guérit le lépreux, il lui
ordonna : « Garde-toi d'en parler à personne »
(Matthieu 8:4 ; Marc 1:44; Luc 5:14). Quand il guérit les
foules de Galilée, il « leur recommanda sévèrement
de ne pas le faire connaître » (Matthieu 12:16 ;
Marc 3:12). Quand il ramena à la vie la fille du chef de la
synagogue, « il ne permit à personne d'entrer avec
lui, sauf à Pierre, à Jacques et à Jean, et au
père et à la mère de l'enfant », et
« il leur recommanda de ne dire à personne ce qui
était arrivé » (Marc 5:37-43 ; voir
aussi Luc 8:51-56).
Lorsque
Jésus guérit le sourd, il « le prit à
part loin de la foule », et ensuite « il leur
recommanda de n'en parler à personne » (Marc
7:33-36). Avant que Jésus ne guérisse l'aveugle, « il
le conduisit hors du village », et après avoir
rendu la vue à l'homme, il lui dit : « N'entre
pas au village » (Marc 8:23-26).
À
l’opposé, lorsque dans le pays des Gadaréniens
Jésus chassa la légion de démons hors de
l'homme, il lui dit de raconter à ses amis les grandes choses
que le Seigneur avait faites pour lui (Marc 5:19 ; Luc 8:39).
Peut-être était-ce suite à la demande de la foule
que Jésus quitte leur pays (Matthieu 8:34 ; Marc 5:17 ;
Luc 8:37).
Mais
lorsque les évangiles synoptiques ne présentent pas les
miracles du Maître comme étant accomplis pour convaincre
l'incroyant, ils notent que le peuple qui les avait vus était
saisi de crainte, s'émerveillait, glorifiait ou louait Dieu
(voir par exemple Matthieu 9:8, 32-33 ; 12:22-23 ; Marc
1:26-27 ; 2:12 ; Luc 4:36-37 ; 5:26 ; 7:16 ;
9:43 ; 18:43).
Les
auteurs des synoptiques rapportent qu'à une certaine occasion
le Seigneur fit référence aux miracles passés,
mais apparemment il les présenta comme un signe pour fortifier
la foi vacillante de ceux qui croyaient déjà. Les
disciples de Jean-Baptiste demandèrent à Jésus
s'il était bien celui qui devait venir. Il leur dit de
retourner vers Jean et de lui rapporter comment ils avaient vu les
aveugles voir à nouveau, les boiteux marcher, les lépreux
être purifiés, les sourds entendre et les morts
ressusciter (Matthieu 11:2-6 ; Luc 7:18-23).
Vers
la fin de son ministère, alors que le Sauveur était sur
la croix du Calvaire, les grands prêtres et les autres
demandèrent à nouveau un signe, se moquant de lui en
lançant ce défi : « S'il est roi
d'Israël, qu'il descende de la croix, et nous croirons en lui »
(Matthieu 27:42 ; voir aussi Marc 15:29-32 ; Luc 23:35-37).
Ce défi moqueur, comme beaucoup d'autres, resta sans réponse.
À
l’opposé des évangiles synoptiques, l'évangile
de Jean présente parfois les miracles de Jésus comme
des signes pour les incroyants. Peut-être s'agit-il d'une
présentation différente pour un autre auditoire. Les
évangiles de Matthieu, Marc et Luc semblent avoir été
écrits pour les incroyants, comme un livre missionnaire
adressé respectivement aux Juifs, aux Romains et aux Grecs
(voir C. Wilfred Griggs, The Testimony of John, dans Studies in
Scripture, Ed. Kent P. Jackson et Robert L. Millet, 5, Salt Lake
City, Deseret Book, 1986, p. 111 ; Bruce R. McConkie, Doctrinal
New Testament Commentary, vol. 1, Salt Lake City, Bookcraft, 1973, p.
65). Il aurait été inapproprié de présenter
à cet auditoire les miracles comme des signes destinés
à convertir l'incroyant. L'évangile de Jean, au
contraire, a été écrit pour les saints (op.
cit.), c'est-à-dire des croyants dont la foi pouvait être
fortifiée de façon appropriée, à savoir
en présentant les miracles comme des signes.
Le
livre de Jean rapporte plusieurs exemples où le Sauveur a dit
que les oeuvres qu'il accomplissait témoignaient de lui (Jean
5:36; 10:25). À la dernière de ces occasions, il dit :
« Quand même vous ne me croiriez pas, croyez à
ces oeuvres. » (Jean 10:38)
Jean
identifie le changement de l'eau en vin à Cana comme étant
« le premier des miracles [qui manifestèrent] la
gloire de [Jésus] ; et ses disciples crurent en lui »
(Jean 2:11) Peu après, quand Jésus était à
Jérusalem « à la fête de la Pâques,
plusieurs crurent en son nom, voyant les miracles qu'il faisait »
(Jean 2:23).
Quand
il vint voir Jésus, Nicodème dit : “Rabbi,
nous savons que tu es un docteur venu de Dieu ; car personne ne
peut faire ces miracles que tu fais, si Dieu n'est avec lui. »
(Jean 3:2) À Capernaüm, Jésus dit à
l'officier qui lui demandait de guérir son fils malade :
« Si vous ne voyez des miracles et des prodiges, vous ne
croyez point ». Ensuite, il guérit le fils, et
l'officier et toute sa maison crurent (Jean 4:48-53). À
l'inverse, quand Jésus guérit l'aveugle de naissance,
les Pharisiens constatèrent la preuve et ne crurent toujours
pas (Jean 9:1-34).
Le
livre de Jean décrit un miracle que le Sauveur accomplit
sachant qu'il persuaderait le peuple de croire. En présence
d'une grande foule, il ramena Lazare à la vie. « Des
Juifs qui étaient venus vers Marie, et qui virent ce que fit
Jésus, crurent en lui » (Jean 11:40-45).
À
la fin de son récit, Jean écrit, apparemment aux
croyants, « Jésus a fait encore, en présence
de ses disciples, beaucoup d'autres miracles, qui ne sont pas écrits
dans ce livre. Mais ces choses ont été écrites
afin que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de
Dieu, et qu'en croyant vous ayez la vie éternelle. »
(Jean 20:30-31)
Il
y a de nombreux exemples dans le reste du Nouveau Testament où
les apôtres cherchèrent à renforcer la foi des
croyants ou à convertir les incroyants en faisant référence
aux signes et aux prodiges précédemment accomplis par
le Sauveur ou par son autorité.
Dans
son sermon, le jour de la Pentecôte, Pierre rappela au peuple
que Jésus était « un homme à qui Dieu
avait rendu témoignage... par les miracles, les prodiges et
les signes qu'il a opérés par lui au milieu de vous,
comme vous le savez vous-mêmes. » (Actes 2:22 ;
voir aussi Jean 2:19-22)
Paul
rappela aux Corinthiens que « les preuves de mon apostolat
ont éclaté au milieu de vous par une patience à
toute épreuve, par des signes, des prodiges et des miracles »
(2 Corinthiens 12:12). Selon l'épître aux Hébreux,
Dieu appuya le témoignage des apôtres « par
des signes, des prodiges et divers miracles, et par les dons du
Saint-Esprit, selon sa volonté. » (Hébreux
2:4)
Le
Livre de Mormon aussi rapporte des cas où les prophètes
utilisèrent les signes ou les miracles dans le processus de la
conversion. Parmi la génération précédant
le Christ, il y eut beaucoup de grands miracles et de grandes
manifestations qui convertirent la plupart des Lamanites « par
la force des preuves qu'ils avaient reçues »
(Hélaman 5:50). Néphi parla à la foule du
meurtre de leur grand juge et de l'identité du meurtrier et
les présenta comme un signe pour les convaincre qu'il était
« un honnête homme… envoyé par Dieu »
(Hélaman 8:27 ; 9:24-36). Plus tard, il « [montra]
des signes et des prodiges ; faisant des miracles parmi le
peuple, afin qu'il sût que le Christ viendrait bientôt. »
(Hélaman 16:4)
Les
signes dans la révélation moderne
Dans
son ensemble, la Bible semble quelque peu ambiguë pour savoir si
les signes devaient être utilisés pour convertir
l'incroyant. À l’opposé, les révélations
modernes interdisent cela parce que les signes ne devraient pas être
recherchés ni utilisés dans ce but.
Le
Seigneur déclara aux membres de son Église rétablie :
« Il en est parmi vous qui recherchent des signes, et il y
a eu des gens comme cela dès le commencement » (D&A
63:8). Mais l'acquisition de la foi au moyen de signes n'est pas la
voie divine, parce que « la foi ne vient pas par les
signes mais les signes suivent ceux qui croient ». Le
Seigneur continue : « Oui, les signes viennent par la
foi, pour l'accomplissement de grandes oeuvres, car sans la foi, nul
n'est agréable à Dieu ; et ceux contre qui Dieu
est irrité ne lui sont pas agréables ; c'est
pourquoi à ceux-là il ne montre aucun signe, si ce
n'est dans sa colère pour leur condamnation. C'est pourquoi,
moi, le Seigneur, je ne suis pas satisfait de ceux d'entre vous qui
ont cherché des signes et des prodiges pour avoir la foi et
non pour le bien des hommes en vue de ma gloire. » (D&A
63:9, 11-12)
Le
Livre de Mormon contient nombre d'enseignements sur cette méthode
impropre qui consiste à chercher ou à utiliser des
signes pour obtenir la foi ou pour susciter une conversion.
Pendant
qu'il enseignait les Zoramites, Alma se référa aux
nombreuses personnes qui disaient : « Si tu nous
montres un signe du ciel, alors nous saurons assurément, alors
nous croirons ». Se désolant de cette demande, il
fit la remarque qu’elle montrait un manque total de foi (Alma
32:17-18).
« Ne
disputez pas parce que vous ne voyez pas » a dit le
prophète Moroni dans un autre passage, « car vous
ne recevrez de témoignage que lorsque votre toi aura été
mise à l'épreuve » (Éther 12:6). En
parlant de cette instruction des Écritures, le président
Spencer W. Kimball a dit : « Adam, le père,
comprenait ce principe fondamental : 'Un ange du Seigneur
apparut à Adam, et lui dit : Pourquoi offres-tu des
sacrifices au Seigneur ? Et Adam lui dit : Je ne le sais, si ce
n'est que le Seigneur me l'a commandé' (Moïse 5:6). Les
hommes ont souvent mal compris et renversé le processus. Ils
voudraient la récolte avant les semailles, la récompense
avant le service, le miracle avant la foi. » (The
Teachings of Spencer W. Kimball, éd. Edward L. Kimball, Salt
Lake City, Bookcraft, 1982, p. 458)
Jésus
enseigna (et ses prophètes l'enseignèrent par la suite)
que « les signes suivent ceux qui croient »
(Marc 16:17 ; Mormon 9:24 ; D&A 84:65). Le Livre de
Mormon enseigne le principe en ces termes : « Et
jamais personne n'a, en aucun temps, fait de miracles qu'après
avoir eu la toi ; c'est pourquoi, ils croyaient tout d'abord au
Fils de Dieu. » (Éther 12:18)
Les
signes sont lourds de conséquences
Le
Seigneur a donné des avertissements significatifs à
ceux qui, sans la foi, recherchent des signes. À ces derniers,
« il ne montre aucun signe, si ce n'est dans sa colère
pour leur condamnation » (D&A 63:11). Le Livre de
Mormon contient deux exemples de ce principe et une explication
mémorable de la manière dont les hommes sont condamnés
lorsqu'ils recherchent un signe.
En
débattant avec Jacob, Shérem, l'érudit,
demanda : « Montre-moi un signe par ce pouvoir du
Saint-Esprit, grâce auquel tu connais tant de choses ».
Dans ce cas, un signe fut donné. Il fut frappé par le
pouvoir de Dieu, confessa son erreur et mourut (Jacob 7:13-20).
De
même, Korihor dit à Alma : « Si tu veux
me montrer un signe pour que je sois convaincu qu'il y a un Dieu,
oui, montre-moi qu'il a du pouvoir, et alors je serai convaincu de la
véracité de tes paroles ». Alma refusa,
rappelant à l'incrédule que les témoignages des
prophètes et des croyants constituaient déjà des
signes. Korihor insista, arguant du fait qu'il ne croirait pas « si
vous ne me montrez pas un signe », et reçut un
signe : il devint muet, fut chassé et piétiné
à mort (Alma 30:43-59).
En
enseignant les Zoramites, Alma expliqua comment le fait de rechercher
un signe peut mener à la condamnation. Celui qui s'humilie
« sans être obligé d'être humble »
est davantage béni que celui qui est obligé d'être
humble. Il compara celui qui est volontairement humble à une
personne croyante et baptisée « sans avoir le coeur
obstiné, oui, sans avoir été amenée à
connaître la parole, ou même forcée de la
connaître avant de vouloir croire ». Puis il donna
cet exemple :
« Oui,
il y en a beaucoup qui disent : Si tu nous montres un signe du
ciel alors nous saurons assurément ; alors nous croirons.
Maintenant, je vous le demande : Est-ce là de la foi ? Je
vous dis que non ; car si un homme connaît une chose, il
n'a pas lieu de croire, car il sait. Or, combien plus est maudit
celui qui connaît la volonté de Dieu et ne la fait pas,
que celui qui croit seulement ou a seulement lieu de croire et qui
tombe en transgression ? » (Alma 32:15-19).
On
peut tirer deux enseignements de ceci. Premièrement, ceux qui
acquièrent la connaissance par les signes se privent de la
possibilité de développer leur foi. Sans ce
développement spirituel (présenté plus loin) et
sans le soutien de la foi, ils sont arrêtés dans leur
progression et restent sujets à la transgression et à
la chute. Deuxièmement, ceux qui acquièrent la
connaissance puis chutent sont plus maudits que ceux qui, suivant le
chemin de la foi, sont parvenus seulement à la croyance avant
de chuter.
Ainsi,
les signes peuvent amener la condamnation sur ceux qui, par ce moyen,
parviennent à la connaissance. Ils se privent de la
possibilité de développer leur foi, et se soumettent à
une punition plus sévère que ceux dont la progression
spirituelle suit le chemin normal du développement de la foi.
Il
existe d'autres « condamnations » pour ceux qui
recherchent des signes sans développer premièrement la
foi que Dieu requiert.
Une
de ces condamnations est d'être induit en erreur. Dieu a averti
l'Israël ancien contre le fait de suivre des prophètes
qui accomplissaient des signes et des prodiges et qui, ensuite,
cherchaient à les détourner pour adorer des dieux
étrangers (Deutéronome 13:1-3). Le Sauveur enseigna à
ses apôtres que, dans les derniers jours, « il
s'élèvera de faux Christs et de faux prophètes,
et ils montreront de grands signes et de grands prodiges, au point de
séduire, s'il était possible même les élus,
qui sont les élus selon l'alliance » (Matthieu
24:23, traduction de Joseph Smith ; voir aussi Matthieu 24:24 ;
Marc 13:22). L'apôtre Paul a averti que le Sauveur ne
reviendrait pas « jusqu'à ce que vienne un déchu,
par les oeuvres de Satan avec tout pouvoir, et les signes et les
prodiges mensongers, et avec toutes les séductions de
l'iniquité pour ceux qui périssent »
(2 Thessaloniciens 2:9-10, traduction de Joseph Smith).
Dans
la grande révélation sur les signes, le Seigneur dit :
« Celui qui cherche des signes verra des signes mais pas
pour le salut » (D&A 63:7). Le président
Spencer W. Kimball expliqua : « il est certain que
nous ne devrions pas rechercher les signes. Les signes existent et je
crois que tous ceux qui le veulent, peuvent en obtenir. Je crois que
si quelqu'un veut des révélations au point de les
solliciter au-delà de ce qui est juste, il obtiendra,
finalement, ces révélations, mais elles ne viendront
peut-être pas de Dieu. Je suis sûr que beaucoup de choses
spectaculaires peuvent être accomplies, parce que le diable est
très actif. Il écoute et est impatient d'agir. Et ainsi
il donne des expériences étranges. »
(Spencer W. Kimball, Faith Precedes the Miracle, Salt Lake City,
Deseret Book, 1972, p. 4)
De
même, le professeur Hugh Nibley a écrit : « Les
miracles utilisés à des fins de démonstration ne
peuvent jamais être [infaillibles], car les miracles ne sont
pas exclusivement chrétiens... Comme la philosophie et le
mysticisme, les miracles (les vrais miracles) sont présents
dans le monde entier et sont utilisés partout par les
professionnels de la religion pour étonner et convaincre les
incrédules. » (Hugh Nibley, The World and the
Prophets, Salt Lake City, Deseret Book et Foundation for Ancient
Research and Mormon Studies, 1987, p. 139)
Manifestement,
l'accomplissement de miracles et l'apparition de signes et de
prodiges ne sont pas des preuves que ceux qui les accomplissent sont
des serviteurs de Dieu ou des ministres de la vérité.
De nos jours, Dieu n'utilise pas les miracles ou les signes comme
moyen d'enseigner ou de convaincre l'incroyant. En conséquence,
nous ne devrions pas demander de signes dans ce but, et nous devrions
être très prudents vis à vis de ces soi-disant
preuves spirituelles.
La
conversion par les signes
Être
témoin de signes et de miracles n'est pas une fondation sûre
pour une conversion. L'histoire scripturaire atteste que ceux qui ont
été convertis par les signes et les prodiges les
oublient rapidement et deviennent à nouveau la proie des
mensonges et des distorsions de Satan et de ses serviteurs (Hélaman
16:23 ; 3 Néphi 1:22 ; 2:1 ; 8:4). Le
Seigneur dit à Moïse : « Jusques à
quand ce peuple me méprisera-t-il ? Jusques à quand ne
croira-t-il pas en moi, malgré tous les prodiges que j'ai
faits au milieu de lui ? » (Nombres 14:11)
Jean
raconte avec tristesse J'entrée triomphale que fit Jésus
dans Jérusalem : « Malgré tant de
miracles qu'il avait faits en leur présence, ils ne croyaient
pas en lui. » (Jean 12:37)
À
l’opposé du témoignage de l'Esprit, qui peut se
renouveler de temps en temps selon les besoins de celui qui en est
digne, être témoin d'un signe ou vivre un miracle est un
événement qui s'estompera dans la mémoire de
celui qui l'aura vécu et dont l'impact s'effacera (voir Joseph
Fielding Smith, Doctrine du Salut, vol. 1, 1977, p. 50). Par exemple,
comme le président Spencer W. Kimball l'a fait remarquer :
« Oliver Cowdery a vu beaucoup de signes. Il a eu les
plaques sacrées en main, il a vu Jean-Baptiste ; il a
reçu la haute prêtrise des mains de Pierre, Jacques et
Jean et a vécu de nombreux grands miracles, et néanmoins
toutes ces choses ne purent le garder dans la foi. »
(Spencer W. Kimball, Faith Precedes the Miracle, Salt Lake City,
Deseret Book, 1972, p. 5)
Le
président George Q. Cannon a résumé cette
expérience en ces termes : « Je ne crois pas
que les hommes puissent être convaincus comme ils le devraient
par de telles manifestations. Il a été observé
par ceux qui avaient de l'expérience dans cette Église,
que lorsque des hommes ont été convertis par de telles
manifestations, une succession constante de ces dernières
était nécessaire pour les garder dans l'Église ;
leur foi devait être constamment fortifiée par le
témoignage de telles manifestations ; mais lorsque leur
conviction provenait du débordement de l'Esprit de Dieu, que
leur jugement était convaincu, qu'ils avaient jugé par
eux-mêmes et obtenu satisfaction par le témoignage de
Jésus en réponse à leurs prières et à
leur quête fidèle de la connaissance auprès de
Dieu, lorsque cela a été le cas, ils ont été
plus forts pour rester fermes, pour endurer les persécutions
et les épreuves que ceux qui ont été convaincus
grâce à quelque manifestation surnaturelle du genre
auquel j'ai fait allusion. » (Journal of Discourses,
vol. 22, p. 361-362)
La
véritable Église ne convertit pas par les signes et les
prodiges, mais par le témoignage du Saint-Esprit. La façon
du Seigneur d'enseigner les vérités religieuses n'est
pas de faire un miracle ou un signe spectaculaire mais par un
témoignage personnel.
De
cette manière, la véritable Église protège
l'intégrité de la conversion de ses membres. Là
où l'expérience de la conversion est individuelle et
personnelle, les convertis potentiels n'ont pas de raison de
rivaliser pour obtenir la plus grande. La pression de l'entourage et
la psychologie de groupe qui peuvent accompagner les expériences
de conversion en masse sont ainsi éliminées. Une vraie
conversion est une expérience personnelle fondée sur la
communication individuelle de l'Esprit, et non pas sur un signe ou un
miracle.
Les
preuves scientifiques et la foi
Les
méthodes scientifiques qui ont si bien servi l'avancée
des connaissances séculières, s'appuient fortement sur
les observations. Les scientifiques étudient et mesurent les
événements physiques, les expériences
attentivement préparées et les phénomènes
naturels. Leurs méthodes diffèrent entre elles, mais
pour tous les scientifiques, la preuve de l'exactitude des réponses
qu'ils recherchent se trouve dans leurs observations et dans leurs
mesures détaillées. Nous pouvons donc avancer que les
scientifiques cherchent à progresser dans la connaissance et à
apprendre la vérité par l'observation physique et la
mesure des signes. Ceci sans vouloir nier le fait que les efforts des
scientifiques ont été guidés par des choses non
mesurables comme l'intuition et l'inspiration.
La
religion des saints des derniers jours n'est pas hostile à
toute vérité trouvée par quelque moyen que ce
soit. Les saints des derniers jours ont été parmi les
utilisateurs les plus efficaces des méthodes scientifiques et,
par ce moyen (et par la révélation, quand ils étaient
qualifiés pour la recevoir), ont beaucoup contribué à
la connaissance du monde dans lequel nous vivons. Mais les saints des
derniers jours fidèles savent que les méthodes
scientifiques ne sont pas appropriées pour connaître
Dieu ou déterminer les vérités de son Évangile.
Un
membre de l'Église qui comptait parmi les scientifiques les
plus renommés au monde, Henry Eyring, maîtrisait
parfaitement les méthodes scientifiques qui permettent
d’obtenir de la connaissance mais il savait aussi que ces
méthodes ont leurs limites et qu'il existe une autre manière
de trouver des réponses aux questions qui importent le plus.
Son attitude a été décrite par son fils, Henry
B. Eyring :
« Maintenant,
quand quelqu'un vous dit que les questions qui importent relèvent
seulement d'une analyse rationnelle quelconque, souvenez-vous que les
réussites étonnantes de la raison ces trois cents
dernières années sont sorties de ce qu'on appelle la
'méthode scientifique'. J'espère que vous vous
souviendrez, comme je me souviendrai toujours, du scientifique Henry
Eyring à genoux, quand les questions qui importaient le plus
relevaient de la méthode pour trouver la vérité
qu'il avait apprise sur les genoux de sa mère alors qu'il
était un petit garçon à Old Mexico. C'était
longtemps avant qu'il ne prenne le train pour Tucson, puis Berkeley,
puis Madison, et ensuite pour Berlin et Princeton pour appliquer la
méthode scientifique dans la création de théories
qui ont changé le monde de la science. Ce qu'il apprit à
genoux lui apporta la paix et changea ma vie. » (Henry B.
Eyring, Going Home, dans Brigham Young University 1986-87 Devotional
and Firesides Speeches, Provo, Utah, University Publications, 1987,
p. 76-77)
Le
cardinal Joseph Ratzinger, théologien catholique éminent,
décrit la relation qui existe entre les méthodes
divergentes utilisées par la science et par la religion :
« Il
ne peut y avoir de confusion entre la théologie – l'étude
de Dieu et des relations de Dieu avec l'humanité –
et les sciences naturelles. Car la théologie, selon ses
propres termes, considère que Dieu est surnaturel. Il est
fondamental dans toute connaissance humaine de reconnaître que
l'objet de l'étude indique et détermine la méthode
correcte à suivre pour le comprendre. On n'approche pas la
chirurgie comme la politique ou les arts, ou l'art comme la chimie…
Parce que nous croyons en Dieu, nous reconnaissons dès l'abord
que la science n'est pas adaptée pour étudier la
divinité. Le vrai scientifique, qui est croyant, connaît
suffisamment les limites de sa méthodologie pour savoir que
par elle seule, personne ne peut voir Dieu… Nous ne saurions
nier à l'humanité la capacité d'être
réceptive au-delà des limites de la raison pure. »
(cité dans Paul T. Stallsworth, The Story of an encounter,
dans Biblical Interpretation in Crisis : The Ratzinger
Conference on Bible and Church, éd. Richard J. Neuhaus, Grand
Rapids, Mich. Wm B. Eerdmans, 1989, p. 106-107)
Le
professeur Joseph F. McConkie explique cette relation de cette
manière : « Toute vraie re1igion doit être
fondée sur le surnaturel ou le miraculeux. La vraie religion
requiert nécessairement la foi pour l'accepter et pour la
vivre. Sans un Dieu omnipotent, un Dieu au-delà du
raisonnement et des pouvoirs de l'homme, il ne peut y avoir de vraie
religion. La vraie religion trouve des réponses dans
l'omnipotence de Dieu. Cette dernière n'est pas terrestre et
ne cherche pas non plus de vérifications auprès des
mortels. La vraie religion ne cherchera pas des réponses dans
la science ou par toute autre discipline créée par
l'homme. Ses principes et ses pratiques doivent professer être
enracinés dans les cieux. » (Joseph Fielding
McConkie, Prophets and Prophecy, Salt Lake City Bookcraft, 1988, p.
156)
Les
Écritures rejettent l'idée que les hommes peuvent
utiliser les méthodes scientifiques ou les signes pour
acquérir la foi : une expérience mise en scène
ou suscitée par la volonté de l'homme et au moment
choisi par lui. Le Seigneur décrète que quand des
signes seront donnés, ils le seront selon ses conditions :
par la volonté de Dieu et au moment et dans les conditions
qu'il aura choisis ; « Oui, les signes viennent par
la foi, non pas par la volonté des hommes, ni selon leur bon
plaisir, mais par la volonté de Dieu. » (D&A
63:10)
Pourquoi
en est-il ainsi ? La réponse se trouve dans le but de la vie.
Nous, les mortels, ne sommes pas envoyés sur terre pour
prouver l'existence de Dieu. Nous sommes ici pour être mis à
l'épreuve. Pour réaliser notre destinée
éternelle, nous devons développer notre foi.
Comme
l'apôtre Paul l'enseigna : « Or, sans la toi,
il est impossible [d'être] agréable [à Dieu] ;
car il faut que celui qui l'approche croie que Dieu existe, et qu'il
est le rémunérateur de ceux qui le cherchent. »
(Hébreux 11:6)
Pour
nous permettre de développer cette foi, les paramètres
de la condition mortelle furent, comme Bruce C. Hafen l'a dit,
« attentivement et délibérément
prévus pour ne pas obliger à croire » (Bruce
C. Hafen, The Believing Heart, Salt Lake City, Deseret Book, 1986, p.
6). Par exemple, après que le texte du Livre de Mormon a été
rédigé, les plaques d'or furent enlevées afin de
ne plus être accessibles pour servir de preuve au Livre de
Mormon. La foi ne vient pas des preuves scientifiques ou des signes
miraculeux. Si c'était le cas, l'ordre prescrit par Dieu
serait renversé et la progression spirituelle qui vient du
développement et de l'exercice de la foi serait empêchée.
(op. cit. p. 46-48)
La
foi vient comme le Seigneur l’a prévu : par le
désir, les tâtonnements et la confiance, par la prière
et le service. Dieu nous a placés dans un contexte terrestre
où nous pouvons acquérir la foi de la façon
qu'il a prévue. Les preuves et les signes viennent plus tard,
selon d’autres critères. Comme le président
George Q. Cannon a dit : « Le témoignage
fiable doit venir de l'intérieur; c'est à dire que les
saints doivent avoir le témoignage du Saint-Esprit en eux. Les
signes extérieurs et les preuves vont confirmer et fortifier
le témoignage intérieur. » (George Q.
Cannon, Gospel Truth, éd. Jerreld L. Newquist, Salt Lake City,
Deseret Book, 1987, p. 152)
Ceci
nous aide à comprendre pourquoi les méthodes
scientifiques ne s'appliquent pas pour établir la véracité
de l'Évangile, la réalité du rétablissement
ou l'origine et l'authenticité du Livre de Mormon. Le
président Ezra Taft Benson a déclaré : « La
véracité du Livre de Mormon n'a jamais été
prouvée, hier comme aujourd'hui, par des études
d'experts. L'origine, la préparation, la traduction et la
vérification de la véracité du Livre de Mormon
ont toutes été conservées entre les mains du
Seigneur. » (Ezra Taft Benson, A Witness and a Warning,
Salt Lake City, Deseret Book, 1988, p. 31)
Quelques
saints des derniers jours n'ont pas accepté cette réalité
et sont préoccupés par les preuves confirmant le Livre
de Mormon. À ce sujet, je suis d'accord avec les professeurs
de religion de l'université Brigham Young, Joseph Fielding
McConkie et Robert L. Millett qui ont dit : « Dans de
telles preuves, nous pouvons trouver du carburant pour alimenter le
témoignage, mais seulement si le feu du témoignage
brûle déjà fortement. De telles choses peuvent
alimenter un feu qui brûle déjà mais n'ont pas le
pouvoir d'allumer ce feu. Elles ne sont pas la source du témoignage
et ainsi n'ont pas leur place dans l’œuvre de
prosély1isme. Les preuves, qu'elles soient internes ou
extérieures, ne convertissent ni le Juif, ni le Gentil. De
telles choses peuvent affermir le converti mais elles ne
convertissent pas. Il est dans l'ordre céleste que les signes
suivent la croyance ; ils ne la précèdent pas. »
(Joseph Fielding McConkie et Robert L. Millet, Doctrinal Commentary
on the Book of Mormon, vol. 2, Salt Lake City, Bookcraft, 1987, p.
xiii)
Le
manque de preuves scientifiques décisives des vérités
scripturaires n'empêche pas les défenseurs de l'Évangile
d'avoir accès à des contre-arguments de même
nature. Quand des opposants attaquent l'Église ou ses
doctrines en présentant des soi-disant preuves, les défenseurs
loyaux les contrent avec des arguments d'une nature similaire. Comme
Neal A. Maxwell a dit : « Nous pouvons être
assurés que suffisamment de données et de preuves
extérieures plausibles apparaîtront pour empêcher
les moqueurs de s'amuser avec les Écritures, mais ne seront
pas suffisantes pour enlever la nécessité de la foi. »
(Neal A. Maxwell, But for a Small Moment, Salt Lake City, Bookcraft,
1986, p. 35)
Tout
comme la science ne prouvera pas la vérité religieuse,
elle ne pourra pas la réfuter. Les vérités
éternelles de la religion ne seront pas réfutées,
même par les toutes dernières preuves ou les lois les
plus solides de la science. La science est trop expérimentale
pour cela.
Au
cours du siècle dernier, de grandes avancées ont été
faites dans la compréhension humaine en ce qui concerne la
nature de l'univers physique et de ses éléments
vivants. Des scientifiques parmi mes amis me disent que les lois de
Newton ne sont actuellement applicables que sous un nombre restreint
de conditions ; par exemple, elles ne correspondent pas au
comportement des micro-particules à grande vitesse. La nature
atomique de la matière était loin d'être acceptée
il y a cent ans. De nos jours, la description la plus précise
d'un atome correspond à une équation mathématique
complexe. Des avancées comparables ont été
faites dans notre compréhension de la photosynthèse, un
processus de base utilisé par le monde végétal
qui permet la continuation de toute vie sur la planète. Il y a
seulement quelques décennies, les scientifiques croyaient que
l'oxygène produit par ce processus venait du dioxyde de
carbone ; aujourd'hui, ils sont sûrs qu'il vient de l'eau.
Il y a moins d'un demi siècle, les scientifiques croyaient que
les protéines présentes dans une cellule étaient
le composant génétique de la cellule. Les manipulations
d'ADN rendues possibles, les scientifiques furent rapidement
convaincus que le composant génétique des cellules
était l'ADN, et non pas les protéines.
Dans
les efforts passionnants des scientifiques, les anciennes
explications sont présentées comme moins exactes que
les plus récentes. Les anciennes explications admises sur des
relations diverses, s'avèrent fausses ou d'une application
limitée. Le processus dynamique se poursuit, et comme nous
l'avons dit, la connaissance s'accroît. Mais la connaissance
obtenue par la méthode scientifique est toujours expérimentale
et n'est pas une fondation suffisante pour réfuter l'existence
ou l'oeuvre de Dieu. Le professeur Hugh Nibley donne cette
conclusion :
« Les
paroles des prophètes ne peuvent être soumises aux
essais expérimentaux et imparfaits que les hommes ont préparés
pour les mettre à l'épreuve. La science, la philosophie
et le bon sens sont tous utilisés par les tribunaux. Mais ils
n'ont pas le dernier mot. Chaque fois que les hommes, dans leur
sagesse, ont eu le dernier mot, d'autres derniers mots ont rapidement
suivi. Le dernier mot est le témoignage de l'Évangile
qui ne vient que par la révélation directe. Notre Père
céleste le prononce. S'il était en accord parfait avec
la science d'aujourd'hui, il serait sûrement en désaccord
avec la science de demain. En conséquence, ne cherchons pas à
comparer Dieu aux avis éclairés du moment alors qu'il
parle le langage de l'éternité. » (Hugh
Nibley, The World and the Prophets, Salt Lake City, Deseret Book et
Foundation for Ancient Research and Mormon Studies, 1987, p. 134)
Le
rôle des signes et leur diffusion
Quel
est donc le rôle légitime des signes et des miracles ?
Ce n'est sûrement pas de prêcher l'Évangile. Comme
George Q. Cannon l'a observé :
« L'Évangile
de Jésus n'est pas et n'a jamais été dépendant
des seuls miracles pour prouver sa véracité… Par
une lecture attentive des Écritures, nous constatons que ni
Jésus ni ses apôtres n'usaient de miracles pour
convaincre de la vérité de leur enseignement. S'ils
avaient considéré les miracles comme étant la
manière correcte de convertir les gens, ils l'auraient
sûrement adoptée; et un homme n'aurait pas pu être
condamné pour ne pas avoir embrassé leur doctrine s'il
n'avait pas été témoin d'une démonstration
de pouvoir surnaturel (tel que nous le connaissons). Quoi qu'il en
soit, avant son ascension, en parlant à ses disciples, il dit
explicitement que ces signes ou démonstrations de pouvoir
suivraient ceux qui croiraient ; ils devaient être la
conséquence de la foi et non pas l'unique fondement sur lequel
la foi repose. » (George Q. Cannon, Gospel Truth, éd.
Jerreld L. Newquist, Salt Lake City, Deseret Book, 1987, p. 151-152 ;
une Écriture précise que les langues sont un signe pour
l'incroyant : 1 Corinthiens 14:22 ; peut-être
que ceci décrit simplement la fonction du don des langues dans
la prédication aux incroyants)
Les
signes permettent de fortifier la foi et sont une bénédiction
pour les croyants. Le Nouveau Testament rapporte la promesse du
Sauveur : « les miracles accompagneront ceux qui
auront cru » (Marc 16:17). Il est rapporté plus
loin que lorsque ses serviteurs s'en allèrent prêcher,
le Seigneur « confirmait la parole par les miracles qui
l'accompagnaient » (Marc 16:20).
La
promesse que les signes suivraient et confirmeraient la parole a été
réaffirmée par les prophètes dans beaucoup
d'autres Écritures (voir, par exemple, Mormon 9:24 ;
Éther 4:18 ; D&A 58:64 ; 68:10 ; 84:65).
Néphi enseigna que les Gentils doivent être convaincus
que Jésus-Christ, « par la puissance du
Saint-Esprit, se manifeste à tous ceux qui croient en lui…
faisant, selon leur foi, des miracles, des signes et des prodiges
puissants parmi les enfants des hommes » (2 Néphi
26:13).
Ceux
qui ont écrit l'histoire de l'Église primitive ont noté
que les apôtres accomplissaient « beaucoup de
prodiges et de miracles » (Actes 2:43 ; 5:11-14 ;
9:33-35, 40-42 ; 13:9-12). De même, dans les temps
modernes, le Seigneur a promis : « Je montrerai des
miracles, des signes et des prodiges à tous ceux qui croient
en mon nom » (D&A 35:8). À la même
époque, il a mis en garde les détenteurs de sa prêtrise
en disant : « Ne demandez des miracles que si je vous
le commande » (D&A 24:13).
Le
principe selon lequel les signes sont montrés à ceux
qui croient est bien illustré par l'expérience de Néphi
qui désirait voir et connaître les choses que son père
avait vues en vision (1 Néphi 10:7). Après avoir,
par la prière, diligemment cherché à recevoir
cette manifestation, et après avoir fait preuve de foi, il
reçut une vision (1 Néphi 11:1). L'Esprit lui
indiqua que cette vision lui était donnée comme un
signe, à cause de sa foi : « Et toi, Néphi,
tu es béni, parce que tu crois au Fils du Dieu très
haut; c'est pourquoi tu verras les choses que tu as désirées.
Et voici ceci te sera un signe : Lorsque tu auras vu... tu
rendras témoignage. » (1 Néphi 11:6-7)
De
même, dans la révélation moderne, le Seigneur a
rappelé que les dons spirituels sont donnés non comme
un signe pour l'incroyant mais comme une aide pour le croyant :
« Car en vérité, je vous le dis, ils sont
donnés pour le bénéfice de ceux qui m'aiment et
qui gardent tous mes commandements, et de celui qui s'efforce de
faire ainsi ; afin que puissent en bénéficier tous
ceux qui cherchent ou qui me demandent, mais non ceux qui me
demandent un signe pour le consommer dans leur convoitise. »
(D&A 46:9)
II
y a une autre différence entre les preuves scientifiques et
les signes ou miracles que Dieu donne pour confirmer la parole au
fidèle. C'est la mesure dans laquelle de telles expériences
sont partagées avec les autres. Pour remplir sa fonction, la
preuve scientifique doit être rendue publique. À
l’opposé, les signes et les miracles ne doivent pas être
montrés au monde.
En
renouvelant sa promesse que les signes suivraient ceux qui croient,
le Seigneur a commandé aux membres de son Église « de
ne pas se vanter de cela ni d'en parler devant le monde, car cela
vous est donné pour votre profit et pour le salut »
(D&A 84:73). Deux ans plus tard, il répéta ces
directives aux saints égarés du Missouri, les
conseillant ainsi : « Ne vous vantez pas de votre foi
ni de vos oeuvres puissantes » (D&A 105:24). Plus
tard, Joseph Smith, le prophète, recommanda : « Soyons
fidèles et silencieux, frères, et si Dieu vous donne un
signe, gardez-le pour vous-mêmes. » (Enseignements
du prophète Joseph Smith, p. 69)
En
règle générale, les saints des derniers jours
suivent ce conseil. Ils ne parlent pas publiquement de leurs
expériences les plus sacrées. Ils mentionnent rarement
les miracles en rendant leur témoignage, et ils prêchent
rarement au pupitre que, grâce aux signes, l'Évangile
est vrai. Habituellement, dans leur témoignage, ils affirment
la véracité de l'Évangile rétabli en
présentant le dénouement de leur expérience mais
sans en révéler toutes les étapes.
Cette
réticence à parler de miracles ou d'expériences
sacrées est quelquefois mal perçue par ceux qui ne
comprennent pas les saints des derniers jours, y compris par d'autres
chrétiens fervents. Il y a quelques années, je donnais
une conférence sur un thème juridique dans une célèbre
université protestante. À l'issue de la conférence,
plusieurs membres de la faculté de théologie
m'invitèrent à déjeuner. Ils me dirent :
“Nous connaissons la grande importance que revêt la vie
familiale chez les mormons. Nous respectons la manière dont
les mormons fidèles paient un dixième de leurs revenus
en dîme. Nous savons que de nombreux mormons ont réussi
dans divers domaines. Mais nous ne savons rien de votre vie
spirituelle individuelle. Nous n'avons jamais entendu nos amis
mormons nous en parler. Les mormons vivent-ils des expériences
religieuses ?" »
J'ai
compris que la question de ces pasteurs fervents était :
« Comment pouvez-vous être sauvés si vous
n'avez pas eu un témoignage de l'Esprit ? Si les mormons ont
de telles expériences, pourquoi n'en parlent-ils pas, comme
nous, lorsque nous racontons le moment où nous avons été
'sauvés' ? » Je les assurai que les mormons ont des
expériences spirituelles, mais j'expliquai que nous
considérons ces expériences comme étant si
sacrées que nous en parlons rarement. Je pensai en moi-même
que nous, les saints des derniers jours, pourrions voir plus loin que
la lettre du commandement de ne pas nous vanter des miracles ou de ne
pas les montrer au monde. En omettant de faire part de la richesse de
notre vie religieuse lors de conversations privées avec des
membres réceptifs d'autres Églises, nous perdons des
occasions de glorifier Dieu et de témoigner du Christ et des
bénédictions de son Évangile. Nous pouvons même
induire en erreur certaines personnes lorsque nous en disons trop à
propos des fruits visibles du mormonisme et des réalisations
louables d'éminents saints des derniers jours, et que nous en
disons trop peu sur les expériences spirituelles personnelles
édifiantes des saints des derniers jours ordinaires.
Conclusion
Le
Seigneur a commandé que les signes ne soient pas utilisés
pour convertir l'incroyant. Les signes suivent ceux qui croient et
ont la foi et sont une confirmation et une force pour eux. À
ce sujet, les méthodes de la science, bien qu'elles aient
abouti à tant d'avancées dans la connaissance du monde,
diffèrent nettement de la méthode du Seigneur. Certains
confondent les méthodes de la science et celles du Seigneur (y
compris l'utilisation correcte ou incorrecte des signes) et ne
comprennent pas l'utilisation appropriée de chacune d'elles.
Il se peut que certaines de ces confusions soient imputables à
l'utilisation du mot preuve dans le domaine spirituel.
L'apôtre
Paul a dit : « Mais examinez toutes choses et retenez
ce qui est bon » (1 Thessaloniciens 5:21). De même,
en réaffirmant le commandement de la dîme par
l'intermédiaire du prophète Malachie, le Seigneur dit :
« Mettez-moi de la sorte à l'épreuve, dit
l'Éternel des armées. Et vous verrez si je n'ouvre pas
pour vous les écluses des cieux, si je ne répands pas
sur vous la bénédiction au-delà de toute
mesure. » (Malachie 3:10)
Par
la bouche de Malachie, le Seigneur a donné des promesses
spécifiques à ceux qui apporteraient leur dîme
(par exemple : « Pour vous je menacerai celui qui
dévore »). Ces passages scripturaires invitent le
fidèle à mettre le Seigneur à l'épreuve
en gardant ses commandements et en recherchant la bénédiction
promise. Cette « expérience » ne fait
pas partie du genre de signes qu'il nous est commandé
d'éviter.
Puisque
le genre de preuve qui provient de l'obéissance aux
commandements et de la recherche de la bénédiction
promise est le résultat de l'exercice de la foi, les signes
qui suivent ceux qui croient ne sont pas des signes interdits mais
appropriés. Ceci est évident dans ce qui est peut-être
la plus puissante invitation, parmi toutes les Écritures, à
rechercher une preuve : « Et quand vous recevrez ces
choses, je vous exhorte à demander à Dieu, le Père
éternel, au nom du Christ, si ces choses ne sont pas vraies ;
et si vous le demandez avec un coeur sincère et avec une
intention réelle, ayant foi au Christ, il vous en manifestera
la vérité, par le pouvoir du Saint-Esprit. »
(Moroni 10:4)
Moroni
fait la promesse explicite d'une manifestation spirituelle à
celui qui cherche à connaître la véracité
du Livre de Mormon. Mais, il faut le noter, cette promesse est faite
seulement à la personne qui demande « avec un coeur
sincère et avec une intention réelle, ayant foi au
Christ ». La manifestation qui est donnée en
réponse, suite à cette promesse, n'est pas un signe
donné pour convertir l'incroyant, mais un signe qui suit la
foi et l'engagement de l'individu.
Lors
d'une récente conférence générale, le
président Howard W. Hunter, réaffirmant l'avertissement
de James E. Talmage concernant l'arrogance de ceux qui rejettent la
véracité des miracles et des signes dont ils n'ont pas
fait l'expérience, et qu'ils ne peuvent comprendre, a dit :
« La science et l'intelligence humaine n'ont pas encore
fait suffisamment de progrès pour analyser et expliquer ces
prodiges. Frère Talmage a averti qu'il est de toute évidence
arrogant d'affirmer que les miracles n'existent pas, que les
résultats et les manifestations ne peuvent être
qu’imaginaires puisque nous ne pouvons comprendre les moyens
par lesquels ils se produisent... En fait, ceux qui ont été
les bénéficiaires de ces miracles en sont les témoins
les plus convaincants. » (L’Étoile,
juillet 1989, p. 14)
Ce
conseil s'applique particulièrement au témoignage sacré
que le Saint-Esprit rend à celui qui recherche la vérité.
Ceux qui ne sont pas prêts spirituellement à recevoir ce
témoignage devraient prendre garde à ne pas affirmer
que, parce qu'ils n'en ont pas fait l'expérience, il n'existe
pas.
Dans
une revue d'histoire moderne, un spécialiste saint des
derniers jours a fait cette analyse de la croyance mormone à
propos des miracles et du témoignage de l'Esprit :
« La
caractéristique la plus anachronique du mormonisme pourrait
être son ouverture constante au miraculeux. [Richard] Bushman
fait la remarque que depuis le 18ème siècle la plupart
des dénominations chrétiennes ont rejeté la
possibilité d'événements surnaturels non
mentionnés dans la Bible. En parlant d'anges, de guérisons,
de prophéties et de la révélation à notre
époque, les mormons offensent les fondamentalistes et les
agnostiques en enfreignant cette règle qui est une synthèse
chrétienne du Siècle des Lumières. Se souciant
peu de l'authenticité contemporaine du doute existentiel, les
mormons affirment individuellement que leur foi a été
miraculeusement confirmée par un témoignage du
Saint-Esprit reçu en réponse à leur prière.
Même les spécialistes mormons tels que Bushman et
[Leonard J.] Arrington expliqueraient que ces expériences de
révélation sont aussi essentielles à leur foi
que la recherche documentaire, la preuve empirique ou la logique
herméneutique... Au seuil du Jugement Dernier, il semble que
tout le monde soit d'accord sur un point : les mormons vont à
l'encontre de l'esprit de notre temps. » (Bryce
Christensen, Mormons and Modernism, Chronicles of Culture, juillet
1985, p. 10)
Le
professeur Hugh Nibley a noté une tendance naturelle, dans le
domaine de la religion, « à osciller entre deux
pôles opposés : le pôle de l'intellect et le
pôle de la superstition et de la vulgarité »
(Hugh Nibley, The World and the Prophets, Salt Lake City, Deseret
Book et Foundation for Ancient Research and Mormon Studies, 1987, p.
142). En d'autres termes, ce qui relève de la religion est
susceptible d'être corrompu d'un côté par
l'intellectualisme et de l'autre par la superstition. Cette tendance
est évidente dans l'opposition entre les signes et la science.
L'approche
purement intellectuelle de la religion rejette les miracles modernes
et suspecte toute vérité religieuse qui ne peut être
prouvée par des méthodes scientifiques. À
l'autre extrême se situent les superstitieux, ceux qui
rejettent la possibilité de connaître Dieu par quelque
moyen que ce soit, scientifique ou religieux. La science se considère
comme étant maître des signes. La superstition apparaît
comme la servante des signes.
La
vraie religion n'est ni intellectuelle ni superstitieuse. Le rôle
exact des signes illustre le juste milieu de la vérité.
Les signes ne servent pas à prouver la vérité
religieuse, comme certains pensent que les méthodes
scientifiques le peuvent. Les signes ne sont pas non plus un
substitut à la connaissance, comme le voudrait la
superstition. La connaissance de la vérité à
propos de Dieu et de ses commandements à ses enfants vient par
la foi et la révélation du Saint-Esprit, ce qui est une
méthode inacceptable pour la superstition et qui ne peut être
prouvée par la science. Quand la foi est obtenue et exercée,
les signes suivent ceux qui croient.
CHAPITRE
4 : PRENDRE SOIN DES PAUVRES
Un
des exemples les plus frappants de la différence entre les
voies du Seigneur et celles de l’homme se trouve dans la façon
dont l'Église de Jésus-Christ des saints des derniers
jours et ses membres cherchent à résoudre le problème
des personnes âgées et à obéir au
commandement éternel de prendre soin des pauvres.
Le
commandement de prendre soin des pauvres
Les
Écritures anciennes et modernes sont explicites quant aux
instructions qu'elles donnent sur l'aide à apporter aux
pauvres et aux nécessiteux. Les passages scripturaires qui s'y
rapportent sont trop nombreux pour pouvoir les citer tous, et trop
connus pour que cela soit nécessaire. Quelques exemples
suffiront.
Frère
Russell M. Nelson a observé que « lorsque le
Seigneur envoyait des prophètes pour sortir Israël de
l'apostasie, dans presque chaque cas, un des premiers griefs qui lui
était imputé était que les pauvres avaient été
négligés » (L’Étoile,
juillet 1986, p. 22). Ainsi, le message de Jean-Baptiste incluait :
« Que celui qui a deux tuniques partage avec celui qui
n'en a point, et que celui qui a de quoi manger agisse de même. »
(Luc 3:11)
Les
prophètes du Livre de Mormon enseignèrent que prendre
soin des pauvres était la seule manière d'obtenir
certaines bénédictions essentielles. Le roi-prophète
Benjamin déclara que nous devons donner de notre substance aux
pauvres, « de manière à nourrir ceux qui ont
faim, vêtir ceux qui sont nus, visiter et soulager les malades
tant spirituellement que temporellement » pour « [nous]
conserver de jour en jour la rémission de [nos] péchés
et pour marcher purs devant Dieu » (Mosiah 4:26).
Après
avoir enseigné les principes fondamentaux de l'Évangile
(y compris l'expiation et la nécessité de la foi, du
repentir et de la prière), Amulek ajouta : « Et
maintenant... ne pensez pas que ce soit là tout ; car,
lorsque vous avez fait tout cela, si vous renvoyez les indigents et
ceux qui sont nus ; si vous ne visitez pas les malades et les
affligés ; si vous ne donnez pas de vos biens, si vous en
avez, à ceux qui sont dans le besoin, je vous le dis, si vous
ne faites aucune de ces choses, voici, votre prière est vaine
et ne vous sert de rien, et vous êtes comme des hypocrites qui
nient la foi. » (Alma 34:28)
Dans
les temps modernes, le Seigneur a donné l'ordre à son
peuple de « visiter les pauvres et les affligés et
les soulager » (D&A 44:6), et a ajouté :
« celui qui ne fait pas cela n'est pas mon disciple »
(D&A 52:40). Le Seigneur commanda à ses saints d'apprendre
« à donner les uns aux autres comme l'Évangile
l'exige » (D&A 88:123). Frère Marion G. Romney
a expliqué l'importance de ces commandements en les
rapprochant de la déclaration du Sauveur qui dit que quand il
viendra dans sa gloire, il séparera son peuple « comme
le berger sépare les brebis d'avec les boucs »
(Matthieu 25:32). Il a dit : « Le critère en
fonction duquel cette séparation [se fera] en ce grand jour
[sera] l'attention qui aura été donnée aux
pauvres et aux nécessiteux. » (Ensign,
janvier 1973, p. 97)
Aussi
important soit-il, ce devoir à l'égard des pauvres ne
vient qu'en seconde position après un autre devoir. Le plan du
Seigneur pour s'occuper des pauvres et des nécessiteux
requiert et présuppose que chacun d'entre nous subvienne à
ses propres besoins et à ceux de sa famille, dans la mesure de
ses possibilités. Ceci inclut de s'occuper des membres de
notre propre famille - les parents s'occupant des enfants, et les
enfants des parents (L’Étoile, juillet 1986, p.
24). Après quoi, nous nous occupons des membres nécessiteux
de l'Église, et ensuite nous apportons notre aide aux autres
dans la mesure où nos moyens nous le permettent (Joseph F.
Smith, Doctrine de l’Évangile, ch. 13). Nous faisons
ceci, premièrement, en payant notre dîme ;
deuxièmement, en donnant libéralement aux fonds de
jeûne ; et ensuite, en faisant d'autres dons sous forme de
travail et d'argent dans la mesure de nos moyens (voir Marion G.
Romney, Caring for the Poor and the Needy, Ensign, janvier
1973, p. 99). C'est la responsabilité que le Seigneur a placée
sur chaque membre de son Église.
Traditionnellement,
les religions ont enseigné aux hommes d'adorer un Dieu qui
leur donne le commandement de s'aimer et de se servir les uns les
autres. Mais aujourd'hui il y a une foule de pseudo-religions qui
enseignent aux hommes de s'adorer eux-mêmes et de célébrer
le culte d'eux-mêmes par des rites de complaisance. La vraie
religion prêche le principe de la responsabilité, nous
enseigne à donner. Les contrefaçons modernes de la
vraie religion prêchent les droits plutôt que les
devoirs, et nous enseignent à prendre plutôt qu'à
donner. La vraie religion produit des citoyens formés à
servir, ses contrefaçons modernes produisent des citoyens
habitués à réclamer de l'aide.
Les
efforts du gouvernement
Ce
n'est pas l’objet de cet ouvrage de donner une description
complète ou d’évaluer les efforts de l’État
dans l’aide aux nécessiteux. Un bref résumé
suffira pour comparer les voies de l’homme à celles de
Dieu.
En
ce qui concerne les programmes d'entraide gouvernementaux, on
constate une insatisfaction générale. Les critiques
viennent non seulement des contribuables qui financent l'aide et qui
supportent mal le fait qu'elle semble ne pas atteindre ses buts, mais
aussi des personnes qui ne sont pas satisfaites de l'étendue
et de la nature de l'aide reçue et des contrôles
administratifs qui l'accompagnent. Certains experts et hommes
politiques se joignent aux critiques.
Les
accusations les plus sévères affirment que les
programmes d'entraide de l’État n’ont pas réussi
à réduire la pauvreté, qu’ils l'ont
probablement accrue en favorisant une série de problèmes
sociaux connexes (voir, par exemple, Charles Murray, Losing Ground,
New York City Basic Books Inc., 1984). John Goodman, président
du National Center for Political Analysis, a dit : « Le
système d'entraide des États-Unis est un désastre.
Il crée la pauvreté au lieu de l'éliminer. Il
subventionne le divorce, les grossesses juvéniles, l'abandon
des parents âgés par leurs enfants, ainsi que la
désagrégation générale de la famille.
Pourquoi ? Nous donnons de l’argent aux gens pour qu’ils
restent pauvres. Les associations caritatives ont toujours mieux
répondu aux besoins là où ils sont réellement
nécessaires. » (cité dans Thomas S. Monson,
Un plan prévoyant, une promesse précieuse, L'Étoile,
juillet 1986, p. 65)
Que
sont devenus les énormes fonds publics attribués au
secours des pauvres ? Robert L. Woodson, président du National
Center for Neighborhood Enterprise et président du Council for
Black Economic Agenda, a écrit : « Depuis
1964, le gouvernement fédéral [des États-Unis] a
engagé des milliards de dollars dans des programmes pour
l'emploi, l'habitat, la solidarité et le développement
économique conçus pour aider les nécessiteux. Le
principal bénéficiaire de cet important effort est, à
l’évidence, 'l'industrie du service social', parachutée
dans la collectivité pour gérer les programmes d'aide,
moyennant des salaires et des coûts de fonctionnement qui se
taillent la part du lion dans les budgets alloués. »
(Robert L. Woodson, Race and Economic Opportunity, Vanderbilt Law
Review 42, mai 1989, p. 1025)
Certains
ne seront pas d'accord avec ces accusations sévères.
Dans le cadre de ce livre, il suffit de souligner qu'il existe une
insatisfaction générale en ce qui concerne l'aide
apportée aux pauvres par l’État. Il convient
également de remarquer que la gestion de cette aide nécessite
la rémunération d’un personnel nombreux et des
dépenses de fonctionnement qui font que l'aide aux pauvres est
devenue un gros marché dont beaucoup de « non-pauvres »
tirent un gain financier conséquent.
L’arrangement
qui permet d'obtenir des dégrèvements fiscaux en
échange d’une aide financière apportée aux
pauvres, ce que quelqu'un a appelé « se faire du
bien en faisant du bien », est une formule bien connue. Au
midi des temps, Judas se plaignit que le parfum utilisé pour
oindre les pieds de Jésus n'ait pas été vendu au
bénéfice des pauvres. L'évangile de Jean
explique la motivation réelle de Judas : « Il
disait cela, non qu'il se mît en peine des pauvres, mais parce
qu'il était voleur, et que tenant la bourse, il prenait ce
qu'on y mettait. » (Jean 12:6)
Dans
la promotion et la gestion de l'aide de l’État aux
nécessiteux on retrouve les mêmes motivations. Certains
programmes contre la pauvreté ne sont pas conçus en
faveur des pauvres mais parce que leurs promoteurs « tiennent
la bourse », et que les programmes proposés
favoriseront leur enrichissement personnel, leur renom ou leur
pouvoir.
Une
autre caractéristique de la gestion actuelle de l'aide de
l’État aux pauvres est critiquée par Robert L.
Woodson : « Ces vastes empires bureaucratiques et
professionnels, qui ont le monopole des services sociaux régis
par l'État, exigeaient aussi un coût humain et social.
Ceux qui reçoivent de l’aide perdent leur autonomie en
tant qu'êtres humains en devenant des 'clients' (ce qui, dans
la terminologie juridique latine, signifie un individu dépendant).
Cette dépendance psychologique a perverti à la fois la
moralité publique et la moralité individuelle, générant
un climat d'impuissance, d'irresponsabilité et de
ressentiment. En tant que 'clients' passifs, les pauvres et les
démunis ont été conduits dans une impasse où
une somme d'argent à peine suffisante entretient leur pauvreté
et sape l'initiative individuelle, les rendant complètement
dépendants. » (op. cit., p. 1026) En résumé,
même si les intentions étaient probablement bonnes, les
moyens employés étaient inefficaces.
À
l'opposé, le président Spencer W. Kimball a observé :
« Enseignez-leur la vérité, donnez-leur
l'Évangile et l'ambition est née, la fierté est
entretenue, l'indépendance remplace la paresse, les hommes
apprennent comment construire leur foyer, l'équiper et le
peindre, et ensuite comment construire pour les autres. »
(Teachings of Spencer W. Kimball, éd. Edward L. Kimball, Salt
Lake City, Bookcraft, 1982, p. 370)
L'entraide
à la manière du Seigneur
Une
écriture-clé sur la manière du Seigneur de
répondre aux besoins des pauvres et des nécessiteux est
donnée par cette révélation tirée des
Doctrine et Alliances :
« Et
j'ai l'intention de pourvoir aux besoins de mes saints, car tout est
à moi. Mais il faut que cela se fasse à ma façon,
et voici quelle est la façon que moi, le Seigneur, j'ai décidé
d'employer afin de pourvoir aux besoins de mes saints : les
pauvres seront élevés en ce que les riches seront
abaissés.
« Car
la terre est pleine, et il y a assez, et même en réserve ;
oui, j'ai tout préparé et j'ai donné aux enfants
des hommes qu'ils aient leur libre arbitre. C'est pourquoi si
quelqu'un prend de l'abondance que j'ai faite et ne donne pas de sa
part, selon la loi de mon Évangile, aux pauvres et aux
nécessiteux, il élèvera avec les méchants
les yeux en enfer, étant dans les tourments. » (D&A
104:15-18)
Pour
résumer : (1) Le Seigneur désire répondre
aux besoins temporels aussi bien qu'aux besoins spirituels de ses
saints. (2) Néanmoins, cela doit être fait à sa
manière. (3) Sa manière de faire exaltera le pauvre (ce
qui signifie, aider les pauvres spirituellement aussi bien que
temporellement et ainsi les faire avancer vers l'exaltation). (4) Sa
manière de faire abaissera le riche (c'est à dire, les
riches s'humilieront et ainsi s'approcheront aussi d'une plus grande
spiritualité et de l'exaltation). (5) La terre contient plus
que le nécessaire pour le soutien de chacun. (6) Les hommes
sont moralement responsables d'utiliser de leur abondance pour
pourvoir aux besoins des pauvres et des nécessiteux. (7) Ceux
qui ne le font pas iront avec les méchants en enfer.
La
manière du Seigneur de pourvoir aux besoins des pauvres et des
nécessiteux a été révélée à
Adam et à sa postérité, en même temps que
les autres principes de l'Évangile. Ces principes furent
enseignés et illustrés par les prophètes du
temps de l'Ancien Testament et du Livre de Mormon et par le Sauveur
et ses apôtres à leur époque. Ils furent révélés
au prophète Joseph Smith dans les premiers temps de l'Église
rétablie.
La
manière du Seigneur de s'occuper des pauvres fut mise en
pratique lors de la traversée des plaines. Dans une révélation
donnée au prophète Brigham Young le Seigneur commanda :
« Que chaque compagnie prenne en charge, en proportion de
sa part de biens, les pauvres, les veuves et les orphelins et les
familles de ceux qui sont partis à l'armée, afin que
les cris de la veuve et des orphelins ne montent pas aux oreilles du
Seigneur contre ce peuple » (D&A 136:8). Ces mêmes
principes furent appliqués dans le peuplement des montagnes de
l'Ouest par les saints. Ensuite, au fur et à mesure que les
conditions changèrent, quelques-uns des moyens de mise en
oeuvre de ces principes tombèrent en désuétude
et on en oublia même ou on en négligea les raisons
profondes.
Pour
répondre aux cruels défis économiques de la
Grande Dépression, les dirigeants de l'Église mirent de
nouveau l'accent sur les principes fondamentaux du souci des pauvres
et des nécessiteux et établirent ce que certains
considérèrent comme de nouveaux moyens pour les mettre
en action. Certains, et surtout des gens qui n'étaient pas
membres de l'Église, pensèrent même que ce que
nous appelons maintenant le programme d'entraide de l'Église
fut fondé en 1936. Mais il s'agissait seulement de la
manifestation la plus récente d’un principe aussi vieux
que l'Évangile lui-même.
L'explication
de la Première Présidence sur la raison pour laquelle
ils établirent le programme d'entraide moderne contient deux
buts : l'un est décrit comme « l'objectif
annoncé » et l'autre est identifié comme
« notre but principal » :
« L'objectif
annoncé, fixé à l'Église dans le cadre de
ce programme, était de fournir pour le 1er octobre 1936, par
un système entièrement bénévole de dons
en argent ou en nature, suffisamment de nourriture, de combustible,
de vêtements et de literie pour répondre aux besoins,
tout au long de l'hiver à venir, de chaque famille
nécessiteuse et digne, membre de l'Église, incapable de
se procurer cela par elle-même, de façon à ce
qu’aucun membre de l'Église ne souffre dans ces temps
d'agitation et de crise.
« Dans
la mesure du possible, nous avons eu comme but principal
l’établissement d’un système grâce
auquel on se débarrasserait de la malédiction de
l’oisiveté, on abolirait les maux des indemnités
de chômage, et où l’indépendance, le
labeur, l’épargne et le respect de soi seraient rétablis
parmi notre peuple. L’Église entend aider ses membres à
s’aider eux-mêmes. Le travail doit être remis à
l’honneur en tant que principe directeur de la vie des membres
de l’Église. » (L’Étoile,
octobre 1980, p. 141)
L'objectif
annoncé était de pourvoir aux besoins des pauvres pour
qu'ils ne souffrent pas du manque de nourriture, de vêtements
et d'un abri. Mais le but principal, qui est une expression du
principe éternel de s'occuper des pauvres, était de
fournir l'assistance nécessaire de la manière qui
permet de corriger les déficiences spirituelles : chasser
l'oisiveté et les maux de l'allocation chômage et aider
les membres de l'Église en leur donnant l'occasion de
travailler afin qu'ils jouissent de l'indépendance et du
respect de soi.
En
décrivant la raison de l'effort concentré lancé
en 1936, la Première Présidence expliqua que « le
véritable but du plan [d'entraide] de l'Église est
d'aider chaque individu à acquérir son indépendance,
à l'aider à pourvoir à ses propres besoins, à
remplacer l'oisiveté par l'épargne et la productivité »
(Improvement Era, janvier 1938, p. 7). De même, il y a
presque cent ans, le président Joseph F. Smith a dit :
« C'est l’objectif de Dieu dans le rétablissement
de l'Évangile et de la Sainte Prêtrise, non seulement
pour le bénéfice spirituel de l'humanité, mais
aussi pour son bénéfice temporel. » (Joseph
F. Smith, Doctrine de l'Évangile, p. 172)
Utilisés
dans ce contexte, les termes temporel et spirituel nécessitent
une clarification. Temporel qualifie tout ce qui appartient à
la vie mortelle, y compris la nourriture, l'abri, l'emploi et la
propriété. Spirituel qualifie tout ce qui appartient à
l'éternité, y compris la foi, le repentir, la
sanctification, les alliances et les sacrements. Etant donné
que les choix temporels ont des conséquences spirituelles et
vice versa, le temporel et le spirituel sont étroitement liés
à long terme. Pour Dieu toute chose est spirituelle et aucun
de ses commandements n'est temporel (D&A 29:34-35). Toutefois,
dans le court passage de la condition mortelle, il est quelquefois
utile d'identifier les choses temporaires ou terrestres comme
temporelles et les choses moins terrestres et plus célestes
(les choses de l'éternité) comme spirituelles. C'est le
sens dans lequel Joseph F. Smith utilisa ces termes, et c'est le sens
dans lequel ils seront utilisés dans le reste de ce chapitre.
Dans
le plan du Seigneur, les objectifs temporels et spirituels vont
toujours de pair, mais le spirituel doit toujours avoir la priorité
dans les programmes gérés par l'Église. Les
actes charitables individuels et les diverses organisations
caritatives peuvent répondre aux besoins temporels des
pauvres, mais seules les activités d'entraide parrainées
par l'Église ou dirigées par la Prêtrise peuvent
répondre aux besoins spirituels de ceux qui reçoivent
et de ceux qui apportent l’aide. Frère Marion G. Romney
enseigna ce principe succinctement quand il dit : « Le
devoir fondamental de l'Église d'aider les pauvres n'est pas
d'apporter un secours temporel à leurs besoins, mais de sauver
leur âme. » (L'Étoile, avril 1978, p.
124)
Le
Sauveur enseigna la supériorité du spirituel sur le
temporel. Quand Marie eut oint les pieds de Jésus avec un
parfum coûteux, Judas demanda : « Pourquoi
n'a-t-on pas vendu ce parfum trois cents deniers pour les donner aux
pauvres ? » La réponse de Jésus révéla
un grand principe à ses disciples : « Laisse-la
garder ce parfum pour ma sépulture. Vous avez toujours les
pauvres avec vous, mais moi, vous ne m'avez pas toujours »
(Jean 12:5, 7-8). Ainsi, bien que le fait de s'occuper des pauvres
soit essentiel, son importance devait être vue dans un contexte
spirituel. Dans cet exemple, il y avait quelque chose de plus
important à faire de ce parfum que de donner sa valeur aux
pauvres. Ce qui concernait l'éternité, y compris ce que
Jésus pouvait enseigner à ses disciples pour le salut
de leur âme et ce qu'il pourrait faire pour eux par sa mort et
sa résurrection, était plus important que le souci
temporel en faveur des pauvres. En vérité, une des
raisons pour lesquelles nous avons « toujours les pauvres
avec [nous] » est que ceux qui ne le sont pas subissent
l’épreuve et reçoivent la croissance spirituelle
qui sont liées à notre réponse à leurs
besoins.
La
supériorité du spirituel sur le temporel, que Jésus
enseigna, a beaucoup d'applications de nos jours. Par exemple, elle
explique pourquoi l'Église dépense de grosses sommes
d'argent dans la prédication de l'Évangile rétabli
et dans la construction de temples pour accomplir les sacrements de
l’éternité plutôt que (comme quelques-uns
le recommandent) de dévouer ces mêmes ressources aux
problèmes temporels dont d'autres s'occupent déjà,
tels que la protection de l'environnement, la recherche de
traitements contre les maladies, ou la réponse à
d'autres besoins physiques qui peut être apportée sans
le pouvoir ni la direction de la prêtrise.
Tous
les prophètes modernes qui ont eu la responsabilité
principale d'expliquer les voies du Seigneur dans le secours aux
pauvres ont mis l'accent sur la priorité des buts spirituels
sur les buts temporels. On compte parmi eux David O. McKay, Spencer
W. Kimball, Ezra Taft Benson, J. Reuben Clark, Henry D. Moyle, Marion
G. Romney, Gordon B. Hinckley et Thomas S. Monson. Tous ont mis
l'accent sur l'importance des méthodes qui permettent
d’édifier l'esprit aussi bien que de nourrir le corps.
En
tant que président de l'Église, Spencer W. Kimball,
dans un message important sur l'entraide, a dressé la liste
des six « principes spécifiques qui sont la
fondation de cette oeuvre ». Il déclara :
« Nous pouvons approcher l'idéal de Sion seulement
en appliquant ces vérités... Cet ordre le plus élevé
de la société de la prêtrise est fondé sur
les doctrines [1] de l'amour, [2] du service, [3] du travail, [4] de
l'autonomie, [5] de l'intendance, qui sont tous couverts par [6]
l'alliance de la consécration » (L’Étoile,
avril 1978, p. 115-120). Il est à noter que la plupart de ces
principes sont d'ordre spirituel et que leur signification matérielle
ou temporelle est implicite. D'autres enseignements mettent l'accent
sur le fait que la manière du Seigneur de prendre soin des
pauvres et des nécessiteux sanctifie ceux qui donnent parce
qu'ils agissent volontairement, et exalte ceux qui reçoivent
dans la mesure où il leur est enseigné qu’ils ont
l’honneur de participer à une entreprise céleste
en y contribuant selon leurs capacités (D&A 104:16). Le
président Kimball expliqua : « La voie du
Seigneur édifie l'estime de soi, redonne et accroît la
dignité des individus, tandis que la voie du monde déprécie
l’image de soi et provoque un profond mécontentement »
(Teachings of Spencer W. Kimball, éd Edward L. Kimball, Salt
Lake City, Bookcraft, 1982, p. 369). « Vu sous cet angle,
nous pouvons constater que les services d'entraide ne sont pas un
programme, mais l'essence même de l’Évangile.
C'est l'Évangile en action. C'est le principe suprême
d'une vie chrétienne. » (op. cit., p. 365)
Quand
la Première Présidence institua ce que nous appelons le
programme d'entraide de l'Église dans les années 1930,
elle mit l'accent sur trois principes de gestion.
1.
Le plan est fondé sur des principes religieux. Ces principes
sont ceux présentés plus haut, ainsi que celui de
l'autonomie.
2.
Le plan est mené à bien entièrement par les
agences de l'Église et principalement par des bénévoles
qui n'ont pas d'intérêt personnel dans la gestion de
l'aide.
L'officier
de l'Église le plus important dans le programme du Seigneur
pour s'occuper des pauvres est l'évêque. Dans la
révélation moderne cette responsabilité lui est
confiée (voir par exemple, D&A 38:34-36 ; 42:30-31 ;
72:9-10, 12). Sa responsabilité a été réaffirmée
lorsque le programme d'entraide a été de nouveau
institué. La Première Présidence a dit :
« La responsabilité de s'assurer que personne n'est
affamé ou a froid ou est insuffisamment vêtu repose sur
les épaules des évêques, chacun pour les membres
de sa propre paroisse. » (Improvement Era, janvier
1937, p. 3 ; réimprimé dans Messages of the First
Presidency, James R. Clark, vol. 6, Salt Lake City, Bookcraft, 1975,
p. 22, 24)
Les
évêques accomplissent la tâche de « cherch[er]
les pauvres pour subvenir à leurs besoins en rendant humbles
les riches et les orgueilleux » (D&A 84:112). Frère
J. Reuben Clark fils, a décrit cette responsabilité :
« Selon la parole du Seigneur, le seul mandat pour prendre
soin des pauvres de l'Église et la seule autorité pour
s'occuper d'eux sont placés sur l'évêque... À
lui seul revient le devoir de déterminer qui, quand, comment
et combien sera donné à tout membre de sa paroisse sur
les fonds de l'Église au titre de l’aide de la
paroisse. » (cité par Marion G. Romney dans Ensign,
janvier 1974, p. 91-92)
Les
collèges de la prêtrise ont une responsabilité
importante mais différente dans la gestion de l'entraide de
l’Église. Leur tâche est de mettre les membres du
collège dans la situation où ils deviennent autonomes.
Dans un discours remarquable donné lors du lancement du
programme d’entraide, frère J. Reuben Clark expliqua
cette responsabilité : « Cette aide peut se
concrétiser sous la forme d'une assistance pour le frère
nécessiteux, dans ses besoins ou son problème
proprement dit, pour construire sa maison ou à se lancer dans
une petite entreprise, ou, si c'est un artisan, lui procurer un jeu
d'outils ou, si c'est un fermier, lui procurer des semences, l'aider
à planter ou à moissonner, ou à satisfaire un
besoin urgent de crédit. » (James R. Clark,
Messages of the First Presidency, 676 ; voir aussi Gordon B.
Hinckley, Responsabilités des collèges de la prêtrise
en matière d'entraide, L'Étoile, avril 1978, p.
131)
La
Société de secours joue aussi un rôle essentiel
dans la gestion de l'entraide. Frère Clark l'a décrit
comme suit :
« La
Société de secours des femmes porte la charge de tout
ce qui est lié à la fourniture de vêtements, à
la préparation et à la conservation de nourriture, aux
soins apportés aux malades, aux funérailles, tout ce
qui est lié à l'infinité des petites attentions
et à la gentillesse, tout ce qui est lié, même de
loin, à l'amour et au rituel de la maternité. L'évêque
est le père de la paroisse, la Société de
secours en est la mère. Le plan d'entraide de l'Église
ne peut être mené à bien sans les soeurs. C’est
là où elles sont les plus actives qu’il est le
plus efficace. Elles créent des ateliers de couture et de
cuisine, elles aident à établir des budgets, elles
encouragent les personnes particulièrement éprouvées
et découragées, elles redonnent courage aux timorés,
elles chassent le désespoir des coeurs affligés ;
elles sèment l'espoir, la foi et la droiture dans chaque
foyer. La féminité, épanouie dans une maternité
légitime, est la démarche la plus proche de la divinité
que des mortels puissent connaître. Les mères sont les
membres éminents de la Société de secours. »
(James R. Clark, Messages of the First Presidency, Salt Lake City,
Bookcraft, 1975, vol. 6, p. 77)
Comme
les collèges de la prêtrise, la Société de
secours participe à la gestion de l'entraide en aidant ses
membres à acquérir la connaissance et les techniques
nécessaires pour remplir leurs responsabilités
familiales et sociales. La connaissance et les techniques dont ses
membres ont besoin peuvent varier selon l'époque et l'endroit.
Ainsi, le savoir-faire des femmes dans les arts ménagers il y
a cinquante ans doit aujourd'hui faire l'objet d'un enseignement
spécifique. Pour citer un autre exemple, le plus grand besoin
de formation de certains membres de l'Église à travers
le monde est l'alphabétisation. La Société de
secours peut aider dans ce domaine ainsi que dans de nombreux autres.
3.
Les mesures du plan visent à accorder une aide temporaire,
telle que de la nourriture, un abri et des vêtements pour
subvenir aux besoins vitaux et au bien-être, plutôt que
de remédier aux désordres financiers et sociaux qui
sont la cause des besoins de l'individu. (voir Conference Report,
octobre 1936, p. 2-6 ; J. Reuben Clark, fils, Church Welfare
Plan, dans Messages of the First Presidency, vol. 6, p. 63-88,
discours donné lors d'une conférence à Estes
Park, Colorado, 1939)
Le
but premier de l'aide de l'Église aux pauvres et aux
nécessiteux a toujours été de soulager la
détresse de façon temporaire. En accord avec cette
mission, l'aide apportée à chaque bénéficiaire
est adaptée à ses besoins. À la différence
de la plupart des programmes d'assistance publique, il n'y a pas de
montant ou de droit fixes ni de durée déterminée
à l'aide.
En
résumé, en accord avec les principes de l'Évangile,
l'évêque accorde une aide adaptée à
l'individu pour ses besoins physiques immédiats, tels que de
la nourriture, des vêtements et du chauffage. La Société
de secours aide de multiples façons par des services et de la
compassion. Quant aux collèges de la prêtrise, ils
répondent aux besoins permanents, tels que l'instruction ou
d'autres besoins nécessaires pour aider les membres du collège
à devenir autonomes.
Le
principe et la mise en pratique de l'autonomie
Afin
d'atteindre ses buts spirituels, l'aide temporelle donnée par
l'intermédiaire de l'entraide de l'Église doit être
soumise au principe fondamental de l'Évangile qu'est
l'autonomie. Aucune idée ne peut mieux exprimer la différence
entre le gouvernement et l'Église dans l'aide apportée
aux nécessiteux que les mots travail et autonomie.
L'autonomie
signifie de travailler pour soi-même au maximum de ses
capacités. « C'est à la sueur de ton visage
que tu mangeras du pain » (Genèse 3:19). Notre
responsabilité de subvenir à nos propres besoins et à
ceux de notre famille est un principe vital dans notre relation à
Dieu, aux autres et à la société. Les saints des
derniers jours s'attendent à devoir travailler pour ce qu'ils
reçoivent, que ce soit pour leur salut ou pour leur
nourriture. La seule aide qu'ils attendent est l'occasion de
travailler.
Dans
notre relation à Dieu, ce principe est exprimé dans le
dicton : « Aide-toi et le ciel t'aidera ».
Knute Rockne appliqua ce principe au football américain quand
il dit : « Les prières sont plus efficaces
quand les joueurs sont costauds » (Andrew J. Malkovich,
éd., Sport Quotations, Jefferson, N.C., McFarland & Co.,
1984, p. 90). La biographie de Lincoln par Carl Sandburg donne un
exemple de cette attitude au dix-neuvième siècle quand
il parle d'un fermier de la Nouvelle-Angleterre qui demanda à
son pasteur de prier pour que sa ferme produise de meilleures
récoltes. Après avoir regardé le sol pierreux et
inculte, le pasteur dit : « Cette ferme n'a pas
besoin de prières mais de fumier ! » (CarI
Sandburg, Abraham Lincoln : The Prairie Years, 1, New York,
Harcourt, Brace 1 World, 1926, p. 125)
Certains
peuvent trouver cette attitude sacrilège ; d'autres la
considéreront comme dépassée. Pour les saints
des derniers jours, elle est l'illustration d'une loi de la vie. Elle
montre également la bonté de Dieu qui attend de nous
non seulement d'avoir foi en lui mais aussi d'avoir foi en nous-mêmes
et de montrer notre foi et notre reconnaissance par des efforts
personnels soutenus pour faire fructifier les talents et les
occasions qu'il nous a donnés. En résumé, nous
cherchons à appliquer le vieux proverbe : prier comme si
tout dépendait de Dieu et ensuite travailler comme si tout
dépendait de nous.
Le
travail et l'autonomie sont des principes anciens dans la foi
chrétienne. L'apôtre Paul enseigna : « Si
quelqu'un ne veut pas travailler, qu'il ne mange pas non plus »
(2 Thessaloniciens 3:10). Il a écrit également :
« Si quelqu'un n'a pas soin des siens, et principalement
de ceux de sa famille, il a renié la foi, et il est pire qu'un
infidèle » (1 Timothée 5:8).
Ces
mêmes principes furent réaffirmés par la
révélation dans la dernière dispensation :
« Tu ne seras pas paresseux, car le paresseux ne mangera
pas et ne portera pas les vêtements du travailleur »
(D&A 42:42). « Tout homme qui est obligé de
pourvoir aux besoins de sa famille, qu'il le fasse, et il ne perdra
aucunement sa couronne ; et qu'il travaille dans l'Église.
Que chacun soit diligent en tout. Le paresseux n'aura pas de place
dans l'Église, à moins qu'il ne se repente et ne
s'amende » (D&A 75:28, 29).
Le
président Brigham Young a expliqué :
« L'expérience m'a enseigné, et c'est devenu
un principe pour moi, qu'il n'y a pas d'avantage à donner
continuellement, à un homme ou à une femme, de
l'argent, de la nourriture, des vêtements ou quoi que ce soit
d'autre, s'ils sont aptes physiquement et peuvent travailler et
gagner ce dont ils ont besoin... C'est mon principe, et j'essaie
d'agir en conséquence. Suivre un chemin contraire conduirait à
la ruine de toute société dans le monde et rendrait ses
membres paresseux. » (cité par Marion G. Romney
dans Ensign, janvier 1974, p. 89)
Le
président Joseph F. Smith enseigna le même principe pour
l'appliquer à l'individu : « Les hommes et les
femmes ne devraient pas chercher à recevoir la charité
à moins qu'ils n'y soient obligés pour éviter de
souffrir. Chaque homme et chaque femme devrait posséder
l'esprit d'indépendance et d'autonomie qui les inciterait à
dire, quand ils sont dans le besoin, 'je veux donner mon travail en
échange de ce que vous me donnez'. Aucun homme ne devrait être
heureux de recevoir et de ne rien faire en contrepartie. »
(Doctrine de l'Évangile, p. 195)
Bien
sûr, la doctrine de l'autonomie n'impose aucune obligation de
travail aux personnes âgées, aux handicapés, aux
malades ou à tous ceux qui sont incapables de travailler pour
subvenir à leur besoins (voir Marion G. Romney, La nature
céleste de l'indépendance, L'Étoile,
avril 1983, p. 183-188).
Le
travail et l'autonomie ont une importance évidente dans notre
relation avec l'État. Par exemple, le travail et l'autonomie
furent inhérents à la distribution des terres la plus
importante effectuée par le gouvernement des États-Unis
au dix-neuvième siècle. En accord avec le Homestead Act
de 1862, le gouvernement des États-Unis offrait un titre de
propriété pour 65 hectares de terre publique au « chef
de famille, ou [tout autre personne] atteignant l'âge de vingt
et un ans » qui améliorerait cette terre en y
résidant et en la cultivant pendant une période de cinq
ans (voir United State Statute at Large 12, 1862, p. 392). Les colons
qui obtinrent les titres de propriété par ce moyen, y
compris de nombreux pionniers mormons, travaillèrent pour ce
qu'ils reçurent. Leur gouvernement leur offrait une occasion
et non pas la charité. Ils fortifièrent la nation en
affermissant ses frontières, en colonisant ses terres, en
payant ses impôts, et en produisant de la nourriture pour son
peuple.
Un
exemple plus récent est le G.I. bill, par lequel le
gouvernement reconnaissant a offert une formation aux militaires qui
avaient interrompu leurs activités pour servir leur pays.
À
l'opposé de l'idéal traditionnel de l'autonomie, les
programmes d'entraide du gouvernement de ce siècle ont
rarement inclus l'obligation que le bénéficiaire
travaille pour ce qu'il ou elle reçoit.
L'adoption
du Social Security Act en 1935 a marqué un tournant dans le
développement de l'entraide sociale moderne aux États-Unis.
Les avantages sociaux acquis grâce à cette loi n'avaient
que peu ou pas de rapport avec les cotisations que les bénéficiaires
avaient versées à ce qu'on appelait le fonds
d'assurance. Quant aux travailleurs, ils n'étaient pas
intéressés par un fonds à part.
Ceci
est toujours vrai après plus d'un demi siècle. Les
sommes colossales que les bénéficiaires potentiels et
leurs employeurs paient en cotisations sociales sont à peine
dissociées des impôts sur le revenu et les
remboursements versés par la sécurité sociale
n'ont que peu de rapport avec le montant des cotisations versées.
Certains paient beaucoup plus qu'ils ne reçoivent en retour,
d'autres paient beaucoup moins. En conséquence, on peut dire
que pour l'État les sommes déboursées par la
sécurité sociale sont difficiles à différencier
des sommes versées au titre de l'aide sociale (voir Louis
Kohlmeier, Social Security and Welfare on an Historic Convergence
Course, Financier 1, septembre 1977, p. 6).
Quoi
qu'il en soit, il y a une grande différence en terme de
motivation. Etant donné que tous les bénéficiaires
de l'aide sociale ont cotisé pour l'aide qu'ils reçoivent
(et certains ont payé plus qu'ils ne recevront), pour des
raisons de motivation du bénéficiaire il est possible
de comparer la sécurité sociale à l'achat d'une
rente viagère. De toute façon, il est virtuellement
impossible aux employés et aux employeurs d'éviter les
impôts destinés au soutien des bénéficiaires
de l'aide sociale. Dans ces conditions, les membres de l'Église
et les sociétés appartenant à l'Église
(en tant qu'employeurs) n'ont pas d'autre alternative que de
participer au système de sécurité sociale, même
s'il laisse beaucoup à désirer quand on le compare au
principe de l'autonomie.
Aucun
dirigeant n'a autant parlé de l'importance de l'autonomie que
frère Marion G. Romney. Son discours lors de la conférence
d'octobre 1982 est caractéristique de son plaidoyer à
ce propos :
« Des
gens bien intentionnés ont créé de nombreux
programmes pour aider ceux qui sont dans le besoin. Cependant, un
grand nombre de ces programmes sont motivés par l'objectif à
court terme 'd'aider les gens', en opposition à 'aider les
gens à s'en sortir'. Nous devons toujours diriger nos efforts
pour rendre indépendants les gens qui en sont capables
physiquement...
« L'habitude
d'aspirer à des avantages non mérités et de les
recevoir est maintenant tellement établie dans notre société
que même les riches ayant les moyens de produire davantage de
richesses attendent de l'État la garantie d'un bénéfice...
« Tous
nos actes dans le cadre de l'Église et de la famille doivent
avoir pour but de rendre indépendants nos enfants et nos
membres. Nous ne pouvons pas toujours contrôler les programmes
de l'État, mais nous pouvons avoir le contrôle de nos
propres foyers et de nos assemblées. En enseignant ces
principes et en les vivant, nous ferons beaucoup pour contrer les
effets pervers des programmes gouvernementaux de tout pays. »
(L'Étoile, avril 1983, p. 184-185)
Beaucoup
de spécialistes, de législateurs et d'administrateurs
de l'aide de l'État ont plaidé pour imposer le travail
en compensation de l'aide publique. La théorie est appréciée,
mais dans la pratique, le but est souvent irréalisable. Un
programme de travail compensatoire est sans doute plus coûteux
à administrer que d'y renoncer. Comme le coût total est
le critère le plus important appliqué à l'aide
publique, les obligations de travail n'ont pas abouti ou ont été
de courte durée.
Le
président Ezra Taft Benson a défini le mal que
l'autonomie permet d'éviter. Il a expliqué pourquoi
l'Église a persisté dans l'obligation d'un travail
compensatoire alors que les programmes de l'État y ont renoncé
en considérant qu'ils étaient impossibles à
mettre en pratique ou inutiles : « Les bénéficiaires
de l'entraide doivent travailler dans la mesure de leurs capacités
à gagner les denrées ou l'aide du don de jeûne.
Si on ne fournit pas de travail compensatoire utile, si on
n'encourage pas les gens à travailler, on créera une
déprimante 'allocation chômage' de l'Église et le
but dans lequel le programme d'entraide a été établi
sera manqué. Il est une loi céleste, une loi que nous
n'avons pas pleinement apprise ici-bas, qui fait qu'on ne peut pas
aider en permanence les autres en faisant pour eux ce qu'ils peuvent
faire eux-mêmes. » (L'Étoile, octobre
1977, p. 95)
Il
y a un vieux conflit entre l'autonomie individuelle d'un côté
et la responsabilité de groupe et les efforts communs pour
s'occuper des pauvres de l'autre. Comment promouvoir l'un sans
affaiblir l'autre ?
Un
observateur averti à rendu hommage à la solution des
saints des derniers jours pour résoudre ce conflit. William
Rees-Mogg, rédacteur en chef du London Times, a observé :
« Quelquefois,
aux États-Unis, on sent que l'attitude politique conservatrice
est poussée à un point extrême, là où
l'individualisme devient antisocial...
« Les
résultats de l'individualisme extrême qui a permis
l'enlaidissement de quelques États américains,
n'existent pas en Utah. Je pense que c'est parce que l'Utah équilibre
les principes pionniers de l'indépendance et de l'autonomie
avec ceux de la responsabilité sociale volontaire inspirés
à la fois des enseignements et de l'histoire des mormons.
Comme tous les pionniers, les mormons ont dû compter sur
eux-mêmes ; comme tous les pionniers ils ont dû
aussi dépendre les uns des autres. Brigham Young, un des plus
grands dirigeants pionniers américains, a choisi la ruche
comme symbole du nouvel État, la ruche étant un symbole
à la fois de travail et de coopération...
« L'Utah
connaît, par conséquent, un conservatisme dans lequel la
liberté individuelle est équilibrée avec la
coopération sociale et la stabilité qui provient d'une
foi religieuse majoritaire et d'une vie familiale solide. »
(William Rees-Mogg, Conservatism Shines Its Brightness in Utah,
Deseret News, 31 mars 1980, p. A1, A3)
Le
but du don et la manière de donner
Le
président Marion G. Romney expliqua le but éternel du
commandement d'aider les pauvres et les nécessiteux :
« Dans ce monde moderne, empoisonné de contrefaçons
du plan du Seigneur, nous ne devons pas nous égarer en
supposant que nous pouvons nous décharger de notre obligation
envers les pauvres et les nécessiteux en laissant cette
responsabilité à la charge de quelque organisme public
ou gouvernemental. C'est seulement en donnant en abondance de l'amour
à notre prochain que nous pouvons développer cette
charité caractérisée par Mormon comme étant
'l'amour pur du Christ' (Moroni 7:47). Nous devons développer
cette qualité si nous voulons obtenir la vie éternelle. »
(Ensign, janvier 1973, p. 98)
L'obligation
individuelle de prendre soin des pauvres inclut-elle l'obligation
d'aider ceux qui peuvent subvenir à leurs besoins mais qui
refusent ou négligent de le faire ? C'est un vieux problème
parmi les chrétiens.
Comment
réconcilier l'obligation individuelle de s'occuper de soi avec
celles (individuelles et collectives) de s'occuper des pauvres ?
Alfred P. Doolittle, la canaille adorable de My Fair Lady, parle de
ce problème quand il déclare : « Je
fais partie des pauvres peu méritants. Cela veut dire que je
me heurte à la moralité de la bourgeoisie tous les
jours de ma vie » (My Fair Lady, acte 1, scène 5).
L'aspect de la moralité des classes moyennes dont Doolittle se
plaint est la réticence des gens qui travaillent à
aider les personnes physiquement capables qui pourraient travailler
pour subvenir à leurs propres besoins.
Dans
le plan du Seigneur pour secourir les pauvres et les nécessiteux,
les saints des derniers jours évitent ce dilemme en faisant
des dons à l'Église. Ils paient leurs offrandes de
jeûne, et le Seigneur, par l'intermédiaire de son
serviteur l'évêque, décide qui devrait les
recevoir et à quelles conditions.
La
mise en pratique des principes d'entraide
Ceux
qui agissent conformément au principe selon lequel le secours
aux pauvres et aux nécessiteux devrait être apporté
à la manière du Seigneur rencontrent de nombreuses
difficultés. Les philosophies contraires et les méthodes
de nombreux programmes d'entraide de l'État sont persuasives
et très connues et elles exercent une influence constante sur
les employés de l'Église qui accordent de l'aide et sur
les attentes des nécessiteux qui la reçoivent.
Sur
un plan doctrinal et théorique, il est fort probable qu'il
régnera de la confusion sur le principe de l'autonomie. Par
exemple, certains n'ont pas compris clairement la manière dont
le principe de l'autonomie s'applique au double but du bien-être
temporel et du salut spirituel. Le principe véritable est
l'autonomie pour ce qui relève du temporel et la dépendance
finale et totale envers notre Sauveur, Jésus-Christ, pour ce
qui est du spirituel. Comme Néphi l'enseigna : « C'est
par la grâce que nous sommes sauvés après tout ce
que nous pouvons faire. » (2 Néphi 25:32)
Comme
C. S. Lewis, auteur éclairé de The Screwtape Letters,
je crois qu'une des techniques les plus efficaces de Satan est de
faire semblant d'accepter un principe vrai puis d'agir en le
corrompant. Ainsi, Satan aimerait certainement corrompre la pratique
de l'autonomie afin de nous rendre autonomes dans les choses
spirituelles (en nous laissant penser que nous pouvons « résoudre
le problème de notre salut ») et largement
dépendants des autres dans les choses temporelles. Il souhaite
cette corruption car l'incompréhension d'un des deux rôles
de l'autonomie entrave une part importante de la progression
personnelle que le plan du Père prévoit pour nous.
L'incompréhension de ces deux rôles a un effet
doublement dévastateur.
Il
existe des forces puissantes qui travaillent pour nous duper en ce
qui concerne l'autonomie spirituelle et pour nous attirer vers la
dépendance temporelle. Il est facile aux saints des derniers
jours de devenir la proie de ces forces.
Par
exemple, puisque la plupart des programmes de l'État n'ont pas
de contrepartie similaire à l'obligation de travail
compensatoire à laquelle ceux qui reçoivent l'aide de
l'Église sont soumis dans la mesure de leurs possibilités,
il est facile pour les bénéficiaires et tentant pour
les évêques de considérer cette obligation comme
malvenue. En répondant aux besoins des membres, les dirigeants
de l'Église sont peut-être plus efficaces dans l'apport
de l'aide nécessaire pour pourvoir aux besoins temporels que
dans la gestion de l'obligation de travail qui est nécessaire
pour répondre aux besoins spirituels. Il est quelquefois peu
commode pour un évêque ou un autre dirigeant qui sont
très occupés, d'imposer ou de gérer l'obligation
de travail dans un environnement urbain où il y a moins
d'occasions de travail manuel que dans une société
rurale. Mais si un évêque n'accorde pas suffisamment
d'importance au fait de donner un travail compensatoire, il se peut
que l'aide temporaire qu'il accorde encourage le bénéficiaire
à une dépendance permanente.
L'expérience
a montré que plus une organisation est importante, plus il est
difficile de gérer le travail compensatoire et de l'adapter à
chaque personne. Ainsi, il est souvent beaucoup plus facile de
produire un sac de pommes de terre et de le livrer à chacune
des nombreuses personnes nécessiteuses qu'il ne l'est de
définir et de gérer un programme de travail
individualisé pour chaque bénéficiaire. C'est
une des raisons pour lesquelles l'aide de l'État s'effectue
généralement en espèces, à partir de
formules de calcul imposées, sans obligation de travail
individuel en contrepartie.
Une
autre difficulté pour gérer l'aide à la manière
du Seigneur plutôt qu'à la manière de l'État,
réside dans le choix de la nature et de l'étendue de
l'aide apportée. En matière d'entraide, l'Église
a toujours préféré la distribution de denrées
produites par d'autres membres sur les propriétés
agricoles du programme d'entraide de l'Église. Mais cette
méthode est évidemment beaucoup plus exigeante et
parfois même plus coûteuse que la méthode adoptée
par l'État qui consiste à distribuer de l'argent en
espèces. De plus, beaucoup de bénéficiaires
préfèrent recevoir de l'argent.
Enfin,
l'aide de l'Église est prévue pour assurer le
nécessaire plutôt que de permettre au bénéficiaire
de conserver son niveau de vie. Ces restrictions peuvent être
très difficiles à gérer dans la mesure où
elles exigent de l'évêque qu'il étudie
attentivement les besoins d'un membre précédemment
autonome et souffrant des conséquences de la réduction
de son niveau de vie.
Les
gens de passage qui cherchent à récupérer autant
d'aide que possible avant de partir pour une nouvelle destination
représentent également une difficulté dans ce
programme fondé sur la confiance et destiné à
aider les nécessiteux tout en protégeant des profiteurs
les ressources dont il dispose.
Quel
que soit le pays où vivent les saints des derniers jours,
s'ils ne sont pas correctement enseignés et dirigés,
ils peuvent lentement devenir dépendants de l'Église
pour leurs besoins temporels. Cette dépendance peut être
bien plus que le besoin temporaire de nourriture ou d'un abri. La
plupart des autorités générales ont reçu
des lettres de saints de divers endroits leur demandant :
« Pourquoi l'Église ne fait-elle rien au sujet
de...? » Selon les régions du monde, cette question
peut porter sur le chômage ou sur d'autres conditions
économiques, sur les possibilités éducatives
locales, ou même sur la politique du pays.
Dans
de nombreux pays, l'attitude de dépendance des saints des
derniers jours vis à vis des initiatives ou de l'aide
financière de l'Église à leur égard est
difficile à combattre parce qu'elle est courante dans
l'environnement politique et social du pays où ils vivent.
Mais la dépendance vis à vis de l'Église pour ce
qui est temporel ne doit pas être encouragée ni admise
car elle est contraire aux voies du Seigneur qui nous enseignent à
soutenir son Église, et non pas à attendre d'elle
qu'elle nous soutienne. Le Seigneur nous enseigne à considérer
l'Évangile comme une invitation à aider les autres, et
non pas comme le commandement adressé aux autres de nous
aider.
Les
méthodes changent
Les
principes que Dieu a révélés à propos de
l'aide aux pauvres sont éternels et ne changent pas. Les
méthodes utilisées pour mettre ces principes en action
diffèrent de temps en temps et même selon les nations.
Le
président Spencer W. Kimball a mis l'accent sur la différence
entre les principes et les méthodes dans un discours magistral
intitulé : « Les services d'entraide :
l'Évangile en action ». Dans ce discours, il passa
d'abord en revue ce qu'il appelait les « vérités
fondamentales » ou les « principes d'entraide »
caractéristiques de la manière du Seigneur d'aider les
pauvres : l'amour, le service, le travail, l'autonomie, la
consécration et l'intendance. Ensuite, il présenta ce
qu'il appelait « quelques activités et programmes
qui sont représentatifs de la façon de vivre ces
principes » (L'Étoile, avril 1978, p.
115-120). Cette distinction faite entre les principes et les
méthodes nous rappelle que lorsque les lois et les conditions
sociales d'un pays changent, les dirigeants de l'Église sont
inspirés à modifier les activités et les
programmes d'entraide. La révélation est nécessaire
non seulement dans l'enseignement des principes éternels, mais
également pour faire appliquer ces principes où et
quand cela est requis.
Les
magasins
Quand
la manière du Seigneur de prendre soin des pauvres et des
nécessiteux fut révélée lors du
rétablissement de l'Évangile, ces révélations
aboutirent à l'établissement d'un magasin (D&A
51:13 ; 72:10, 12 ; 78:3). Dans la plupart des premières
révélations, le magasin et la loi de consécration
étaient étroitement liés. Les membres fidèles
consacraient et apportaient tous leurs biens à l'Église.
Ils recevaient en retour suffisamment pour couvrir leurs propres
besoins et le reste était entreposé dans le magasin
pour que l'évêque le distribue aux pauvres et aux
nécessiteux (D&A 43:33-34 ; 51:1-13 ; 78:1-14 ;
83:5-6).
Quelques
années plus tard, lorsque les dons de tous les biens des
membres à l'Église cessèrent, le magasin de
l'évêque continua à remplir sa fonction
essentielle dans la collecte des dîmes (la loi financière
du Seigneur qui a suivi la loi de consécration, D&A 119)
et dans l'aide aux pauvres. Le magasin était nécessaire
dans la gestion de la dîme à l'époque où
la plupart des dîmes étaient payées en nature.
Lorsque l'utilisation de l'argent se généralisa dans
les régions où la plupart des membres vivaient et que
la dîme fut de moins en moins payée en nature, les
magasins de l'évêque tombèrent en désuétude.
Quand
les coopératives qui sont connues maintenant sous le nom de
programme d'entraide de l'Église furent mises en place pendant
la Grande Dépression des années 1930, l'Église
rétablit l'ancien système des magasins de l'évêque.
Ils servaient pour la collecte, le stockage et la distribution de
nourriture, de combustible et de vêtements produits et donnés
par les membres pour venir en aide aux pauvres et aux nécessiteux.
(James R. Clark, Messages of the First Presidency, Salt Lake City,
Bookcraft, 1975, vol. 6, p. 74)
Les
projets d'entraide
En
accord avec le principe fondamental de l'autonomie, le plan
d'entraide qui fut remis à l'ordre du jour prévoyait
que les personnes aidées travailleraient en compensation de ce
qu'elles recevaient. En fait, le travail des bénéficiaires
était étroitement lié à la nature de
l'aide fournie. Les unités locales de l'Église étaient
encouragées à développer des projets de travail
qui avaient deux buts : « produire des marchandises
et fournir du travail aux sans emploi » (Priesthood and
Church Welfare, Salt Lake City, Deseret Book, 1938, p. 33). Pour
atteindre les principaux buts spirituels du programme d'entraide, ces
projets fournissaient aussi des occasions à tous les membres
de travailler ensemble pour aider les autres.
Dans
une société où la plupart des membres de
l’Église vivaient dans des fermes ou dans des zones
urbaines assez proches de la campagne, ce programme fonctionnait
bien. Une personne dans le besoin pouvait être nourrie avec des
denrées provenant de la ferme où elle travaillait.
Différents projets permettaient de produire diverses
marchandises et le magasin pouvait être utilisé comme
entrepôt et lieu d’échange. Ce programme fut
expérimenté à Welfare Square à Salt Lake
City, un complexe dont le bâtiment principal avait été
construit en grande partie grâce au travail des saints des
derniers jours en échange de marchandises qui y étaient
entreposées et mises en conserve. » (Henry D.
Taylor, The Church Welfare Plan, 1984, manuscrit relié,
History Library-Archives, The Church of Jesus Christ of Latter-day
Saints, Salt Lake City, Utah, p. 57)
Les
projets de production et le fonctionnement des magasins
Immédiatement
après la seconde guerre mondiale, les projets de production et
les magasins bien remplis rendirent possible le remarquable effort de
l’Église pour soulager la souffrance de ses membres
européens. Dans un délai relativement court, un convoi
de 133 camions remplis de denrées et de produits de première
nécessité fut envoyé en Europe. La bénédiction
matérielle qu’a représenté ce secours
opportun fut significative, mais les bénédictions
spirituelles que reçurent à la fois les donateurs et
les bénéficiaires furent tout aussi importantes (voir
Ezra Taft Benson, Conference Report, avril 1947, p.152 ; Alfred
W. Uhrhan, Welfare in the Church, lmprovement Era, novembre
1956, p. 852 ; Henry D. Taylor, The Church Welfare Plan, p.
58-59 ; Ezra Taft Benson, Labor of Love, Salt Lake City, Deseret
Book, 1989).
La
nature et l’étendue de cette opération
d’entraide, fondée sur le programme des magasins et de
la production de marchandises, apparaissent dans les rapports publiés
pour l’année 1955. Il y eut 689 projets de production
(la plupart étaient des projets agricoles, mais quelques-uns
étaient industriels) et 140 magasins de l’évêque.
Environ 50.000 personnes furent aidées financièrement
ou en nature et plus de 92.000 personnes offrirent environ 790.000
heures de travail aux projets d’entraide (voir Henry D. Taylor,
The Church Welfare Plan, p. 59). Les membres de l’Église
travaillaient gratuitement à des projets tels que l’élevage
de bovins, la production de lait ou la culture d’agrumes pour
que les membres nécessiteux puissent recevoir par exemple de
la viande de bœuf, du lait et des oranges. Vingt ans plus tard,
en 1975, 73 pour cent des paroisses et des pieux américains et
canadiens de l'Église étaient engagés dans des
projets de production, et il était toujours vivement conseillé
aux autres de faire de même (voir Marion G. Romney, Welfare
Services, Ensign, novembre 1975, p. 127).
Les
changements récents
Alors
que le cinquantième anniversaire du rétablissement du
plan d'entraide approchait, il était évident que les
conditions changeaient et que les coopératives de l'Église
qui s'occupaient des pauvres et des nécessiteux devaient
évoluer. La population de l'Église n'était plus
concentrée dans quelques États de l'Ouest américain
mais dans les villes de tous les États-Unis ainsi que dans de
nombreuses parties du monde. En 1935, l'Église de Jésus-Christ
des saints des derniers jours comptait 746.000 membres, dont les deux
tiers vivaient en Utah, en Idaho et en Arizona. En 1983, on comptait
5,3 millions de membres, dont un peu moins d'un tiers vivaient dans
ces trois États et 1,6 millions en-dehors des États-Unis.
Dans
les années 1980 on trouvait des saints des derniers jours dans
des pays sous différents régimes politiques. Même
aux États-Unis, les lois de ce qui était appelé
« l'État providence » et son
environnement affectaient les projets d'entraide privés (comme
les écoles, les hôpitaux et l'aide aux nécessiteux),
et les lois fiscales des comtés, des États et de la
nation créaient des problèmes importants aux
coopératives et aux projets de production de l'Église.
Lors
d'une réunion tenue pendant la conférence générale
d'avril 1983, l'Église annonça ce que ses dirigeants
appelèrent les modifications « les plus
significatives et les plus lourdes de conséquences »
en matière d'entraide depuis que le président Grant en
avait annoncé les objectifs en 1936 (voir Ensign, mai
1983, p. 84). Frère Gordon B. Hinckley, au nom de la Première
Présidence, « [réaffirma] les principes
fondamentaux du programme d'entraide » et assura « qu'il
n'y aurait pas de divergence par rapport à ces principes. »
(cité dans Henry D. Taylor, The Church Welfare Plan, 1984, p.
122)
Lors
de cette même réunion, frère Thomas S. Monson mit
l'accent sur la différence entre les principes fondamentaux
non changeants sur lesquels repose le soin des pauvres et les
méthodes susceptibles d'évoluer par lesquelles cela
s'accomplit. Il cita la déclaration du président Harold
B. Lee que « personne ne change les principes et les
doctrines de l'Église si ce n'est le Seigneur par la
révélation. Mais les méthodes changent lorsque
la direction inspirée vient à ceux qui président
à un moment donné » (Ensign, janvier
1971, p. 10). Alors qu'il rappelait l'historique du programme
d'entraide, frère Monson observa que « les
procédures avaient été révélées
pour convenir à une certaine époque » et il
affirma que les changements nouvellement annoncés étaient
« dans la droite ligne d'une série de
changements. » (Thomas S. Monson, cité dans Henry
D. Taylor, The Church Welfare Plan, p. 124-125)
Frère
Monson donna un aperçu de l'évolution de la société
qui nécessitait les modifications annoncées des
méthodes du programme d'entraide de l'Église :
« Aujourd'hui,
nous sommes devenus une société urbaine. Le recensement
de fin 1980 montre que la population rurale est tombée à
2,5 pour cent aux États-Unis. Avec 97,5 pour cent de la
population vivant dans les villes, il est devenu de plus en plus
difficile d'avoir des projets de production qui répondent aux
objectifs pour lesquels ils sont mis en place. Les membres habitent
de plus en plus loin des fermes de l'Église. De plus, grâce
à une technologie moderne, l'agriculture est devenue une
question d'investissement financier, et non plus une question de
travail manuel intensif. Aussi, la croissance mondiale de l'Église
nous a amenés à beaucoup réfléchir sur la
manière dont le programme d'entraide devait être modifié
pour répondre aux demandes du monde entier. Ceci pour ne citer
que quelques-unes des conditions actuelles qui ont été
prises en considération. » (op. cit., p. 125)
Les
modifications apportées au programme ou à la méthode
furent importantes. Les évaluations annuelles du budget des
marchandises du magasin (payées par chaque pieu grâce à
des projets de production ou en espèces) furent abandonnées.
Les programmes pour les marchandises seraient maintenant financés
par les contributions volontaires au fonds de jeûne (en
espèces). Le financement des magasins et des projets de
production serait pris en charge dorénavant par le fonds
général de l'Église, sans contribution locale.
Les projets de production existants seraient évalués en
vue de les regrouper, de les revendre ou de les transformer afin
qu'ils deviennent plus efficaces. Seules les propriétés
qui produiraient des biens nécessaires au système
d'entraide seraient retenues en tant que projets de production. Les
autres seraient vendues ou gérées en fermage (voir
Ensign, mai 1983, p. 83 ; Henry D. Taylor, The Church
Welfare Plan, p. 124-125).
À
l'occasion de ce changement de méthode, le nombre des projets
de production fut réduit de manière significative, en
particulier dans les régions où il n'y avait pas de
grandes concentrations de membres de l'Église. De nombreux
projets de production et la plupart des magasins demeurèrent,
mais leurs fonctions étaient ramenées au but initial de
produire et de distribuer des marchandises directement pour secourir
les pauvres et de fournir des occasions de travail aux personnes
aidées et à un nombre important de membres. Quand on ne
pouvait pas atteindre ces objectifs par un projet de production,
l'aide aux pauvres et aux nécessiteux devait être gérée
avec des liquidités.
Ces
changements réduisirent ou éliminèrent la
concurrence entre les projets de production et les fermiers ou les
hommes d'affaires qui gagnaient leur vie en produisant des produits
comparables. Ils éliminaient aussi de nombreuses controverses
sur les exemptions d'impôts fonciers et d'impôts sur le
revenu pour les propriétés qui servaient aux projets de
production de l'entraide.
En
1989 l'Église publia un livret intitulé Basic Self
Reliance (Principes d’autonomie). Dans une lettre aux
dirigeants de l'Église datée du 16 novembre 1989, frère
Howard W. Hunter expliquait que ce livret était destiné
à être utilisé « comme une aide pour
l'amélioration de la santé et du bien-être des
membres de l'Église dans les régions en voie de
développement ». Ce livret contient une formation
de base sur la prévention des maladies, la nutrition,
l'hygiène et les installations sanitaires, les soins au foyer
et le jardinage. Ces sujets doivent être enseignés sous
la direction du comité d'entraide de paroisse, selon les
besoins des membres. Les présidences inter-régionales
ont reçu la responsabilité « de gérer
la formation sur l'autonomie de base ».
Les
conséquences des changements annoncés en 1983 sont mis
en évidence dans un rapport rendu public tout juste quatre ans
après. Devant le House Ways and Means Subcommittee on Public
Assistance, Keith B. McMullin, directeur général des
Services d'Entraide de l'Église, a donné une
description complète du programme de l'Église et a à
peine fait état des projets de production. Quelques projets de
production demeurent, mais ils sont l'exception plutôt que la
règle.
Après
avoir passé en revue les principes religieux qui sous-tendent
le programme d'entraide de l'Église, frère McMullin
parla des méthodes : « Nous cherchons
premièrement, et avant tout, à encourager l'autonomie
et la prévoyance », à acquérir des
connaissances et un bon métier, à vivre selon ses
moyens et à éviter les dettes inutiles. Les saints des
derniers jours sont encouragés à faire « des
réserves en nourriture [et en] vêtements », à
avoir de « bonnes habitudes d'hygiène »,
et à cultiver « des principes qui assurent le
bien-être social, émotionnel et spirituel ».
Il expliqua que quand les individus ont fait tout ce qu'ils ont pu
pour subvenir à leurs propres besoins, la famille proche ou
éloignée est supposée venir en aide tout
d'abord, et lorsque les ressources familiales ne sont pas
suffisantes, l'Église apporte alors l'aide nécessaire.
Cette aide « peut consister en de la nourriture ou des
vêtements, des conseils, une formation professionnelle, des
paiements de factures ou des services compatissants de voisins ou
d'amis. » (Keith B. McMuIlin, témoignage lu devant
le House Ways and Means Subcommittee on Public Assistance, tel que
cité dans un communiqué de l'Église de
Jésus-Christ des saints des derniers jours à la presse,
11 mars 1987)
En
résumé, dans les années 1980, les principes de
l'entraide de l'Église perdurèrent, mais les méthodes
avaient subi des changements significatifs. L'accent était mis
à nouveau sur la prévention, comme on peut le voir dans
le livret Basic Self-Reliance. L'attention portée à
l'aide temporaire continuait, mais l'étendue de l'aide
apportée allait dorénavant bien au-delà de la
fourniture de nourriture, de chauffage, de vêtements et de
literie des années 1930. Les projets de production furent
réduits et les évêques reçurent la
possibilité d'apporter une aide plus variée que celle
qui consistait à distribuer des produits entreposés
dans leur magasin. La liste des produits du magasin fut élargie
et on y ajouta la gamme complète des produits alimentaires,
des vêtements, des talents, et autres ressources fournies par
des membres de l'Église. Cette définition modifiée
apparaît dans Pourvoir aux besoins à la façon du
Seigneur – Guide d'entraide pour les dirigeants, publié
en 1990 :
« Le
magasin reçoit, garde en dépôt et distribue les
offrandes faites par les saints. Dans sa forme et son fonctionnement,
le magasin est aussi simple ou aussi complexe que l'exigent les
circonstances. Ce peut être une liste de services disponibles,
de l'argent sur un compte, de la nourriture dans un garde-manger ou
des denrées entreposées. Un magasin est fondé
dès l'instant où des membres fidèles donnent à
l'évêque leur temps, leurs talents, leur savoir-faire et
leur compassion, du matériel et des moyens financiers pour
s'occuper des pauvres et édifier le royaume de Dieu sur la
terre. » (p. 11)
Bien
entendu, ces nouvelles méthodes répondaient mieux aux
lois et aux modes de vie actuels, aux États-Unis et dans les
autres parties du monde.
L'aide
de l'État
En
même temps qu'évoluaient les méthodes de l'Église
pour administrer son aide aux pauvres et aux nécessiteux,
d'autres changements survenaient pour ceux qui recevaient de l'aide
de l'État.
À
ses débuts, l'entraide de l'Église était une
alternative à l'entraide de l'État et les membres de
l'Église avaient reçu le conseil d'éviter de
recevoir toute aide sociale. Cette méthode était
réalisable aux États-Unis dans les années 1930
et 1940, mais elle était difficilement applicable dans les
pays socialistes où le nombre des membres a augmenté de
façon conséquente dans les années 1950, ou même
dans l'environnement social de l'entraide aux États-Unis des
années 1970.
En
1977, le président Ezra Taft Benson expliqua les principes
fondamentaux pour aider les saints des derniers jours à savoir
s'ils devaient accepter ou non l'aide de l'État : « On
nous demande parfois s'il est convenable que les membres de l'Église
reçoivent l'aide de l'État plutôt que celle de
l'Église. Je tiens à répéter ce qui est
un principe fondamental. Dans toute la mesure du possible chacun doit
pourvoir à ses propres besoins. Quand une personne n'est pas
capable de prendre soin d'elle-même, c'est sa famille qui doit
l'aider. Lorsque la famille n'est pas capable de pourvoir au
nécessaire, c'est l'Église qui doit aider, pas le
gouvernement. Nous acceptons le principe fondamental que 'bien que le
peuple soutienne l'État, l'État ne doit pas soutenir le
peuple'. » (L'Étoile, octobre 1977, p.
95-96)
Ensuite
il parla d'une différence importante entre l'aide « méritée »
et l'aide « non méritée », en
expliquant son importance en terme d'impact spirituel sur le
bénéficiaire : « Les saints des
derniers jours ne doivent pas recevoir de la part d'organisations
locales ou nationales une aide qu'ils n'ont pas méritée.
Ceci s'applique aussi aux bons alimentaires. Les dirigeants de la
prêtrise et de la Société de secours doivent
vivement conseiller aux membres de l'Église d'accepter le
programme d'entraide et de gagner ce dont ils ont besoin grâce
à ce programme, même s'ils reçoivent moins
d'argent et de nourriture. Ce faisant, les membres seront fortifiés
spirituellement et conserveront leur dignité et le respect
d'eux-mêmes. » (L'Étoile, octobre
1977, p. 96)
Dans
les années 1980, les saints des derniers jours, dans le monde
entier, payaient des impôts pour soutenir quantité de
services sociaux dont les pauvres n'étaient pas les seuls
bénéficiaires : des repas chauds gratuits dans les
écoles primaires, des cours de rattrapage dans les collèges
et des services d'orientation, pour n'en citer que quelques-uns.
Devaient-ils se refuser l'accès à des programmes
sociaux pour lesquels ils cotisaient et se tourner seulement vers
l'Église pour obtenir de l'aide ?
Comme
dans le message du président Benson cité plus haut,
l'Église a continué à conseiller à ses
membres de ne pas accepter le soutien traditionnel de l'État
aux pauvres, tel que les bons alimentaires. Mais lorsqu'un programme
subventionné par le gouvernement est accessible à tous
les citoyens de façon générale et dans la mesure
où il est en accord avec le principe de l'autonomie et les
autres principes de l'entraide de l'Église, les dirigeants de
l'Église ne s'opposent pas de nos jours à ce que ses
membres en bénéficient. Par exemple, il n'y a pas
d'objection à ce qu'un membre fasse une contribution
personnelle importante pour bénéficier d'un programme
(par exemple un étudiant qui doit étudier afin de
réaliser le bénéfice de la subvention d'impôt
dans un collège proposant un droit d'instruction à
tarif réduit).
Le
principe de l'autonomie et sa relation avec l'aide de l'État
sont décrits dans ce passage clé du Guide de l'entraide
pour les dirigeants :
« Les
saints des derniers jours ont la responsabilité de pourvoir à
leurs besoins et à ceux de leur famille. Toutefois certains
membres peuvent nécessiter une aide plus importante que celle
que la famille peut apporter et dans ce cas, ils peuvent demander
l'aide de l'Église. Dans certains cas, des membres peuvent
décider de recevoir de l'aide en provenance d'autres sources,
y compris de l'État. Dans tous ces cas, ils doivent éviter
de devenir dépendants de ces sources et s'efforcer de devenir
autonomes. Dans la mesure du possible ils devraient travailler en
échange de l'aide reçue. » (Pourvoir aux
besoins à la façon du Seigneur, Guide de l'entraide
pour les dirigeants, 1990, p. 15)
Dans
son témoignage devant la Commission Parlementaire (la Chambre
des Représentants des États-Unis, ndt), frère
McMullin, directeur général de l'entraide de l'Église,
s'est exprimé publiquement sur cette nouvelle conception :
« Lorsque les ressources disponibles de la collectivité
sont compatibles avec nos principes, nous les utilisons volontiers.
Cependant, notre objectif premier sera toujours d'aider les gens à
s'aider eux-mêmes. » (Keith B. McMullin, communiqué
à la presse, 11 mars 1987)
Il
existe un fossé, qui va peut-être en s'élargissant,
entre la manière de l'État et la manière de
l'Église de prendre soin des pauvres et des nécessiteux.
Ce fossé est inévitable dans la mesure où les
objectifs de l'Église, dictés par les commandements
divins, sont spirituels aussi bien que temporels.
Le
développement de l'urbanisation et la diversité des
situations rencontrées dans une Église mondiale
présentent de nombreux défis à ceux qui ont la
responsabilité d'utiliser les ressources du Seigneur au
bénéfice des pauvres et des nécessiteux. Les
changements récents dans l'organisation et les procédures
de l'Église facilitent cette mission sacrée, mais les
paramètres variables les plus importants demeurent l'attitude
du bénéficiaire potentiel et l'inspiration de l'évêque.
Aucun de ces critères n'a changé. Les voies du Seigneur
en matière d'entraide ne changeront pas tant que les membres
seront déterminés à pourvoir à leurs
propres besoins du mieux qu'ils le pourront et à participer
ensuite à l'aide apportée aux moins favorisés,
et tant que les évêques continueront à gérer
l'entraide à la manière du Seigneur.
CHAPITRE
5 : LA QUERELLE
Le
Seigneur a indiqué une « manière
particulière » d'agir en ce qui concerne un autre
sujet que les Écritures nomment la querelle. Puisque ce mot et
ses synonymes (tels que affrontement) ont plusieurs sens dans les
Écritures, il est nécessaire de préciser que le
genre de controverse présentée dans ce chapitre est
synonyme de colère, de conflit, de discussions enflammées
et de disputes (à l'opposé, affronter implique parfois
un conflit physique, comme dans le cas où « les
Néphites étaient contraints de se battre contre leurs
frères, même jusqu'à l'effusion du sang »,
Alma 43:14. Affronter et querelle sont aussi utilisés pour
désigner une argumentation rigoureuse d'un point, comme dans
la déclaration de l'apôtre Paul « nous primes
de l'assurance… pour vous annoncer l'Évangile de Dieu,
au milieu de bien des combats », 1 Thessaloniciens
2:2. De même, Jude nous conseilla de « combattre
pour la foi », Jude 1:3 ; voir aussi D&A 18:20;
112:5). C'est le sens que l'on retrouve dans disputer, quereller
(voir par exemple Alma 9:1-4 ; 19:25-28). Avoir des points de
vue différents ou s'entretenir de points de désaccord
ne constitue pas ce genre de querelle. Il en est de même pour
une discussion ou un débat, si (et seulement si) ils se
déroulent dans un bon état d'esprit et selon une
méthode en accord avec cet esprit. En résumé, le
genre de querelle traité ici consiste en des désaccords
dans un esprit de colère ou engendrés par une méthode
de débat favorisant la querelle.
Exemples
de querelles
En
tant que magistrat ayant l'expérience des procès civils
et des procédures criminelles, ayant approfondi les
connaissances juridiques et ayant été conseiller
juridique, j'ai été en contact très proche avec
les débats inhérents aux procédures
contradictoires. Dans leurs moments les plus enflammés, de
telles discussions entre professionnels peuvent être
considérées comme étant de la querelle. En tant
que magistrat, mon expérience m'a démontré que
des adversaires peuvent aussi avoir des échanges sur des
points de désaccord sans se quereller.
Dans
ma vie et même dans mon travail pour l'Église, je me
suis parfois rendu coupable de franchir la limite entre la discussion
raisonnée et la querelle. Par exemple, en tant qu'étudiant
en droit tout nouvellement formé dans les procédures
d'une cour de justice, je cherchais à utiliser les techniques
de la controverse pour présenter les sujets de l'Évangile
que j'enseignais à un groupe d'anciens. J'encourageais parfois
le débat et la controverse, et je jouais occasionnellement le
rôle de l'avocat du diable (si bien nommé). Chacune de
ces techniques invitait à la querelle ou la frôlait. Je
me rappelle ces erreurs de jeunesse lorsque je vois d'autres
personnes utiliser les techniques de la controverse pour essayer
d'enseigner les sujets de l'Évangile. Ce n'est pas la voie
divine.
Joseph
Smith fut témoin de telles situations dans les premiers jours
de l'Église et fut amené à donner quelques
conseils pour y remédier. À Kirtland, en Ohio, le 18
novembre 1835, un soir de semaine, il rendit visite à une
famille et trouva « quelques-uns des jeunes anciens
s'engageant dans un débat » sur la question de
savoir si le Christ avait l'intention d'établir son Évangile
par des miracles. Le journal du prophète poursuit :
« Après
un débat intéressant de trois heures ou plus, au cours
duquel un grand talent oratoire fut démontré, les
présidents du débat conclurent par la négative,
ce qui était une bonne réponse. Je trouvais que dans ce
débat, on faisait preuve de beaucoup d'ardeur, de beaucoup
trop de zèle pour maîtriser le sujet, de beaucoup trop
de cet enthousiasme qui caractérise l'avocat à la
barre, déterminé à défendre sa cause,
qu'elle soit juste ou non. Pour ma part, j'ai profité de cette
occasion favorable pour dire quelques mots à ce sujet sous
forme de conseil, afin qu'ils puissent élever leur pensée
et cultiver leur intelligence dans le bon sens, afin qu'ils
n'encourent pas le déplaisir des cieux, afin qu'ils traitent
les choses très sacrées de façon appropriée,
dans le respect des opinions des autres et dans le seul souci de la
gloire de Dieu. » (Dean C. Jessee, comp.-éd., The
Personal Writings of Joseph Smith, Salt Lake City, Deseret Book,
1984, p. 90)
Ici,
le prophète nous enseigne comment éviter le « déplaisir
des cieux » lors de discussions sur des choses sacrées.
Nous devons les tenir pour « très sacrées
dans le respect des opinions des autres ». Le but de notre
discussion devrait être sage et ne devrait pas être
caractérisé par le zèle à « maîtriser
le sujet », mais par « le seul souci de la
gloire de Dieu ».
Un
demi siècle plus tard, George Q. Cannon donna le même
conseil à propos des débats contradictoires :
« Est-il juste pour un saint des derniers jours de se
quereller et d'avoir des disputes ? Non ; ce n'est pas selon
l'Esprit et la volonté de Dieu. Quand deux anciens se
querellent et se disputent, ils devraient savoir et tout le monde
devrait savoir que l'Esprit de Dieu n'est pas présent comme il
devrait l'être, car là où l'Esprit de Dieu règne,
il n'y a pas de querelle, ni de controverse. Les hommes peuvent avoir
des points de vue différents, mais après avoir exprimé
ces différences, la querelle devrait cesser ; en fait,
elle ne devrait pas avoir lieu. » (George Q. Cannon,
Gospel Truth, éd. Jerreld L. Newquist, Salt Lake City, Deseret
Book, 1987, p. 160, discours donné le 3 août 1890)
Il
expliqua aussi pourquoi les saints des derniers jours devraient
éviter la querelle : « Toutes nos idées
sur les cieux nous poussent à croire que la dissension et la
division, les conflits, les discordes et les querelles sur tout sujet
important sont exclus de cette demeure céleste... En
conséquence, dans la mesure où le but de la religion
est de nous préparer pleinement à habiter éternellement
avec Dieu notre Père éternel, nous pouvons nous
attendre à ce que la religion ait pour effet de donner à
l'humanité un avant-goût de cette béatitude, de
cette union, de cet amour et de cette paix de la plénitude des
bénédictions des cieux. » (op. cit., p. 159)
Si
la confrontation et d'autres techniques contradictoires sont des
manières acceptées pour acquérir de la
connaissance dans de nombreux domaines, à l'opposé,
dans les Écritures anciennes et modernes, le Seigneur enseigne
à ses disciples de ne pas se quereller sur les points de sa
doctrine et d'éviter les disputes et la querelle.
Les
enseignements des Écritures sur la querelle
L'enseignement
le plus explicite du Sauveur à propos des maux de la querelle
est donné dans le Livre de Mormon. Quand le Seigneur
ressuscité donna à ses disciples du continent américain
le pouvoir de baptiser, il leur fit remarquer qu'il y avait eu des
querelles parmi eux sur la manière de baptiser. Après
avoir donné des conseils précis sur la manière
dont ce sacrement devait être administré, le Sauveur
ajouta ce grand enseignement au sujet des disputes et des querelles :
« Et
il n'y aura plus de disputes parmi vous, comme il y en a eu jusqu'à
présent ; et il n'y aura plus de disputes parmi vous sur
les points de ma doctrine, comme il en a été jusqu'à
présent. Car, en vérité, en vérité,
je vous le dis : Celui qui a l'esprit de controverse n'est pas
de moi, mais il est du diable qui est le père de la
controverse ; et il pousse le coeur des hommes à lutter
les uns contre les autres avec colère. Voici, ce n'est pas ma
doctrine d'exciter les cœurs des hommes à la colère
l'un contre l'autre ; mais c'est ma doctrine que de telles
choses soient abandonnées. » (3 Néphi
11:28-30)
Il
est intéressant de constater que l'enseignement du Sauveur à
propos des disputes et des querelles ne se limitait pas à ceux
qui avaient des idées fausses sur la doctrine ou la façon
de baptiser. Il interdit les disputes et la querelle à tout le
monde en disant : « Celui qui a l'esprit de
controverse n'est pas de moi ». Les hommes ne devraient
pas être enclins à la colère « les uns
contre les autres ».
Le
commandement d'éviter la querelle s'applique aussi bien à
ceux qui ont raison qu'à ceux qui ont tort. Il n'est pas
suffisant pour les disciples du Sauveur d'avoir une compréhension
correcte de la doctrine et de son application. Ils doivent aussi
vivre en harmonie les uns avec les autres en cherchant à
servir le Seigneur.
Dans
les années qui suivirent le ministère du Sauveur sur le
continent américain, tout le peuple fut converti et vécut
dans la vertu, dans la paix et la prospérité. Pour moi
il est significatif que, dans les Écritures, la description de
cette période commence par le fait qu'il « n'y
avait ni querelles, ni disputes parmi eux » (4 Néphi
1:2 ; voir aussi le verset 15), ce qui suggère que
l'absence de querelle est en tête de liste des bienfaits de la
vertu.
Dans
le Sermon sur la Montagne, le Sauveur aborda un autre aspect de ce
principe : la nécessité de résoudre nos
différends personnels avant d'approcher Dieu pour lui
présenter nos offrandes. « Si donc tu présentes
ton offrande à l'autel, et que là tu te souviennes que
ton frère a quelque chose contre toi, laisse là ton
offrande devant l'autel, et va d'abord te réconcilier avec ton
frère, puis, viens présenter ton offrande »
(Matthieu 5:23-24). Apparemment, ce commandement ne tient pas compte
de la raison du différend (qui a raison et qui a tort). Nous
devons « [nous] réconcilier avec [notre] frère »
même s'il a tort et que nous sommes la victime. Dans les buts
recherchés par le commandement de se réconcilier, le
fait de savoir qui a tort est sans importance. L'objectif recherché
est la réconciliation, pas le jugement ; la paix, pas la
justice. La réconciliation tente de rétablir les
relations, pas de juger les différends.
Si
nous pouvons éviter de ressasser les causes et de tenter de
juger les responsables, et si nous pouvons diriger nos efforts
seulement vers le rétablissement des relations, nous pouvons
nous réconcilier avec nos frères et sœurs.
Combien de mariages pourraient être sauvés, combien de
familles pourraient être de nouveau unies, combien d'amitiés
pourraient être retrouvées, si seulement les personnes
pouvaient oublier la querelle et appliquer le principe de la
réconciliation !
Tout
au long du Sermon sur la Montagne, le Sauveur a mis et remis l'accent
sur le refus de la querelle : « Vous avez appris
qu'il a été dit : Oeil pour oeil et dent pour
dent. Mais moi, je vous dis de ne pas résister au méchant.
Si quelqu'un te frappe sur la joue droite, présente-lui aussi
l'autre. » (Matthieu 5:38-39)
Dans
un commentaire très intéressant sur l'application
actuelle de ce commandement, Leonard E. Read, rédacteur en
chef de vieille date de The Freeman, conclut que cela signifiait « de
ne pas se disputer avec qui que ce soit... En un mot, éloignez-vous
de la confrontation ! » Il donna cet exemple :
« De temps en temps nous sommes victimes d'une
escroquerie : une promesse non tenue, un prix excessif, une
mauvaise qualité, une tentative de 'soutirer le maximum'. Ne
vous opposez pas à cette malhonnêteté ; n'y
prêtez pas attention ; ne prononcez pas une parole de
réprimande ; éloignez-vous simplement et n'y
retournez plus. Si notre opposition renforce le malfaiteur dans ses
péchés quand il prépare sa défense, notre
passivité le laisse seul avec sa conscience, son magasin et
son trafic, dans une situation que même un malfaiteur pourra
méditer et comprendre. » (The Freeman,
septembre 1970, p. 530-534)
On
évite aussi la querelle en appliquant un autre enseignement du
Sermon sur la Montagne : « Vous avez appris qu'il a
été dit : Tu aimeras ton prochain, et tu haïras
ton ennemi. Moi, je vous dis : Aimez vos ennemis, bénissez
ceux qui vous maudissent, faites du bien à ceux qui vous
haïssent, et priez pour ceux qui vous maltraitent et qui vous
persécutent » (Matthieu 5:43, 44). Ce grand
commandement est considéré par beaucoup comme le test
suprême du comportement chrétien.
Dans
le Sermon sur la Montagne (rapporté dans le sixième
chapitre de Luc), le Sauveur mit en relation son commandement d'aimer
nos ennemis avec le fait de refuser la querelle :
« Si
quelqu'un te frappe sur la joue, présente-lui aussi l'autre,
il est préférable d'offrir l'autre joue, que d'injurier
aussi. Et si quelqu'un te prend ta cape, ne lui interdis pas de
prendre aussi ton manteau. Car il est préférable que tu
souffres que ton ennemi prenne ces choses, que de l'affronter. En
vérité, je te le dis, ton Père céleste
qui voit dans le secret, amènera ce méchant en
jugement » (Luc 6:29-30, traduction de Joseph Smith).
En
commentant ces versets, George Q. Cannon écrivit :
« Quand nous sommes poursuivis en justice, nous ne devons
pas nous laisser tenter par ce même esprit. Nous ne devons pas
injurier si nous sommes injuriés. Nous ne devons pas rendre le
mal pour le mal. Mais nous devons constamment chercher à
rendre le bien pour le mal... Nous devons aimer nos ennemis... Tant
que nous ne surmontons pas tous la tendance qui pousse les hommes à
prendre ce mauvais chemin [rendre le mal pour le mal], nous ne
pouvons pas prétendre aux bénédictions que le
Seigneur a promises. » (Juvenile Instructor, vol.
26, 1981, p. 572-573)
Le
Nouveau Testament contient beaucoup d'autres enseignements sur le
refus de la querelle.
Il
n'est pas d'auteur dans les Saintes Écritures qui n'ait plus
fréquemment donné d'avertissement contre la querelle
que l'apôtre Paul. Son enseignement le plus détaillé
sur ce sujet se trouve dans son épître aux Romains. Il
expose sa préoccupation à propos de la querelle en
constatant que dans « le jugement de Dieu... qui rendra à
chacun selon ses oeuvres », les personnes qui se
complaisent dans la querelle récolteront « tribulations
et angoisse » (Romains 2:2, 6, 8-9).
Plus
loin dans son épître, Paul donne une illustration
frappante de la raison pour laquelle nous devons éviter la
querelle et de la manière dont cela peut être fait. Il
exprime son souci pour « celui qui est faible dans la
foi » et conseille qu'une telle personne soit acceptée
telle qu'elle est et qu'on ne discute pas « sur les
opinions » (Romains 14:1). Pour illustrer cela, il
rappelle aux Romains les avis divergents concernant ce qu'un chrétien
devrait manger, ce qui apparemment était source de querelles
parmi eux. Ensuite il supplie que ceux qui suivent des régimes
alimentaires différents ne « méprise[nt] »
pas ou ne se « juge[nt] pas l'un l'autre : « Que
celui qui mange ne méprise point celui qui ne mange pas ;
et que celui qui ne mange pas ne juge point celui qui mange, car Dieu
l'a accueilli. » (Romains 14:3)
En
résumé, nous devons nous aimer les uns les autres et
laisser le jugement à Dieu : « Ne nous jugeons
donc plus les uns les autres ; mais pensez plutôt à
ne rien faire qui soit pour votre frère une pierre
d'achoppement ou une occasion de chute. » (Romains 14:13)
Paul
donne ensuite cet exemple mémorable. À propos des
aliments, il dit qu'il était « persuadé...
que rien n'est impur en soi ». Néanmoins, il y
avait quelque chose de plus important que son avis à ce sujet.
D'autres membres considéraient certaines nourritures comme
impures. À cette occasion, en vertu du principe de l'amour et
par souci des autres, Paul mit un frein à une conduite qui
pourrait détruire, affaiblir ou offenser les autres.
« Mais
si, pour un aliment, ton frère est attristé, tu ne
marches plus selon l'amour : ne cause pas par ton aliment la
perte de celui pour lequel le Christ est mort... Recherchons ce qui
contribue à la paix et à l'édification mutuelle.
Pour un aliment, ne détruis pas l'oeuvre de Dieu. À la
vérité, toutes choses sont pures ; mais il est mal
à l'homme, quand il mange, de devenir une pierre
d'achoppement. Il est bien de ne pas manger de viande, de ne pas
boire de vin, et de s'abstenir de ce qui peut être pour ton
frère une occasion de chute, de scandale ou de faiblesse. »
(Romains 14:14-21)
Plus
tard, alors qu'il concluait son épître aux Romains, Paul
plaida une dernière fois pour éviter les divisions
parmi les saints :
« Je
vous exhorte, frères, à prendre garde à ceux qui
causent des divisions et des scandales, au préjudice de
l'enseignement que vous avez reçu. Eloignez-vous d'eux. Car de
tels hommes ne servent point Christ, notre Seigneur, mais leur propre
ventre ; et, par des paroles douces et flatteuses, ils séduisent
les coeurs des simples. » (Romains 16:17-18)
En
bref, ne créez pas de divisions parmi les saints par une
attitude que certains pourraient considérer comme mauvaise. Ne
mettez pas de pierre d'achoppement sur le chemin d'un frère ou
d'une soeur. Servez le Seigneur en « recherch[ant] ce qui
contribue à la paix. » (Romains 14:19)
Les
Actes des Apôtres rapportent que Paul « se
disputait » (version du roi Jacques, ndt) dans la
synagogue (voir Actes 17:17 ; 19:8). À la lumière
de son propre enseignement sur la querelle, ces récits se
réfèrent sûrement à des discussions
raisonnées, et non à des confrontations violentes.
Dans
sa première épître aux Corinthiens, Paul donna le
même conseil : « Si quelqu'un se plaît à
contester, nous n'avons pas cette habitude, non plus que les Églises
de Dieu » (1 Corinthiens 11:16). Dans sa seconde
épître, il écrivit qu'il craignait de trouver
« des querelles, de la jalousie, des animosités,
des cabales, des médisances, des calomnies, de l'orgueil, des
troubles » (2 Corinthiens 12:20) quand il viendrait
chez eux.
De
même, Paul conseilla à Tite d'éviter « les
discussions folles... les querelles, les disputes relatives à
la foi ; car elles sont inutiles et vaines » (Tite
3:9). Il donna pour instruction à Timothée :
« Repousse les discussions folles et inutiles »
parce qu'elles « font naître les querelles ».
Il poursuit : « Or, il ne faut pas qu'un serviteur du
Seigneur ait des querelles ; il doit, au contraire, avoir de la
condescendance pour tous, être propre à enseigner, doué
de patience ; il doit redresser avec douceur les adversaires »
(2 Timothée 2:24-25).
L'apôtre
Jacques a aussi enseigné le fait d'éviter la querelle
et ses causes : « Sachez-le, mes frères
bien-aimés. Ainsi que tout homme soit prompt à écouter,
lent à parler et à se mettre en colère ;
car la colère de l'homme n'accomplit pas la justice de Dieu »
(Jacques 1:19, 20). Plus tard, il développa cet enseignement
en ces termes : « Car là où il y a un
zèle amer et un esprit de dispute, il y a du désordre
et toutes sortes de mauvaises actions. La sagesse d'en haut est
premièrement pure, ensuite pacifique, modérée,
conciliante, pleine de miséricorde et de bons fruits, exempte
de duplicité et d'hypocrisie. » (Jacques 3:16-17)
Les
prophètes du Livre de Mormon ont aussi mis leur peuple en
garde contre la querelle. Le roi Benjamin enseigna : « Mais,
ô mon peuple, soyez sur vos gardes de peur que des querelles ne
s'élèvent parmi vous, et que vous choisissiez d'obéir
à l'esprit malin » (Mosiah 2:32). Alma commanda à
son peuple « de ne point avoir de querelles entre eux »
(Mosiah 18:21, voir aussi 23:15). Auparavant, Néphi avait
prophétisé que ceux qui construiront de fausses églises
« enseigneront avec leur science et renieront le
Saint-Esprit, qui donne le pouvoir de s'exprimer se disputeront l'un
[...] avec l'autre » (2 Néphi 28:4).
Comme
cité plus haut, le Seigneur ressuscité commanda aux
disciples néphites : « Il n'y aura plus de
disputes parmi vous » (3 Néphi 11:28 ;
voir aussi 11:22). Plus tard, il dit : « Et bénis
serez-vous s'il n'y a pas de disputes parmi vous. »
(3 Néphi 18:34)
Les
avertissements modernes contre la querelle
Les
révélations données à Joseph Smith, le
prophète, pour instruire les dirigeants de l'Église
rétablie et pour établir les procédures de son
administration contiennent de nombreux avertissements contre la
querelle.
Après
que les pages manuscrites du livre de Mormon eurent été
volées à Martin Harris, le Seigneur donna une
révélation déclarant : « Ils
feront parvenir à la lumière les vrais points de ma
doctrine... Je fais ceci afin d'établir mon Évangile,
afin qu'il n'y ait plus autant de querelles. Oui, Satan excite le
coeur des hommes aux querelles sur les points de ma doctrine, et ils
font erreur en cela car ils déforment les Écritures et
ne les comprennent pas. » (D&A 10:62-63)
Dans
les révélations suivantes le Seigneur remet sans cesse
l'accent sur le fait que l'Évangile ne devait pas être
prêché dans un esprit de querelle. Il fut recommandé
aux anciens de prêcher l'Évangile « en toute
humilité, mettant [votre] confiance en moi, n'insultant pas
ceux qui [vous] insultent » (D&A 19:30 ; voir
aussi 31:9). « Que votre prédication soit la voix
d'avertissement, chacun à son voisin, avec douceur et
humilité » (D&A 38:41). Ils devaient prêcher
l'Évangile « sans colères, ni disputes »
(D&A 60:14). En accord avec ces conseils, Joseph Smith recommande
aux anciens d'éviter « les querelles et les
discussions inutiles avec les hommes à l'esprit corrompu, qui
ne désirent pas connaître la vérité »
(Enseignements du prophète Joseph Smith, p. 31).
De
temps en temps, les saints des derniers jours ont l'occasion d'être
impliqués dans un débat sur un sujet de l'Évangile.
Mais, pour citer le professeur Richard Lloyd Anderson : « Le
débat est un outil bien faible pour découvrir la vérité
car il défend une position étroite et manque
généralement d'envergure. Tout le monde peut donner des
'arguments' pour ou contre quelque chose. » (Richard Lloyd
Anderson, Investigating the Book of Mormon Witnesses, Salt Lake City,
Deseret Book, 1989, p. 151)
Le
débat n'est jamais approprié pour résoudre les
divergences d'opinion sur les principes de l'Évangile ou leur
application. C'est Satan qui excite le coeur des gens à lutter
au sujet de points de la doctrine. Russell M. Nelson a enseigné :
« La doctrine divine de l'Église est la cible
principale de ceux qui la combattent par attaques dans le domaine
spirituel... Disséquer la doctrine en recherchant la
controverse pour attirer l'attention sur soi n'est pas agréable
au Seigneur. » (L’Étoile, juillet
1989, p. 63)
Le
Seigneur a renforcé la gravité de son commandement
d'éviter la querelle dans la révélation qui
instruit son peuple sur la raison de la persécution et des
afflictions qu'il avait subies dans l'État du Missouri :
« Voici, je vous le dis, il y avait parmi eux des
querelles et des disputes, des envies, des luttes et des désirs
voluptueux et cupides. Ils ont souillé par là leur
héritage » (D&A 101:6). Quatorze ans plus tard,
alors que les saints des derniers jours se préparaient à
aller vers l'Ouest, le Seigneur leur parla par l'intermédiaire
d'un autre prophète, leur commandant de cesser de se
« quereller les uns avec les autres » (D&A
136:23).
Bruce
R. McConkie expliqua comment les saints des derniers jours doivent
appliquer le principe de s'abstenir de la querelle à l'égard
des fausses déclarations des personnes qui critiquent
l'Église :
« Notre
mission divine est d'annoncer de joyeuses nouvelles au monde, et non
de nous quereller avec les autres à propos de l'interprétation
des textes. Il y a, bien sûr, des réponses à
toutes les fausses déclarations de ceux qui luttent contre
nous (je ne crois pas que le diable ait utilisé une tactique
nouvelle depuis cent ans) mais la conversion ne se trouve pas dans
les arènes de la polémique. Elle vient plutôt en
lisant le Livre de Mormon en suivant le conseil de Moroni. La plupart
des membres de l'Église se porteraient mieux en se contentant
d'ignorer les fausses déclarations des anti-mormons
professionnels. » (Bruce R. McConkie, Doctrines of the
Restoration, éd. Mark L. McConkie, Salt Lake City, 1989, p.
233)
Les
saints des derniers jours ne devraient pas céder à la
tentation de devenir ce que Marvin J. Ashton a appelé des
« anti-anti-mormons ». Il explique :
« Que
les accusations, les insinuations, les dénigrements ou les
mensonges soient murmurés ou proclamés ouvertement,
l'Évangile de Jésus-Christ nous rappelle que nous ne
devons pas user de représailles ni de querelles...
« La
paix et la haine ne pourront jamais demeurer dans une même âme.
La paix continuelle ne pourra pas demeurer avec ces personnes ou ces
groupes dont l'objectif est de condamner, de discréditer, de
railler ou d'abattre ceux dont les croyances sont différentes
des leurs. Ces personnes se nourrissent de haine et voudraient
détruire les autres dans la mesure où ils le peuvent.
Les vrais chrétiens n'ont pas de temps à perdre en
querelles. Une paix durable ne peut être établie si nous
insultons ou haïssons les autres. Ceux qui prêchent la
haine, le ridicule et les contrevérités ne peuvent être
considérés comme des artisans de paix. À moins
qu'ils ne se repentent, ils ne récolteront que les fruits
auxquels peuvent prétendre ceux qui s'enrichissent par les
voies de la haine. Les sentiments d'inimitié et de malice ne
sont jamais compatibles avec les sentiments de paix. »
(Marvin J. Ashton, Be of Good Cheer, Salt Lake City, Deseret Book,
1987, p. 88)
Pendant
vingt ans j'ai été intimement associé avec les
dirigeants de l'Église de Jésus-Christ des saints des
derniers jours et j'ai été émerveillé de
la manière dont ils appliquent le commandement d'éviter
disputes et querelles. Ils ne sont pas toujours d'accord, mais ils
sont toujours en harmonie. Ils ne sont pas toujours du même
avis, mais ils sont unis dans l'effort. Ils sont nombreux, mais ils
sont un.
Ces
affirmations sont impossibles à prouver sans aller à
l'encontre du caractère confidentiel du travail des Autorités
générales. Toutefois, si on observe attentivement
comment les affaires de l'Église sont dirigées au
quotidien, on peut voir la preuve de cette absence de querelles, et
ceux qui lisent soigneusement les biographies des dirigeants de
l'Église peuvent trouver de nombreuses preuves écrites
qu'ils traitent leurs divergences d'opinion à la manière
du Seigneur, dans le respect mutuel et sans querelle (voir L. Brent
Goates, Harold B. Lee, Prophet and Seer (Salt Lake City, Bookcraft,
1985, p. 222, 336, 366-367, 382-384 ; O. Michael Quinn, J.
Reuben Clark : The Church Years, Provo, Brigham Young University
Press, 1983, p. 113-144, 197-219, 251-278 ; Edward L. Kimball et
Andrew E. Kimball, fils, Spencer W. Kimball, Salt Lake City,
Bookcraft, 1977, p. 228, 344, 357).
Le
commandement de s'abstenir de la querelle est toujours en vigueur.
Les circonstances actuelles le rendent plus nécessaire que
jamais.
Lors
d'une conférence générale récente,
Russell M. Nelson exprima sa préoccupation « que la
querelle est en passe de devenir un comportement acceptable ».
Dans la presse écrite, à la télévision,
et dans divers aspects des affaires publiques ou politiques, le modus
operandi est la querelle. Nous vivons dans un environnement de
querelle. Mais, comme frère Nelson nous le rappelle, la
querelle est contraire aux voies du Seigneur : « Il
est si facile et pourtant si néfaste de laisser la querelle
imprégner les questions spirituelles car elle est interdite
par décret divin : Le Seigneur Dieu a commandé aux
hommes... de ne pas être envieux, de ne pas avoir de malice ;
de ne pas se quereller les uns avec les autres (2 Néphi
26:32). » (L'Étoile, juillet 1989, p. 61)
Le
Sauveur est le « prince de la paix, » et le
diable le « père de la querelle »
(3 Néphi 11:29). Selon Bruce R. McConkie :
« L'Esprit du Seigneur mène à l'harmonie, à
l'unité, à l'accord et à l'unanimité.
L'esprit du diable prend fait et cause pour la division, la
polémique, la querelle, et la désunion. »
(Bruce R. McConkie, Doctrines of the Restoration, p. 231)
C'est
là le cœur du problème. Le Seigneur nous a
commandé d'éviter la querelle parce qu'elle nous
retranche de Dieu et de son Esprit. C'est pourquoi il est conseillé
aux saints des derniers jours de diriger leur famille « avec
humilité » (D&A 31:9) et de vivre ensemble,
s'aimant les uns les autres (voir D&A 42:45). C'est pourquoi le
Seigneur a rappelé aux saints des derniers jours qu'ils
doivent être unis : « Soyez un ; et si
vous n'êtes pas un, vous n'êtes pas de moi.» (D&A
38:27).
CHAPITRE
6 : LES PROCÈS
Les
actions en justice sont parmi les manifestations de controverse les
plus courantes aux États-Unis. De par la croissance
démographique de ce pays et son évolution complexe,
nous avons connu une augmentation proportionnelle ou supérieure
du nombre de lois gouvernementales et des conflits privés
résolus par les tribunaux. Cette caractéristique de la
vie américaine permet d'illustrer les nombreuses différences
qui existent entre les voies du Seigneur et les voies du monde.
Certains
saints des derniers jours ont de plus en plus recours aux tribunaux
civils pour résoudre les conflits privés et publics,
reflétant ainsi cette tendance typiquement américaine.
Les autres, sensibles aux avertissements des Écritures et des
prophètes modernes à ce sujet, sont déconcertés
ou mal à l'aise pour décider si leurs démarches
en justice seraient justifiées par le Seigneur. Une lettre que
j'ai reçue d'un étudiant de l'université Brigham
Young il y a plus de quinze ans illustre ce malaise. Il écrivit :
« Comment
un « bon » saint des derniers jours (c'est à
dire, qui s'efforce honnêtement de vivre les commandements et
de mettre en pratique les Écritures dans sa vie quotidienne)
peut-il concilier des actions en justice avec les déclarations
dans le Nouveau Testament et les Doctrine et Alliances nous demandant
de pardonner à notre prochain et de ne pas le poursuivre en
justice ? » (Lettre à l'auteur, 22 juin 1975)
Après
avoir cité quelques exemples tirés de ses expériences
personnelles lors d'accidents de voiture ou de conflits entre
propriétaire et locataire, cet étudiant consciencieux
demanda s'il aurait dû oublier les torts subis ou bien faire
valoir ses droits, que ce soit dans son propre intérêt
ou pour empêcher un coupable de faire d'autres victimes. Il
conclut ainsi :
« Mon
sentiment est que les lois sont faites pour être un moyen
pacifique de réparer les torts sans avoir recours à la
violence, qu'elles sont destinées à être
utilisées pour nous protéger nous-mêmes et notre
prochain de pratiques contraires à la morale. Pourtant, quand
on en vient à poursuivre en justice un frère dans
l'Évangile (ou un enfant de notre Père céleste,
qu'il soit mormon ou non), je n'en suis plus aussi sûr. Si nous
n'utilisons pas les tribunaux, comment pouvons-nous arrêter
l'injustice, légalement parlant ? Pourtant Paul et la
révélation moderne ne nous disent-ils pas de ne
poursuivre personne en justice, et le sermon sur la montagne ne nous
dit-il pas de payer même le double si nous sommes poursuivis en
justice ? Je ne connais pas la réponse à cette question
et je ne sais pas si quelqu'un la connaît. » (Lettre
à l'auteur, 22 juin 1975)
De
par de mon expérience d'avocat, de professeur de droit,
d'éducateur et de juge, j'ai reçu de nombreuses
questions similaires : quand est-il opportun pour un saint des
derniers jours fidèle d'être engagé dans un
procès ? Je ne me suis jamais senti à la hauteur pour
répondre à de telles questions. Bien que dans certains
cas j'aie été capable de répondre à l'une
ou l'autre de ces questions, je n'ai jamais pu définir de
principes généraux pouvant servir de guide en fonction
des situations dans lesquelles de telles questions sont soulevées.
La
préparation de ce livre a été pour moi
l'occasion et une incitation à effectuer des recherches et à
considérer ce sujet dans un esprit de prière. La suite
de ce chapitre est une interprétation personnelle et mon
résumé de ce que les Écritures et les prophètes
modernes ont enseigné à ce propos et comment ces
enseignements s'appliquent de nos jours.
Deux
positions extrêmes
Dès
le départ, je rejette deux extrêmes.
1.
Certains ont estimé qu'un bon chrétien ne doit jamais
aller devant les tribunaux pour résoudre des conflits.
Quelques exemples suffiront pour démontrer que ce point de vue
extrême est irréaliste et même en désaccord
avec les Écritures elles-mêmes.
La
révélation moderne indique qu'une personne qui a tué,
volé, ou menti « sera livrée, et traitée
selon les lois du pays » (D&A 42:79, 84-86). Ces lois
sont, bien sûr, appliquées par les tribunaux civils.
La
« déclaration des croyances » de
l'Église, publiée en 1835, énonce : « Nous
croyons que les hommes doivent faire appel aux lois civiles pour le
redressement de tous leurs torts et griefs, des dommages infligés
à leur personne ou des atteintes à leur propriété
ou à leur réputation, lorsqu'il y a des lois pour les
protéger contre cela » (D&A 134:11). Bien sûr,
cette déclaration prévoit qu'il y aura des situations
dans lesquelles un saint des derniers jours utilisera la justice de
manière appropriée, puisque la manière
habituelle pour redresser les torts et les griefs est d'avoir recours
aux lois civiles.
De
plus, il y a de nombreuses circonstances où une personne ne
peut éviter d'être impliquée dans un procès.
La plupart du temps, les personnes qui ont été
attaquées en justice ont dû comparaître devant un
tribunal pour se défendre. Dans certains cas, une personne se
voit dans l'obligation d'intenter une action en justice car la seule
possibilité prévue par la loi pour obtenir gain de
cause, ce qui est souvent parfaitement justifié, est
l'application d'un arrêt, d'une ordonnance ou d'un jugement.
Comme autres exemples on peut citer les sursis avec mise à
l'épreuve, les décrets d'adoption ou de divorce, et les
ordonnances précisant les termes d'un contrat ou clarifiant un
titre de propriété. Les administrateurs publics, les
fidéicommissaires ou les responsables d'une société
ont des responsabilités fiduciaires qui les obligent parfois à
intenter un procès. Ces personnes n'ont pas la liberté
d'éviter le procès, même si elles sont
personnellement opposées à cette manière d'agir.
Ces
exemples ne donnent pas la liste complète de toutes les
situations dans lesquelles une personne peut être impliquée
dans un procès légitime, mais ils suffisent à
rejeter le point de vue extrême selon lequel un saint des
derniers jours n'est jamais justifié d'intenter un procès
en justice.
2.
À l’opposé, quelques saints des derniers jours
ont supposé que la religion permettait dans tous les cas
d'intenter un procès, adoptant ainsi la croyance populaire que
chaque mal a son remède prévu par la loi et applicable
en justice de façon légitime.
Cette
mentalité a créé des dépenses publiques
importantes. Au cours des quelques décennies passées,
tous ceux qui lisent les journaux ont vu augmenter le nombre de
comptes-rendus d'audience qui font état d'affaires qui peuvent
être considérés comme abusives ou frivoles. Une
fillette de neuf ans a poursuivi les fabricants de Crackerjack parce
que le jouet manquait dans la boîte qu'elle avait achetée.
Un fan de l'équipe de football américain des Chicago
Bears a traîné son équipe devant les tribunaux
pour publicité mensongère parce que les Bears perdaient
tous leurs matchs. Un amoureux déçu est allé en
justice parce que sa bien-aimée n'était pas venue au
rendez-vous. On pourrait dresser une liste interminable d'exemples
semblables.
Lors
d'une conférence générale récente, Boyd
K. Packer a cité un exemple moins extrême mais plus
répandu :
« La
justification nous entraîne à rejeter sur autrui la
responsabilité de nos fautes.
« Par
exemple, lorsqu'on recherche le profit financier, on peut se laisser
tenter par d'autres de mal évaluer, voire de ne pas tenir
compte des risques. Lorsque les choses tournent mal, et elles peuvent
mal tourner même dans les affaires bien gérées,
certains cherchent à rejeter la faute sur d'autres. Il leur
faut trouver quelqu'un qui paiera pour eux...
« Ils
ont peu de difficultés à trouver un avocat disposé
à jouer les grands prêtres et à faire endosser
leur responsabilité à quelqu'un d'autre. Ils intentent
un procès sans fondement, ou fondé sur quelques
détails, dans le but de forcer ceux qu'ils attaquent à
régler l'affaire, évitant ainsi le coût
exorbitant de leur défense.
« Il
n'y a rien de déshonorant à s'adresser à un
tribunal pour se faire rendre justice ou se faire protéger. En
revanche, je fais référence ici à ceux qui le
font pour se justifier et faire porter leur responsabilité par
autrui. » (L'Étoile, janvier 1988, p. 13)
Tout
le monde sait que nos tribunaux sont surchargés et que le
nombre des procès a augmenté ces dernières
années, à un taux beaucoup plus important que la
croissance de la population (voir Warren E. Burger, Isn't There a
Better Way ?, American Bar Association Journal, 68, mars 1982, p.
275). Les experts ne sont pas d'accord sur les causes de cette
augmentation. Un expert juridique a déclaré que « nous,
les Américains, sommes le peuple le plus procédurier au
monde ». Cet expert a inventé le terme hyperlexis
pour décrire notre situation actuelle (voir Bayles Manning,
Hyperlexis : Our National Disease, Northwestern University Law
Review, 71, 1977, p. 772). Un autre expert suggère au
contraire que la soi-disant explosion des procès peut être
simplement une conséquence naturelle de l'augmentation des
torts dans une société très industrialisée
et structurée (plus la population est dense, plus nous
risquons de nous bousculer), où la prise de conscience des
raisons de ces torts est plus importante dans une communauté
mieux éduquée, et où l'utilisation de la justice
pour harmoniser les relations est accrue dans une société
complexe (voir Marc Galanter, Reading the Landscape of Disputes, UCLA
Law Review, 31, 1983, p. 4-11).
Quel
que soit le bien-fondé de ces évaluations, il n'y a pas
de contestation sur le fait que l'utilisation accrue des tribunaux
civils pour résoudre les conflits privés est
excessivement coûteuse pour les parties adverses et le
contribuable. D'autres coûts plus difficiles à évaluer
mais tout aussi réels incluent l'impact sur la société
des millions d'actions des personnes cherchant à se protéger
d'un procès plutôt que de s'occuper au mieux de leur
patient, de leur partenaire, etc. Cette catégorie inclut les
praticiens qui abandonnent la médecine à cause du coût
des assurances contre l'erreur médicale ou qui, pour se
protéger, prescrivent des examens peu nécessaires mais
très onéreux. Cette catégorie inclut aussi les
employeurs qui ne peuvent pas se fier aux lettres de recommandation
qu'ils reçoivent parce que beaucoup de ceux qui les écrivent
se soucient, plutôt que d'émettre un jugement négatif
mais honnête sur un candidat, d'éviter les conséquences
juridiques que cela pourrait entraîner.
En
1984, dans son discours en tant que président de la Cour
Suprême, Warren E. Burger a résumé le
mécontentement officiel à propos du très grand
nombre de procès. Il a dépeint notre dépendance
actuelle « de la procédure contradictoire utilisée
comme moyen principal de résoudre les conflits »
comme étant « une erreur que nous devons
corriger ». Il a expliqué : « Pour
certains conflits, les procès seront le seul moyen efficace,
mais dans beaucoup de cas, les procès qui font appel à
la procédure contradictoire dégénèrent en
batailles sans pitié, comme dans les temps révolus.
Notre système est trop coûteux, trop pénible,
trop destructif, trop inefficace pour un peuple réellement
civilisé. » (American Bar Association Journal,
avril 1984, p. 66)
Comme
j'en parlerai plus loin, les règles religieuses et morales
limitent l'utilisation des tribunaux civils pour résoudre les
conflits qui peuvent être réglés d'une autre
manière.
En
résumé, à un extrême on prétend
qu'un bon saint des derniers jours ne devrait jamais être
engagé dans un procès. À l'autre extrême
on exclut toute limite d'ordre religieux en ce qui concerne les
procès. Ces deux points de vue extrêmes sont dans
l'erreur. Comme c'est souvent le cas, ce qui est correct se situe
quelque part entre les deux extrêmes. Mais où ?
Les
procès et les dirigeants de l'Église
Il
y a des enseignements scripturaires qui semblent interdire la
participation à tout procès. Une part de la confusion
résultant de ces Écritures provient du fait que l'on a
mal compris que certains de ces conseils étaient destinés
aux dirigeants de l'Église plutôt qu'aux membres
ordinaires et aux croyants. Les prophètes modernes ont
clarifié ce point, mais quelques membres consciencieux se sont
toujours considérés comme liés par des conseils
scripturaires qui ne leur étaient pas adressés.
Dans
le Sermon sur la Montagne, le Sauveur enseigna que nous ne devrions
pas résister au mal, mais que nous devrions tendre l'autre
joue : « Si un homme veut plaider contre toi, et
prendre ta tunique, laisse-lui encore ton manteau »
(Matthieu 5:39-40). James E. Talmage explique : « Ces
instructions s'adressaient surtout aux apôtres, qui seraient
appelés officiellement à se consacrer uniquement à
l'oeuvre du royaume. Dans leur ministère, il vaudrait mieux
qu'ils perdent des biens matériels ou soient persécutés
et maltraités individuellement par des oppresseurs corrompus
plutôt que l'oeuvre soit affaiblie et entravée par le
fait de résister et de se quereller. » (James E.
Talmage, Jésus le Christ, p. 287)
Bruce
R. McConkie confirme : « Pour les serviteurs du
Seigneur, il était plus important, dans les circonstances
sociales et politiques de l'époque, de souffrir des
persécutions plutôt que leur ministère soit
entravé ou arrêté par des procès...Rien
n'est aussi important que de proclamer la vérité et
d'œuvrer pour la bonne cause. Il ne fallait pas permettre aux
procédures tracassières de la justice d'empiéter
sur l'établissement du nouveau royaume. » (Bruce R.
McConkie, The Morlal Messiah, vol. 2, Salt Lake City, Deseret Book,
1980, p. 137, 141)
Le
Livre de Mormon donne une vision légèrement différente.
Quand le Sauveur s'adressa aux Néphites, ses enseignements
n'étaient pas réservés aux Douze qui avaient été
spécialement appelés (3 Néphi 11:22-12:1).
Ils faisaient partie d'un sermon adressé à la multitude
réunie au temple (3 Néphi 11:1 ; 12:1,
39-40). Un écrivain a suggéré que cette
multitude était un groupe privilégié
d'adorateurs au temple (John W. Welch, The Sermon at the Temple and
the Sermon on the Mount, Salt Lake City, Deseret Book, 1990), mais le
texte montre qu’il ne s'agissait pas seulement de dirigeants
spécialement appelés. En conséquence, ces
enseignements contre le recours aux procès ne peuvent pas être
considérés comme s'adressant uniquement aux dirigeants
de l'Église. Comme nous le verrons en détail
ultérieurement, le principe de la « non querelle »
et le commandement d'aimer et d'aider notre prochain rendent ces
enseignements du Livre de Mormon applicables par tous.
Le
caractère temporaire de certains conseils
À
certaines époques de l'Histoire, les prophètes de Dieu
ont conseillé aux fidèles de ne pas aller devant les
tribunaux civils pour régler leurs différends. Certains
ont considéré que ces conseils engageaient tous les
croyants en tous temps et en toutes circonstances. D'autres
considèrent ces conseils comme étant temporaires,
adaptés à une époque précise.
En
étudiant les commandements et les conseils que le Seigneur a
donnés par l'intermédiaire de ses prophètes à
différentes époques, je suis convaincu que les conseils
d'éviter tout procès étaient temporaires. Ces
conseils étaient la réponse à des situations
particulières dans lesquelles se trouvaient les croyants et le
fonctionnement de la justice civile au moment où ils furent
donnés, mais ils ont été remplacés
lorsque les circonstances ont changé (d'autres conseils
relatifs au règlement des querelles par l'intermédiaire
des tribunaux civils représentent des principes éternels,
applicables en tous temps et en tous lieux. Ils seront présentés
plus loin).
C'est
dans la première épître de Paul aux Corinthiens
que nous trouvons l'enseignement scripturaire le plus pertinent
mettant en garde les fidèles contre l'utilisation des
tribunaux pour régler leurs différends.
« Quelqu'un
de vous, lorsqu'il a un différend avec un autre, ose-t-il
plaider devant les injustes, et non devant les saints ?
« Ne
savez-vous pas que les saints jugeront le monde ? Et si c'est par
vous que le monde est jugé, êtes-vous indignes de rendre
les moindres jugements ?
« Ne
savez-vous pas que nous jugerons les anges ? Et nous ne jugerions
pas, à plus forte raison, les choses de cette vie ?
« Quand
vous avez des différends pour les choses de cette vie, ce sont
des gens dont l'Église ne fait aucun cas que vous prenez pour
juges !
« Je
le dis à votre honte. Ainsi, il n'y a parmi vous pas un seul
homme sage qui puisse prononcer entre ses frères.
« Mais
un frère plaide contre un frère, et cela devant les
infidèles !
« C'est
déjà certes un défaut chez vous que d'avoir des
procès les uns avec les autres. Pourquoi ne souffrez-vous pas
plutôt quelque injustice ? Pourquoi ne vous laissez-vous pas
plutôt dépouiller ? » (1 Corinthiens
6:1-7).
La
New English Bible (1970) traduit ainsi le premier et le dernier de
ces versets :
« Si
l'un de vous a un différend avec un autre, osera-t-il le mener
devant un tribunal païen plutôt que devant la communauté
du peuple de Dieu ?...
« En
vérité, vous êtes déjà tombés
en deçà de vos principes en allant en justice l'un
contre l'autre. Pourquoi ne souffrez-vous pas plutôt quelque
injustice ? Pourquoi ne vous laissez-vous pas plutôt voler ? »
En
conseillant aux saints de Corinthe de ne pas porter leurs querelles
devant les tribunaux païens, Paul explique que les saints, qui
se préparent à rendre au monde un jugement éternel,
devraient avoir parmi eux quelqu'un de suffisamment sage pour juger
leurs querelles.
Nous
comprendrions la raison de ce conseil et sa nature temporaire si nous
en savions davantage sur les tribunaux civils à Corinthe au
temps de Paul (je remercie le professeur John W. Welch de la J.
Reuben Clark Law School à Brigham Young University pour les
éclaircissements et les sources utilisées dans ce
paragraphe et le suivant). Si ces tribunaux suivaient le droit
romain, comme cela semble probable, alors une procédure
criminelle ne pouvait être initiée que si l'accusateur
prêtait serment (voir A. H. J. Greenidge, The Legal Procedure
of Cicero's Time, South Hackensack, New Jersey, Rothman Reprints,
1971, p. 259, 261-262, 273-274, 459, 470). Afin que son témoignage
soit recevable, un témoin devait aussi prêter serment.
Dans ces tribunaux, de tels serments pouvaient éventuellement
donner lieu à des sacrifices aux dieux païens. Dans le
meilleurs des cas, il fallait jurer par des dieux païens ou
autres, tels que l'empereur romain, ou leur offrir un sacrifice. En
conséquence, pour les adorateurs du seul vrai Dieu (Juifs ou
Chrétiens), les formalités requises pour participer à
des tribunaux païens relevaient de l'idolâtrie (Matthieu
5:33-37). Ceci est une raison suffisante pour que Paul donne le
conseil de ne pas aller en justice « devant les
infidèles » (1 Corinthiens 6:6).
Une
autre raison qui permette de comprendre le conseil de Paul figure
dans une directive comparable donnée par des dirigeants Juifs,
environ deux générations après les écrits
de Paul. Peu après la destruction du temple en 70 après
Jésus-Christ, quand l'autonomie de la justice des juifs fut
restreinte pendant une courte période par la loi romaine, il
fut enseigné aux Juifs fidèles de ne pas participer aux
tribunaux des Gentils. Un commentateur avisé a noté
deux raisons motivant cette directive. Le recours à un
tribunal Gentil était blasphématoire parce qu'il
équivalait à nier la Présence Divine et à
profaner le Nom Divin. Ainsi, un rabbi de la fin du premier siècle
aurait dit : « Celui qui quitte un juge d'Israël
et va devant un étranger a premièrement renié
Dieu et ensuite a renié la loi » (StB, III, 362,
cité dans The Anchor Bible, 1 Corinthians, commentaire
par William F. Orr et Jeams Arthur Walther, Garden City, New York,
Doubleday, 1976, p. 196). Utiliser un tribunal Gentil était
également déloyal parce que cela sapait les tribunaux
juifs, dont l'indépendance et l'activité étaient
essentielles pour l'autonomie du peuple juif (voir M. Elon, Jewish
Law Sources and Application, Israel Law Review, 2, 1967, p. 524-525 ;
voir aussi Welch, The Sermon at the Temple, p. 54-56).
Un
second exemple de conseils temporaires prononcés contre le
fait d'avoir recours à un tribunal civil vint des présidents
Brigham Young et de John Taylor au début de l'histoire de
l'Église, au fin fond des montagnes de l'Ouest.
La
plupart des saints des derniers jours connaissent les remarques très
critiques à propos des juristes émises par Brigham
Young durant cette période. Les juristes saints des derniers
jours, qui ont été choqués par ces commentaires,
ressentent mieux que d'autres qu'ils ne sont plus aussi appropriés
de nos jours.
Le
caractère temporaire des commentaires du président
Young est évident vu les circonstances dans lesquelles il les
prononça. Ses critiques sur les magistrats furent faites dans
le contexte de ses conseils aux saints des derniers jours de ne pas
porter leurs querelles devant les tribunaux civils.
Ces
conseils furent donnés dans des circonstances identiques à
celles du temps de l'apôtre Paul.
Pendant
pratiquement quarante-six ans d'activité, les tribunaux civils
du Territoire de l'Utah furent administrés par des juges, des
procureurs, et des avocats qui étaient en majorité
hostiles à l'Église et à ses membres. Dans ces
circonstances, comme l'apôtre Paul, les dirigeants de l'Église
conseillèrent aux saints de ne pas aller en justice « devant
les infidèles ».
Dans
un discours donné le 7 avril 1852, le président Young
dit : « Pour ceux qui portent le nom de saints, aller
dans un tribunal Gentil pour régler ses problèmes est
une abomination aux yeux du Tout-Puissant. » (Journal of
Discourses, vol. 6, p. 319)
En
1856, le président Young dénonça la perte de
temps que représentait le règlement des différends
dans les tribunaux civils. Il ordonna aux fidèles de « rester
éloignés des palais de justice ; aucun homme
respectable ne s'y rendra, à moins qu'il n'y aille en tant que
témoin, ou qu'il y soit forcé d'une manière ou
d'une autre. Il n'y a pas une seule personne juste dans cette
communauté, qui ait des problèmes qui ne puissent être
réglés mieux et de manière plus satisfaisante
que par les médiateurs, les tribunaux de l'évêque,
le grand conseil ou par les 12 arbitres (comme prévu par la
résolution n°4, p. 390 des Lois de l'Utah), sans avoir à
s'opposer l'un à l'autre dans les tribunaux, ce qui a pour
conséquence directe de détruire les meilleurs intérêts
de la communauté, et d'éloigner de nombreux hommes de
leurs devoirs de citoyens bons et travailleurs. » (Journal
of Discourses, vol. 3, p. 241, 238)
Entrant
dans le vif du sujet, frère Brigham devint encore plus
direct : « Le Seigneur aime-t-il votre conduite quand
vous vous traînez l'un l'autre devant les tribunaux des impies
? Quand vous recherchez les problèmes, les querelles, les
brouilles et les conflits ?... Il n'y a pas un homme ni une femme
dans cette maison, qu'il soit saint ou pécheur, Juif ou
Gentil, esclave ou libre, noir ou blanc, qui puisse croire cela un
seul instant. » (op. cit., p. 238-239)
Nous
pouvons comprendre les conseils du président Young seulement
quand nous connaissons les circonstances dans lesquelles ils furent
donnés. L'étude faisant autorité à ce
sujet conclut : « Pour les saints des derniers jours
du dix-neuvième siècle, les tribunaux civils, les
magistrats et la loi représentaient un système
inadéquat et souvent corrompu qui oeuvrait contre
l'établissement de Sion » (Edwin Brown Firmage et
Richard Collin Mangrum, Zion in the Courts, Urbana and Chicago,
University of Illinois Press, 1988, p. 373). L'utilisation des
tribunaux civils allait à l'encontre des intérêts
des saints. En effet, une part importante de leurs efforts pour
établir Sion comme alternative à l'Amérique
pluraliste consistait à établir leurs tribunaux
ecclésiastiques qui « contribuaient à
l'indépendance de l'Église vis à vis de
l'État. » (op. cit., p. 261)
Depuis
l'arrivée des pionniers jusqu'au début du XXe siècle,
les tribunaux de l'Église ont réglé les litiges
privés des membres en matière de « droit de
propriété, de ressources naturelles, de relations
familiales, d'arrangements contractuels, et de réclamations de
préjudice » (op. cit., p. 278 ; voir aussi p.
293-370). Pendant la plus grande partie de cette période, les
membres étaient passibles des commissions disciplinaires de
l'Église s'ils utilisaient les tribunaux civils dans ces
domaines où les tribunaux de l'Église étaient
considérés, par la loi de l'Église, comme étant
seuls compétents (op. cit., p. 264-271). Le rôle
dominant des tribunaux de l'Église était relativement
facile à maintenir, puisque la plupart des conflits durant
cette période avaient lieu entre membres d'une même
colonie où le dirigeant de l'Église était aussi
l'administrateur civil (voir James B. Allen et Glen M. Leonard, The
Story of the Latter-day Saints, Salt Lake City, Deseret Book, 1976,
p. 258-262)
Le
conseil d'éviter les tribunaux civils (« Gentils »)
fût renforcé par John Taylor, qui succéda à
Brigham Young en 1877 et qui fût président de l'Église
pendant les rudes persécutions des années 1880. Le
président Taylor accepta l'utilisation des tribunaux civils
pour régler les griefs avec des non membres de l'Église
(voir Journal of Discourses, vol. 20, p. 105), mais il mit fortement
l'accent sur l'importance d'utiliser les tribunaux de l'Église
pour régler les différends entre membres de l'Église.
Dans
un discours donné en 1878, le président Taylor expliqua
le devoir d'un saint des derniers jours fidèle impliqué
dans un conflit contre un autre saint des derniers jours. Il devait
d'abord aller trouver son adversaire et essayer de régler le
problème en privé. S'il échouait, il devait à
nouveau se rendre chez son adversaire, « en prenant avec
[lui] un autre frère ». Si cela ne marchait pas, il
devait informer les « Instructeurs ou les Prêtres »
du problème. Si cela échouait, une accusation pouvait
être déposée devant l'évêque et ses
conseillers. Si une des parties n'était pas satisfaite de leur
décision, elle pouvait faire appel au grand conseil. Si la
partie déboutée n'acceptait pas la décision de
ce tribunal, elle était « retranchée de
l'Église ». Ensuite, le membre lésé
pouvait en toute justice demander réparation par
l'intermédiaire d'un tribunal civil, puisque l'autre partie
n'était plus membre de l'Église (voir op. cit., p.
104-105)
Que
devait faire un membre fidèle si un autre membre le
poursuivait devant un tribunal civil ? Le président Taylor
donna cette directive : « Je vous dis ce que vous
devriez faire : quand un homme essaie de vous attaquer devant la
justice civile, vous devriez l'attaquer devant les tribunaux de
l'Église ; vous devriez le faire comparaître pour
avoir violé les lois de l'Église, pour être allé
en justice devant les impies, au lieu d'utiliser les moyens que Dieu
a révélés » (op. cit., p. 104). Le
président Taylor expliqua « qu'en tant que saints
de Dieu nous devrions être gouvernés par les lois [de
Dieu], et non par les lois du monde ». En conséquence,
il conseilla aux présidents de pieu que s'ils trouvaient un de
leurs membres « menant son frère en justice devant
les impies », ils devraient « le convoquer et
remettre en question sa qualité de membre » (op.
cit., p. 106).
Peu
après la création de l'État d'Utah en 1896, et
pendant la période de réconciliation entre l'Église
et les autorités fédérales qui suivit, les
dirigeants de l'Église s'éloignèrent de leur
point de vue selon lequel les membres qui utilisaient les tribunaux
civils pour régler leurs différends entre eux devaient
être soumis à la discipline de l'Église.
« L'acceptation graduelle du pluralisme politique
américain au lieu du concept mormon d'une Sion [indépendante]
marqua la fin du système des tribunaux ecclésiastiques
mormons. » (Firmage et Mangrum, Zion in the Courts, p.
371-372)
Au
cours de cette période, les dirigeants de l'Église ont
abandonné leur forte opposition à l'utilisation par
leurs membres des tribunaux civils, mais le rôle des tribunaux
de l'Église comme étant la méthode préférée
pour régler les conflits entre membres continua encore pendant
une génération.
En
1903, le président Joseph F. Smith et ses conseillers
déclarèrent : « Les tribunaux de
l'Église sont exclusivement ecclésiastiques. Ils se
prononcent sur les conflits entre membres de l'Église et sur
l'application de la discipline de l'Église. Les procès
entre membres sont désapprouvés, et il est considéré
comme mauvais qu'un frère aille en justice contre un autre
frère. Mais les tribunaux de l'Église ne peuvent que
disqualifier ou excommunier, ce qui est la sanction la plus grave. La
compétence des tribunaux civils est reconnue et leurs
décisions sont honorées et observées. »
(Messages of the First Presidency, comp. James R. Clark, vol. 4, Salt
Lake City, Bookcraft, 1970, p. 82)
Un
changement important survint en 1908, lorsqu'un comité du
conseil des douze apôtres recommanda « que les
tribunaux de l'Église ne soient pas utilisés comme
centres de recouvrement de dettes » (Committee Report,
cité dans Firmage et Mangrum, Zion in the Courts, p. 343).
Un
article datant de 1919 écrit par James E. Talmage, rappelle le
conseil toujours en vigueur indiquant que les conflits entre membres
devraient d'abord être réglés entre eux. Si cela
échouait, les membres en conflit devaient aller devant le
tribunal de l'évêque, puis devant le grand conseil, et
en dernier recours seulement, devant le conseil des douze apôtres.
L'article continue par ce qui semble être la dernière
déclaration en date de l'Église demandant à ses
membres de ne pas porter leurs différends devant les tribunaux
civils : « Les tribunaux de l'Église ne
prétendent en aucune manière s'opposer à la loi
civile ou à la remplacer ». Cependant l'article
continue : « Nous considérons qu'en matière
de différends entre frères, lorsque aucune infraction
spécifique à la loi civile n'est commise, et pour les
délits dits 'civils', en opposition aux délits
'criminels', il est tout aussi indigne aujourd'hui que cela l'était
à l'époque de Paul qu'un 'frère plaide contre un
frère' ; et nous considérons honteux qu'un
jugement juste ne puisse être rendu parmi nous (1 Corinthiens
6:5-7). » (Improvement Era, avril 1919, p. 680)
Lors
de la conférence générale d'avril 1923, Anthony
W. Ivins, de la Première Présidence, exprima pour la
première fois la position de l'Église à propos
des relations entre l'Église et l'État et entre leurs
lois respectives : « Soumettez-vous aux lois des
hommes pour ce qui relève du gouvernement civil, et aux lois
de Dieu pour ce qui est du royaume des cieux. »
(Improvement Era, vol.
26, p. 680)
Le
président Ivins dit qu'il n'existait pas de conflit entre la
loi civile et la loi ecclésiastique, si ce n'est ce qui
résulte de « l'ignorance ou d'une mauvaise
interprétation délibérée de l'une ou de
l'autre » (Improvement Era,
vol. 26, p. 682). Sa définition de la fonction des
tribunaux de l'Église incluait le règlement des
différends entre membres, mais il ne demandait ni ne
conseillait aux membres d'utiliser les tribunaux de l'Église
de préférence aux tribunaux civils, ou même de
s'efforcer de régler les conflits par la médiation de
l'Église avant d'attenter un procès. Le thème
principal de son discours était la différence entre les
méthodes coercitives de la loi civile et les méthodes
non contraignantes de la prêtrise (voir Improvement Era,
vol. 26, p. 685).
Il
conclut ainsi à l'adresse des membres et des dirigeants :
« Il est du devoir de chaque membre de l'Église
d'honorer la loi du pays et d'y obéir, et de soutenir ceux qui
sont choisis pour l'administrer, dans la mesure où ils le font
avec honnêteté et équité. La prêtrise
nous est conférée pour la progression et
l'administration de l'Église du Christ et ne peut être
légitimement utilisée à d'autres fins. »
(Improvement Era, vol.
26, p. 686)
La
déclaration du président Ivins marque la fin de
l'utilisation obligatoire ou conseillée des tribunaux de
l'Église pour résoudre les conflits entre membres.
Le
droit reconnu par l'Église à ses membres d'aller devant
la justice civile pour résoudre leurs conflits avec d'autres
membres sans craindre la discipline de l'Église ou sa
désapprobation est exprimé par Bruce R. McConkie dans
son commentaire du sixième chapitre de la première
épître de Paul aux Corinthiens : « Si
les saints vont en justice l'un contre l'autre, il peuvent choisir de
le faire dans le cadre de la juridiction de l'État ou de celle
de l'Église. Paul leur conseille ici de régler leurs
affaires par les tribunaux de l'Église ; son conseil est
bon et peut être suivi par les membres de l'Église
aujourd'hui. Evidemment, lorsque les querelles impliquent des non
membres, l'affaire doit être portée devant les tribunaux
civils (voir D&A 134:11). » (Bruce R. McConkie,
Doctrinal New Testament Commentary, vol. 2, Salt Lake City,
Bookcraft, 1970, p. 337)
En
résumé, certains conseils des Écritures et des
prophètes modernes contre tout recours aux tribunaux civils
sont temporaires. C'est le cas du conseil de Paul aux Corinthiens et
des conseils des présidents Young et Taylor aux saints des
derniers jours qui vivaient dans le Territoire d'Utah. À cause
de la levée de l'interdiction d'utiliser les tribunaux civils
(et de donner la préférence aux tribunaux de l'Église),
ce conseil des prophètes devint obsolète.
Aujourd'hui,
l'augmentation du nombre de membres de l'Église et leur
dispersion géographique fait que la plupart des querelles
concernent des membres demeurant dans des pieux différents.
Dans cette situation, le jugement d'un tribunal de l'évêque
ou d'un tribunal du grand conseil est impossible et déconseillé
car il n'existe pas de conseil local de l'Église qui ait
juridiction sur les différentes parties en conflit.
Est-ce
que la renonciation de l'Église à toute fonction dans
le jugement des conflits entre membres signifie qu'ils ne sont soumis
à aucune restriction d'ordre moral quant à
l'utilisation des tribunaux civils pour résoudre leurs
différends avec d'autres membres ? Bien sûr que non.
L'Église rétablie a toujours encouragé ses
membres à résoudre leurs conflits sans avoir recours
aux tribunaux civils. Le conseil des présidents Young et
Taylor à ce sujet est toujours en vigueur, même si les
procédures qu'ils ont recommandées (telles qu'utiliser
les instructeurs de la prêtrise d'Aaron de la paroisse) sont
tombées en désuétude. Les limites de ce conseil
sur le recours aux tribunaux civils sont présentées
ci-dessous.
Les
principes éternels régissant le recours aux tribunaux
civils
Bien
qu'il n'y ait pas d'interdiction absolue à ce que les membres
de l'Église de Jésus-Christ des saints des derniers
jours aillent en justice pour résoudre leurs conflits, même
entre membres, il existe des principes éternels qui
interdisent une telle démarche dans certains cas et qui, dans
d'autres cas, imposent des conditions strictes. Ceux qui veulent
intenter un procès devraient analyser leur projet à la
lumière de certains critères (fondés sur ces
principes) qui montreront s'ils doivent traiter leurs affaires
judiciaires à la manière du Seigneur ou selon les voies
du monde. Ces principes et ces critères se trouvent dans les
Écritures et dans les enseignements des prophètes
modernes.
1.
Pardonner
Le
premier critère est de savoir si l'accusateur peut pardonner à
son adversaire. Ce test s'impose au vu de ce que le Seigneur a dit :
« Et, lorsque vous êtes debout faisant votre prière,
si vous avez quelque chose contre quelqu'un, pardonnez, afin que
votre père qui est dans les cieux vous pardonne aussi vos
offenses. Mais si vous ne pardonnez pas, votre Père qui est
dans les cieux ne vous pardonnera pas non plus... » (Marc
11:25-26).
Dans
une révélation moderne, le Seigneur a commandé :
« Vous devez vous pardonner les uns aux autres... de vous
il est requis de pardonner à tous les hommes. Et vous devriez
dire en votre coeur : Que Dieu juge entre moi et toi, et te
récompense selon tes actes. » (D&A 64:9-11)
L'importance
de pardonner a été illustrée de façon
exemplaire. Deux ans après cette révélation, en
1833, les saints du Missouri furent chassés de leurs maisons
dans le comté de Jackson. Leurs possessions furent dispersées,
leur imprimerie fût détruite, et certains furent
fouettés et maltraités. Sans l'aide efficace de l'État
ou du gouvernement fédéral, ces victimes avaient deux
possibilités : la résistance armée ou la
soumission passive. C'est dans ce contexte que le Seigneur donna la
révélation de la section 98 des Doctrine et Alliances.
Après
avoir réconforté les saints, cette révélation
les instruisait sur l'importance de la loi civile et sur le fait de
rechercher des hommes bons et sages pour gérer les affaires
publiques. Elle les exhortait à « abandonner tout
mal » et déclarait que le Seigneur les châtierait
s'ils ne se détournaient pas de « leurs voies
perverses ». Par contre, elle promettait que s'ils
gardaient les commandements, le Seigneur détournerait d'eux
« toute colère et toute indignation »
(D&A 98:5-11, 20-22).
Dans
le choix qui leur était proposé, le Seigneur leur
conseilla de « renoncer à la guerre [et de]
proclamer la paix » (verset 16). Il donna ensuite ces
conseils spécifiques sur le comportement des saints à
l'égard de ceux qui les avaient maltraités : « Je
vous parle maintenant de vos familles : si les hommes vous
frappent une fois, et que vous le supportez patiemment et ne les
insultez pas ni ne cherchez à vous venger, vous serez
récompensés » (verset 23). De plus, si un
ennemi les frappait une deuxième et une troisième fois
et s'ils le supportaient patiemment et n'insultaient pas leur ennemi,
leur récompense serait bien plus grande (versets 25-26). Même
si l'ennemi ne se repentait pas de ses actions, ils devraient lui
pardonner trois fois (versets 41-43). Ensuite, si l'ennemi échappait
à la vengeance de Dieu, ils devaient « l'avertir
[au nom du Seigneur], afin qu'il ne [les] attaque plus ».
Ensuite, s'il persistait, le Seigneur dit, « je livrerai
votre ennemi entre vos mains ». Mais même à
ce moment-là, « si vous l'épargnez, vous
serez récompensés pour votre droiture »
(versets 28-30).
Ces
versets montrent comment exactement mettre en pratique le grand
enseignement du Sauveur : « Aimez vos ennemis,
bénissez ceux qui vous maudissent, faites du bien à
ceux qui vous haïssent, et priez pour ceux qui vous maltraitent
et qui vous persécutent » (Matthieu 5:44). Ces
versets enseignent que si nous supportons patiemment l'injustice et
la persécution, notre récompense sera grande. Dans les
versets suivants ce principe s'applique même au conflit armé
entre les nations ou les peuples. Dans ce cas, le Seigneur enseigne
au fidèle à tenter de faire la paix par trois fois et à
lui faire part de ces efforts, et à n'entrer en guerre contre
son adversaire que lorsque le Seigneur le lui ordonne. Ensuite, le
Seigneur promet : « Moi, le Seigneur, je combattrai
pour eux » (D&A 98:33-37).
Il
est nécessaire de rappeler que cette révélation
fut donnée après que de nombreux saints des derniers
jours furent chassés du comté de Jackson, au Missouri,
par des émeutiers armés. Elle fut donnée pour
guider un groupe de saints des derniers jours pour lesquels il n'y
avait aucun recours possible devant les tribunaux ou devant des
responsables politiques, et qui envisageaient la possibilité
de s'organiser pour combattre leurs ennemis. De même, ces
conseils de pardonner au malfaiteur, même dans des
circonstances aussi extrêmes, semblent toujours s'appliquer à
ceux qui envisagent d'avoir recours aux tribunaux civils pour
redresser des torts ou pour résoudre des conflits.
Boyd
K. Packer aborda ce sujet lors de la conférence générale
d'octobre 1987 :
« Si
vous avez de la rancoeur contre quelqu'un, si vous êtes
impliqué dans une controverse acerbe, 'Voici ce que dit
l'Écriture (et elle le dit au moins cinquante fois) –
L'homme ne frappera ni ne jugera ; car le jugement m'appartient,
dit le Seigneur, la vengeance m'appartient aussi, et je donnerai la
rétribution' (Mormon 8:20). Je vous dis donc : 'Laissez
tomber !' Si vous avez besoin d'un renfort spirituel,
demandez-le donc. C'est ce qu'on appelle la prière... Si vous
en voulez à quelqu'un pour ce qu'il a fait, ou ce qu'il n'a
pas fait, oubliez-le... C'est ce qu'on appelle le pardon. Le pardon
est un puissant remède spirituel. Accordez le pardon, ce baume
apaisant, à ceux qui vous ont offensé, vous vous
assurerez ainsi la guérison. » (L’Étoile,
janvier 1988, p. 13)
Le
président Gordon B. Hinckley a lui aussi donné un
conseil inspiré sur l'importance du pardon :
« Nous
en voyons le besoin dans les foyers, où les taupinières
d'incompréhension se transforment en montagnes de discorde.
Nous le voyons parmi nos voisins, où des différends
insignifiants mènent à une amertume éternelle.
Nous le voyons chez les associés en affaires qui se querellent
et refusent de trouver un compromis et de pardonner quand, dans la
plupart des cas, s'il avaient le désir de s'asseoir autour
d'une table et de se parler calmement, le problème pourrait
être résolu pour le bien de tous. Ils préfèrent
passer leur temps à nourrir leur rancune et à planifier
la vengeance...
« Y
a-t-il une vertu que nous ayons plus besoin d'appliquer de nos jours
que la vertu de pardonner et d'oublier ? Il y en a qui
considéreraient cela comme un signe de faiblesse. Est-ce le
cas ? J'admets qu'il ne faut ni force ni intelligence pour ruminer
dans la colère les torts subis, pour vivre toute sa vie dans
un esprit de vengeance, pour gaspiller ses capacités en
planifiant la vengeance. Il n'y a pas de paix à entretenir la
rancune. Il n'y a pas de bonheur en vivant pour le jour où
vous pourrez 'rendre la monnaie de la pièce'. »
(L'Étoile, novembre 1991, p. 3-6)
Un
des actes les plus nobles de l'âme humaine est celui de
pardonner. Cela peut être extrêmement difficile quand le
tort subi a été particulièrement cruel, mais la
guérison et la joie qui s'ensuivent sont merveilleuses.
Parmi
mes précieux objets-souvenirs, il y a deux lettres d'une femme
qui décrivent les effets de son pardon à son frère
aîné, qui abusa d'elle sexuellement quand elle était
enfant :
« Un
jour avant une conférence [régionale] (alors que je
souffrais des blessures causées par les sévices
sexuels), je parlai à mon mari de la colère que je
ressentais parfois et comment parfois j'aurais souhaité lui
rendre le mal en retour de la peine qu'il m'avait infligée.
J'avais essayé de lui pardonner, mais mon coeur n'était
pas encore totalement engagé dans le pardon.
« Le
dimanche matin, je me rendis à la conférence. Il me
sembla que vous étiez sur le point de terminer votre discours,
mais le Seigneur vous poussa à dire une chose de plus. Vous
dîtes que nous devions pardonner à ceux qui nous avaient
fait du mal. Quel témoignage je ressentis ! Je savais que
je devais pardonner et AIMER mon frère. Et je sais que je ne
peux le faire qu'avec l'aide du Seigneur, car sans lui, je ne suis
rien.
« Il
avait déjà payé le prix de ce péché
au jardin de Gethsémané. Je n'avais pas le droit de
retenir ce péché et de demander justice, alors je le
lui rendis de bonne grâce et me réjouis dans son amour
et sa miséricorde... Mon coeur est tellement rempli de joie,
de paix, de gratitude et d'amour ! Cette oeuvre n'est-elle pas
glorieuse ? Combien je l'aime ! Les mots ne peuvent exprimer mes
sentiments. » (Lettre à l'auteur, 23 mars 1989)
Je
répondis à sa lettre et une semaine plus tard j'en
recevais une deuxième où elle décrivait ce qui
se produisit après que son coeur eut changé :
« Le
jour où j'ai reçu votre lettre j'ai ressenti que ma
guérison était complète ». « J'étais
remplie de charité envers mon frère ». Le
jour suivant elle fut informée que son frère, qui était
un membre de l'Église peu pratiquant et qui vivait dans un
autre État, avait été hospitalisé suite à
un grave accident. Elle téléphona immédiatement
pour demander à un ami de donner une bénédiction
de la prêtrise à son frère. Dans cette
bénédiction il lui fut dit que sa soeur l'aimait. La
nuit suivante, alors qu'il était en soins intensifs, entre la
vie et la mort, elle prit conscience de la présence de
l'esprit de son frère chez elle et ressentit qu'il avait
conscience de l'horreur de ce qu'il lui avait fait subir à
elle et à d'autres. Elle ressentit le remords qu'il éprouvait
ainsi que son désir de repentir, et elle eut le sentiment
qu'elle pouvait communiquer avec lui. Le lendemain, il mourut. Elle
m'écrivit : « Je ressens la grande miséricorde
du Seigneur grâce à laquelle je me rends compte que [mon
frère] n'était pas assez fort pour mettre sa vie en
ordre ici-bas. Et j'implore la miséricorde pour que le prix
qu'il a à payer ne soit pas trop lourd... J'aime tant le
Seigneur. En tant que convertie, il m'est doux de sentir son amour.
Je ne pourrai jamais lui exprimer suffisamment ma gratitude. Je
m'émerveille de ses voies, de son amour et de sa
miséricorde. » (Lettre à l'auteur, 13 avril
1989)
Il
y a de la noblesse dans cet exemple. Il peut nous servir de modèle
à tous.
Avant
d'intenter un procès, les saints des derniers jours devraient
prendre en compte le commandement du Seigneur qui dit : « C'est
pourquoi, je vous dis que vous devez vous pardonner les uns aux
autres ; car celui qui ne pardonne pas à son frère
ses offenses est condamné devant le Seigneur, car c'est en lui
que reste le plus grand péché. Moi, le Seigneur, je
pardonne à qui je veux pardonner, mais de vous il est requis
de pardonner à tous les hommes. » (D&A 64:9-10)
Notons
que ce commandement fait référence au pardon et non au
conflit. Selon le mode de pensée du monde, la question que se
pose la partie lésée est, en règle générale,
de savoir si elle doit intenter un procès ou non. Selon les
voies du Seigneur, la question n'est pas celle-là, mais plutôt
de connaître ce que ressent la partie lésée
vis-à-vis de l'auteur des torts. Dans de nombreux cas, une
attitude et une volonté de pardonner empêcheront le
procès. Quelquefois, il n'en sera pas ainsi. Qu'il y ait
procès ou pas, le pardon est toujours nécessaire parce
qu'il est requis du croyant.
2.
Rechercher un règlement à l'amiable
Comme
nous l'avons déjà noté dans les citations
précédentes des présidents Young et Taylor,
avant que les saints des derniers jours n'aient recours à un
procès, ils ont pour devoir de rechercher un accord à
l'amiable entre eux personnellement ou avec l'aide d'un médiateur.
Ce devoir s'appuie sur les mêmes principes éternels que
ceux qui permettent de conseiller aux saints d'éviter le
conflit et la controverse.
Pourquoi
les saints devraient-ils chercher à éviter les procès
en réglant les problèmes préalablement ou même
en supportant des torts sans dédommagement ? À propos
de l'enseignement du Sauveur à ce sujet, Bruce R. McConkie
expliqua : « La querelle mène à
l'amertume et à l'étroitesse d'esprit ; ceux qui
s'affrontent se dessèchent spirituellement et mettent leur
salut en danger. Aux yeux du Seigneur il est tellement important
d'éviter ces maux qu'il attend de ses saints qu'ils endurent
les afflictions et les torts plutôt que de perdre leur paix
intérieure et leur sérénité à
cause des querelles. 'Celui qui a l'esprit de querelle n'est pas de
moi', a-t-il dit aux Néphites, 'mais il est du diable qui est
le père de la querelle, et il pousse le coeur des hommes à
lutter l'un contre l'autre avec colère' (3 Néphi
11:29). » (McConkie, Doctrinal New Testament Commentary,
vol. 1, p. 228)
Puisqu'un
procès implique presque toujours la querelle et que la
réconciliation et le pardon permettent de l'éviter, ces
enseignements sont une directive adressée aux saints des
derniers jours afin qu'ils évitent à tout prix un
procès, que ce soit avec des membres de l'Église ou
avec des non membres, et qu'ils utilisent tout autre moyen
raisonnable pour régler leurs différends.
Le
Sauveur a enseigné que nous devrions nous réconcilier
avec notre frère avant de faire une offrande sur l'autel, et
que nous devrions tendre l'autre joue quand on nous fait du tort
(Voir 3 Néphi 12:23-24, 39). Il a aussi enseigné que
nous devrions régler nos conflits en nous accordant avec notre
frère : « Si ton frère a péché,
va et reprends-le entre toi et lui seul. S'il t'écoute, tu as
gagné ton frère. » (Matthieu 18:15)
A
notre époque, le Seigneur a de nouveau commandé que son
peuple cherche à se réconcilier l'un avec l'autre :
« Si ton frère ou ta soeur t'offensent, tu les
prendras à part, et s'ils confessent, vous vous
réconcilierez. » (D&A 42:88)
Les
premiers dirigeants de l'Église rétablie ont prêté
une attention toute particulière à l'enseignement sur
la nécessité de régler les différends en
privé. Dans un discours donné en 1852, Brigham Young a
dit : « Je n'éprouve pas de sympathie pour les
hommes qui sont coupables de... querelles et qui vont devant les
tribunaux des Gentils ou de l'évêque pour régler
leurs différends. Il y a un meilleur moyen de les régler...
Quand il y a un différend, que les parties impliquées
se rencontrent dans un esprit d'humilité et disent, 'Frère
(ou soeur) je veux ce qui est juste ; oui, je préférerais
oublier mes intérêts au profit des vôtres !'...
Après cela, si vous ne pouvez trouver un arrangement, appelez
une tierce personne et réglez le problème. »
(Journal of Discourses vol. 6, p. 319)
Le
président Young donna encore ce conseil en 1871 :
« N'allez pas du tout en justice ; cela ne vous
apportera rien de bon et vous fera gaspiller votre argent... Si vous
avez des difficultés que vous ne pouvez régler par
vous-mêmes, ayez recours à un médiateur. »
(Journal of Discourses, vol. 14, p. 82, 84)
À
ce sujet, le conseil de Brigham Young est aussi pertinent et
d'actualité que la plus récente déclaration sur
l'administration judiciaire. Les experts de ce qui est maintenant
appelé « l'alternative pour résoudre les
différends » disent que le règlement à
l'amiable, l'arbitrage devant des spécialistes et
l'intervention d'un médiateur sont les moyens les plus
appropriés dans le cas de querelles entre personnes supposées
poursuivre leurs relations au-delà du conflit. Ceci comprend
les relations commerciales comme entre les fournisseurs et les
consommateurs de biens ou de services, les propriétaires et
leurs locataires, les copropriétaires, et même les
étudiants et l'établissement qu'ils fréquentent.
Le même principe s'applique évidemment aux membres de la
famille (même dans les cas de divorces où les enfants
sont impliqués) et aux membres de l'Église. Dans tous
ces cas, il est préférable de régler la querelle
à l'amiable, par la médiation ou l'arbitrage, plutôt
que par une procédure contradictoire.
Le
président John Taylor a lui aussi conseillé aux membres
de l'Église de régler les querelles à l'amiable
et de ne pas les porter devant les tribunaux de l'Église. Dans
un discours donné en 1877, il se plaignit que des « affaires
insignifiantes » (mettant en jeu moins de cinquante à
cent francs) étaient portées devant les grands
conseils. Il dit : « Le grand conseil préférerait
payer de sa poche le montant du litige plutôt que d'écouter
des absurdités. » (Journal of Discourses, vol. 19,
p. 53-54)
Le
président Joseph F. Smith a rappelé ce conseil en
1916 : « Réconciliez-vous. N'ayez pas recours
aux tribunaux de l'Église ni aux tribunaux civils en cas de
querelle. Réglez vous-mêmes vos ennuis et vos
difficultés ;... le seul moyen de régler un
conflit entre deux personnes est qu'elles se rencontrent et en
débattent. Les tribunaux ne peuvent pas régler les
différends entre mon frère et moi. »
(Conference Report, octobre 1916, p. 7-8)
Le
conseil de régler les différends à l'amiable,
sans avoir recours à la justice, est toujours en vigueur de
nos jours. Lors d'une conférence générale
récente, le président Hinckley a dit :
« Nous
vivons dans un monde où abondent les litiges, les conflits,
les poursuites et les contre-poursuites. Même là, les
pouvoirs de guérison peuvent être invoqués. Quand
j'étais jeune homme, j'ai travaillé avec Stephen L.
Richards, qui faisait alors partie du Collège des douze. Quand
il devint membre de la Première Présidence, il me
demanda de l'aider dans un cas très délicat, dont les
conséquences pouvaient être des plus graves. Après
l'avoir écouté sur cette affaire, je lui ai dit :
'Frère Richards, ce n'est pas de moi dont vous avez besoin,
c'est d'un avocat'. Il m'a dit : 'Mais je suis avocat. Je ne
veux pas traiter cette affaire en justice. Je veux la régler à
l'amiable'.
« Nous
avons travaillé dans ce sens et de merveilleux résultats
ont été obtenus. Une grosse somme d'argent a été
épargnée. Personne ne s'est senti embarrassé.
L'oeuvre a pu avancer sans fanfare ni scandale. Les blessures ont été
guéries. Le pouvoir de guérison du Maître, les
principes de l'Évangile de Jésus-Christ ont été
invoqués dans une situation difficile et délicate pour
régler ce qui aurait pu devenir une catastrophe.
« Il
n'est pas toujours facile de vivre selon ces principes quand notre
nature nous pousse à contre-attaquer...
« La
plupart d'entre nous n'est pas encore arrivé à ce
niveau de compassion, d'amour et de pardon. Ce n'est pas facile. Cela
exige une autodiscipline presque surhumaine. Mais en faisant des
efforts, nous découvrons qu'il y a une source de guérison,
un grand pouvoir de guérison en Christ, et que si nous voulons
être vraiment ses serviteurs, nous devons appliquer ce pouvoir
de guérison non seulement aux autres, mais aussi et surtout à
nous-mêmes. » (L’Étoile, janvier
1989, p. 51)
Pourquoi
nous est-il demandé si instamment de régler nos
différends plutôt que d'avoir recours à la
justice ?
Il
existe, bien sûr, des raisons pratiques à ce conseil.
Abraham Lincoln a dit : « Évitez les procès.
Persuadez vos voisins de trouver un compromis chaque fois que vous le
pouvez. Montrez-leur comment le soi-disant vainqueur est souvent le
vrai perdant - en honoraires, en frais, et en perte de temps. »
(cité dans Burger, Isn't There a Better Way ?, p. 275)
Roger
Fisher, professeur au Harvard Law School est d'accord sur ce point :
« Tout comme la guerre, les procès devraient être
évités. Pour le plaignant, tous les cas plaidés
s'avèrent être une erreur. À moins qu'un
plaignant ou les deux parties aient commis une faute, le cas aurait
pu être réglé et les deux parties s'en seraient
mieux sorties. Elles auraient pu régler leur différend
bien mieux qu'un tribunal. Dans le pire des cas, elles auraient pu
épargner et partager entre elles les honoraires
impressionnants revenant aux avocats. » (American Bar
Association Journal, vol. 69, septembre 1983, p. 1221)
Il
y a des raisons encore plus importantes, des raisons d'ordre
spirituel pour chercher à régler à l'amiable les
différends. Comme frère Packer l'observait dans un
discours récent de conférence, les procès
impliquent souvent un « long parcours plein d'amertume
entre frères pour des biens ou de l'argent ». Il a
donné cet avertissement : « Prenez garde de ne
pas devenir vous-même le bouc émissaire [dans le sens de
l'Ancien Testament] et de ne pas porter d'invisibles fardeaux
spirituels dans le désert. Bien plus graves que la perte
d'argent ou de biens matériels, les conséquences
spirituelles invisibles s'accumulent comme les intérêts
d'une dette dont, selon le plan éternel, il faudra
inévitablement s'acquitter un jour ». Son message
mettait l'accent sur la sagesse de ces plaignants qui ont trouvé
une solution à des procès parce qu'ils voyaient « que
l'avantage matériel qu'ils pouvaient obtenir ne valait pas la
dépense spirituelle. » (L’Étoile,
janvier 1988, p. 13)
Un
ami m'écrivit pour décrire la sanction spirituelle
qu'il ressentit alors qu'il était impliqué dans un
procès :
« En
tant que patriarche dans notre pieu je donnais une ou deux
bénédictions chaque semaine et comme tout patriarche,
j'essayais de rester digne et prêt. Je me joignis à une
action en justice contre un homme qui nous avait pris une somme
d'argent importante, par la fraude et le mensonge.
« Au
début, je me lançai dans cette action avec vigueur et
avec une juste indignation. Au bout d'environ trois semaines, je
remarquai que mes sentiments changeaient et qu'il m'était
difficile de me sentir bien dans ce que j'étais en train de
faire. Après six semaines, je dis à ma femme que je
voulais renoncer aux poursuites mais que je ne savais pas comment m'y
prendre pour ne pas créer de problèmes aux autres
personnes impliquées. Je lui dis également qu'il me
semblait que cela faisait longtemps que je n'avais pas donné
une bénédiction patriarcale.
« Après
dix semaines mes sentiments avaient tout à fait changé ;
j'avais commencé le procès avec conviction et désireux
de récupérer l'argent que j'avais perdu, et maintenant
je portais un fardeau de souffrance et de malheur dont j'avais besoin
de me décharger. Après une bonne discussion avec ma
femme, je signalai à notre avocat que j'abandonnais toute
accusation et que je renonçais à la poursuite. Suite à
cette décision, un sentiment de bien-être nous envahit
tous les deux et mes sentiments de souffrance et de malheur me
quittèrent immédiatement.
« Le
jour suivant, une jeune femme du pieu m'appela pour prendre un
rendez-vous pour une bénédiction patriarcale, et, alors
que je regardais mon agenda, je réalisai que la dernière
bénédiction que j'avais donnée remontait au
dimanche précédant la mise en marche de la poursuite
judiciaire. Pendant que je restais assis devant mon agenda, je reçus
dans mon coeur et dans mon esprit le témoignage personnel que
l'esprit de procès et l'esprit de la bénédiction
sont opposés. La bénédiction est l'esprit
d'amour et du libre arbitre. La poursuite judiciaire est l'esprit de
force et de contrainte. Je compris que personnellement, en tant que
patriarche de pieu, je ne pouvais donner de bénédictions
si ma vie était dominée par l'esprit de procès. »
(Lettre à l'auteur, 12 octobre 1988)
Pour
des raisons pratiques et spirituelles, un plaignant potentiel devrait
rechercher la possibilité d'un règlement à
l'amiable.
3.
Eliminer la vengeance
Un
des critères auquel un procès potentiel doit
satisfaire, pour ceux qui désirent agir selon les voies du
Seigneur, consiste à évaluer le mobile. Est-ce que le
procès en question est une tentative de bonne foi, nécessaire
pour régler un différend et obtenir justice, ou est-il
une tentative de vengeance contre un adversaire ?
Pour
un chrétien, la vengeance n'est jamais un bon mobile. Comme
l'apôtre Paul l'a écrit aux romains : « Ne
vous vengez point vous-mêmes, bien-aimés, mais laissez
agir la colère ; car il est écrit : À
moi la vengeance, à moi la rétribution, dit le
Seigneur » (Romains 12:19). Le Livre de Mormon donne le
même enseignement : « L'homme ne frappera ni ne
jugera ; car le jugement m'appartient, dit le Seigneur, la
vengeance m'appartient aussi, et je donnerai la rétribution. »
(Mormon 8:20)
Le
prophète Moroni décrivit les Néphites qu'il
guidait comme ayant « continuellement soif de sang et de
vengeance ». Ils étaient « sans
principe, et au-delà de tout sentiment ». Voyant
cela, il dit : « Je crains que l'Esprit du Seigneur
n'ait cessé de lutter avec eux. » (Moroni 8:5, 20,
4)
Le
désir de se tourner vers les tribunaux civils pour punir un
adversaire plutôt que pour que le plaignant obtienne
restitution est un mobile courant, mais indigne d'un saint des
derniers jours. Si le mobile est la vengeance, un saint des derniers
jours n'intentera pas un procès ni ne forcera quelqu'un
d'autre à faire de même.
4.
Protéger les autres
Alors
que la vengeance n'est pas un mobile acceptable, un autre mobile qui
peut justifier ou même obliger d'intenter un procès est
la protection des personnes qui ne sont pas directement impliquées
dans une affaire. Un critère pour justifier un procès
est de savoir si le plaignant agit principalement dans son propre
intérêt ou d'abord dans l'intérêt d'autrui.
Si
le plaignant a affaire à un récidiviste, sa
responsabilité envers d'éventuelles personnes peut
requérir une action préventive de la justice. Ce peut
être le cas de personnes qui se livrent à des agressions
sexuelles ou à l'escroquerie. Ce peut être aussi le cas
d'autres personnes qui trompent leurs patients ou leurs clients qui
ne se plaignent pas par crainte de la honte ou des dépenses
liées à la divulgation. Si cela peut nuire gravement à
d'autres, une victime ne doit pas prendre en compte que son intérêt
personnel ou son obligation de pardonner. Quelqu'un qui est en mesure
d'arrêter un éléphant solitaire avant qu'il ne
blesse les autres villageois a le devoir de le faire. Quelqu'un qui
est en mesure de mener une action judiciaire de nature préventive
ou corrective pour protéger d'éventuelles victimes peut
agir ainsi.
5.
Considération de l'effet d'un procès sur ceux qui sont
poursuivis
Le
fait de décider d'intenter un procès devrait toujours
être en accord avec le commandement du Sauveur qui dit :
« Tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour
vous, faites-le de même pour eux » (Matthieu 7:12).
La règle d'or dissuade rarement les gens d'intenter un procès,
néanmoins on devrait y penser.
Il
y a environ dix ans, alors que je travaillais à la Cour
Suprême d'Utah, je donnai un discours à l'université
Brigham Young sur « le règlement chrétien
des disputes ». Suite à ce discours, un étudiant
consciencieux m'écrivit une lettre suggérant les choses
qu'un saint des derniers jours devrait prendre en considération
avant d'avoir recours à un procès. En plus du règlement
à l'amiable et des autres principes déjà
présentés ici, il suggéra ce test :
« Cherchons-nous
un dédommagement par nécessité ou seulement par
convoitise ? Cherchons-nous notre bien-être ou celui de notre
famille, à qui nous le devons certainement, ou bien le luxe
grâce à l'erreur d'un autre ? (Mormon 9:28).
« Quelles
seront les conséquences de notre procès envers ceux qui
nous ont causé du tort ? Sommes-nous importants au point de
recevoir des dommages et intérêts en ruinant
financièrement et peut-être spirituellement dans un
climat d'amertume une autre personne et sa famille ? Et que dire si
la ruine de cette personne entraînait un destin similaire pour
ses employés et leurs familles ? Sommes-nous plus importants
qu'eux tous ? Le pardon repose sur le principe que nous tous, comme
le Christ, sommes prêts à donner notre propre vie pour
les autres. Ni les liens familiaux, ni le temps ne doivent limiter
l'amour que Dieu requiert de nous pour les autres. Il est pour tous
les hommes (Énos 1:12-18 ; 3 Néphi 5:13, 14 ;
Mormon 9:35-36). » (Lettre à l'auteur, 31 août
1983)
Le
jeune homme qui écrivit cette lettre avait vécu une
expérience personnelle à ce sujet. Il avait déjà
mis en pratique ce qu'il prêchait :
« Ce
sont des choses auxquelles j'ai souvent pensé. À
dix-sept ans, quand j'étais lycéen, je fus blessé
lors d'un match de football américain par un garçon qui
avait traversé la moitié du terrain en courant pour me
jeter à cinq mètres en dehors du terrain, après
que le match eut été terminé depuis trois
secondes. Neuf ans plus tard, j'appris par un autre garçon qui
était dans le même lycée que leur entraîneur
avait suggéré que celui qui me blesserait suffisamment
pour me sortir du terrain obtiendrait tout l'argent. Dans cette
équipe c'était une pratique courante...
« Il
m'est venu à l'esprit que je pouvais poursuivre en justice cet
entraîneur et peut-être aussi le service administratif
qui l'employait. Simplement, je ne crois pas que mes ambitions
sportives d'adolescent étaient aussi importantes que les
personnes que je pouvais détruire par vengeance. Si le lycée
était obligé de payer pour sa négligence, alors
chaque contribuable aurait dû payer aussi. Je ne suis pas aussi
important que cela.
« Certainement,
aucun d'entre nous n'est suffisamment important pour justifier la
destruction d'autres personnes. Il est requis de nous que nous
pardonnions (voir D&A 64:8-10). » (Lettre à
l'auteur, 31 août 1983)
Mettre
les intérêts des autres avant nos propres intérêts
est un test rigoureux. Cela est inhérent à
l'application de la loi de consécration, que le Seigneur
décrit comme « chacun cherchant l'intérêt
de son prochain et faisant tout en n'ayant en vue que la gloire de
Dieu » (D&A 82:19). C'est l'exemple même de
notre Seigneur et Sauveur, Jésus-Christ, qui s'offrit en
sacrifice pour nous tous.
Mettre
les intérêts des autres avant les siens est conforme aux
voies prescrites par le Seigneur et non à celles du monde. Ce
principe est requis par la notion du bien plutôt que par les
règles de la loi.
En
commençant son remarquable discours de remise des diplômes
à l'université d'Harvard en 1978, le romancier
Alexandre Soljenitsyne mit au défi les occidentaux de fonder
leur conduite sur des principes plus élevés que « la
lettre de la loi ». Il décrivit la « société
occidentale » telle qu'il la voyait : « Si
la loi donne raison à quelqu'un, il n'y a rien à
ajouter. Personne n'oserait émettre la possibilité
qu'il n'ait pas entièrement raison ni ne demanderait une
certaine retenue, ou renoncerait à ses droits, ou
encouragerait le sacrifice et le risque désintéressé :
cela semblerait tout simplement absurde. On ne voit pratiquement
jamais personne ne pas exiger la peine maximale pour son adversaire.
Tout le monde opère à l'extrême limite des
frontières fixées par la justice. »
(Alexandre Soljenitsyne, Commencement Adress, Harvard University
Gazette, 8 juin 1978)
Soljenitsyne
conclut par la description frappante de ce que je crois être un
principe éternel :
« J'ai
passé toute ma vie sous un régime communiste et je peux
vous dire qu'une société qui ne possède pas
d'échelle objective de valeurs dans le domaine juridique est
terrible. Par contre, une société sans autre échelle
que celle de la loi n'est pas non plus digne de l'homme. Une société
qui est basée sur la lettre de la loi et qui ne vise pas plus
haut, ne tire pratiquement pas avantage des extraordinaires
possibilités de l'homme. La lettre de la loi est trop froide
et trop impersonnelle pour avoir une influence bienfaisante sur la
société. Quand les relations humaines ne reposent que
sur des principes légaux, il se crée une atmosphère
de médiocrité morale, paralysant les aspirations plus
nobles de l'homme.
« Il
sera impossible de traverser les épreuves de ce siècle
menaçant avec pour seul soutien une structure basée sur
la loi. » (op. cit.)
6.
Penser à ses responsabilités avant de penser à
ses droits
Au
lieu de ne penser qu'à nous-mêmes, si nous
réfléchissions aux conséquences de nos actes
envers les autres, nous envisagerions nos décisions en terme
de responsabilités plutôt que de droits. Le 21 février
1990, Vaclav Havel, président de la République
Tchécoslovaque a introduit cette vérité dans son
discours à la session commune du Congrès des
États-Unis. Il parla des changements philosophiques qui
devront avoir lieu dans le monde occidental si nous voulons atteindre
nos objectifs de paix et de prospérité. Il rappela que
la triste expérience vécue par les Tchèques ces
cinquante dernières années contenait une leçon
qu'ils avaient à offrir à l'ouest :
« Le
salut de ce monde n'est pas ailleurs que dans le cœur de
l'homme, dans sa capacité à réfléchir,
dans sa douceur et son sens de la responsabilité.
« Sans
une révolution complète dans le domaine de la
conscience humaine, rien ne changera en bien sur notre globe, et la
catastrophe inévitable vers laquelle ce monde se dirige sera
écologique, sociale, démographique ou un effondrement
général de la civilisation...
« Que
les intérêts soient personnels, égoïstes,
étatiques, nationaux, regroupés, et même les
intérêts des entreprises, ils l'emportent toujours de
loin sur les intérêts de la planète et les
intérêts véritablement communs. Nous sommes
toujours sous l'emprise de la croyance destructrice et vaine que
l'homme est le summum de la création, pas seulement une
partie, et qu'à partir de là tout est permis...
« En
d'autres termes, nous ne savons toujours pas comment faire passer la
moralité avant la politique, la science et l'économie.
Nous sommes toujours incapables de comprendre que la seule origine
véritable de toute action, si elle est morale, est le sens des
responsabilités, que ce soit envers quelque chose de plus
élevé que ma famille, mon pays, mon entreprise, mon
succès personnel. La responsabilité envers « l'Être
suprême » auprès duquel toutes nos actions
sont enregistrées de manière indélébile
et par qui uniquement elles seront jugées correctement ».
Le
plaidoyer éloquent du président Havel pour la
responsabilité n'est que rarement évoqué par la
classe politique américaine. En tant que peuple, nous nous
préoccupons des droits, droits constitutionnels, droits
civils, droits légaux. Mais le financement et l'application
des droits dépendent entièrement de l'acceptation et de
la prise de responsabilité individuelle et collective. Comme
le président Havel le démontre, c'est seulement en
recherchant quelque chose de plus élevé que l'intérêt
personnel ou les exigences de la loi que nous pouvons être
persuadés d'appliquer ces responsabilités.
Les
responsabilités sont plus proches des cieux que ne le sont les
droits parce qu'elles représentent ce que nous donnons, alors
que les droits représentent ce que nous voulons obtenir (voir
Dallin H. Oaks, Rights and Responsabilities, Mercer Law Review, 36,
1985, p. 427-442). Les voies du Seigneur mettent l'accent sur les
responsabilités ; celles du monde sur les droits. L'un
n'exclut pas l'autre, mais notre choix détermine le résultat
dans de nombreux cas.
En
résumé, un bon saint des derniers jours peut participer
à un procès, mais il ne le fera qu'après avoir
considéré ses responsabilités personnelles (et
pas seulement ses droits) : en pratiquant le pardon, en
recherchant le règlement à l'amiable, en évitant
la vengeance, et en tenant compte de l'effet du procès en
question sur les autres.
CHAPITRE
7 : LA CRITIQUE
Les
voies du Seigneur diffèrent de celles du monde en ce qui
concerne un autre sujet, celui de la critique. Certains saints des
derniers jours ne comprennent pas cette différence qui
implique une interaction complexe entre, d'un côté, le
libre arbitre et la liberté, et de l'autre, la charité
et l'indulgence. La différence entre les voies du Seigneur et
celles du monde est très nette, et l'incompréhension du
conseil adressé aux membres de l'Église de s'abstenir
de critiquer ses dirigeants est des plus évidentes.
Le
mot critique a plusieurs significations. L'une d'entre elles est
« l'examen d'un principe, d'un fait, en vue de porter sur
lui un jugement d'appréciation » (Le Petit Robert,
1985). Cette sorte de critique est inhérente à
l'exercice du libre arbitre et de la liberté. Dans le domaine
politique, l'évaluation critique accompagne inévitablement
tout exercice pertinent de la liberté d'expression et de la
liberté de la presse. En dehors de la politique, nous pouvons
nous attendre à une évaluation critique de tout ce qui
est mis sur la place publique. Les critiques littéraires et
musicaux, les journalistes sportifs, les spécialistes, les
analystes boursiers, et ceux qui testent les produits et les services
doivent être libres d'exercer leurs facultés critiques
et d'en informer le public. Cette sorte de critique touche
généralement des sujets brûlants, et elle est
habituellement constructive. La critique joue un rôle approprié
dans la relation des saints avec les programmes et les dirigeants de
l'Église, bien que, comme précisé plus loin,
quand elle est appliquée aux serviteurs du Seigneur et à
l'oeuvre du Seigneur elle devrait être émise à la
manière du Seigneur.
Une
autre signification du mot critique, tel que traité dans ce
chapitre, est la « tendance de l'esprit à émettre
des jugements sévères, défavorables... Ce qui
fait ressortir... les défauts de quelque chose »
(op. cit.) Cette sorte de critique est dirigée la plupart du
temps contre des individus et elle est habituellement destructrice.
Cette critique envahit notre société. Le président
Gordon B. Hinckley a dit : « Nous vivons dans une
société qui se nourrit de critiques. Les journalistes
et les commentateurs vivent de la critique et l'on en trouve trop
parmi nos membres. Il est facile de trouver des défauts ;
il faut savoir se discipliner pour y résister. »
(L'Étoile, octobre 1982, p. 96)
La
critique et la médisance
La
critique partisane et la médisance ne sont évidemment
pas dignes d'un chrétien. L'apôtre Paul a dit :
« Que toute amertume, toute animosité, toute
colère, toute clameur, toute calomnie, et toute espèce
de méchanceté, disparaissent du milieu de vous »
(Éphésiens 4:31). Il conseilla aux saints de mettre de
côté « toute malice, toute ruse, la
dissimulation, l'envie, et toute médisance. »
(1 Pierre 2:1)
Ces
commandements sont réitérés dans la révélation
moderne : « ...voir qu'il n'y ait pas d'iniquité
dans l'Église, ni de dureté réciproque, ni de
mensonge, ni de calomnie » (D&A 20:54). « Cessez
de vous critiquer les uns les autres » (D&A 88:124).
« Cessez de dire du mal les uns des autres. »
(D&A 136:23)
Dans
le Tabernacle de Salt Lake City en 1879, George Q. Cannon se référa
à ces principes scripturaires en donnant cette instruction
spécifique : « Jaser, médire, calomnier
et dire du mal l'un de l'autre, de telles choses sont-elles correctes
pour les saints ? Elles devraient être bannies de notre société
et de nos foyers. Nos enfants devraient être mieux enseignés.
Quand ils disent du mal de quelqu'un, ils devraient être
interrompus et on devrait leur enseigner que s'ils ne peuvent pas
dire quelque chose de bien sur leurs semblables, il vaut mieux ne
rien dire du tout » (Journal of Discourses, vol. 20, p.
290). George Albert Smith fit la distinction entre les deux types de
critiques présentés au début de ce chapitre :
« Il y a deux sortes de critiques. Si nous critiquons de
manière constructive sous l'influence de l'Esprit du Seigneur,
nous pouvons influencer les choses de façon positive et
appropriée. Mais si nous avons la tendance à chercher
les défauts, si nous montrons du doigt la faiblesse et les
échecs des autres d'une manière destructrice, cela
n'est pas le résultat de la compagnie de l'Esprit de notre
Père céleste et est néfaste. »
(Conference Report, octobre 1934, p. 50)
Plus
récemment le président Hinckley a fait la même
distinction et a donné le même conseil :
« Je
ne demande pas que toutes les critiques soient réduites au
silence. La progression vient en corrigeant. La force vient du
repentir. L'homme qui reconnaît ses erreurs lorsqu'elles sont
montrées par d'autres et qui change agit avec sagesse.
« Ce
que je suggère est que chacun de nous se détourne du
négativisme qui imprègne tant notre société
et recherche le bien chez ceux que nous côtoyons, que nous
parlions des vertus des autres plus que nous ne parlons de leurs
fautes. » (Ensign, avril 1986, p. 4, 6)
Marvin
J. Ashton a appliqué ce principe aux groupes aussi bien qu'aux
individus quand il a dit : « Aucune religion, aucun
groupe ou individu ne peut prospérer longtemps sur le
fondement de la critique. » (Marvin J. Ashton, Be of Good
Cheer, Salt Lake City, Deseret Book, 1987, p. 9)
Ces
commandements et ce conseil sont donnés pour une bonne raison.
La raison principale est de préserver le bien-être
spirituel de celui qui voudrait critiquer plutôt que de
protéger la ou les personnes qui seraient l'objet de la
critique. L'apôtre Paul a conseillé aux saints :
« N'attristez pas le Saint-Esprit de Dieu »
(Éphésiens 4:30) en disant du mal. Au sujet de ceux qui
critiquent, Brigham Young a dit : « L'Esprit de Dieu
n'a pas de place dans [de telles] personnes » (Journal of
Discourses, vol. 8, p. 13). Nous perdrons l'Esprit du Seigneur si
notre attitude et nos actions reposent sur la critique.
Quand
la critique est justifiée
Le
conseil d'éviter de chercher les défauts chez les
autres et d'éviter la critique d'autrui s'applique-t-il
seulement aux fausses allégations ? Certainement pas.
Puisque
certaines critiques sont fondées sur des réalités,
le conseil de s'abstenir de critiquer et de médire revient,
selon certains, à altérer la vérité. Mais
ce n'est pas le cas. S'empêcher de critiquer (même si la
critique est justifiée) laisse la vérité
intacte. Un tel conseil implique simplement qu'il y a des
circonstances où nous ne devrions pas diffuser, encore moins
claironner, ce que nous considérons être la vérité
concernant d'autres personnes. Comme l'Ecclésiaste
l'enseigna : « Il y a un temps pour tout, un temps
pour toute chose sous les cieux ». En particulier, il y a
« un temps pour se taire, et un temps pour parler »
(Ecclésiaste 3:1, 7).
Le
conseil de s'abstenir de certaines critiques est fondé sur le
même principe que l'apôtre Paul appliqua aux saints de
Corinthe en leur conseillant de s'abstenir de manger des viandes
offertes en sacrifice aux idoles. En fait, il enseigna qu'une idole
n'est rien. Mais puisque certains sont faibles dans la foi et
pourraient se méprendre, ceux qui ont la connaissance
devraient faire attention que leur liberté [connaissance] « ne
devienne une pierre d'achoppement pour les faibles »
(1 Corinthiens 8:9). Krister Stendahl, théologien
protestant, conclut : « L'essentiel de la pensée
de Paul est que l'intégrité n'a pas de valeur par
elle-même. » (Krister Stendahl, Paul Among Jews and
Gentiles and Other Essays, Philadelphia Fortress, 1976, p. 611)
La
question la plus importante est de savoir comment nous utilisons la
vérité. Quand il traita de ce sujet dans son épître
aux Romains, Paul dit : « Mais si, pour un aliment,
ton frère est attristé, tu ne marches plus selon
l'amour ; ne cause pas, par ton aliment, la perte de celui pour
lequel Christ est mort » (Romains 14:15). Les chrétiens
qui se soucient des autres font attention à leur façon
de manier la vérité. Une telle attention n'altère
pas la vérité, elle l'ennoblit.
La
vérité existe assurément en tant qu'absolu, mais
notre utilisation de la vérité devrait être
guidée par d'autres valeurs. Par exemple, il n'est pas bien
d'exercer un chantage auprès de quelqu'un, même si les
faits le concernant sont vrais. Il est interdit aux médecins,
aux avocats et à d'autres professionnels de révéler
des informations confidentielles, même si elles sont vraies. Il
n'est pas bien non plus de faire un exposé des faits dans le
but de nuire, même si ces faits sont réels.
Celui
qui se concentre sur les fautes commises par un autre, quand bien
même elles seraient réelles, le détruit. Les
vertus de la patience, de la bonté fraternelle, du respect
mutuel, de la loyauté, des bonnes manières reposent
toutes, à un degré ou à un autre, sur le
principe que même si quelque chose est vrai, nous ne sommes pas
forcément justifiés de le communiquer à
n'importe qui et à n'importe quel moment.
De
même que l'Évangile de Jésus-Christ prévoit
que les exigences de la justice doivent être supplantées
par l'application de la miséricorde (Alma 42), l'utilisation
de la vérité doit être motivée par l'amour
du prochain. Comme Paul l'enseigna aux Éphésiens, nous
croîtrons dans le Christ en « professant la vérité
dans l'amour » (Éphésiens 4:15, version du
roi Jacques).
Dans
un message intitulé « La vérité –
et plus », Russell M. Nelson mit en lumière la
différence entre le chirurgien résolu qui annonce
froidement la vérité à propos d'une maladie en
phase terminale et le chirurgien compatissant qui présente les
choses avec l'amour et les encouragements qui aident le patient et sa
famille à supporter la vérité. La vérité
est puissante et absolue en elle-même, mais sa divulgation
devrait normalement être guidée par certains principes.
« Si ce n'est pas le cas », observe frère
Nelson, « l'épée de la vérité,
tranchante et acérée comme le scalpel du chirurgien,
peut ne pas être gouvernée par la droiture et la
miséricorde, et être mal utilisée, sans égard,
afin d'embarrasser, de rabaisser ou de tromper les autres... En fait,
dans certains cas, le compagnon miséricordieux de la vérité
est le silence. Il vaut mieux laisser quelques vérités
non dites. » (Ensign, janvier 1986, p. 70-71)
Un
membre de l'Église m'écrivit pour décrire ce
qu'il appelait « l'angoisse de celui qui commet l'erreur
d'émettre une critique honnête ». Il dit :
« Plus gravement, cela blesse à la fois le locuteur
et l'accusé ». Cet homme, qui avait dit du mal de
son président de pieu, exprima son regret « d'avoir
été l'instrument d'une telle douleur ». Il
conclut : « Parfois, le silence est de loin une bien
meilleure vertu que ne l'est la pure vérité. »
(Lettre à l'auteur, 19 février 1987)
Il
est également nécessaire de fixer des limites à
la vérité en vue de respecter le principe de l'unité.
Celui qui se concentre sur les fautes des autres suscite des
dissensions et des divisions parmi les saints qui forment le corps du
Christ. La dispute déplaît au Seigneur et éloigne
son Esprit.
S'abstenir
de dire toute la vérité ne doit pas servir de prétexte
pour justifier le mensonge. Les principes de l'amour, de l'unité,
de la droiture et de la miséricorde ne tolèrent pas la
tromperie. Le Seigneur a commandé : « Tu ne
porteras pas de faux témoignage » (Exode 20:16), et
il n'a pas abrogé ce commandement. Quand la vérité
doit tenir compte des contraintes imposées par d'autres
vertus, le résultat n'est pas la tromperie mais le silence
temporaire. Comme les Écritures le disent, il y a « un
temps pour se taire, et un temps pour parler »
(Ecclésiaste 3:7).
De
même, le conseil d'éviter la critique destructrice
d'autrui ne signifie pas que les saints des derniers jours doivent
être résignés ou indifférents aux
politiques imparfaites, aux pratiques inappropriées, et à
la conduite arbitraire des organisations privées ou
gouvernementales dans lesquelles ils ont un intérêt.
Comme il ressort des enseignements des présidents Smith et
Hinckley cités plus haut, notre philosophie religieuse ne fait
pas obstacle à la critique constructive dans de telles
situations. Le message de l'Évangile lui-même est une
critique constructive de tout ce qui est misérable ou sordide
dans notre société. Mais les chrétiens, à
qui il est commandé d'être charitables, devraient
professer la vérité dans l'amour (voir Éphésiens
4:15) et s'abstenir d'attaques personnelles et de dénonciations
vigoureuses. Nos communications publiques, même celles qui
dénoncent les faiblesses, devraient être raisonnées
dans leur contenu et positives dans leur esprit.
La
critique des dirigeants de l'Église
Le
commandement d'éviter de critiquer toute chose et de médire
s'applique-t-il à la critique des dirigeants de l'Église
? La réponse est oui. Joseph Smith, le prophète, a
averti : « Il y a un principe éternel qui a
existé avec Dieu, depuis toute éternité, que
l'homme qui s'élève pour condamner les autres, trouvant
des fautes dans l'Église, disant qu'ils sont sur le mauvais
chemin alors que lui-même est juste, sachez alors assurément
que cet homme est sur la grand-route de l'apostasie et que, s'il ne
se repent pas, il apostasiera, comme Dieu vit. » (The
Words of Joseph Smith, comp. et éd. Andrew W. Ehat et Lyndon
W. Cooks, Provo, Brigham Young University Religions Studies Center,
1990, p. 413)
Jude
a mis en garde ceux qui « méprisent l'autorité
et injurient les gloires » et qui « parlent
d'une manière injurieuse de ce qu'ils ignorent ».
Il faisait référence à « toutes les
paroles injurieuses qu'ont proférées contre [le
Seigneur] des pécheurs impies », et les a appelés
« des gens qui murmurent, qui se plaignent de leur sort,
qui marchent selon leurs convoitises » (Jude 1:8, 10,
15-16). Le président David O. McKay a dit ceci à propos
de ce qu'il appelait « les gens qui murmurent” et
les « gens qui critiquent » :
« 'Ne
parlez pas contre les autorités. Qu'est-ce que cela signifie ?
Ne soyez pas une personne qui murmure ; voilà ce que cela
signifie. C'est une des choses les plus venimeuses qui puisse être
introduite dans le foyer d'un saint des derniers jours : les
murmures contre les présidents de pieu, les membres du grand
conseil, les superintendants de l'Ecole du Dimanche, [etc.]... Il
vaut mieux cesser de murmurer et édifier. Souvenez-vous qu'un
des pires moyens de mettre à bas un individu est la calomnie.
Elle est l'une des armes les plus venimeuses que le malin utilise. La
médisance nous met au rang des malfaiteurs plutôt que
des bienfaiteurs. » (Improvement Era, 1953, p. 143)
Dans
nos relations avec tous les dirigeants de l'Église – locaux
ou généraux, hommes ou femmes – nous
devrions suivre le conseil de l'apôtre Paul : « Ne
réprimande pas rudement le vieillard, mais exhorte-le comme un
père. » (1 Timothée 5:1)
Ces
commandements et ce conseil contre la critique des dirigeants de
l'Église ne sont pas enseignés pour donner une immunité
ou protéger les dirigeants. Les dirigeants que je connais sont
des gens solides. Les dirigeants locaux mènent leurs affaires
dans un monde plein de critiques et les officiers généraux
ont mené leurs affaires avec succès dans ce monde avant
qu'ils ne soient appelés à leur ministère. Ils
n'ont pas besoin de protection ; ils ne cherchent pas à
avoir l'immunité contre la critique - constructive ou
destructrice. Ils cherchent seulement à accomplir ce qu'ils
ont compris comme étant les responsabilités de leur
ministère, à l'égard du Seigneur et de son
peuple.
Trois
expériences citées dans l'Ancien Testament expliquent
pourquoi les enfants de Dieu devraient s'abstenir de critiquer ceux
que le Seigneur a appelés.
Il
fût un temps où le peuple d'Israël tout entier
devint insatisfait et « murmura dans le désert
contre Moïse et Aaron... Que sommes-nous pour que vous murmuriez
contre nous ? » leur demanda Moïse. « Le
Seigneur a entendu les murmures que vous avez proférés
contre lui ; car que sommes-nous ? Ce n'est pas contre nous que
sont vos murmures, c'est contre l'Éternel. » (Exode
16:2, 7-8)
De
même, quand les enfants d'Israël ignorèrent les
avertissements inspirés du prophète Samuel et lui
demandèrent d'oindre un roi pour les gouverner, le Seigneur
conseilla au prophète de faire comme ils le demandaient, et
expliqua : « Ce n'est pas toi qu'ils rejettent, c'est
moi qu'ils rejettent » (1 Samuel 8:7). Le méchant
roi Saül poursuivait sans raison le jeune guerrier David et
cherchait à le tuer. Pendant que le roi Saül dormait au
milieu de ses troupes, David et un de ses soldats rampèrent
silencieusement jusqu'à lui. Déclarant que Dieu l'avait
livré entre leurs mains, le compagnon de David était
sur le point de tuer Saül avec sa lance. « Ne le
détruis pas ! » ordonna David. « Car
qui pourrait impunément porter la main sur l'oint de l'Éternel
? » (1 Samuel 26:9). Dans ces trois exemples, la
Bible enseigne que murmurer, rejeter ou agir contre les serviteurs du
Seigneur équivaut à faire la même chose contre le
Seigneur lui-même. Comment pourrait-il en être autrement
? Le Seigneur agit par l'intermédiaire de ses serviteurs.
C'est le plan qu'il a établi pour préserver notre libre
arbitre dans la condition mortelle. Ses serviteurs ne sont pas
parfaits, ce qui est une autre conséquence de la condition
mortelle. Mais si nous agissons à leur encontre, nous
travaillons contre le Seigneur et son oeuvre et nous serons bientôt
privés de la compagnie de son Esprit.
On
trouve d'autres enseignements semblables dans les Écritures
anciennes et modernes. Le prophète Ésaïe a dénoncé
ceux qui « considèrent un homme comme un offenseur
pour un mot, ceux qui tendent un piège à celui qui
réprimande à la porte » (Ésaïe
29:21 ; voir aussi 2 Néphi 27:32 ; ceux qui
« réprimandent à la porte »
étaient, du temps d'Ésaïe, les dirigeants
religieux).
La
révélation moderne des Doctrine et Alliances soulève
le même point :
« Maudits
sont ceux qui lèveront le talon contre mes oints, dit le
Seigneur, et crient qu'ils ont péché, alors qu'ils
n'ont pas péché devant moi, dit le Seigneur, mais ont
fait ce qui était convenable à mes yeux et que je leur
avais commandé.
« Mais
ceux qui crient : Transgression ! le font parce qu'ils sont
serviteurs du péché et sont eux-mêmes les enfants
de la désobéissance. Et ceux qui jugent faussement
contre mes serviteurs, afin de les amener dans la servitude et la
mort : Malheur à eux ! Parce qu'ils ont offensé
mes petits enfants, ils seront retranchés des ordonnances de
ma maison.
« Leur
panier ne sera pas rempli, leurs maisons et leurs granges périront,
et ils seront eux-mêmes méprisés par ceux qui les
ont flattés. Et ils n'auront aucun droit à la prêtrise,
ni leur postérité après eux, de génération
en génération. Il aurait mieux valu pour eux qu'une
meule de moulin eût été pendue à leur cou
et qu'ils eussent été noyés dans les profondeurs
de la mer. » (D&A 121:16-22)
Ces
enseignements font une différence essentielle entre la
critique dirigée contre les dirigeants choisis à la
manière du monde et la critique dirigée contre les
dirigeants choisis à la manière du Seigneur. C'est une
chose de dénigrer quelqu'un qui détient un poste à
responsabilité dans une entreprise et même au
gouvernement. C'en est une autre de critiquer ou de dénigrer
quelqu'un dans l'exercice d'un office auquel il ou elle a été
appelé(e) par Dieu.
Les
fonctionnaires du gouvernement ou les dirigeants d'une entreprise,
qui sont directement ou indirectement élus ou nommés
par le vote à la majorité, doivent s'attendre à
ce que leur action soit sujette à des évaluations
critiques et publiques par leurs électeurs. Cela fait partie
de l'information que reçoivent ceux qui ont le droit et le
pouvoir de sélection ou de renvoi. Il en va de même pour
ceux qui sont élus démocratiquement dans les
organisations professionnelles, dans la collectivité ou dans
les organisations privées. Je suppose qu'il en est de même
pour les dirigeants religieux qui sont élus par le suffrage
direct ou indirect. En accord avec les principes de l'Évangile,
ces évaluations, bien que critiques et publiques, devraient
être constructives.
Un
principe différent s'applique dans l'Église de
Jésus-Christ des saints des derniers jours où le choix
des dirigeants repose sur la révélation soumise au vote
de soutien des membres. Dans notre système d'administration de
l'Église, la critique des dirigeants et la médisance à
leur égard sont toujours négatives. Comme George F.
Richards, du collège des douze apôtres, l'a dit dans un
discours de la conférence générale d'avril
1947 : « Quand nous disons quelque chose de mal à
propos des dirigeants de l'Église, que ce soit vrai ou faux,
nous avons tendance à affaiblir leur influence et leur utilité
et nous travaillons ainsi contre le Seigneur et contre son oeuvre »
(Conference Report, avril 1947, p. 24). C'est pourquoi le
Saint-Esprit ne guidera ni ne confirmera la critique contre les oints
du Seigneur ou les dirigeants de l'Église, locaux ou généraux.
C'est pourquoi il nous est commandé et conseillé de
nous abstenir de critiquer les dirigeants de l'Église. Ceci
est pour notre bien-être spirituel. Contrairement à ce
que certains ont dit, les enseignements contre la critique des
dirigeants de l'Église ne sont pas une assertion de leur
infaillibilité, une revendication du droit à commettre
des méfaits en toute impunité, un pari d'obéissance
aveugle des membres. Comme nous allons le voir, nous pouvons faire
part de nos différends avec les dirigeants de l'Église.
Mais cela doit se faire à la manière du Seigneur.
Certaines
personnes, même parmi les saints des derniers jours, ne peuvent
accepter ce conseil. Considérant ce fait, un érudit
saint des derniers jours m'a écrit pour en suggérer la
raison : « Certaines personnes voient le monde à
travers des idéologies qui, malgré leur valeur,
s'avèrent en désaccord avec les enseignements de
l'Évangile rétabli. » (Lettre à
l'auteur, 6 février 1987)
Le
commandement du Seigneur de s'abstenir de critiquer, de chercher des
failles et de médire ne sera jamais bien accepté dans
une société où la controverse est une forme
populaire d'amusement, où l'opposition est institutionnalisée,
et où la critique de l'autre est courante. Quelques saints des
derniers jours ne comprennent pas et n'acceptent pas que ce qu'on
appelle « l'opposition loyale » qui est très
utile dans une démocratie, est une contradiction de termes
lorsqu'on l'applique à une théocratie. Certains ne
comprennent pas non plus que l'habitude de rechercher les failles est
spirituellement destructrice pour ceux qui s'y livrent, et que les
membres qui s'engagent dans la critique personnelle des dirigeants de
l'Église s'isolent eux-mêmes de l'Esprit du Seigneur. Il
est possible d'avoir des avis différents de ceux des
dirigeants de l'Église, mais ils doivent s'exprimer selon les
voies du Seigneur, et non selon celles du monde.
Que
faire si nous avons une divergence d'opinion avec les dirigeants de
l'Église ?
Que
faisons-nous si nous sentons que notre présidente de la
Société de secours ou que notre évêque ou
qu'une autorité générale transgresse les lois ou
poursuit une politique que nous désapprouvons ? Ceux qui nous
critiquent ont-ils raison lorsqu'ils accusent les saints des derniers
jours d'être des victimes sans recours face aux caprices d'un
dirigeant insouciant ou même malfaisant ?
Il
y a des recours, mais ce ne sont pas les mêmes ni les mêmes
procédures que ceux utilisés à l'égard
des dirigeants d'autres organisations.
Notre
Père céleste ne nous oblige pas à penser tous de
la même manière sur tous les sujets ou toutes les
procédures. Alors que nous cherchons à réussir
dans nos objectifs personnels, nous aurons inévitablement des
différends avec ceux qui nous entourent, y compris certains de
ceux que nous soutenons comme nos dirigeants. La question n'est pas
de savoir si nous aurons des différends, mais comment nous y
ferons face. Ce que le Seigneur a dit à propos d'une autre
question est également vrai en ce qui concerne nos différends
avec les dirigeants de l'Église : « Il faut
que cela se fasse à ma façon » (D&A
104:16). Nous devrions nous conduire de telle façon que nos
pensées et nos actions ne nous privent pas de la compagnie et
des directives de l'Esprit du Seigneur.
Le
premier principe pour résoudre nos différends dans
l'esprit de l'Évangile est de les garder pour soi et de ne pas
permettre qu'ils soient une cause de dispute. Dans ce domaine, nous
pouvons nous référer à de bons exemples. Chaque
étudiant de l'histoire de l'Église sait qu'il y a eu
des différences d'opinion parmi les dirigeants depuis que
l'Église a été rétablie. Chacun de nous a
été témoin de tels différends dans ses
responsabilités dans les organisations auxiliaires, dans les
collèges, les paroisses, les pieux et les missions de
l'Église. Nous savons que de tels différends sont
débattus, mais qu'ils ne le sont pas en public ni dans un
esprit de dispute. Les conseillers acceptent les décisions du
président. Les instructeurs suivent le conseil de leur
présidence. Les membres sont loyaux envers le conseil de leur
évêque. Tout se passe avec calme et loyauté, même
de la part des membres qui auraient adopté une autre politique
ou une procédure différente s'ils avaient été
eux-mêmes dirigeants.
Pourquoi
ne parle-t-on pas de ces différends en public ? Le débat
public, qui est le moyen de résoudre les différends
dans un gouvernement démocratique, n'est pas approprié
dans le gouvernement de l'Église. Nous sommes tous soumis à
l'autorité des serviteurs du Seigneur qui ont été
appelés et soutenus. Ils sont et nous sommes gouvernés
par les conseils de l'Esprit du Seigneur et cet Esprit n'agit que
dans une atmosphère d'unité. C'est pourquoi les
différends personnels sur la doctrine de l'Église, sa
politique ou ses procédures doivent être traités
en privé et sans querelle. Il n'y a rien de mal à
débattre de nos différends en privé, pourvu que
cela se fasse dans un esprit d'amour.
Il
y a au moins cinq procédures différentes qu'un membre
peut suivre pour faire part de ses différends avec un officier
général ou local de l'Église, homme ou femme.
1.
La première, et celle qui prend le moins d'énergie, est
d'ignorer le différend. Brigham Young raconte comment il a
fait ceci lorsque dans un cas précis il a éprouvé
un « manque de confiance » en la gestion
financière du prophète Joseph. Après avoir
entretenu de telles pensées pendant une courte période,
il vit qu'elles pouvaient le mener à perdre confiance au
prophète et finalement à douter. Il conclut :
« Bien que j'admette au plus profond de moi-même et
que je sus tout le temps que Joseph était un être humain
qui pouvait commettre des erreurs, ce n'était pas mes affaires
de rechercher ses fautes... Il était appelé par Dieu ;
Dieu le dirigeait, et si le coeur lui en disait de le laisser à
lui-même et de lui permettre de commettre une erreur, ceci ne
me regardait pas... Il était le serviteur de Dieu, et pas le
mien. » (Journal of Discourse, vol. 4, p. 297)
Lorenzo
Snow observa aussi quelques « imperfections »
chez Joseph Smith, mais il décida de les ignorer et même
d'en tirer de la force : « J'ai remercié Dieu
d'avoir confié à un homme qui possédait des
imperfections le pouvoir et l'autorité qu'Il lui avait
confiés... car je savais que moi-même j'avais des
faiblesses, et je pensais qu'il existait une chance pour moi. »
(cité par Neal A. Maxwell dans L'Étoile, avril
1985, p. 8)
2.
Une deuxième solution est de réserver son jugement pour
plus tard et d'attendre. Dans de nombreux cas, ce que nous tentons de
critiquer peut être fondé sur des confidences qui
empêchent le dirigeant d'expliquer sa position publiquement.
Dans de tels cas il y a de la sagesse à choisir de patienter
et de faire confiance.
3.
La troisième possibilité, qui devrait être bien
connue de ceux qui étudient la Bible, est de faire part en
privé de nos différends au dirigeant concerné.
Le Sauveur enseigna : « Si ton frère a péché,
va et reprends-le entre toi et lui seul. S'il t'écoute, tu as
gagné ton frère. » (Matthieu 18:15)
Cela
peut se faire dans un entretien privé, lorsque c'est possible,
ou par lettre ou autre moyen. Combien de différends pourraient
être résolus si seulement nous en discutions en privé
avec les personnes concernées ! La communication directe
facilite la progression et le changement. Faire part de ses
différends en privé enlève la possibilité
qui existe parfois dans la critique en public d'en déduire que
celui qui critique recherche l'avancement personnel plutôt que
le bénéfice général. Certains différends
n'auraient plus lieu d'être une fois que ces échanges en
privé auraient permis de se rendre compte qu'il s'agissait de
malentendus. D'autres différends seraient temporairement mis
de côté en acceptant de ne pas être d'accord.
4.
Une quatrième possibilité est de s'adresser à
l'officier de l'Église qui a autorité sur la personne
soupçonnée être dans l'erreur ou dans la
transgression. La Bible appelle cela : « le dire à
l'Église » (voir Matthieu 18:17). L'Écriture
moderne, dans la révélation que nous appelons « la
loi de l'Église », décrit cette procédure :
« S'ils ne se confessent pas, tu les livreras à
l'Église, pas aux membres, mais aux anciens. Cela se fera dans
une réunion, pas devant le monde » (D&A 42:89).
Notez l'injonction que cette démarche doit être privée :
« pas devant le monde ». Ceci non pas pour
dissimuler les faits, mais pour augmenter les possibilités de
se corriger et de s'améliorer.
Le
président John Taylor, a décrit ces deux dernières
possibilités lorsqu'il enseigna la manière dont nous
devrions soutenir un dirigeant :
« En
supposant qu'il soit... surpris en train de mentir, de tricher, de
tromper quelqu'un, de voler, de commettre tout autre délit, ou
même d'être empêtré dans le péché,
le soutiendriez-vous toujours ? Il serait alors de mon devoir de lui
parler comme avec n'importe qui d'autre, et de lui dire que je
connais la vérité et que dans ces circonstances je ne
pourrais plus le soutenir. Par contre, si je m'apercevais que j'avais
été mal informé, je retirerais l'accusation ;
autrement, il serait de mon devoir de m'assurer que la justice soit
rendue, qu'il soit jugé par le tribunal approprié pour
répondre de ses délits. En dehors de cela, je n'aurais
aucune raison de parler de lui. » (Journal of Discourses,
vol. 21, p. 208)
En
ce qui concerne un membre qui transgresse, James E. Talmage fait le
lien entre les principes énoncés plus haut et les
devoirs distincts des membres et des juges de l'Église :
« Le
Seigneur a déclaré qu'il ne doit pas y avoir d'iniquité
dans son Église, et il a appelé des officiers dont le
devoir spécifique et clairement établi est d'éliminer
toute iniquité, pour que chaque cas soit réglé
et que les personnes concernées puissent être sauvées.
Il ne nous a pas dit que l'Église doive couvrir le péché.
Ce n'est pas la volonté du Seigneur, ni son but, ni son plan.
Il nous a dit que nous devrions éviter de commérer, de
calomnier, de répandre des propos inexacts et de médire
quelle que soit notre façon de considérer un membre en
tant qu'autorité de l'Église, générale,
ou locale, ou autre. Je n'ai pas le droit de condamner mon frère,
à moins de le faire officiellement, dans le cadre de
l'autorité de la Sainte Prêtrise ; je devrais alors
le faire avec amour et avec le désir sincère de
l'aider. » (Conference Report, octobre 1920, p. 61-62)
5.
Il existe une cinquième possibilité : nous pouvons
prier pour trouver une solution au problème. Nous devrions
prier pour le dirigeant qui selon nous est dans l'erreur, en
demandant au Seigneur de remédier à la situation si
besoin est. En même temps, nous devrions prier pour nous-mêmes,
en demandant au Seigneur de nous éclairer si nous sommes dans
l'erreur.
Une
personne qui appréhende, dans un esprit de prière, un
différend avec un dirigeant de l'Église reste en accord
avec l'Esprit du Seigneur. Cette personne s'adresse ainsi directement
à Celui qui peut résoudre le problème. La
solution peut venir sous forme d'inspiration donnée à
ce dirigeant ou, pour la personne qui prie, une compréhension,
une force et une patience accrues.
es
cinq possibilités ci-dessus concernent les membres ayant une
divergence d'opinion avec leurs dirigeants. Le meilleur moyen
dépendra des circonstances et de l'inspiration qui guidera
ceux qui prient sincèrement. En suivant ces recommandations,
les membres peuvent travailler pour la correction d'un dirigeant ou
un changement de politique. Les membres qui agissent ainsi avec de
bonnes intentions n'affligeront pas l'Esprit du Seigneur. Ils ne se
couperont pas de leurs dirigeants ou de leurs frères et soeurs
dans l'Église.
En
dépit des commandements et des conseils que je viens
d'énoncer, certains membres continuent à critiquer
publiquement les dirigeants de l'Église. Qu'en est-il ?
Tout
au long de son histoire, l'Église et ses dirigeants ont été
critiqués par certains membres. L'action disciplinaire de
l'Église à l'encontre de tels membres a été
rare ou inexistante. Ceux qui persistent dans leurs critiques se
punissent eux-mêmes. En se retranchant délibérément
de ceux que le Seigneur a appelés en qualité de
dirigeants de son Église (locaux ou généraux),
ils se privent des conseils de l'Esprit du Seigneur. Ils s'éloignent
progressivement de la prière, des Écritures, de
l'assistance aux réunions de l'Église et de
l'obéissance aux commandements. Ils perdent inévitablement
leur spiritualité et passent à côté de
bénédictions. Comme le prophète Néphi l'a
observé, ceux qui succombent à l'orgueil et aux
« oeuvres de ténèbres » sont sur
le chemin de la destruction spirituelle, « car l'Esprit du
Seigneur ne luttera pas toujours avec l'homme » (2 Néphi
26:10-11).
Un
autre aspect de l'avertissement divin contre la critique des
dirigeants s'adresse aux dirigeants eux-mêmes. Il met l'accent
sur leur responsabilité particulière dans l'exercice de
leur autorité. À l’opposé des dirigeants
du gouvernement ou d'entreprises, qui peuvent être despotiques
et autoritaires dans l'exercice de leur pouvoir, les dirigeants de
l'Église ont quant à eux, des limites strictes dans la
manière dont ils peuvent exercer leur autorité. Le
Seigneur a indiqué que les pouvoirs des cieux ne peuvent être
exercés que « selon les principes de la justice »,
c'est-à-dire, « par la persuasion, la longanimité,
la gentillesse, l'humilité, l'amour sincère »
(D&A 121:36, 41). Ce commandement entre en vigueur :
« Lorsque
nous entreprenons... de flatter notre orgueil, notre vaine ambition,
ou d'exercer, avec quelque degré d'injustice que ce soit, un
contrôle, une domination ou une contrainte sur l'âme des
enfants des hommes, voici les cieux se retirent ; l'Esprit du
Seigneur est affligé, et lorsqu'il s'est retiré, amen à
la prêtrise et à l'autorité de cet homme. »
(D&A 121:37)
Conclusion
L'autorité
d'un dirigeant de l'Église provient d'une source différente
de celle d'un dirigeant d'entreprise ou de gouvernement. La procédure
pour corriger un dirigeant de l'Église est différente
de celle utilisée pour corriger les dirigeants choisis
démocratiquement. Cette différence est liée à
la manière dont nos dirigeants sont appelés et relevés.
En suivant les procédures approuvées, nous éviterons
de nous retrancher de l'Esprit du Seigneur.
On
ne peut pas attendre de la part de ceux qui rejettent les Écritures
ou l'autorité des prophètes des derniers jours
d'accepter ce qui est dit ici. De même, on ne peut pas attendre
de la part de ceux qui placent la liberté ou la vérité
au-dessus de tout, d'être persuadés par les Écritures
qui enseignent que « la connaissance enfle mais la charité
édifie » (1 Corinthiens 8:1). Je recommande
vivement à ceux qui sont troublés par ce conseil de
l'appréhender en tant qu'enseignement des Écritures
plutôt que sous l'angle de leur préférence
personnelle ou de leur pratique professionnelle.
On
ne peut pas attendre de ceux qui fondent leurs pensées et
leurs actions exclusivement sur les principes du libéralisme,
du conservatisme ou de l'intellectualisme d'être d'accord avec
tous les enseignements de l'Évangile de Jésus-Christ.
Moi-même, je trouve de la sagesse dans le libéralisme,
de la sagesse dans le conservatisme, et beaucoup de vérité
dans l'intellectualisme - mais je ne trouve le salut dans aucun
d'eux.
Le
rôle d'un prédicateur ou d'un juge spirituel n'est pas
d'être populaire dans le monde ou d'être estimé
par un groupe particulier, mais d'être juste devant Dieu. Ésaïe
affirma ce fait quand il condamna les rebelles « qui
disent aux voyants : Ne voyez pas ! et aux prophètes :
Ne nous prophétisez pas les vérités, dites-nous
des choses flatteuses, prophétisez-nous des chimères ! »
(Ésaïe 30:10). Il est facile de prêcher la liberté
ou la vérité. Les louanges à ce sujet sont
habituellement sûres et toujours populaires. Il est infiniment
plus difficile de prêcher comment les hommes et les femmes
devraient utiliser la liberté ou la vérité. Le
prédicateur de ce message peut inspirer le respect, mais il ou
elle ne gagnera pas la popularité.
Je
conclus avec un message d'espoir. Quand Ésaïe condamna
les critiques à son époque, il conclut par une
prophétie. Il dit qu'un jour les enfants de Dieu « craindront
le Dieu d'Israël » et « sanctifieront
[son] nom. » Il déclara ensuite : « Ceux
dont l'esprit s'égarait acquerront de l'intelligence, ceux qui
murmuraient recevront de l'instruction » (Ésaïe
29:23-24). Dans cet esprit, je prie pour le jour où, tous,
nous connaîtrons Dieu et où nous garderons ses
commandements. Ce jour-là, comme Ésaïe l'a prédit,
le « roi régnera selon la justice » et
« l'oeuvre de la justice sera la paix, et le fruit de la
justice sera le repos et la sécurité pour toujours »
(Ésaïe 32:1, 17).
CHAPITRE
8 : L'ACTION DISCIPLINAIRE DE L'ÉGLISE
Les
hommes sont gouvernés par des lois : certaines sont
établies par Dieu, d'autres par les hommes. Le contenu et
l'application de ces deux systèmes de lois, sacré et
profane, comportent quelques similitudes et de nombreuses
différences. Dans ce chapitre nous allons les examiner en
comparant et en faisant une distinction entre les voies du Seigneur
et celles du monde.
À
certaines périodes de l'Histoire, le pouvoir sacré et
le pouvoir séculier étaient réunis sous une même
autorité. On citera Moïse, prophète et dirigeant
dans l'Ancien Testament et Benjamin, prophète et roi dans le
Livre de Mormon. À d'autres époques, l'autorité
séculière et l'autorité sacrée étaient
séparées. Les lois des hommes étaient dictées
par un roi ou une assemblée représentative et exécutées
par des autorités laïques, et les lois de Dieu étaient
données par l'intermédiaire d'un prophète ou
d'un prêtre et administrées par les autorités
religieuses. Dans la Bible, cette différence est marquée
par la séparation de l'autorité des rois d'Israël
et des prophètes. Le Livre de Mormon décrit comment le
roi Mosiah laissa au prophète Alma l'autorité sur
l'Église (Mosiah 25:19 ; 26:8), mais continua à
diriger les affaires séculières (Mosiah 27:1-3). En
vertu de cette séparation des juridictions, le roi refusa de
juger des personnes qui lui étaient amenées pour avoir
commis un péché ou une iniquité, et les renvoya
pour être jugés par Alma, le grand-prêtre (Mosiah
26:6-12).
Le
Sauveur enseigna à ses disciples qu'ils devaient rendre à
César ce qui appartient à César et à Dieu
ce qui appartient à Dieu (Matthieu 22:21 ; Marc 12:17 ;
Luc 20:25). L'apôtre Pierre enseigna aux premiers saints de se
soumettre à l'autorité civile (1 Pierre 2:13-17).
Ces enseignements montrent que les saints de cette époque
étaient soumis à deux autorités différentes,
les lois de l'homme et les lois de Dieu.
Lorsque
les lois divines sont données et administrées par une
autorité et que les lois des hommes le sont par une autre,
certaines personnes qui sont soumises à ces deux systèmes
peuvent s'y perdre. Elles risquent de ne pas discerner quelles sont
les lois qui s'appliquent dans un cas donné. D'autres risquent
de ne pas bien comprendre quelles autorités administrent telle
ou telle loi. D'autres encore risquent de ne pas savoir déterminer
la procédure à appliquer quand une loi donnée a
été enfreinte. De telles confusions se produisent à
l'heure actuelle. Certains saints des derniers jours se méprennent
sur le contenu, les buts et les procédures des deux genres de
lois les concernant, les lois divines et les lois humaines.
Dans
cette dispensation, le modèle divin suit une double
juridiction. Quels que soient les pays, les enfants de Dieu sont
soumis à l'autorité qui établit et administre la
loi divine et aux autorités qui établissent et
administrent les lois humaines.
La
révélation moderne prescrit cette dualité et
enseigne aux fidèles comment la vivre. Il est conseillé
aux saints de se soumettre « aux pouvoirs qui existent »
et d'obéir à ce qui est appelé « les
lois du pays » en plus de ce qui est appelé « les
lois de Dieu » ou « les lois de l'Église »
(D&A 58:21-23). La « déclaration de foi »
officielle de l'Église de Jésus-Christ des saints des
derniers jours, adoptée en 1835 et publiée dans la
première édition des Doctrine et Alliances, déclare
que « les lois humaines [ont] été instituées
dans le but exprès de régler nos intérêts
individuels et nationaux d'homme à homme », et que
« les lois divines ont été données du
ciel pour régler les affaires spirituelles, la foi et le
culte ». D'une manière significative, l'Écriture
continue : « dont l'homme est responsable devant son
Créateur » (D&A 134:6).
Les
lois de l'homme
Le
but des « lois humaines » (que j'ai choisi
d'appeler les lois de l'homme) est de protéger tous les
citoyens et de garantir la paix publique et l'harmonie. Les
responsables politiques et les magistrats sont « chargés
de protéger les innocents et de punir les coupables »
(D&A 134:6-8).
Les
lois de l'homme visent à atteindre ces buts dans le cadre du
droit civil et du droit pénal. Le droit pénal punit (et
quelquefois cherche à réhabiliter) une personne qui en
a lésé une autre. Les lois civiles proposent de
résoudre les litiges entre des parties privées en
permettant aux personnes lésées de recevoir de l'argent
ou une autre compensation de ceux qui leur ont causé du tort.
Les lois civiles visent également à prévenir les
méfaits d'une personne envers une autre. Toutes ces
dispositions tendent à préserver la paix et l'harmonie
en encourageant les parties lésées à renoncer à
se faire justice elles-mêmes ou à se venger mais plutôt
à se tourner vers les lois et les autorités civiles
pour punir la partie adverse, pour obtenir compensation ou pour
prévenir et empêcher des torts futurs. La déclaration
de foi officielle de l'Église déclare que le « crime
doit être [puni]... par les lois du gouvernement du pays où
l'offense a été commise » (D&A 134:8).
L'autorité civile devrait « punir les délits »
et devrait aussi « réprimer le crime »
(D&A 134:4). Pour apporter leur contribution, « tous
les hommes doivent s'employer activement à utiliser leurs
capacités pour assurer la punition de ceux qui ont violé
des lois justes » (D&A 134:8). Ainsi, dans la
révélation donnée en 1831 et appelée « la
loi de l'Église », le Seigneur conseilla au peuple
de son Église que, si une personne parmi eux tuait, volait,
dérobait, ou mentait, « elle sera livrée et
traitée selon les lois du pays » (D&A 42:79,
84-86).
De
plus, lorsque les lois et les institutions de l'homme prévoient
des recours, il est conseillé aux membres de l'Église
« de faire appel aux lois civiles pour le redressement de
tous leurs torts », y compris les dommages infligés
à leur personne ou les atteintes à leur propriété
(D&A 134:11).
Les
lois de Dieu
On
appelle commandements la partie des lois de Dieu qui s'applique au
comportement humain. Les procédures qui encouragent les
membres de l'Église à garder les commandements et qui
prescrivent les conséquences de leur inobservance sont
appelées aujourd'hui l'action disciplinaire de l'Église.
À
la différence des lois de l'homme, qui se soucient de
préserver la paix dans ce monde, les lois de Dieu visent à
promouvoir l'exaltation dans l'éternité. Bien qu'il y
ait des recoupements entre ces lois, la différence entre leurs
finalités crée des disparités importantes dans
leur contenu et dans leurs procédures.
Une
des différences les plus importantes entre les lois de Dieu et
celles de l'homme est que les premières sont dictées ou
guidées par la révélation, alors que les
secondes n'en tiennent pas compte. Les commentaires des chapitres 1
et 2 sur la révélation sont donc une fondation
essentielle pour les considérations qui vont suivre à
propos de la différence dans le contenu et dans l'application
entre ces deux systèmes de lois.
Une
des différences les plus importantes porte sur les sanctions.
Bien sûr, l'Église, qui administre les lois de Dieu, n'a
pas autorité pour ôter la vie d'un transgresseur,
confisquer ses biens, ou lui infliger une punition physique. L'Église
peut « seulement [l']excommunier de [son] sein et [lui]
enlever [ses] privilèges de membre » (D&A
134:10). Ainsi, l'action disciplinaire de l'Église envers ses
membres consiste à leur donner des avertissements au cours
d'entretiens privés, à leur imposer une mise à
l'épreuve sous forme de restrictions ou d'obligations dans
leur vie de membre de l'Église, ou à les disqualifier
ou à les excommunier.
Puisque
l'action disciplinaire de l'Église est très limitée
dans l'étendue de ses prescriptions, que signifie la
déclaration scripturaire que le « meurtrier qui tue
délibérément... mourra » ? (2 Néphi
9:35 ; voir aussi D&A 42:18-19). Il ne s'agit pas ici d'une
directive pour appliquer la peine de mort, puisque la peine capitale
est une punition réservée aux lois de l'homme. Dans ce
contexte, ce que dit l'Écriture se rapporte à la portée
éternelle de l'homicide volontaire. Cette manière de
verser le sang est interdite par Dieu « depuis le
commencement de l'homme » (Éther 8:19). Le meurtre
délibéré est ce que les Écritures
appellent « un péché qui mène à
la mort » (1 Jean 5:16). Il prive le meurtrier de la
vie éternelle (1 Jean 3:15) parce qu'il « n'y
a pas de pardon » pour cet acte (D&A 42:79). En
d'autres termes, une personne qui en tue délibérément
une autre mourra spirituellement.
Dans
les Écritures, la plupart des autres commandements et les
conseils de procédure concernent aussi les lois de Dieu, pas
les lois de l'homme. Si nous négligeons cela, nous risquons de
mal interpréter les Écritures. De même, le
contenu et les procédures des lois de l'homme ne s'appliquent
pas aux activités spirituelles de l'Église, ni à
son action disciplinaire. Si nous négligeons cela, nous
risquons de commettre de graves erreurs dans l'application des lois
de Dieu.
Ceux
qui ont de l'expérience dans l'exécution des lois de
l'homme, en particulier les juges et les avocats, sont plus
susceptibles de commettre l'erreur d'essayer d'appliquer les
principes du droit civil ou pénal à l'action
disciplinaire de l'Église. J'ai vécu moi-même ce
genre de situation.
Pendant
les perturbations universitaires de la fin des années 1960, je
présidais la commission de discipline de l'université
de Chicago. En 1969, notre commission eut à traiter les
accusations portées par l'université contre plus de 150
étudiants accusés d'attitude perturbatrice lors de
l'occupation du bâtiment administratif de l'université
pendant dix-sept jours. Certains des accusés étaient
défendus par des étudiants en droit qui tentaient
d'appliquer à l'action disciplinaire de l'université
diverses procédures propres aux tribunaux d'instance ou aux
cours d'assises. Par exemple, un avocat en herbe (qui ensuite
s'inscrivit dans ma classe de procédure pénale)
prétendit que l'université ne pouvait pas agir contre
les étudiants impliqués dans les perturbations parce
que le Bill of Rights (Déclaration des Droits) de la
Constitution des États-Unis garantissait qu'ils ne pouvaient
être punis sans avoir été inculpés dans
les règles par un grand jury. Il fallut à notre
commission presque une semaine de délibérations pour
établir quelles règles de procédure étaient
requises pour une impartialité fondamentale et étaient
donc applicables aux poursuites disciplinaires de l'université
(telles que l'acte d'accusation et la possibilité de se
défendre), et quelles procédures judiciaires (même
constitutionnelles) n'étaient pas nécessaires à
l'impartialité fondamentale et n'étaient donc pas
requises dans nos poursuites disciplinaires.
Il
en est de même pour l'action disciplinaire de l'Église.
Certaines procédures utilisées dans les poursuites
judiciaires ne s'appliquent pas aux commissions disciplinaires de
l'Église. L'action disciplinaire de l'Église a sa
propre procédure, guidée par les révélations
de Dieu. C'est le plus important des points fondamentaux que doivent
garder à l'esprit tous ceux qui participent à une
commission disciplinaire de l'Église.
Une
autre différence importante entre l'action disciplinaire de
l'Église et les procédures judiciaires est que ces deux
processus distincts traitent d'infractions différentes. Ainsi,
la révélation appelée la loi de l'Église
donne divers commandements et indique que « si un homme ou
une femme commettent l'adultère, ils seront jugés
devant deux anciens de l'Église ou plus » (D&A
42:80). Un conseil identique est donné aux personnes qui « se
livrent à une forme quelconque d'iniquité »
(D&A 42:87). Cependant, comme noté plus haut, cette même
révélation stipule que les meurtriers et les voleurs
seront traités selon les lois du pays (D&A 42:79, 84-86).
Pourquoi cette différence ?
Les
lois de l'homme punissent le meurtre, le vol et le mensonge. Les
officiers publics qui appliquent le droit pénal sont
relativement efficaces pour déterminer qui enfreint la loi et
comment le coupable devrait être puni. Les actes de meurtre, de
vol et de mensonge ont aussi leurs conséquences sous les lois
de Dieu. Quoiqu'il en soit, quand un membre de l'Église est
accusé de ces crimes sous les lois de l'homme, il est
habituellement souhaitable pour l'action disciplinaire de l'Église
d'attendre le jugement de l'autorité publique. De cette
manière l'action disciplinaire de l'Église n'entrave
pas les poursuites judiciaires, et ceux qui administrent l'action
disciplinaire de l'Église peuvent bénéficier des
preuves rassemblées par les autorités civiles ainsi que
de leurs conclusions.
Au
contraire, les lois de l'homme ne se soucient pas de l'adultère
et d'autres iniquités, ou elle les traite avec beaucoup moins
de sérieux qu'ils ne sont considérés sous les
lois de Dieu. Dans cette situation, il est préférable
que l'adultère et les autres iniquités soient traitées
par l'action disciplinaire de l'Église, conformément
aux lois de Dieu. Pour cette même raison, un délit qui
est également une sérieuse transgression des lois de
Dieu peut nécessiter l'action disciplinaire de l'Église,
même si un tribunal d'instance a rendu un non-lieu pour des
raisons techniques.
Ainsi,
bien qu'elles se chevauchent partiellement, les lois de Dieu et les
lois de l'homme ont des buts différents, des juridictions
distinctes et une application indépendante.
Le
but principal de l'action disciplinaire de l'Église
Par
ses lois, Dieu cherche à mener ses enfants à
l'exaltation (le salut). Dans cette optique, le but le plus important
de l'action disciplinaire de l'Église est de sauver des âmes.
Elle encourage les membres à garder les commandements de Dieu.
Son existence même, et particulièrement son application,
met l'accent sur le sérieux des commandements de Dieu et
clarifie leur signification. Ceci est extrêmement important
dans une société essentiellement permissive. Ceux qui
administrent l'action disciplinaire de l'Église devraient
utiliser cette occasion pour mettre l'accent sur les principes de
l'Évangile.
Lorsque
c'est nécessaire, l'action disciplinaire de l'Église
aide les transgresseurs à se repentir, c'est à dire à
reconnaître le péché et à l'abandonner, à
réparer, et à démontrer leur engagement
renouvelé d'obéir aux commandements. Le président
Harold B. Lee a expliqué : « La raison d'être
de l'Évangile est de sauver les hommes, pas de les condamner ;
mais pour sauver il est parfois nécessaire de faire face aux
problèmes et de punir comme le Seigneur nous l'a conseillé. »
(Séminaire des représentants régionaux, 1er
octobre 1969)
Les
lois de Dieu atteignent leur but grâce à la justice, à
la miséricorde et à l'expiation de Jésus-Christ.
L'action disciplinaire de l'Église tient compte de tout cela,
mais plus particulièrement de la miséricorde et de
l'expiation.
À
l’opposé, les lois de l'homme mettent l'accent sur la
justice ; elles ne reconnaissent pas le plan de miséricorde
et ne tiennent pas compte de l'expiation. Quand le droit pénal
a été violé, la justice requiert habituellement
qu'une punition soit imposée. Le symbole de la justice montre
une balance en équilibre tenue par un homme aux yeux bandés
afin que l'impartialité du jugement soit garantie.
En
général, quand un coupable reçoit ce qu'il
mérite et que le châtiment est proportionné à
la faute, les gens ressentent que justice a été rendue.
Ainsi, la déclaration de foi de l'Église affirme
« qu'un crime doit être puni [sous la loi des
hommes] selon la nature de l'offense » (D&A 134:8). Si
un coupable s'est confessé et a démontré du
remords, ceci peut avoir une incidence sur la sanction prononcée
par le juge, mais il est peu probable que ce facteur soit décisif.
L'objectif suprême de la loi de l'homme est la justice. Dans
une moindre mesure, quelques-unes des lois de l'homme prévoient
la réhabilitation du coupable, ce qui est un pâle reflet
du principe de la miséricorde et du salut éternel.
La
justice, la miséricorde et l'expiation
Les
lois de Dieu recherchent aussi la justice, mais elles tiennent compte
également de la miséricorde rendue possible par
l'expiation. C'est ce qu'explique la doctrine de l'Église.
La
notion de justice est la prémisse fondamentale de toutes les
Écritures qui enseignent que les hommes seront jugés
selon leurs oeuvres. Le Sauveur dit aux Néphites que tous les
hommes se tiendraient devant lui pour être « jugés
selon leurs oeuvres, bonnes ou mauvaises » (3 Néphi
27:14 ; voir aussi Mosiah 15:26-27 ; Alma 41:3-4). Dans sa
lettre aux Romains, Paul parla du « juste jugement de
Dieu » en ces termes : « rendre à
chacun selon ses oeuvres » (Romains 2:5-6). Notre deuxième
article de foi affirme que « les hommes seront jugés
pour leurs propres péchés et non pour la transgression
d'Adam ».
Selon
la loi éternelle, quand un commandement est enfreint, une
punition proportionnée doit être imposée. « Mais
il y a une loi donnée et une punition y est attachée »,
enseigna le prophète Alma, et « la justice réclame
la créature et exécute la loi et la loi inflige la
punition ». « Car voici »,
continua-t-il, « la justice impose toutes ses exigences »
(Alma 42:22, 24). La justice de Dieu « [sépare]
également les méchants des justes » (1 Néphi
15:30). Seule, la justice est intransigeante. C'est ainsi que les
hommes devinrent sujets à la mort temporelle et spirituelle.
La
bonne nouvelle de l'Évangile est que la miséricorde
existe pour le pénitent grâce à l'expiation de
Jésus-Christ. La miséricorde représente un
avantage plus grand que le mérite. Si la justice est
équilibre, la miséricorde est déséquilibre.
Si la justice est uniquement ce que l'on mérite, alors la
miséricorde est plus avantageuse. Un des personnages de
Shakespeare déclare cette vérité : « Fais
bien attention à ceci que le seul cours de la justice ne
conduirait aucun de nous à son salut : en vérité,
notre prière demande la miséricorde » (Le
marchand de Venise, acte 4, scène 1). Pour que la loi de la
justice soit satisfaite, la loi éternelle de la miséricorde
permet que le prix soit payé par quelqu'un d'autre que le
transgresseur pénitent.
L'expiation
est le moyen par lequel la justice est satisfaite et la miséricorde
accordée. Dans ce but, le Messie « s'offre en
sacrifice pour le péché, il satisfait aux buts de la
loi pour tous ceux qui ont le coeur brisé et l'esprit
contrit ; et les buts de la loi ne peuvent être satisfaits
en nul autre » (2 Néphi 2:7 ; voir aussi
Romains 5:18-19). Dans une des plus grandes déclarations des
Écritures, Alma explique que par l'expiation, « la
miséricorde réclame le pénitent, et la
miséricorde est accordée à cause de
l'expiation. » (Alma 42:23)
La
justice est satisfaite et la miséricorde est accordée
par les souffrances et le sang de Jésus-Christ. De cette
manière, « Dieu lui-même expie pour les
péchés du monde, pour réaliser le plan de
miséricorde, pour apaiser les exigences de la justice, pour
que Dieu puisse être un Dieu parfait, juste et miséricordieux
à la fois » (Alma 42:15). Comme Boyd K. Packer
l'explique dans son admirable parabole « Le Médiateur » :
« grâce à lui la miséricorde peut être
pleinement accordée à chacun de nous sans offenser la
loi éternelle de la justice. » (L'Étoile,
octobre 1977, p. 59)
La
repentance
1.
Sa nécessité. Les bienfaits de l'expiation sont soumis
aux conditions prescrites par celui qui a payé le prix. Ces
conditions requièrent le repentir. La nécessité
du repentir est l'une des principales différences entre les
lois de Dieu et les lois de l'homme.
Dieu
nous a dit par l'intermédiaire de ses prophètes que
« nul n'est sauvé si ce n'est le vrai pénitent »
(Alma 42:24), et que seulement ceux qui se repentent sont pardonnés
(D&A 1:32 ; 58:42). Bruce R. McConkie a dit de façon
concise : Le Messie apporta « la miséricorde
au pénitent et la justice à l'impénitent »
(Bruce R. McConkie, The Promised Messiah, Salt Lake City, Deseret
Book, 1981, p. 337). Alma enseigna que « le plan de
rédemption ne pouvait être accompli qu'à la seule
condition que les hommes se repentissent dans cet état
probatoire » (Alma 42:13 ; voir aussi Hélaman
5:11). Amulek témoigna que « le grand et éternel
plan de rédemption n'aura d'effet que pour celui qui a la foi
qui produit le repentir » (Alma 34:16). Enfin, dans cette
dispensation notre Rédempteur a déclaré :
« Car voici, moi, Dieu, j'ai souffert tout cela afin
qu'ils ne souffrent pas s'ils se repentent. Mais s'ils ne veulent pas
se repentir, ils doivent souffrir tout comme moi. » (D&A
19:16-17)
Ces
vérités éternelles, qui sont fondamentales dans
la doctrine de notre Église, expliquent pourquoi l'action
disciplinaire de l'Église cherche à aider le
transgresseur à se repentir. Le repentir est essentiel pour
obtenir la miséricorde, elle-même rendue possible grâce
à l'expiation. En conséquence, la preuve du repentir
est le facteur le plus important pour savoir quelle sera l'action
disciplinaire de l'Église nécessaire pour sauver l'âme
du transgresseur. C'est un point qui fait appel au discernement
spirituel du juge du Seigneur. La fonction rédemptrice de
l'action disciplinaire de l'Église et la révélation
nécessaire pour sa mise en oeuvre n'ont pas d'équivalent
dans les lois de l'homme.
2.
La confession. Sous les lois de l'homme, la confession sert
uniquement de preuve de la culpabilité de l'accusé.
Elle n'est pas essentielle, car s'il existe d'autres preuves,
l'accusé peut être jugé coupable même sans
avoir confessé son délit.
Selon
les lois de Dieu, la confession est absolument essentielle, parce
qu'il n'y a pas de repentir sans confession. « Celui qui
cache ses transgressions ne prospère point, mais celui qui les
avoue et les délaisse obtient miséricorde »
(Proverbes 28:13). « Si nous confessons nos péchés,
il est fidèle et juste pour nous les pardonner, et pour nous
purifier de toute iniquité » (1 Jean 1:9).
« C'est à cela que vous saurez si un homme se
repent de ses péchés : il les confessera et les
délaissera » (D&A 58:43 ; voir aussi
61:2 ; 64:7). Le repentir commence quand nous reconnaissons que
nous avons commis une erreur. Nous pouvons appeler cette étape
« une auto-confession ». Ceci se produit, a dit
le président Kimball, « quand une personne
reconnaît elle-même sa transgression sans l'atténuer
ou la minimiser, ayant le désir de faire face à la
situation et de payer le prix nécessaire ; tant que la
personne n'est pas dans cet état d'esprit, elle n'a pas
commencé à se repentir. » (The Teachings of
Spencer W. Kimball, éd. Edward L. Kimball, Salt Lake City,
Bookcraft, 1982, p. 86)
Une
personne de ma connaissance qui avait été coupable de
transgressions graves a décrit ses sentiments à propos
de cette étape : « Il y a un soulagement
énorme quand vous pouvez faire face à vos délits
et à vos tromperies, et que vous pouvez recommencer à
vivre une vie honnête ». Faire ce premier pas lui
apporta ce qu'il décrivit comme étant « une
certaine paix dans ma vie. » (Lettre à l'auteur, 22
août 1988)
L'étape
suivante, pour tous nos péchés, est de les confesser en
prière au Seigneur.
De
plus, quand les péchés sont de nature grave, ils
doivent être confessés au dirigeant de la prêtrise
désigné par le Seigneur, c'est à dire à
l'évêque. Marion G. Romney a défini les péchés
qui doivent être confessés à l'évêque
comme étant des transgressions « d'une nature telle
que si on ne s'en repentait pas, elles menaceraient notre qualité
de membre ou notre fraternité dans l'Église de
Jésus-Christ » (Conference Report, octobre 1955, p.
125). Ces deux sortes de confessions sont ce dont parlait le Seigneur
lorsqu'il commanda de « [confesser] tes péchés
à tes frères et devant le Seigneur » (D&A
59:12).
3.
La réparation. La réparation recommandée par
l'action disciplinaire de l'Église est également
essentielle au repentir. Les transgresseurs doivent faire tout ce
qu'ils peuvent pour réparer les torts qu'ils ont causés
aux autres, ce qui inclut de confesser à ceux qui ont été
lésés, de rechercher leur pardon ainsi que de faire les
révélations nécessaires pour protéger
ceux qui ont été mis en péril par leurs
mauvaises actions. Par exemple, il peut s'avérer nécessaire
de prévenir les personnes dont la sécurité ou la
santé sont en danger suite à ces actions. Une partie de
leur réparation peut aussi consister à faire des
révélations aux autorités civiles et à en
accepter les conséquences. À l’opposé,
bien que les tribunaux civils condamnent parfois l'accusé à
restituer ce qu'il a pris à sa victime, une telle restitution
est, dans le meilleur des cas, un objectif secondaire de la sanction
prononcée par les lois de l'homme.
4.
La souffrance. La souffrance est probablement l'étape la moins
bien comprise du repentir. Cette incompréhension peut résulter
du fait qu'il existe un grand abîme entre le rôle de la
souffrance selon les lois des hommes et selon les lois de Dieu.
Les
lois de l'homme infligent une sanction destinée à faire
souffrir le coupable. La punition est l'objectif principal des lois
de l'homme. Les tribunaux civils cherchent à faire « payer »
l'offenseur pour ses mauvaises actions.
Certains
ont considéré l'action disciplinaire de l'Église
sous le même angle. Bruce C. Hafen explique : « Quelques
personnes portant le fardeau de graves péchés croient
aussi, de façon erronée, qu'ils doivent d'une certaine
manière 'payer' pour leurs erreurs par l'intermédiaire
d'une commission disciplinaire de l'Église. Ils pensent que le
fait d'être humilié devant une commission disciplinaire
de l'Église constituera un châtiment adéquat. »
(Bruce C. Hafen, The Broken Heart, Salt Lake City, Deseret Book,
1989, p. 152)
Celui
qui croit qu'une commission disciplinaire est censée punir un
transgresseur ou le faire souffrir pour payer le prix de ses
mauvaises actions comprend mal le but de l'action disciplinaire de
l'Église et la nécessité de souffrir pour
bénéficier du repentir, de la miséricorde et de
l'Expiation.
Selon
la loi et la justice du Seigneur, les transgresseurs sont punis.
« Nous croyons que les hommes seront punis pour leurs
propres péchés » (Deuxième article de
foi). Par l'intermédiaire du prophète Ésaïe,
le Seigneur a dit qu'il « [punirait] les habitants de la
terre dans leur iniquité » (Ésaïe
26:21 ; King James Version). La loi de Dieu ne pourrait pas
exister « s'il n'y avait une punition » (Alma
42:17). Il y a une « punition... fixée »
pour chaque péché (Alma 42:18 ; voir aussi Amos
3:1-2). Amulek expliqua que « celui qui ne manifeste pas
cette foi qui produit le repentir restera exposé à
toute la loi des exigences de la justice » (Alma 34:16).
La justice requiert que la personne non repentante souffre pour ses
propres péchés. « S'ils ne se repentent
pas », dit le Seigneur, « ils doivent souffrir
tout comme moi. » (D&A 19:17)
Qu'en
est-il des personnes repentantes ? Sont-elles punies ? Doivent-elles
souffrir ? Alma déclara que « le repentir ne
pouvait être donné aux hommes, s'il n'y avait point une
punition » (Alma 42:16). La punition qui mène au
repentir et celle qui le rend possible doivent inclure la souffrance,
mais la souffrance de qui ? Et quel est le rôle de l'action
disciplinaire de l'Église dans tout cela ?
La
souffrance qui pousse un transgresseur à se repentir est sa
propre souffrance. Mais pour la personne repentante la souffrance qui
satisfait aux exigences de la justice est la souffrance de notre
Sauveur et Rédempteur. Il souffrit pour les péchés
de tous « afin qu'ils ne souffrent pas s'ils se
repentent » (D&A 19:16). Dans le livre d'Ésaïe,
nous lisons ces belles paroles : « Mais il était
blessé pour nos péchés, brisé pour nos
iniquités ; le châtiment qui nous donne la paix est
tombé sur lui ; et c'est par ses meurtrissures que nous
sommes guéris » (Ésaïe 53:5). Le
Rédempteur a payé le prix de nos péchés
si seulement nous voulons bien nous repentir. Comme frère
Packer l'a expliqué, la justice « ne peut demander
plus. Ce ne serait pas juste. » (L'Étoile,
octobre 1977, p. 59)
Cela
signifie-t-il qu'il n'y a pas de souffrance pour la personne
repentante ? Parce que le Christ a souffert pour nos péchés,
certains pensent que la seule chose à faire est d'exprimer du
chagrin pour ses fautes, d'accepter le Christ comme son Sauveur, et
qu'il prendra sur lui toute la souffrance. Il n'en est pas ainsi.
Spencer W. Kimball, qui donna des enseignements détaillés
à propos du repentir et du pardon, dit que la souffrance
personnelle « est une partie très importante du
repentir ». « De nombreuses personnes ne
peuvent pas se repentir tant qu'elles n'ont pas beaucoup souffert...
Si une personne n'a pas souffert, elle ne s'est pas repentie... Elle
doit éprouver un changement accompagné de souffrance,
et alors le pardon est possible. » (The Teachings of
Spencer W. Kimball, p. 88, 97, 99)
Comme
le président Kimball l'a expliqué, la personne
repentante doit souffrir pour ses péchés, mais cette
souffrance a un but différent de celui de la punition ou de la
sanction. Son but est le changement. Le coeur brisé et
l'esprit contrit, tels qu'ils sont mentionnés dans les
Écritures, sont les conséquences de la souffrance du
transgresseur. Le Sauveur commanda : « que vous vous
repentiez de vos péchés et veniez à moi le coeur
brisé et l'esprit contrit » (voir 3 Néphi
12:19). Quand le Sauveur abolit les sacrifices et les offrandes
prescrits par la loi de Moïse, il expliqua : « Vous
m'offrirez en sacrifice un coeur brisé et un esprit contrit »
(3 Néphi 9:20). Combien il est approprié que la
nouvelle offrande rappelant au transgresseur le sacrifice et la
souffrance de son Rédempteur soit un coeur brisé et un
esprit contrit ! Ceci ne peut arriver que par la souffrance de
la personne repentante ! Léhi expliqua que cette
condition était essentielle pour obtenir la miséricorde
grâce à l'expiation du Christ. « Voici, il
s'offre en sacrifice pour le péché, il satisfait aux
buts de la loi pour tous ceux qui ont le coeur brisé et
l'esprit contrit ; et les buts de la loi ne peuvent être
satisfaits en nul autre. » (2 Néphi 2:7)
Quel
est donc le rôle de l'action disciplinaire de l'Église,
en opposition à la sanction prononcée par un tribunal
civil ? Le but principal de l'action disciplinaire de l'Église
qui est de sauver l'âme des transgresseurs, doit aider au
repentir. La souffrance personnelle fait inévitablement partie
de ce processus. Par exemple, lorsque la décision de la
disqualification ou de l'excommunication a été prise
par une commission disciplinaire de l'Église, elle peut
parfois être ressentie comme une punition et engendrer de la
souffrance. Mais infliger une punition ou de la souffrance n'est pas
le but d'une commission disciplinaire.
L'objectif
de l'action disciplinaire de l'Église est d'aider le
transgresseur à se repentir, ce qui lui permet de se qualifier
pour la miséricorde de Dieu et le salut rendus possibles grâce
à l'expiation de Jésus-Christ. En conséquence,
l'action disciplinaire de l'Église n'est pas un instrument de
punition mais un catalyseur pour le changement. Le but de la
souffrance, qui doit intervenir comme partie intégrante du
processus du repentir, n'est pas de punir le transgresseur, mais de
le faire changer. Le coeur brisé et l'esprit contrit requis
pour satisfaire aux buts de la loi amènent la personne
repentante à changer pour rendre sa vie conforme au modèle
prescrit par son Rédempteur.
Cette
présentation du fondement doctrinal de l'action disciplinaire
de l'Église répond aux questions habituelles du
transgresseur : « Pourquoi dois-je me repentir ?
Pourquoi dois-je me confesser à ma femme ? Pourquoi dois-je me
confesser à l'évêque ? Pourquoi dois-je réparer
? Pourquoi essayez-vous de me punir ? Pourquoi dois-je supporter la
honte de l'action disciplinaire de l'Église ? »
Comme le volage Corianton, quelques transgresseurs ont des
difficultés à comprendre « la justice de
Dieu dans la punition du pécheur » (Alma 42:1). Et
ils ne comprennent pas les conditions de la miséricorde. Ils
se demandent : « Pourquoi est-il nécessaire
que je souffre ? » « Maintenant que j'ai dit
que j'étais désolé, pourquoi ne pouvez-vous pas
m'accorder la miséricorde et oublier tout cela ? »
De
telles questions ont une raison d'être sous les lois des
hommes. Sous ces lois, la miséricorde peut être au
détriment de la justice (comme cela arrive dans le cas d'une
amnistie ou d'une grâce présidentielle).
À
l’opposé, sous les lois de Dieu la miséricorde ne
peut pas se substituer à la justice. Le pécheur doit se
repentir ou bien payer le prix de la souffrance pour ses propres
péchés. Le but des lois de Dieu est de sauver le
pécheur, pas simplement de le punir, mais il n'y a pas
d'exception aux conditions à remplir par un transgresseur pour
qu'il puisse bénéficier de la miséricorde
nécessaire au salut. La personne repentante doit changer, et
les conditions du repentir, qui comprennent la confession et la
souffrance, sont essentielles pour y parvenir. Un transgresseur qui
serait exempté de ces conditions ne pourrait pas opérer
le changement nécessaire à son salut, ce qui ne serait
ni juste ni miséricordieux.
Le
changement
Nous
pensons souvent aux résultats du repentir uniquement en tant
que purification de nos péchés. Ceci est une vision
incomplète. Une personne qui pèche est comme un arbre
qui plie facilement sous le vent. Par une journée de pluie et
de grand vent, l'arbre pourrait se pencher suffisamment pour que ses
feuilles soient maculées de boue, comme par le péché.
Si nous nous soucions uniquement de nettoyer les feuilles, la
faiblesse de l'arbre qui lui a permis de se pencher et de souiller
ses feuilles risque de persister. Nettoyer simplement les feuilles ne
fortifie pas l'arbre. De même, une personne qui regrette
simplement d'être souillée par le péché
péchera à nouveau lors de la prochaine tempête.
La prédisposition à la récidive demeurera tant
que l'arbre n'aura pas été fortifié.
Quand
une personne est passée par le processus qui résulte de
ce que les Écritures appellent un coeur brisé et un
esprit contrit, le Sauveur ne purifie pas seulement cette personne du
péché, il lui donne aussi une force nouvelle. La
nouvelle force que nous recevons du Sauveur est essentielle pour nous
purifier du péché, ce qui nous permet de retourner vers
notre Père céleste. Pour être admis en sa
présence, nous devons être absolument purs. D'une
personne faible qui a transgressé, chacun de nous doit être
transformé en une personne forte ayant une stature spirituelle
qui lui permet de vivre dans la présence de Dieu. Comme les
Écritures le disent nous devons devenir « [comme]
un saint par l'expiation du Christ le Seigneur » (Mosiah
3:19). C'est ce que les Écritures expliquent quand elles
disent qu'une personne qui s'est repentie de ses péchés
les délaissera (D&A 58:43). Délaisser le péché
est plus que se résoudre à ne pas le répéter.
L'abandonner implique un changement fondamental de l'individu.
Le
roi Benjamin et le prophète Alma ont tous deux parlé
d'un « grand changement dans le coeur ». Le
peuple du roi Benjamin décrivit ce grand changement en disant
qu'ils n'avaient plus « de disposition à faire le
mal, mais à faire le bien continuellement » (Mosiah
5:2). Alma illustra ce changement quand il écrivit que le
peuple « s'éveill[a] à Dieu »,
« mit [sa] confiance » en lui, et fut
« [fidèle] jusqu'à la fin ». Il
défia quiconque de « voir avec les yeux de la foi »
le temps où ils « paraît[raient] devant Dieu
[pour] être jugés » selon leurs oeuvres (Alma
5:7, 13, 15). Ceux qui ont vécu ce changement dans leur coeur
ont acquis la force et la stature nécessaires pour vivre avec
Dieu. C'est ce que nous appelons être sauvé.
C'est
le but ultime de l'action disciplinaire de l'Église. C'est la
raison pour laquelle elle applique des règles et des
procédures différentes de celles utilisées sous
les lois et la justice de l'homme.
Les
autres buts de l'action disciplinaire de l'Église
Sauver
les âmes est le but principal de l'action disciplinaire de
l'Église, mais elle a deux buts secondaires importants qui
soutiennent le but principal : protéger les saints et
préserver la respectabilité et l'influence de l'Église.
1.
Le berger doit agir pour protéger le troupeau de Dieu. Il doit
agir pour protéger l'innocent du prédateur. Alma
enseigna : « Quel est parmi vous le berger qui, ayant
beaucoup de brebis, ne veille pas sur elles pour que le loup n'entre
pas dévorer son troupeau ? Et voici, si un loup entre dans son
troupeau, ne le chasse-t-il pas ? Oui, et pour finir, s'il le peut,
il le détruira. Et maintenant, je vous dis que le bon berger
vous appelle, et si vous voulez écouter sa voix, il vous
mènera dans sa bergerie et vous deviendrez ses brebis ;
et il vous ordonne de ne point permettre qu'aucun loup vorace ne
pénètre parmi vous, afin que vous ne soyez point
détruits. » (Alma 5:59-60)
Les
menaces qui pèsent sur les innocents peuvent être la
mort, les coups et blessures ou le vol, par exemple par des pratiques
frauduleuses. Les innocents peuvent aussi être menacés
par de fausses doctrines, ce que nous appelons l'apostasie (dont il
sera fait état plus loin dans ce chapitre).
Le
berger a la responsabilité de protéger le troupeau de
toutes ces menaces. Cette responsabilité peut l'amener à
refuser la compagnie des saints à un prédateur ou même
à le retrancher du troupeau. Jésus enseigna :
« S'il ne se repent pas, il ne sera pas compté au
nombre de mon peuple » (3 Néphi 18:31 ;
voir aussi Mosiah 26:34-36).
Bien
sûr, il est vrai également que la protection des
innocents (face aux menaces physiques ou financières, mais pas
spirituelles) est l'un des objectifs des lois de l'homme.
2.
L'autre but secondaire de l'action disciplinaire de l'Église
est de préserver l'influence positive de l'Église, sa
capacité à accomplir sa mission d'enseigner et
d'influencer les gens dans la droiture. L'action disciplinaire de
l'Église doit sauvegarder la pureté, l'intégrité
et la respectabilité de l'Église. À cet égard,
il y a deux aspects à considérer ; le premier a
trait aux transgressions des membres en général, le
second traite plus particulièrement des membres les plus
éminents et les plus influents, y compris les dirigeants et
les instructeurs.
Le
premier aspect concerne la responsabilité du dirigeant de
l'Église de prévenir le péché et de
réprimander ceux qui transgressent. Les Écritures
contiennent de nombreuses définitions de cette responsabilité,
comme par exemple dans Mosiah 26:6 ; 1 Thessaloniciens
5:14 ; 1 Timothée 5:20 ; Tite 1:10-13. Elles
déclarent même que le dirigeant qui n'enseigne pas et
n'avertit pas devra porter lui-même le fardeau de ces péchés.
Ainsi, le prophète Jacob écrit à propos de ceux
qui magnifient leur charge de dirigeants en « prenant sur
nous la responsabilité, répondant des péchés
du peuple sur notre tête si nous ne lui enseignions pas la
parole de Dieu avec diligence ; c'est pourquoi, en travaillant
de toutes nos forces, son sang ne viendrait pas sur nos vêtements ;
autrement son sang viendrait sur nos vêtements et nous ne
serions pas sans tache au dernier jour. » (Jacob 1:19 ;
voir aussi 2 Néphi 9:44 ; D&A 68:25 ;
88:81-85 ; Ézéchiel 33:2-9)
Alors
qu'il était président du Conseil des Douze, John Taylor
a donné cet avertissement : « J'ai entendu
parler d'évêques qui ont cherché à couvrir
les iniquités des hommes ; je leur dis, au nom de Dieu,
qu'ils devront endosser...cette iniquité, et que s'il en est
parmi vous qui veulent participer aux péchés des hommes
ou les soutenir, ils devront en porter le poids. Entendez-vous,
évêques et présidents ? Dieu vous en demandera
des comptes. Vous n'êtes pas mis en place pour jouer avec les
principes de la justice ni pour couvrir les infamies et les
corruptions des hommes. » (Conference Report, avril 1880,
p. 78 ; voir aussi Guide d'étude personnelle de la
prêtrise de Melchisédek, n°4, p. 71)
Dans
un discours donné en 1885, George Q. Cannon condamna
l'immoralité sexuelle et mit ensuite l'accent sur l'importance
que les dirigeants la traitent et la corrigent, de même que
d'autres transgressions commises par les membres de l'Église :
« Maintenant, si on permet sans réagir à de
telles pratiques de perdurer en notre sein, elles seront à
l'origine des plus terribles conséquences. L'Esprit de Dieu
sera indubitablement si affligé qu'il abandonnera non
seulement ceux qui sont coupables de ces actes, mais s'éloignera
aussi de ceux qui tolèrent qu'ils soient incontrôlés
et non réprimandés parmi nous » (Journal of
Discourses, vol. 26, p. 139). Cet enseignement est fondé sur
le conseil pertinent des Écritures de chasser le transgresseur
qui ne se repent pas et qui ne renonce pas à ses péchés.
Pendant
le règne du roi Mosiah, quand les dissidents et les incroyants
séduisaient de nombreuses personnes et les encourageaient à
commettre des péchés, « il devint nécessaire
que ceux qui étaient dans l'Église et qui commettaient
le péché fussent avertis par l'Église »
(Mosiah 26:6). Le Seigneur instruisit alors le prophète Alma :
« Quiconque ne voudra pas se repentir de ses péchés
ne sera pas compté parmi mon peuple » (Mosiah
26:32 ; voir aussi le verset 36).
De
même, l'apôtre Paul, informé qu'il y avait des
fornicateurs dans l'Église de Corinthe, leur rappela « qu'un
peu de levain fait lever toute la pâte ». « Faites
disparaître le vieux levain », leur conseilla-t-il,
« afin que vous soyez une pâte nouvelle »
(1 Corinthiens 5:6-7). L'apôtre leur rappela en des termes
encore plus précis « de ne pas avoir de relations
avec celui qui, se nommant frère, est impudique... Ôtez
le méchant du milieu de vous... » (1 Corinthiens
5:11, 13 ; voir aussi 2 Thessaloniciens 3:6, 14 ; Tite
3:10).
Dans
cette dispensation nous avons reçu le même conseil :
« Et celui qui ne se repent pas de ses péchés
et ne les confesse pas, vous l'amènerez devant l'Église,
et vous ferez de lui ce que l'Écriture vous dit, soit par
commandement, soit par révélation. Vous ferez ceci afin
que Dieu soit glorifié - non pas que vous ne pardonnez pas,
n'ayant pas de compassion, mais afin que vous soyez justifiés
aux yeux de la loi, afin que vous n'offensiez pas celui qui est votre
législateur » (D&A 64:12-13 ; voir aussi
20:80). En résumé, « Celui qui pèche
et ne se repent pas sera chassé » (D&A 42:28 ;
voir aussi 42:75 ; 41:5). Sinon, nous sapons l'autorité
des commandements divins et nous offensons le législateur.
Deuxièmement,
la respectabilité et l'influence de l'Église sont
particulièrement menacées par la transgression de ses
membres les plus éminents, entre autres les dirigeants et les
instructeurs, puisque leurs transgressions affaibliront
vraisemblablement l'autorité morale et la crédibilité
de l'enseignement de l'Église. Une transgression commise par
un membre détenant un poste en vue peut sérieusement
nuire à l'enseignement des principes corrects de l'Église,
à moins qu'elle ne corrige publiquement le transgresseur. Au
contraire, l'action disciplinaire de l'Église requise après
la transgression d'un membre ordinaire, et à fortiori si cette
transgression n'est pas connue de tous, peut être réglée
avec un minimum de formalités pour sauver l'âme du
transgresseur. Cette différence qui entraîne des
conséquences plus sérieuses et publiques pour les
dirigeants les plus éminents est sous-tendue par la révélation
qui déclare : « Car on demandera beaucoup à
celui à qui l'on a beaucoup donné ; et celui qui
pèche contre une plus grande lumière recevra une
condamnation plus grande. » (D&A 82:3)
La
pureté, l'intégrité et la respectabilité
de l'Église semblent être le fondement de ce que le
Sauveur enseigna à ses apôtres à Capernaüm.
« Si ta main est pour toi une occasion de chute,
coupe-la » enseigna-t-il, expliquant que : « mieux
vaut pour toi entrer manchot dans la vie que d'avoir les deux mains
et d'aller dans la géhenne » (Marc 9:43-44). La
main semble faire référence à l'ensemble des
membres de l'Église. Dans sa traduction inspirée,
Joseph Smith, le prophète, expliqua le sens de ce passage :
« si ton frère t'offense et ne confesse pas et n'y
renonce pas, il sera chassé » (Marc 9:40 ;
traduction de la Bible par Joseph Smith). Ainsi clarifié, le
conseil n'est pas de chasser chaque transgresseur, mais seulement
ceux qui ne se confessent pas et ne renoncent pas à leurs
péchés.
À
l’opposé, le pied et l'oeil semblent faire référence
aux dirigeants. Ils sont tenus en estime. À cause de leur
poste en vue et de leur influence, ils devraient être chassés
même s'ils se sont confessés et ont renoncé à
leur transgression :
« Et
de plus, si ton pied t'offense, coupe-le ; car celui qui a les
valeurs morales selon lesquelles tu marches, sera coupé s'il
transgresse. Il vaut mieux pour toi, entrer boiteux dans la vie que
d'avoir les deux pieds et d'être jeté en enfer, dans le
feu qui ne s'éteint point... Et si ton oeil qui voit pour toi,
celui qui est nommé pour s'occuper de toi, pour te montrer la
lumière, devient un transgresseur et t'offense, ôte-le.
Il vaut mieux pour toi d'entrer borgne dans le royaume de Dieu que
d'avoir les deux yeux et d'être jeté dans le feu de
l'enfer. » (Marc 9:42-43, 46-47, traduction de Joseph
Smith).
Couper
un dirigeant ou un membre de l'Église signifie excommunier,
disqualifier ou retirer des privilèges à cette
personne. Dans ce contexte, les Écritures enseignent comment
appliquer ce que nous appelons aujourd'hui l'action disciplinaire de
l'Église ; elles préconisent une discipline plus
sévère pour les dirigeants.
Cette
comparaison des différents buts de l'application de la loi et
de l'action disciplinaire de l'Église ne serait pas complète
sans un avertissement important. Les principes et les considérations
que les dirigeants de la prêtrise doivent suivre sont énoncés
dans le Manuel d'Instructions Générales de l'Église (devenu Manuel d'instructions
de l'Église, puis Manuel 1, ndt).
Les exemples présentés dans ce chapitre sont choisis
pour illustrer les comparaisons entre la loi de Dieu et la loi
civile. Cependant, ils ne donnent pas tous les conseils nécessaires
à l'application de l'action disciplinaire de l'Église.
En matière d'action disciplinaire aussi bien qu'en termes de
procédure (présentés ci-après), les
dirigeants de la prêtrise seront guidés par le Manuel
d'Instructions Générales (idem, ndt).
Les
procédures de l'action disciplinaire de l'Église
Les
différences entre les buts de l'action disciplinaire de
l'Église et les buts de l'application du droit civil ou du
droit pénal existent aussi dans les procédures
utilisées. Ces différences sont présentées
ici du point de vue de l'action disciplinaire de l'Église.
L'action
disciplinaire non officielle
L'action
disciplinaire non officielle comprend (1) le conseil et
l'avertissement en privé et (2) une mise à l'épreuve
non officielle. Ces mesures sont traitées en privé et
confidentiellement par l'évêque ou le président
de pieu, sans formalité telle qu'une convocation écrite
ou la rédaction d'un procès-verbal et sans annonce
publique de l'action entreprise. En général, même
les conseillers de l'évêque ou du président de
pieu ne sont pas au courant qu'une action disciplinaire non
officielle a été entreprise. Les procédures des
tribunaux civils peuvent proposer des alternatives au jugement
officiel (telles que le règlement à l'amiable des
disputes civiles ou autres arrangements possibles), mais elles
n'offrent pas d'équivalent à l'action disciplinaire non
officielle de l'Église.
L'action
disciplinaire officielle
L'action
disciplinaire officielle est administrée par une commission
disciplinaire de la paroisse, du pieu ou de la mission (appelée
autrefois tribunal de l'Église) selon une procédure qui
comprend la convocation, la présentation de preuves, la
possibilité pour le membre d'être entendu, et une
décision prise officiellement, puis consignée par écrit
et communiquée.
Les
principales ressemblances et différences entre une commission
disciplinaire et les procédures juridiques sont présentées
ci-dessous. Les procédures en droit civil sont amorcées
par une plainte, les poursuites en droit pénal sont mises en
oeuvre par l'action d'une personne responsable du maintien de
l'ordre. De même, les procédures de l'action
disciplinaire de l'Église peuvent être mises en oeuvre
suite à la plainte d'une victime ou par l'action d'un
dirigeant de l'Église. Quoi qu'il en soit, à l'opposé
du droit pénal, il n'y a pas de personne responsable du
maintien de l'ordre dans l'action disciplinaire de l'Église et
l'autorité de l'Église qui lance l'action peut agir par
le pouvoir du discernement (la révélation) aussi bien
que par l'observation personnelle ou une preuve officielle. Un
instructeur au foyer peut même remplir cette fonction, puisque
les Écritures lui donnent la responsabilité de
« toujours veiller sur l'Église... et de voir qu'il
n'y a pas d'iniquité dans l'Église » (D&A
20:53-54).
Le
juge et les autres participants
Une
commission disciplinaire, tout comme un tribunal, est présidée
par un juge. En matière d'organisation, la ressemblance
s'arrête là. À la différence d'un tribunal
d'instance ou d'une cour d'assises, une commission disciplinaire n'a
pas de procureur, d'avocat de la défense, ni de jurés.
L'évêque
(ou le président de mission ou de pieu) est le juge. Un évêque
est nommé pour « être juge en Israël »
(D&A 107:72). Il doit juger « par le témoignage
des justes,... selon les lois du royaume qui sont données par
les prophètes de Dieu » (D&A 58:18). Il
consulte ses conseillers, mais il prend seul la décision.
Dans
une commission disciplinaire de pieu, le président du pieu est
aidé de douze membres du grand conseil. Il est aisé de
se méprendre sur leur rôle. Les personnes mal informées
sont tentées de comparer les membres du grand conseil à
des jurés. En raison des instructions mal interprétées
de la section 102 des Doctrine et Alliances, il y a aussi une
tendance à considérer les membres du grand conseil
comme des accusateurs ou des défenseurs. Aucune de ces
comparaisons n'est appropriée.
Les
membres du grand conseil sont là pour « parler en
faveur de l'accusé et empêcher l'insulte ou
l'injustice » (D&A 102:17). En d'autres termes, ils
doivent s'assurer que les preuves sont examinées objectivement
et que les procédures et les égards vis à vis de
l'accusé sont en accord avec le droit et la justice. Leur rôle
est de rendre la compréhension du cas plus claire par la
persuasion ; ils n'ont pas à plaider ni à juger.
Ils ne peuvent pas dicter sa décision au juge ni opposer leur
veto, bien qu'ils puissent demander que les preuves soient
réexaminées s'ils découvrent « une
erreur dans la décision » (D&A 102:20).
Un
système non contradictoire
Dans
le système juridique nord-américain, les malfaiteurs
sont poursuivis par l'intermédiaire de ce que nous appelons le
système contradictoire. L'accusé et son avocat de la
défense sont opposés au procureur, mettant le ministère
public « à l'épreuve », et s'y
opposant à chaque étape. Cette attitude et cette
procédure remplissent bien le rôle qui leur est édicté
par les lois des hommes et qui a pour but de punir, mais elles ne
sont pas du tout en accord avec les procédures établies
dans l'action disciplinaire de l'Église.
Une
commission disciplinaire se soucie du bien-être du membre de
l'Église et, si elle est convaincue de sa culpabilité,
elle prend en compte la sincérité de son repentir. Le
but le plus important de l'action disciplinaire de l'Église
est de sauver le transgresseur. Dans ce cadre, la personne jugée
par l'action disciplinaire de l'Église devrait être
humble et non rebelle. Une attitude de rébellion n'est pas une
attitude repentante. Comme les professeurs McConkie et Millett l'ont
noté : « Quand une personne se repent dans la
sincérité de son âme, elle fait tout ce qui est
en son pouvoir pour réparer. Elle est prête à
accepter le jugement, quel qu'il soit, que le Seigneur et ses
serviteurs sur la terre lui rendront et à payer le prix
nécessaire pour sa réhabilitation au sein de l'Église.
Ce transgresseur ne cherche en aucune manière à
déterminer les termes de sa mise à l'épreuve ou
à atténuer la juste punition en conséquence de
son péché. Son coeur est comme un livre ouvert. Il n'y
pas de honte, d'hypocrisie ni de duplicité. »
(Doctrinal Commentary on the Book of Mormon, vol. 2, Salt Lake City,
Bookcraft, 1988, p. 300)
L'utilisation
de la confession d'un membre
La
nature non contradictoire de la procédure disciplinaire de
l'Église apparaît de façon évidente dans
un autre domaine. À la différence des règles
suivies dans les tribunaux civils, la confession ne peut pas être
utilisée comme preuve dans une commission disciplinaire de
l'Église à moins que le transgresseur n'y consente.
Cette règle illustre le devoir solennel de l'évêque
ou du président de pieu de garder la confidentialité la
plus absolue sur le contenu de la confession d'un membre. La
confidentialité encourage les membres à communiquer
librement avec leur évêque. La communication libre et en
confiance des membres avec leur évêque est essentielle à
la confession qui est vitale dans le processus du repentir et du
pardon. Ainsi, dans l'action disciplinaire de l'Église, le
rôle de preuve de la culpabilité que joue la confession
est secondaire par rapport à son rôle dans le processus
du repentir du transgresseur.
La
nécessité du consentement des transgresseurs pour
utiliser leur confession n'empêche pas les commissions
disciplinaires de l'Église de remplir leur but principal qui
est de sauver leur âme. Une personne repentante donnera son
consentement. Le non consentement d'une personne non repentante
n'enlèvera pas à une commission disciplinaire de
l'Église la possibilité de s'appuyer sur d'autres
preuves (elle n'empêchera pas non plus l'évêque
d'imposer une action disciplinaire non officielle fondée sur
la confession). Si la commission disciplinaire ne dispose ni de la
confession ni d'autre preuve pour se prononcer, le principal perdant
en sera la personne non repentante. Le refus de consentir à
l'utilisation de sa confession empêchera l'action disciplinaire
de l'Église de lui apporter de l'aide.
Tromper
le juge
Il
en sera de même si le transgresseur réussit à
tromper l'autorité de l'Église responsable d'appliquer
une action disciplinaire.
Supposons
qu'un transgresseur soit traité avec plus de clémence
après avoir trompé l'autorité. Quelles en seront
les conséquences ? Le but de l'action disciplinaire de
l'Église n'est pas de maintenir en équilibre la balance
de la justice en donnant une « sanction proportionnée
à la faute ». Le but de l'action disciplinaire de
l'Église est d'aider le transgresseur à se repentir et
à sauver son âme. S'il feint de se repentir et ne reçoit
pas de sanction ou en reçoit une extrêmement clémente,
il sera le principal perdant.
Dieu,
qui connaît les actions, les pensées et les motivations
les plus intimes de chacun de nous, sera le juge ultime dans la
justice éternelle dont l'action disciplinaire de l'Église
n'est que la prémisse. Dans l'action disciplinaire de
l'Église, l'homme qui juge peut pardonner les péchés
en tant que représentant de l'Église, mais le seul qui
puisse absoudre les péchés est Dieu lui-même
(voir The Teachings of Spencer W. Kimball, p. 101). Dieu a déclaré
que « nul n'est sauvé si ce n'est le vrai
pénitent » (Alma 42:24).
Des
preuves suffisantes
De
même que dans un tribunal d'instance ou une cour d'assises, en
cas de contestation (quand l'accusé nie sa culpabilité),
l'action disciplinaire de l'Église se fonde sur les preuves.
Comme le président Joseph F. Smith l'a déclaré
le 13 septembre 1917 : « Si dans l'Église un
homme est accusé nous ne nous attendons pas à ce qu'il
prouve son innocence, pas plus que ce serait attendu de lui sous les
lois du pays. S'il est coupable, nous nous attendons à ce que
la preuve de sa culpabilité soit apportée de façon
irréfutable ; et quand nous recevons cette preuve, nous
devons la traiter selon des principes justes, en exerçant
toute la miséricorde et la charité possibles et en
recherchant toujours le salut des hommes et non leur destruction. »
(James R. Clark, Messages of the First Presidency of The Church of
Jesus Christ of Latter-day Saints, vol. 5, Salt Lake City, Deseret
Book, 1986, p. 181)
Si
une personne a commis une transgression mais le nie et n'est pas
sanctionnée par une commission disciplinaire de l'Église
par manque de preuve, cette personne en sera la première
perdante. La loi de la miséricorde et le sacrifice expiatoire
de Jésus-Christ ne peuvent pas s'appliquer à celui qui
refuse de reconnaître et de confesser ses péchés.
Amulek expliqua les terribles conséquences qu'il y a à
reporter le repentir à plus tard : « Car
voici, si vous avez différé le jour de votre
repentance, même jusqu'à la mort, voici, vous vous êtes
assujettis au diable, et il vous scelle à lui comme siens ;
c'est pourquoi, l'Esprit du Seigneur s'est retiré de vous, et
n'a aucune place en vous, et le diable a tout pouvoir sur vous ;
et c'est là l'état final du méchant. »
(Alma 34:35)
Entre
temps, nous pouvons seulement espérer que le transgresseur
changera de disposition de coeur et qu'il se repentira et se
qualifiera pour obtenir miséricorde. En attendant, le
processus de purification est retardé, et le salut du
transgresseur est en danger.
Aux
États-Unis, si une procédure est engagée dans un
tribunal civil et qu'il apparaisse que l'on manque de preuves pour
établir le chef d'accusation, la seule alternative possible
est de mettre fin aux poursuites ou d'ordonner un non-lieu. Dans
chacun de ces cas, le défendeur ne pourra plus être
poursuivi pour ce motif car la Constitution interdit une remise en
accusation.
À
l’opposé, de par les procédures et les objectifs
de l'action disciplinaire de l'Église, si la preuve présentée
devant une commission disciplinaire est insuffisante pour justifier
une action officielle de l'Église mais que l'officier
président est convaincu que l'affaire ne devrait pas être
classée, il peut ajourner momentanément la commission
pour chercher ou attendre des preuves supplémentaires.
Les
preuves dans une accusation d'adultère
Quand
il y a une accusation d'adultère et que l'accusé nie,
les commissions disciplinaires de l'Église requièrent
des preuves pertinentes et rigoureuses. La révélation
connue sous le nom de la « loi de l'Église »
conseille :
« Si
un homme ou une femme commettent l'adultère, ils seront jugés
devant deux anciens de l'Église ou plus et toute parole sera
établie contre eux par deux témoins de l'Église
et pas de l'ennemi ; mais s'il y a plus de deux témoins,
c'est mieux.
« Mais
ils seront condamnés par la bouche de deux témoins ;
et les anciens présenteront l'affaire devant [les membres de]
l'Église, et [les membres de] l'Église lèveront
la main contre eux selon la loi de Dieu. » (D&A
42:80-81)
Pour
illustrer l'application de cette règle, supposons qu'un membre
de l'Église confesse un adultère commis avec un autre
membre et révèle l'identité de cette autre
personne. Supposons ensuite que l'autre nie et qu'il n'y ait pas de
preuve directe ou indirecte ni de témoignage d'un tiers qui
constituerait le second témoignage requis par la révélation.
Dans
ce cas l'autre personne peut-elle recevoir une sanction officielle de
la part d'une commission disciplinaire de l'Église ? Non, pas
encore. L'officier président peut entamer une action
disciplinaire non officielle, mais sans un second témoin, la
personne accusée d'adultère ne peut pas, pour le
moment, recevoir de sanction officielle de l'Église. La
question reste en suspens comme dans le cas d'autres transgressions
non prouvées.
Pourquoi
requiert-on deux témoins (ce qui signifie deux sources
distinctes de preuves) pour une accusation d'adultère et pas
pour d'autres transgressions graves ? Peut-être parce que le
péché d'adultère est à la fois grave et
(habituellement) discret. Il est facile pour une personne vindicative
d'accuser de ce genre de transgression et difficile pour un innocent
de la réfuter. La nécessité de deux témoins
est une protection extraordinaire pour l'innocent quand cette
protection est nécessaire.
De
plus, l'adultère est probablement la transgression la plus
grave qui soit communément prise en compte par une commission
disciplinaire de l'Église. D'autres transgressions sérieuses,
telles que le meurtre ou le vol, sont habituellement examinées
tout d'abord par des tribunaux civils qui ont leurs propres règles
rigoureuses à propos des preuves. Ainsi, la révélation
citée plus haut énonce une règle stricte dans la
présentation des preuves pour une accusation qui est
habituellement traitée par l'action disciplinaire de l'Église
et qui est à la fois grave et sujette à manipulation.
La
protection de l'innocent
L'action
disciplinaire de l'Église est beaucoup plus souple que la
justice civile dans sa capacité à s'adapter aux besoins
des innocents concernés par une commission disciplinaire. La
loi et les pressions administratives obligent souvent les tribunaux
civils à agir selon un emploi du temps rigide et sans égard
pour l'innocent. L'action disciplinaire de l'Église est plus
flexible dans son fonctionnement et plus compréhensive dans
son attitude. Elle peut autoriser de longs délais, si
nécessaire, pour le bien du transgresseur, de son conjoint ou
d'autres membres de sa famille, ou pour la victime innocente. Elle
peut prendre en compte les besoins des innocents pour décider
de la sanction et des limites dans lesquelles elle sera rendue
publique.
Le
rôle de la révélation
Une
différence importante entre les tribunaux civils et l'action
disciplinaire de l'Église est que l'action disciplinaire de
l'Église s'appuie sur la révélation, ce qui se
produit de deux façons, l'une courante, l'autre
exceptionnelle.
Généralement,
les participants à une commission disciplinaire s'appuient sur
la révélation pour les guider dans l'accomplissement de
leurs responsabilités qui sont comparables à celles
exercées dans les tribunaux civils : comprendre et
évaluer les preuves et déterminer les sanctions
appropriées.
Par
exemple, la section des Doctrine et Alliances décrivant la
procédure suivie par les grands conseils de pieu précise
que « lorsque les preuves auront été
entendues, que les conseillers, l'accusateur et l'accusé
auront parlé, le président prendra une décision
selon la compréhension qu'il aura du cas » (D&A
102:19). Le président Joseph F. Smith commenta l'application
de cette directive en expliquant que le devoir du grand conseil est
« de trouver la vérité et les faits puis de
juger selon la vérité et les faits qui sont amenés
à leur connaissance » (Doctrine de l'Évangile,
p. 149). Ces instructions laissent supposer que la décision
de la commission disciplinaire sera fondée sur les preuves
grâce à l'inspiration que doivent rechercher en toute
chose ceux qui agissent par l'autorité de la sainte prêtrise.
D'autre
part, la révélation peut les guider dans une commission
disciplinaire, dans un cas spécifique et exceptionnel.
Le
Seigneur a commandé aux premiers dirigeants de l'Église
d'entamer une action contre les transgresseurs non repentants. Il a
aussi prescrit la procédure à suivre dans ce cas :
« Et celui qui ne se repent pas de ses péchés
et ne les confesse pas, vous l'amènerez devant l'Église
et vous ferez de lui ce que l'Écriture vous dit, soit par
commandement, soit par révélation. » (D&A
64:12)
Agir
de la sorte avec « celui qui ne se repent pas »
correspond à suivre les principes et les procédures
spécifiés dans les Écritures. Quand ce conseil
fut donné en 1831, les dirigeants de l'Église
disposaient de nombreuses Écritures comprenant les principes
de l'action disciplinaire de l'Église et les transgressions
pour lesquelles elle s'imposait. Ces conseils scripturaires se
trouvent dans la Bible, le Livre de Mormon et la révélation
moderne, notamment la « loi de l'Église »
(D&A 42) donnée six mois auparavant (la section 102 des
Doctrine et Alliances qui explique la procédure utilisée
dans les grands conseils vint plusieurs années plus tard).
Les
termes suivants du verset cité plus haut expliquent comment
les conseils scripturaires doivent être appliqués dans
l'action disciplinaire de l'Église : « soit
par commandement, soit par révélation » (D&A
64:12).
L'application
des Écritures par commandement signifie de suivre leurs
conseils à la lettre, y compris dans la procédure
habituelle qui inclut de recevoir et d'évaluer les preuves,
comme dans un tribunal civil. Par exemple, dans la révélation
donnée juste un mois plus tard, l'évêque était
présenté comme « juge en Israël... pour
juger son peuple par le témoignage des justes »
(D&A 58:17-18). À l’opposé, l'application de
ces Écritures « par révélation »
va au-delà du fait de les suivre à la lettre et de se
limiter à des preuves devant une commission. La révélation
suivante relative à la procédure du grand conseil donne
un exemple du sens de cette directive : « En cas de
difficulté concernant la doctrine ou les principes, si les
Écritures sont insuffisantes pour rendre le cas clair dans
l'esprit du conseil, le président peut interroger le Seigneur
et obtenir sa volonté par révélation. »
(D&A 102:23)
Cette
mention d'une « difficulté concernant la doctrine
ou les principes » semble limiter cette directive aux
révélations sur les principes de gouvernement, sur des
sujets tels que la signification des commandements (ce qu'ils
interdisent). Apparemment il ne s'agit pas ici d'une révélation
qui dévoilerait, à propos de quelqu'un, la culpabilité
dont le conseil n'aurait pas la preuve. Ce que Joseph F. Smith a dit
peu après être devenu président de l'Église
confirme cette interprétation. Dans un procès
d'assises, un témoin affirma qu'il savait que l'accusé
était coupable parce qu'il avait appris cela par révélation.
En réponse aux critiques publiques qui prétendirent que
l'Église approuvait les dires de ce témoin, le
président Smith déclara : « Une telle
preuve ne serait pas acceptable dans un tribunal de l'Église
où l'utilisation d'une preuve, bien qu'elle ne réponde
pas à des critères aussi techniques que dans un
tribunal civil, est fondée en grande partie sur les mêmes
principes. » (Joseph Fielding Smith, Doctrine de
l'Évangile, p. 40)
La
déclaration du président Smith mit l'Église à
l'écart d'un procès dans lequel un témoin
déclara, sur la base de la révélation, que
l'accusé était coupable. Cependant, sa déclaration
n'enlève pas la possibilité qu'un témoin reçoive
de l'inspiration pour l'aider à témoigner, à se
souvenir des preuves ou à les exprimer. La déclaration
du président Smith n'exclut pas non plus que l'officier
président et les membres d'une commission disciplinaire de
l'Église s'appuient sur la révélation pour
déterminer la culpabilité ou l'innocence de l'accusé.
Nous ne pourrions pas nier l'efficacité de la révélation
dans ce domaine sans aller à l'opposé de l'organisation
et du but de l'Église, et de sa direction divine. Mais, bien
que nous affirmions le bien fondé de la révélation
à ce propos, nous devons mettre l'accent sur le fait que cette
révélation est soumise à une limite importante
mais que cette limite ne s'applique pas aux officiers présidents
qui reçoivent et évaluent les preuves selon la
procédure habituelle ou par la révélation
clarifiant la signification d'un commandement.
Bien
qu'une commission disciplinaire de l'Église traite les preuves
de façon comparable à un tribunal civil, l'officier
président est seul juge et ses décisions n'ont pas à
être soutenues unanimement par les autres membres de la
commission. Si un des membres de la commission pense qu'il y a une
erreur dans la décision, « le cas fera l'objet
d'une nouvelle audience » (D&A 102:20), ce qui, selon
moi, ne signifie pas qu’on procède à nouveau à
l’audition des preuves, mais qu’on les réexamine.
À moins que ce réexamen apporte « une
lumière supplémentaire » qui modifierait la
décision, il est prévu que « la première
décision sera maintenue, la majorité du conseil ayant
le pouvoir de la déterminer » (D&A 102:21-22).
Autrement dit, quand il s'agit d'évaluer les preuves dans un
cas qui ne fait pas l'unanimité, le résultat est
déterminé par l'officier président et une
majorité de la commission.
Je
pense qu'il en est autrement quand la décision est fondée
sur la révélation plutôt que sur les preuves. Si
une commission disciplinaire devait s'appuyer sur la révélation
pour apporter la preuve de la culpabilité, cela devrait se
faire uniquement en accord avec la procédure prévue
pour l'action des commissions de la prêtrise en général :
« Toute décision prise par l'un ou l'autre de ces
collèges doit être à l'unanimité des voix
qui le composent ; c'est à dire que chaque membre du
collège doit être d'accord avec les décisions de
celui-ci pour que les décisions aient le même pouvoir ou
la même validité dans l'un que dans l'autre »
(D&A 107:27). En d'autres termes, si la commission disciplinaire
s'appuie sur la révélation pour apporter tout élément
complémentaire de preuve devant la commission, cet élément
doit obtenir l'unanimité des membres de la commission.
En
public ou en privé
Une
autre différence entre les procédures des commissions
qui appliquent les lois de Dieu et celles des tribunaux qui
appliquent les lois de l'homme est la mesure dans laquelle leur
action parvient à la connaissance du public.
En
général la Constitution et la loi des États et
des nations garantissent un jugement public à celui qui est
accusé de crime. Pour l'accusé, ceci est une importante
garantie d'équité et de justice. En revanche, la
plupart des actions disciplinaires de l'Église sont
confidentielles. Pour sauvegarder la vie privée du membre et
le processus de repentir, le juge et les autres participants sont
liés par le plus solennel devoir de confidentialité. Là
où une action disciplinaire a été engagée,
il peut s'avérer nécessaire d'en faire connaître
publiquement le résultat (mais pas les détails de la
transgression) pour répondre aux buts de l'action
disciplinaire.
Si
le but d'une action disciplinaire, comme une excommunication ou une
disqualification, est de sauvegarder la respectabilité et
l'influence morale de l'Église, il pourra être
nécessaire de rendre publique cette action disciplinaire pour
qu'elle atteigne son objectif. Une annonce publique peut aussi être
nécessaire dans le cas où il y a lieu de protéger
l'innocent. Si le troupeau doit être protégé
contre un prédateur, il se pourra que celui-ci doive être
publiquement identifié comme tel.
Quoiqu'il
en soit, dans la plupart des cas où l'action disciplinaire est
motivée par le seul désir de sauver l'âme du
transgresseur, elle reste confidentielle, et ne peut être
communiquée qu'à ceux qui doivent en être
informés. En général, la décision de
mettre une personne à l'épreuve n'est annoncée à
personne. Les décisions d'excommunier ou de disqualifier sont
annoncées en privé aux officiers locaux qui ont besoin
de cette information pour accomplir leur devoir dans l'Église.
Ces
principes sont dictés par la révélation. La
révélation connue sous le nom de « la loi de
l'Église » proclame le principe de la
confidentialité : « S'ils ne confessent pas,
tu les livreras à l'Église, pas aux membres, mais aux
anciens. Cela se fera dans une réunion, pas devant le monde. »
(D&A 42:89)
La
révélation déclare ensuite que les personnes qui
« en offensent beaucoup... seront châtié[es]
devant beaucoup », et « si quelqu'un t'offense
ouvertement, il sera réprimandé ouvertement, afin qu'il
ait honte » (D&A 42:90-91). À l’opposé,
« si quelqu'un t'offense en secret, il sera réprimandé
en secret, afin qu'il ait l'occasion de confesser en secret à
celui ou à celle qu'il a offensé, et à Dieu,
afin que l'Église ne lui fasse pas de reproche. »
(D&A 42:92)
Cette
révélation montre l'interaction entre deux buts
différents de la sanction : protéger la
respectabilité et l'influence morale de l'Église et
faciliter le repentir. Quand un péché grave est connu
de tous ou s'il y a de nombreuses victimes, et particulièrement
si le transgresseur est un membre occupant un poste en vue dans
l'Église, l'action disciplinaire de l'Église, dont le
but est de sauvegarder la respectabilité et l'influence morale
de l'Église, commande que l'action disciplinaire soit rendue
publique. Celui qui « offense ouvertement... sera
réprimandé ouvertement ». D'un autre côté,
quand un péché n'est pas connu de tous, le repentir et
l'action disciplinaire de l'Église peuvent être traités
de façon privée. Celui qui « offense en
secret... sera réprimandé en secret ». De
même, quand des personnes ne se sont ni confessées ni
repenties, elles sont présentées devant une réunion
d'anciens agissant an nom de l'Église, « et pas
devant le monde ». Ceci montre l'importance de la
confidentialité dans l'action disciplinaire de l'Église
envers les membres ordinaires et dont le seul but est de sauver l'âme
du transgresseur.
L'apostasie
Cette
présentation des différences entre les lois de Dieu et
les lois de l'homme ne serait pas complète si on ne
considérait pas le péché de l'apostasie.
Quelques-unes des transgressions graves traitées par l'action
disciplinaire de l'Église, telles que le meurtre, le vol et la
violence sexuelle, constituent aussi de graves délits. À
l’opposé, il y a deux transgressions graves qui ne sont
pas considérées comme de graves délits dans le
droit civil ; ce sont l'adultère (dont il a été
question précédemment) et l'apostasie. Bien qu'elle ait
un lien avec les délits de trahison, de sédition et
autres, l'apostasie n'appartient qu'au droit religieux. L'apostasie,
telle qu'elle est définie et traitée par l'Église
de Jésus-Christ des saints des derniers jours, est le fait
d'enseigner et/ou de pratiquer de fausses doctrines, et pas
simplement d'y croire.
La
différence essentielle qui existe entre le fait de croire à
une fausse doctrine et celle de l'enseigner a été
définie dans une directive donnée par George Q.
Cannon :
« Un
ami... voulait savoir si nous... considérions qu'une simple
différence de point de vue entre un membre et les Autorités
de l'Église pouvait être assimilée à de
l'apostasie. Nous répondîmes que nous n'avions jamais
déclaré qu'une simple différence de point de vue
entre un membre de l'Église et les Autorités
constituait une apostasie, car nous pouvions concevoir qu'un homme
puisse avoir un point de vue différent de celui des Autorités
de l'Église sans pour autant être un apostat ; mais
nous ne pouvions concevoir qu'un homme publie ces différences
de vue et cherche à diviser l'Église et à lutter
contre les Autorités au moyen d'arguments, de sophisme et de
plaidoyers présentés sous un mauvais angle sans qu'il
soit considéré comme un apostat, car une telle conduite
était de l'apostasie, tel que nous comprenons ce terme. »
(George Q. Cannon, Gospel Truth, éd. Jerrel L. Newquist, Salt
Lake City, Deseret Book Co., 1987, p. 493, discours donné le 3
novembre 1869)
Un
demi siècle plus tard, le président Joseph F. Smith
affirma cette différence dans un article important intitulé
« Les principes de gouvernement dans l'Église ».
Il dit qu'un homme qui professe être membre de l'Église
de Jésus-Christ des saints des derniers jours mais « qui
ignore et rejette la doctrine de l'expiation... n'est pas digne
d'être membre de l'Église.
« Il
peut être considéré inoffensif ou sans grand
danger pour les autres aussi longtemps qu'il garde la bouche fermée
et ne divulgue pas ses doctrines pernicieuses, et il peut lui être
permis de rester membre de l'Église ; mais à
partir du moment où vous le trouvez essayant d'empoisonner
l'esprit de quelqu'un d'autre, un innocent, un naïf, un
imprudent, essayant de semer les graines de la mort, de l'apostasie,
de l'incrédulité et de l'infidélité dans
l'esprit des innocents, à ce moment-là il revient à
l'évêque de la paroisse où l'homme réside
de le prendre à part et de le juger. » (Joseph F.
Smith, dans Messages of the First Presidency, vol. 5, p. 83 ;
voir aussi Improvement Era, novembre 1917, p. 7, 11)
Pour
les besoins de l'action disciplinaire, l'Église définit
actuellement l'apostasie comme se rapportant aux membres qui, (1) de
manière répétée s'opposent publiquement
et de façon délibérée et déclarée
à l'Église ou à ses dirigeants, (2) persistent à
enseigner comme doctrine de l'Église des idées
personnelles, après avoir été repris par leur
évêque ou une autorité supérieure ;
ou (3) continuent de suivre les enseignements de sectes apostates
(telles que celles qui prônent le mariage plural) après
avoir été repris par leur évêque ou une
autorité supérieure. Le fait d'être totalement
non pratiquant dans l'Église ou même d'assister aux
réunions d'une autre Église ou même d'en être
membre ne constitue pas une apostasie.
Bien
qu'elle ait une action très importante contre l'intégrité
doctrinale de l'Église et la sécurité du
troupeau de Dieu, l'apostasie est une transgression difficile à
corriger par l'action disciplinaire de l'Église. Contrairement
aux autres transgresseurs, l'apostat est la plupart du temps arrogant
et non repentant. En fin de compte, la correction d'un apostat peut
se situer à l'opposé d'une correction faite en privé,
de façon utile et dévouée, ce qui est le modèle
et le but premier de l'action disciplinaire de l'Église. À
moins qu'elle ne soit administrée avec la plus extrême
prudence, il est probable qu'une action disciplinaire engagée
pour apostasie présentera quelques-uns des caractères
que revêt toute action judiciaire contradictoire. Pour éviter
cela, les officiers de l'Église qui se trouvent dans une telle
situation devraient être particulièrement bien informés
des différences qui existent entre l'action disciplinaire de
l'Église et les poursuites judiciaires. Ils devraient aussi
être diligents à accomplir les buts de l'action
disciplinaire, particulièrement dans le fait de protéger
le troupeau de Dieu, sans se perdre dans des détails de
procédure et sans se mettre dans l'état d'esprit d'un
tribunal civil.
Conclusion
En
résumé, les lois de l'homme et les lois de Dieu
poursuivent des buts différents, bien qu'elles se chevauchent
partiellement. Les lois de l'homme cherchent en priorité à
rendre justice pour que le coupable paie sa dette à la
société. Les lois de Dieu tiennent compte de la
justice, mais elles font partie d'un cadre plus large qui inclut la
miséricorde et l'expiation de Jésus-Christ. À
partir de là, le but principal de l'action disciplinaire de
l'Église n'est pas de punir le transgresseur, mais de l'aider
à se repentir et à sauver son âme. En
conséquence, l'action disciplinaire de l'Église se
concentre sur les conditions qui encouragent le coupable à se
repentir, à recevoir la miséricorde grâce au
sacrifice expiatoire de Jésus-Christ, et à opérer
le changement de vie qui lui permettra d'atteindre l'exaltation.
Cette
différence est mal comprise. Certains membres de l'Église
commettent l'erreur de juger l'efficacité de l'action
disciplinaire de l'Église en évaluant la sanction par
rapport à la transgression. Les membres qui tentent ce genre
d'évaluation comprennent mal les lois de Dieu et les buts de
l'action disciplinaire de l'Église. D'autres commettent
l'erreur d'essayer de déterminer si l'action disciplinaire est
juste et opportune alors qu'ils ne connaissent pas l'ensemble des
faits qui, dans une action disciplinaire de l'Église, sont
confidentiels et habituellement connus seulement de l'évêque
ou du président de pieu. Même si les faits sont connus,
un observateur extérieur ne connaît pas le point le plus
important sur lequel s'appuie l'action disciplinaire de l'Église,
à savoir : la sincérité du repentir du
transgresseur.
La
procédure de l'action disciplinaire de l'Église diffère
de la procédure civile dans le sens où elle facilite
les buts de la sanction, ce qui n'est généralement pas
le cas d'un jugement civil. Tout cela est en accord avec la
déclaration du Seigneur qui dit que tout doit se faire à
sa manière (voir D&A 104:16).