Croire
le Christ
Stephen
E. Robinson
©1992
Stephen Edward Robinson
Titre de l'édition originale : Believing Christ
Traduction :
Claude Boisseau
REMERCIEMENTS
CHAPITRE
1 : LE GRAND DILEMME
CHAPITRE
2 : LA BONNE NOUVELLE
CHAPITRE
3 : L’ALLIANCE
CHAPITRE
4 : LE SALUT PAR LA GRÂCE
CHAPITRE
5 : INCOMPRÉHENSION DE LA DOCTRINE DE LA GRÂCE
CHAPITRE
6 : « SEIGNEUR ? COMMENT EST-CE POSSIBLE ? »
Pour
Sarah, Rebekah, Emily, Michael, Mary et Leah
REMERCIEMENTS
Je remercie tous ceux qui ont
partagé avec moi les expériences relatées ici,
surtout ma femme, Janet, pour m’avoir autorisé à
les écrire afin qu’elles puissent être une
bénédiction pour qui se trouverait dans semblable
situation. Dans les cas qui ne concernaient pas ma famille, j’ai
changé certains noms et autres renseignements significatifs se
rapportant aux personnes, mais je n’ai pas changé la
teneur des expériences. Dans un cas, les caractéristiques
de plusieurs personnes ayant des histoires semblables ont été
combinées en une seule.
Je
me dois de dire un mot à propos de ma femme, Janet, puisqu’une
une des expériences clés relatées ici la
concerne tout particulièrement, on m’a dit une fois
qu’en parlant d’elle ainsi je la montrais sous un mauvais
jour et que je faisais briller son mari à ses dépens.
Habituellement, Janet et moi pensons en termes de nous plutôt
qu’en termes d’elle ou moi, mais si nous devions comparer
nos statures respectives, je crois que le sketch suivant illustrerait
à peu près les proportions exactes.
Lorsque
Janet arrivera aux portes des cieux, le Seigneur dira aux anges
quelque chose de ce genre : « Hé !
Regardez, voilà Janet Robinson ! La voilà enfin !
Sortons tous pour lui souhaiter la bienvenue et invitons la à
entrer ». Mais au moment où il la saluera sur les
marches, il s’arrêtera et dira : « Mais
Janet, qu’est-ce que c’est que cette triste chose que tu
traînes derrière toi ? » Ce à
quoi elle répondra : « Oh, ça ?
C’est mon mari. Est-ce que je peux le faire entrer aussi ? »
Sans elle, je n’ai pas la moindre chance, et tous ceux qui nous
connaissent le confirmeront.
J’ai
longtemps soutenu qu’un livre sans notes ne vaut pas la peine
d’être lu, car l’absence de documentation indique
que son contenu ne représente que l’opinion personnelle
de l’auteur et que celle-ci n’est pas admise sur le plan
académique. Dans ce cas, je plaide coupable. Fournir une
documentation sur soi-même ou sur ses expériences, ses
réflexions, et ses opinions est chose peu aisée. C’est
pourquoi le lecteur acceptera mon opinion ou la rejettera, c’est
son choix. Comme c’est un sujet personnel, j’ai essayé
d’utiliser le même style qu’en classe ou lors d’une
conversation, qu’il soit familier, elliptique, ironique ou
sarcastique. Je présente mes excuses à Mademoiselle
Wood, mon institutrice à l’école primaire, qui
m’a enseigné à faire mieux. Je ne fais appel à
aucune autorité extérieure pour appuyer mes dires, même
si j’ai inclus toutes les notes que j’ai pu dans ce genre
de livre, qui est évidemment axé sur la théologie,
mais aussi indiscutablement tourné vers la piété.
J’aimerais que le lecteur sache que je crois ce que j’ai
dit ici.
Qu’il
soit clair que j’ai écrit ce livre en tant que saint des
derniers jours pour un lectorat de saints des derniers jours. Je n’ai
pas la prétention d’être objectif, scientifique et
détaché. Si cette œuvre avait été
un papier à l’adresse de mes collègues dans le
domaine académique de la religion, la méthodologie et
le ton en auraient été très différents.
Mais il n’y a aucun problème à être
bilingue, et j’ai choisi pour ce livre le langage de la foi.
On me demande souvent comment
un président de département trouve le temps d’écrire.
Dans ce cas, la réponse se trouve dans le soutien exceptionnel
de ma secrétaire. Je remercie Joell Woodbrey de me protéger
des choses non essentielles.
Une
petite partie de ce livre a été présentée
en mai 1990 lors d’un discours à BYU intitulé :
« Believing Christ : A Practical Approach to the
Atonement et il a été édité dans « BYU
Today » de novembre 1990 et dans Brigham Young University
1989-90 Devotional and Fireside Speeches (Provo : University
Publications, 1990). Une version légèrement révisée
de ce discours a aussi été réimprimée
dans l’Ensign et les magazines internationaux de l’Église
en avril 1992
L’auteur
n’a aucune autorité pour s’exprimer dans ce livre
au nom de l’Église de Jésus-Christ des saints des
derniers jours. Les idées qui y sont exprimées
représentent un point de vue sincère, mais strictement
personnel.
CHAPITRE
UN : LE GRAND DILEMME
Pour
l’homme, le problème universel, la grande contradiction,
dilemme, ou dichotomie réside en deux simples faits :
Le premier est clairement cité
dans les Doctrine et Alliances 1:31 : « Car moi, le
Seigneur, je ne puis considérer le péché avec la
moindre indulgence. »
Cette
Écriture semble dure, car elle déclare nettement que
Dieu ne peut tolérer le péché ou l’état
de péché à quelque degré que ce soit. Il
ne peut fermer les yeux ou l’ignorer, ni se détourner et
regarder ailleurs. Il ne va pas l’occulter ni dire :
« Oh ! C’est juste un petit péché.
Ça ira. » Le principe divin qui règne au
ciel est absolu, et il n’autorise aucune exception. Il n’y
a aucun moyen de l’éviter
Beaucoup
pensent que le Jugement dernier se passera comme lors d’une
pesée. Les bonnes actions d’un côté et les
mauvaises de l’autre. Si les bonnes œuvres sont
supérieures aux mauvaises, ou si les cœurs sont
fondamentalement bons et surpassent le péché, alors ils
peuvent être admis en présence de Dieu. Cette notion est
fausse.
Dieu ne peut et
ne veut pas,ainsi que l’illustre D&A 1:31, qu’aucune
imperfection morale ou éthique de quelque degré que ce
soit, demeure en sa présence. Il ne peut tolérer le
péché « avec la moindre indulgence ».
La question n’est pas de savoir si le nombre de nos bonnes
œuvres est supérieur à celui de nos péchés.
Si nous savons qu’il n’existe qu’un seul péché
en nous, c’en est fini de nous. Le principe céleste
inclut une innocence totale, pure et simple. Rien d’autre
qu’une totale innocence ne saurait être acceptée
dans le royaume de Dieu. Maintenant, quoique vous en pensiez,
n’arrêtez votre lecture à ce point. Bien qu’il
soit déprimant de constater à quel point sont stricts
les principes divins, une incroyable bonne nouvelle s’en suit.
L’autre point, qui a
pour conséquence que ce dilemme représente le problème
le plus important pour l'homme, est assez simple : je pèche
tous les jours, et vous aussi. Personne n’est innocent selon
les critères célestes. Nous ne pouvons être
parfaits tout le temps. Nos actions ne sont pas en accord avec le
comportement exigé pour se tenir dignes en la présence
divine dans le royaume de Dieu. Une des nombreuses Écritures
illustrant cela se trouve dans Romains 3:23 « Car tous ont
péché, et sont privés de la gloire de Dieu. »
En d’autres termes, tous
les êtres humains, même le meilleur, ont commis des
péchés ou démontré des imperfections
incompatibles avec les principes célestes et Dieu ne peut le
tolérer. Dans ce passage comme ailleurs, Paul laisse entendre
qu’il n’existe que deux catégories : Pour
lui, soit vous êtes parfait, soit vous êtes pécheur
à un degré plus ou moins important. Il n’existe
pas de juste milieu. Après tout, un petit péché
a suffi pour qu’Adam et Ève soient expulsés du
Jardin d’Éden et chassés de la présence de
Dieu. Lorsqu’ils étaient totalement innocents, ils
pouvaient marcher et parler avec lui. Une transgression, et c’en
a été fini pour eux.
À
partir de ces deux faits (l’exigence divine absolue de la
perfection et notre incapacité absolue à l’assumer)
une conclusion est inévitable : en raison de notre
imperfection et notre nature pécheresse nul ne peut demeurer
en présence de Dieu. Cette contradiction entre les exigences
divines et notre incapacité à les satisfaire représente
un problème important comportant les conséquences les
plus dangereuses de tout l’univers.
Parfois
nous avons tendance à penser que tout le monde agit mieux que
soi. Nous pensons que le voisin ne pêche pas, qu’il garde
tous les commandements tout le temps, et nous nous décourageons
de ne pouvoir faire de même. En conséquence, beaucoup et
même les meilleurs d’entre nous, se désespèrent
devant ce gouffre infranchissable séparant les exigences
divines des actions de l’homme. C’est pourquoi lorsque le
grand pêcheur d’hommes, Simon Pierre fut pour la première
fois témoin de la puissance du Maître, il s’écria :
« Éloigne-toi de moi, Segneur, car je suis un
pécheur. » (Luc 5:8)
Lorsqu’il
a vu le pouvoir de Jésus-Christ et qu’il a su avec
certitude qu’il était envoyé de Dieu, Pierre en
est arrivé à la seule conclusion possible : « Je
ne suis pas digne. Tu ne devrais pas être ici avec moi. Si tu
savais combien je suis corrompu, tu saurais que c’est sans
espoir et que je ne suis pas comme toi : je suis un pécheur.
Alors, ne perds pas ton temps avec moi ; va trouver un homme
juste et pieux, qui a des chances d’être sauvé.
Saint comme tu l’es, tu mérites un bien meilleur
disciple que le pauvre misérable que je suis ». Nul
ne connaissait mieux que Pierre l’immense abyme existant entre
les exigences divines et l’incapacité des hommes à
les satisfaire. Avant d’avoir eu connaissance de la bonne
nouvelle, même le grand pêcheur d’hommes ne
semblait avoir aucun espoir, aucune issue quant au Grand Dilemme.
Je pourrais illustrer notre
situation par une analogie prise dans mes expériences
familiales. J’ai cinq adorables filles, mais je n’ai
qu’un fils. Je suis assez sévère avec Michael,
mon fils, parce que je l’aime et que je voudrais qu’il
grandisse mieux que moi. Un jour quand Michael avait cinq ou six ans,
il a fait quelque chose que j'estimais tout à fait indigne ;
alors je l’ai corrigé, je lui ai crié dessus et
je l’ai expédié dans sa chambre en lui disant :
« Ne t’avise pas de sortir tant que je ne serais pas
venu te chercher ! »
Et
je l’ai complètement oublié. Les heures se sont
écoulées. Je me souviens que j’ai lavé la
voiture et tondu la pelouse et j’étais à la
moitié d’un match de football que j’étais
en train de regarder à la télé quand j’ai
entendu la porte de la chambre de Michael qui s’ouvrait là
bas tout au fond du vestibule après la salle de séjour.
« Ho ! Non »
me suis je dit en battant ma coulpe en me rappelant Michael. Je
bondis vers le vestibule. Mon petit garçon se trouvait là
bas à l’autre bout du vestibule. Il avait les yeux
gonflés, la figure rouge, et les larmes coulaient sur ses
joues. Il était un peu nerveux et hésitant, car je lui
avais dit de rester dans sa chambre jusqu’à ce que je
vienne le chercher, mais il me regarda du fond du couloir et me dit :
« Papa, est-ce qu’il n’y a pas moyen d’être
encore amis ? »
Alors
là, j’ai eu le cœur brisé. Je me précipitai
vers lui et je l’ai serrai dans mes bras et je l’assurai
qu’aucun petit garçon n’avait jamais été
autant aimé par son père que lui.
Nous
sommes dans le même bateau, spirituellement parlant, que
Michael. Nous savons tous ce que nous ressentons quand nous sommes
spirituellement « renvoyés dans notre chambre c’est
à dire chassés de la présence de notre Père
céleste, retranchés et isolés. C’est dans
la mortalité que nous goûtons à la douleur du
Grand Dilemme. Sachant mieux que quiconque notre dramatique
insuffisance, il nous arrive, comme Pierre, d’être tentés
de dire au Seigneur de se tourner vers quelqu’un plus digne que
nous. Ce n’est pas une manifestation de rejet ou de refus du
Sauveur ; c’est au contraire l’expression de notre
désespérance.
Nous
avons tous fait des choses honteuses, et nous avons tous ressenti le
poids horrible de la culpabilité, du remords et avons tous
battu notre coulpe. Il existe des péchés qui nous
rendent infirmes spirituellement ; des péchés qui
ne nous tuent pas sur le coup, mais pourrissent et ne guérissent
pas ; des péchés qui ont une odeur d‘égouts
ou pour lesquels on a l’impression d’avoir contracté
quelque maladie mortelle, des péchés dont on se lave,
mais dont on n’arrive pas à se purifier. Dans les
griffes de ces péchés, au sein de la culpabilité
et du désespoir, dans notre terrible solitude, retranchés
de Dieu, nous élevons les yeux vers le ciel et nous écrions :
« Oh ! Père, est-ce qu’il n’y a
pas moyen d’être encore amis ? »
CHAPITRE
DEUX : LA BONNE NOUVELLE
La
réponse donnée par tous les prophètes et que
l’on trouve dans toutes les Écritures à la
question du Grand Dilemme est un retentissant « Oui !
Le monde imparfait peut se réconcilier avec Dieu dans sa
perfection pour demeurer en sa présence. « Et comme
c’est un Dieu qui parle, il nous assure qu’aucun fils ou
fille n’a jamais été plus aimé par un père
mortel que nous. En fait, la solution au Grand Dilemme, à la
désaffection de l’humanité imparfaite d’avec
son Dieu parfait, se trouve précisément dans ce que
toutes les Écritures rendent témoignage d’une
façon ou d’une autre : La Réconciliation
(Atonement en anglais, ndt) de Jésus-Christ.
La
Réconciliation signifie rapprocher deux personnes qui ont été
séparées, détachées ou qui ne sont pas de
la même nature, comme Dieu et sa perfection et moi ou vous et
nos imperfections pour les rassembler afin de n’en faire plus
qu’une. Historiquement, le mot dérive de deux mots plus
petits et d’un suffixe at.one.ment (réunifier). Le mot
grec pour atone est souvent traduit par « réconcilier«.
C’est pourquoi Jésus-Christ ajoute une troisième
dimension aux deux dures réalités mentionnées
plus haut dans les Doctrine et Alliances 1:31
et dans Romains 3:23, à savoir : L’expiation, la
réconciliation, la « bonne nouvelle » de
l’Évangile, c’est que nonobstant notre séparation
d’avec Dieu, il existe un processus qui nous permet de
redevenir un avec lui.
J’aime
beaucoup la façon dont le Seigneur le dit dans Ésaïe
1:18 : « Venez et plaidons ensemble : si vos
péchés sont comme l’écarlate, ils
deviendront blancs comme la neige ; s’ils sont rouges
comme la pourpre, ils deviendront comme la laine. » Je
voudrais m’arrêter un peu sur cette Écriture afin
que sa signification ne nous échappe pas.
Voici
ce que dit le Seigneur dans cette Écriture : « Peu
importe ce que vous avez fait. Quoique ce soit, qu’importe son
horreur ou sa vilenie, là n’est pas la question. Quel
que soit votre péché, je peux l’effacer, je peux
vous purifier et vous rendre à l’innocence, à la
pureté et à la dignité, et je peux le faire
aujourd’hui, dès maintenant. »
Croire le Christ
Malheureusement, de nombreux
membres de l’Église n’y croient pas. Tout en
affirmant avoir le témoignage du Christ et de son Évangile,
ils rejettent celui des Écritures et des prophètes
concernant la bonne nouvelle de l’expiation du Christ. Ils
soutiennent souvent de façon naïve des affirmations
contradictoires sans discerner ces mêmes contradictions. C’est
ainsi qu’ils croient que l’Église est vraie, que
Jésus est le Christ, et que Joseph Smith était un
prophète de Dieu, et ils refusent la possibilité de
leur pardon total et complet et de leur exaltation finale dans le
royaume de Dieu. Ils croient en l’existence du Christ, mais pas
vraiment en son pouvoir rédempteur absolu. Il leur dit :
« Même si vos péchés sont comme
l’écarlate, ils deviendront blancs comme la neige. Je
peux vous rendre purs, dignes et célestes.» Et ils lui
répondent : « Non, tu ne peux pas. L’Évangile
marche pour les autres ; mais pas pour moi. »
Pour autant la « bonne
nouvelle » de l’Évangile me concerne
particulièrement non parce qu’elle annonce que d’autres
meilleurs que moi peuvent être sauvés, mais qu’elle
promet que moi, pauvre individu misérable inadapté et
imparfait, je peux être sauvé. Et tant que je n’aurais
pas accepté cette éventualité, tant que je ne
croirais pas que le Christ peut me faire entrer dans le royaume pour
me placer sur un trône, je n’accepterais pas la bonne
nouvelle de l’Évangile. En fait j’accepte le
messager, mais je rejette son merveilleux message.
La
foi est le premier principe de l’Évangile, mais il ne se
limite pas à croire à ses revendications historiques.
Croyez-vous que l’Église est vraie, que Joseph Smith
était un prophète, et que l’Évangile a été
rétabli dans les derniers jours ? C’est bien, mais
ce n’est pas suffisant. Le premier Article de Foi précise
que l’on doit avoir foi au Seigneur Jésus-Christ. On
s’imagine souvent que la foi en Christ se résume à
croire à son identité en tant que Fils de Dieu et
Sauveur du monde. Mais la croyance dans son identité en tant
que Christ n’est pas tout. Il faut aussi croire en sa capacité,
en son pouvoir de purifier et de sauver, de rendre dignes ses fils
indignes.
Nous ne
devons pas nous limiter à croire en son existence, nous devons
aussi croire en sa capacité à réaliser ce qu’il
affirme. Nous ne devons pas seulement croire au Christ, nous devons
aussi croire ce qu’il dit quand il annonce qu’il peut
nous purifier et faire de nous des êtres célestes. Il
dit que, par son sacrifice expiatoire, toute l’humanité
sera sauvée et, logiquement, chacun d’entre nous fait
partie de cette ‘humanité’. C’est pourquoi
tant que nous n’acceptons pas la possibilité de notre
exaltation dans le royaume de Dieu, nous n’avons pas foi au
Christ ; nous ne croyons pas encore.
On
pourrait prétexter : « Vous ne comprenez pas.
J’ai eu une enfance difficile. Quand j’étais
jeune, j’ai fait des choix qui m’ont fait prendre un
chemin différent, et après toutes ces années, je
ne peux pas m’en sortir. Quelqu’un m’a dit un
jour : « Oh ! Non, je ne m’attends pas à
être exalté. Je ne suis rien. Je suis juste un membre
dans la moyenne, qui va à l’église. J’ai
toujours eu des appels modestes dans l’Église. Je n’ai
jamais été dirigeant, et je n’ai aucun talent. Je
ne serais jamais évêque (ou présidente de la
Société de secours). Je n’ai rien à
apporter, alors je n’attends pas grand chose de la
résurrection. J’espère seulement arriver au
minimum acceptable dans le royaume céleste, mais je sais que
je ne serais pas exalté. »
Mon
exemple favori de ce type de réflexion m’a été
donné par un membre qui m’a dit un jour :
« Écoutez, frère, je ne suis pas du bois
dont on fait les célestes. » Je crois que j’en
suis arrivé à perdre patience, car je lui ai dit :
« Et alors ? Évidemment que vous n’êtes
pas fait de ce bois là. Ni moi, ni personne. C’est la
raison pour laquelle nous avons besoin du sacrifice expiatoire du
Christ. Jean, pourquoi n’admettez vous pas votre problème :
vous n’avez pas foi dans le Christ ? « À
ce moment, il s’est un peu énervé, car avant
d’être membre de l’Église, il avait été
protestant et à ce titre, tout comme maintenant, il croyait en
Jésus-Christ. Il me répliqua : « Comment
osez vous me dire cela ? Je sais que Jésus est le Christ,
le Fils de Dieu Oui,répliquai je, vous croyez dans le Christ,
mais vous ne croyez pas dans son pouvoir rédempteur. Jésus
dit qu’il peut transformer votre nature pour devenir céleste,
et vous avez l’audace de vous planter là et de me dire :
‘Non, il ne peut pas’. Vous croyez : très
bien, mais vous ne croyez pas que le Christ peut tenir les promesses
qu’il fait. »
Ces
quatre exemples forment une variation sur le même triste thème.
Ils se résument à : « Je ne crois pas
que le Christ peut faire ce qu’il prétend. Je n’ai
pas la foi dans sa capacité à m’exalter. Si on
demande à ces gens de définir leurs problèmes
spirituels, ils vont insister sur X, Y ou Z ; quelque problème
particulier qu’ils ont rencontré lors de leur parcours
spirituel. Mais en fait leur véritable problème n’est
pas X, Y, ou Z. Il n’est pas particulier et il n’est pas
situé à un point quelconque de leur vie spirituelle.
Leur vrai problème, le numéro un, c’est le tout
premier pas. Car toutes les objections ou autres raisons susceptibles
d’être avancées ne sont que prétextes à
cacher le même problème de base : le manque de foi
au Seigneur Jésus-Christ.
Ces
gens ne veulent tout simplement pas croire que l’Évangile
peut les sauver. Ils ne jouiront pas du pouvoir et des bénédictions
qui découlent de la foi en Christ ou des principes qui suivent
celle-ci (le repentir, le baptême, et le don du Saint-Esprit)
tant qu’ils n’intégreront pas dans leur vie le
premier principe de l’Évangile, et qu’ils ne
démontreront pas une foi sincère en Christ. Ils ne sont
pas encore spirituellement nés, même s’ils se
considèrent comme des membres mûrs et expérimentés.
Si nous nous bornons à
croire au Christ sans croire à son pouvoir, alors c’est
comme si nous étions dans des demeures sombres et froides
environnés d’ampoules et d’appareils de chauffage
électriques familiers, mais inutilisés et dont nous
nous refuserions l’usage. C’est comme si on prétendait,
à qui veut l’entendre, que le simple fait de croire à
l'existence de l’électricité suffit à se
réchauffer et à s'éclairer, mais tant qu’on
n’a pas branché le courant, on continue à
frissonner. Même si le matériel fonctionne et que la
connectique est bonne, si nous n’acceptons pas le courant, et
que nous nous bornons à accepter la théorie, nous ne
pourrons apprécier la chaleur et la lumière. C’est
pourquoi il est indispensable que la foi sincère
(l’acceptation active de son pouvoir et pas simplement une
croyance passive en sa réalité physique) soit le tout
premier principe de l’Évangile. Tout ce que nous
apprenons ou croyons en théorie importe peu ; tant que
nous n’acceptons pas la réalité de notre salut,
nous n’avons pas encore la lumière.
L’exigence
de la perfection
La
raison pour laquelle il est fréquent que des gens n’acceptent
pas pleinement les bénédictions de l’Évangile
c’est que la perfection absolue qui est exigée d’eux
les désespère. Ils croient à tort qu’ils
doivent commencer à devenir parfaits en faisant les efforts
nécessaires pour que l’Expiation puisse être
effective dans leur vie. Mais si on pouvait arriver à cela, on
n’aurait pas besoin de celle-ci, car on serait déjà
réconcilié avec Dieu, ayant rempli les critères
divins de perfection de son propre chef sans passer par le Christ et
son sacrifice, et ceci n’est pas possible.
Permettez
que j’insiste encore : la bonne nouvelle, ce n’est
pas que des gens parfaits puissent être réconciliés
avec Dieu, mais que des gens imparfaits puissent l’être.
À chaque fois que j’entends quelqu’un dire que
l’on va devenir parfait par soi même, je me fais tout
petit. Je voudrais leur dire : « Pensez-vous vraiment
que l’exaltation consiste à rentrer en vous-même
pour en extraire toute l’énergie et la détermination
dont vous avez besoin pour vivre parfaitement ? Si c’est-ce
que vous pensez, ce n’est pas d’un sauveur que vous
voulez, ce que vous voulez c’est vous sauver vous-même. »
Maintenant, il est vrai que pour atteindre la gloire céleste,
nous devons devenir parfait. Nous avons à cœur de nous
répéter entre nous à quel point nous devons être
parfaits. En réalité, quelle que soit la bonne volonté
que nous montrons à bien faire dans notre vie, il y a toujours
un saint bien intentionné qui arrive au bon moment pour nous
faire sentir que nous ne sommes pas parfaits et que nous devons faire
mieux la prochaine fois. Beaucoup d’entre nous agissent ainsi
de temps en temps, quel que soit le soin apporté à ce
que nous faisons, nous ne nous accordons même pas un petit
compliment mérité.
Le
raccourci vers la perfection
C’est
vrai, nous sommes très forts pour dire à quel point
nous devons être parfaits si nous voulons hériter du
royaume. Le hic, c’est que nous oublions souvent de nous
demander comment nous pouvons atteindre cette perfection. Vous voyez,
il existe un truc pour acquérir la perfection, un raccourci.
Si vous ne connaissez pas le truc, le raccourci, vous allez vous
épuiser à essayer de devenir parfait par vous même.
Voici le grand secret : Jésus-Christ veut partager sa
perfection, son impeccabilité, sa justice, ses mérites
avec nous. Par sa miséricorde, il nous offre d’utiliser
sa perfection, à défaut de la nôtre, afin de
satisfaire aux exigences de la justice.
Dans
l’immédiat, nous sommes considérés et
acceptés comme étant parfaits, en devenant un avec le
Christ parfait. À plus long terme, cela nous permettra à
l’avenir de devenir parfaits à notre rythme ; mais
ce sera longtemps après le jour du jugement dernier et
longtemps après avoir hérité du royaume de Dieu,
par les mérites, la grâce et la perfection de
Jésus-Christ. C’est pourquoi le plus important, ici bas,
consiste à devenir un en Christ par l’alliance de
l’Évangile afin de bénéficier de cette
union dans sa perfection plutôt que de rester isolé à
tenter (vainement) de devenir parfait pour se sauver soi-même.
Ici comme dans d’autres
ouvrages, j’utilise une figure de rhétorique pour
ménager mon effet. En fait, il n’y a pas de raccourci
pour ce cas. Permettez moi de vous donner un exemple : il y a
assez longtemps notre famille vivait à Williamsport en
Pennsylvanie. La vie était agréable là-bas. Nous
étions propriétaires d’une petite maison dans un
cadre agréable, et nous avions des voisins sympathiques.
J’avais un bon travail au collège du coin et ma carrière
marchait bien. Notre famille était relativement heureuse. Nous
faisions nos soirées familiales et nos prières ensemble
tous les soirs. Nous avions une recommandation pour le temple et y
allions le plus souvent possible. J’étais dans
l’épiscopat du pieu local et Janet était
présidente de Société de secours.
Cette
année là a été très difficile pour
Janet. En plus d’être la présidente de la Société
de secours, elle avait redoublé la classe de comptabilité
et s’était présentée à l’examen
de comptabilité pour prendre un travail dans une entreprise du
coin. Elle a aussi donné naissance à notre quatrième
enfant (Michael), tout cela pendant ses heures de loisir, évidemment.
Il s’en est suivi que Janet était plus que stressée
cette année, mais comme beaucoup de maris, je n’avais
pas remarqué ni évalué la pression sous laquelle
elle était jusqu‘à ce qu’elle craque. Et
elle a craqué.
Un
jour la lumière a disparu. Comme si Janet était morte
spirituellement ; elle était épuisée. Elle
adopta une attitude très passive par rapport à
l’Église. Lorsque ses conseillères de la Société
de secours l’appelèrent, elle leur répondit de
faire ce qu’elles voulaient, qu’elle avait demandé
à être relevée de son appel. Un des pires côtés
de ce brusque changement, c’est que Janet ne voulait pas en
discuter ; elle ne voulait pas me dire ce qui clochait.
Finalement, au bout de deux
semaines, à force de l’asticoter, un soir que nous
étions dans notre chambre, elle me dit : « Bon,
tu veux savoir ce qui ne va pas ? Je vais te le dire ce qui ne
va pas ; je ne peux plus y arriver. Ma charge est trop lourde.
Je ne peux pas assumer tout ce que je suis censée faire. Je ne
peux pas me lever à cinq heures et demie du matin, faire le
pain, faire la couture, aider les enfants à faire leurs
devoirs du soir, faire les miens, faire le petit déjeuner, le
ménage et tous les trucs de la Société de
secours, étudier les Écritures, faire ma généalogie,
écrire au député, aller aux réunions des
soeurs, organiser nos réserves d’un an, aller aux
réunions de pieu, écrire aux missionnaires… Elle
commença à parler des choses qu’elle ne pouvait
pas faire ou ne faisait pas bien, des charges qu’on lui avait
imposées au nom de la perfection jusqu’à ce
quelle craque.
« J’essaie
de ne pas crier après les enfants, continua-t-elle, mais je ne
peux m’en empêcher ; je me mets en colère et
je hurle. J’essaie de ne pas me mettre en colère, mais
je finis par m’y mettre. J’essaie de ne pas avoir de
mauvais sentiments envers untel ou unetelle, mais je finis par en
avoir. Je ne suis pas d’une nature christique. Quels que soient
les efforts que je fais pour aimer tout le monde, je n’y arrive
pas. Je n’ai pas les talents de sœur Une telle, et je ne
suis pas aussi aimable que telle autre sœur; je ne suis pas
parfaite, je n’y arriverai jamais, et je n’ai aucune
prétention à l'être. J’ai finalement admis
au fond de moimême que je ne suis pas faite pour le royaume
céleste, alors pourquoi est-ce que je devrais me briser les
reins à essayer ? »
Ce
fut la nuit la plus longue que nous passâmes ensemble. Je
demandais à Janet : « As-tu un témoignage ?
Elle me répondit : Bien sûr j’en ai un, c’est
ça qui est terrible. Je sais que l’Évangile est
vrai, mais je ne peux pas le vivre. Je lui demandais si elle avait
gardé les alliances du baptême, et elle me dit :
Non, j’ai essayé plusieurs fois, mais je ne peux pas
garder tous les commandements tout le temps. » Je lui
demandais si elle avait gardé les alliances contractées
au temple, et de nouveau elle me dit : « J’essaie,
mais même si je fais tous les efforts du monde, je n’ai
pas l’impression de pouvoir faire tout ce qui est requis de
moi. » Je voudrais préciser que j’ai épousé
Janet dans ma jeunesse, parce que je n’ai jamais rencontré
de femme plus belle, plus douce, et qui m’offre un amour plus
sincère et généreux qu’elle. Aussi, ce
qu’elle me racontait ne correspondait pas avec l’image
que j’avais d’elle. Alors pendant un moment, elle fit la
liste de tous ses défauts, ses insuffisances, et ses
imperfections, pendant que moi, je m’évertuais à
lui dire qu’elle était la meilleure femme au monde, tout
en essayant de comprendre ce qui n’allait pas. Finalement, le
problème m’apparut dans toute sa clarté, et
franchement j’étais stupéfait. Moi qui suis censé
avoir un « doctorat « en religion, je ne voyais
pas le mont Everest devant mon nez. Je réalisais finalement
que Janet ne comprenait pas complètement le cœur de
l’Évangile : l’expiation du Christ. Elle en
connaissait les exigences, mais ignorait la bonne nouvelle.
Qui aurait pu penser qu’après
toutes ces réunions, toutes ces leçons, touts ces
discours et témoignages, toutes ces soirées familiales,
quelque part, le cœur de l’Évangile lui avait
échappé ? Elle connaissait tout et elle y croyait,
sauf le principal. Voyez vous, Janet essayait d’arriver au
salut par elle même. Elle tentait de faire tout ça en
considérant Jésus comme un simple conseiller. Janet
savait pourquoi on peut considérer Jésus comme un
entraîneur, un meneur de ban, un conseiller, un instructeur, le
frère aîné, le chef de l’Église, et
même Dieu. Elle comprenait tout cela, mais elle ne comprenait
pas pourquoi on l’appelle Sauveur.
Le
salut
Mais les saints
des derniers jours croient-ils qu’ils sont sauvés ?
Si je pose cette question à ma classe avec mon accent traînant
du Sud, en général, j’ai le tiers de la classe
qui va secouer la tête et dire : « Non, nous ne
croyons pas que nous sommes sauvés. Ce sont les autres types,
là, à la télé. » Quelle
tragédie ! Bien sûr que les saints des derniers
jours croient qu’ils sont sauvés. Ils le croient
aujourd’hui et ils l’ont toujours cru. Comment Jésus
pourrait-il être appelé Sauveur, s’il ne sauve
jamais personne ?
C’est
comme si on avait un garde du corps qui ne bougerait pas de son
siège : « Hé ! Regarde ça.
Y’en a encore un qui se pointe. Bah, c’est bien dommage !
Ce garde du corps pourrait aussi donner des conseils avisés :
« Fais lui un crochet ! » S’il ne se
mouille pas un tant soit peu, à quoi sert-il ? Et
qu’est-ce que c’est qu’un Sauveur qui ne sauve
personne ? C’est tout le message du Livre de Mormon, et de
la Bible : Jésus est le Sauveur du monde. Mais Janet,
comme tant d’autres, essayait d’acquérir le salut
par elle même, et elle n’y arrivait pas. En réalité,
personne ne le peut, même le meilleur d’entre nous.
Le frère de Jared.
Regardez par exemple dans Éther 3:2 dans le Livre de Mormon.
L’orateur est le frère de Jared, l’un des plus
grands prophètes qui n’aient jamais vécu. Sa foi
était si grande qu’il put, comme il est dit dans ce
chapitre, percer le voile et voir Dieu. Mais considérez la
façon dont cet homme généreux et fidèle
se présenta à Dieu : « Or, voici, ô
Seigneur, ne sois pas en colère contre ton serviteur à
cause de sa faiblesse devant toi ; car nous savons que tu es
saint et que tu demeures dans les cieux, et que nous sommes indignes
devant toi. » Vous en rendez vous compte ! Voilà
l’un des plus grands prophètes de tous les temps qui
commence sa prière en s’excusant de sa faiblesse et de
son indignité. Il est-certain qu’il ne se faisait pas la
moindre illusion quant à sa perfection.
Il
continue en disant : « Notre nature est devenue
continuellement mauvaise. » Cela veut dire que suite à
la chute d’Adam, les êtres humains sont assujettis aux
conditions de la mortalité. Tant que nous serons dans la
chair, nous devrons lutter avec elle, avec notre nature charnelle et
occasionnellement, la chair aura le dessus. Il est toujours mauvais
d’être battu, et nous devrons rendre des comptes, mais
ces échecs arriveront de temps en temps.
Cette
lutte durera toute notre vie. Nous avons tous connu cette opposition
dans notre chair d’une façon ou d’une autre. Ainsi
de temps en temps je dis à mon corps : « Aujourd’hui,
nous allons jeûner ! » Ce à quoi mon
corps me répond systématiquement un truc de ce genre :
« Tu peux courir, mec ! » Et il commence à
psalmodier sur un ton monotone : « J’ai faim !
J’ai faim ! J’ai faim ! » Cette
opposition de la chair ne peut être vaincue en une seule fois
au cours de la vie mortelle. Pour paraphraser le frère de
Jared, tant que nous serons dans cette situation, notre nature
charnelle sera portée à faire le mal. À mon
avis, l’opposition de la chair n’existera plus dans la
résurrection. Dans la vie mortelle, l’esprit et le corps
sont deux entités séparées forcées de
coexister dans la même personne. Leur association dans la
mortalité est temporaire, et ne date pas de longtemps, c’est
pourquoi ils ont la bougeotte. Mais dans la résurrection, le
corps et l’esprit deviendront une seule entité. Ils
seront inséparablement unis, fondus en un seul corps, et ils
parleront d’une seule voix : la voix du moi uni, la voix
de l’âme dans le sens strict du terme (Voir D&A
88:15). Mais, jusque là, nous devons lutter contre notre moi
charnel, et séparé. De tempsen temps, même le
meilleur d’entre nous, comme le frère de Jared, perdra
une bataille.
Dans
Éther 3:2 le point important se trouve à la fin du
verset : « Néanmoins, Ô Seigneur, tu
nous as donné le commandement de t’invoquer, afin de
recevoir de toi selon notre désir. » Il importe peu
qu’à long terme, le frère de Jared soit indigne
selon le point de vue céleste. À cet égard, il
n’est pas différent de tous les autres humains.
L’important est que Dieu nous a commandé, tout indignes
que nous sommes, de le prier toujours, parce qu’il nous a
préparé la voie afin de recevoir selon nos désirs
en dépit de notre imperfection. Remarquez qu’il dit :
« selon notre désir et non pas « selon
notre mérite ni « selon nos œuvres »
ni aucune autre éventualité à laquelle nous
pourrions nous attendre (voir D&A 137:9).
Il
est important que par le sacrifice expiatoire de Jésus-Christ
nous recevions selon nos désirs, mais seulement si c’est-ce
que nous désirons, et ce, en dépit de notre indignité.
Alors qu’est-ce que vous voulez ? Que désirez vous
vraiment ? Dans Matthieu 5:6, le Seigneur dit : « Heureux
ceux qui ont faim et soif de justice, car ils seront rassasiés
! » On interprète souvent cette écriture
à tort en comprenant : « Bénis sont les
justes. » Mais ça ne veut pas du tout dire cela.
Quand avons-nousfaim ? Quand avons-nous soif ? Après
le dîner de Thanksgiving et tous ses accompagnements ?
Non ! Nous avons faim quand nous n’avons pas mangé ;
nous avons soif quand nous n’avons pas bu, lorsque nous ne
jouissons pas de l’objet de notre désir.
Les
Béatitudes s’adressent à des gens comme vous et
moi qui aspirons au bien, qui avons faim et soif de justice, de cette
justice divine immaculée et parfaite et de cette innocence
totale que l’on trouve dans le royaume céleste. Bénis
sont ceux qui désirent de tout leur cœur être
justes comme le Christ, être parfaits comme lui, qui le
désirent ardemment et le recherchent, et qui, même s’ils
n’ont rien, sont prêts à tout donner. Quelle est
leur récompense ? Ils goûteront à ces
Béatitudes grâce au sacrifice expiatoire du Christ, et
les recevront selon leurs plus profonds désirs ! Selon
les paroles des Béatitudes, « ils seront
rassasiés. »
L’exemple
de Néphi. Prenons un autre exemple de prophète dans le
Livre de Mormon. Dans 2 Néphi 4:17 19, voici ce que dit
Néphi : « Ô misérable que je
suis ! Oui, mon cœur est dans l’affliction à
cause de ma chair ; mon âme est dans la désolation
à cause de mes iniquités. Je suis encerclé par
les tentations et les péchés qui m’enveloppent si
facilement. Et lorsque je désire me réjouir, mon cœur
gémit à cause de mes péchés. »
Attendez une minute. Iniquités ? Tentations ?
Péchés ? Il doit y avoir une erreur là.
Cette écriture doit concerner Laman ou Lemuel, les fils
indignes, mais sûrement pas Néphi. Lui, c’était
le bon fils.
Non,
évidemment il n’y a pas d’erreur. Il s’agit
bien de Néphi un des plus grands prophètes qui aient
jamais vécu. Et ce n’est même pas Néphi
dans sa jeunesse. L’Écriture est extraite de 2 Néphi,
lorsque toute la famille se trouvait déjà dans le
Nouveau Monde. Néphi parle alors qu’il est adulte, c’est
le Néphi qui a de l’expérience et de la sagesse,
qui nous permet de sonder son cœur. Néphi, comme le
frère de Jared ou comme l’apôtre Paul (voir 1
Timothée 1:15), ne se faisait aucune illusion quant à
sa perfection. Néphi savait, et il le regrettait, qu’il
avait quelques fois perdu des batailles contre la chair, qu’il
était facilement tenté, et qu’il péchait.
Mais encore une fois, le fait que Néphi fut imparfait, qu’il
ne se soit pas qualifié par ses efforts et ses mérites
pour entrer dans le royaume de Dieu, et que parfois il ait carrément
cafouillé n’est pas le problème. Aucun humain, à
l’exception de Jésus-Christ, n’a réussi à
garder tous les commandements tout le temps. On peut chuter à
des degrés différents, mais tout le monde chute. C’est
pourquoi nous avons besoin d’aide, nous avons tous besoin du
Sauveur. Cette nécessité de requérir l’aide
du Sauveur n’est pas une honte. C’est précisément
ce que veut dire Néphi à ce moment : « Néanmoins,
je sais en qui j’ai mis ma confiance… Il m’a
rempli de son amour, oui, jusqu’à ce que ma chair en
soit consumée. » (2 Néphi 4:19, 21)
Même si Néphi
était découragé et déprimé en
constatant son incapacité à vivre la perfection, il
avait confiance dans le Sauveur pour l’amener au royaume. Il
s’était confié dans le Sauveur et avait foi dans
son amour. Pour paraphraser ces trois versets, Néphi dit :
« Non, je ne suis pas parfait. Oui, mes fautes me causent
des soucis, et j’aurais aimé faire mieux. Néanmoins,
j’ai foi en JésusChrist, je lui fais confiance. Il dit
qu’il peut m’amener au royaume en dépit des mes
imperfections, et je le crois. Je sais qu’il m’aime, et
je lui fais confiance pour qu’il continue à me protéger
de mes ennemis. »
Malheureusement,
à l’inverse de Néphi, beaucoup parmi nous ne font
pas confiance au Sauveur. Nous croyons en lui, mais nous ne lui
faisons pas confiance. Nous sommes tellement, intimidés,
effrayés, horrifiés par nos imperfections, que nous ne
voyons pas comment il lui serait possible de nous sortir de là
et nous perdons foi. Mais si ces grands prophètes avaient une
conscience si claire de leurs péchés et de leurs
défauts, et que cela ne les empêchait pas de continuer à
croire que leur place était réservée dans le
royaume de Dieu, ne pourrionsnous pas profiter, nous aussi, de leurs
exemples de foi et de confiance ?
Hormis
nos défauts, il existe d’autres raisons pour lesquelles
nous ne faisons pas confiance au Sauveur : beaucoup craignent
qu’en se consacrant à lui pour vivre l’Évangile
loyalement et fidèlement, ils risquent de rater des choses
importantes du monde. On craint souvent qu’un engagement
complet envers le Christ et son Église ne se traduise par le
sentiment d’être exploité, ou de se croire
insatisfait émotionnellement, intellectuellement, ou
physiquement. Il existe des gens qui veulent que l’Église
fasse partie de leur vie, mais ont peur d’y être
impliqués à cent pour cent. La limite pour tous ces
gens est toujours la même : même s’ils peuvent
croire en lui, ils ne lui font pas confiance. Ils n’ont pas
encore une foi sincère en Christ.
Comment
arriver à la perfection?
La
bonne nouvelle de l’Évangile nous apprend que la
perfection vient, pour qui le désire, par l’expiation du
Christ et non par nos efforts. Nous pouvons bénéficier
de la perfection du Christ lorsque nous devenons un avec lui dans
l’alliance de l’Évangile. C’est comme
lorsque deux personnes qui ont des comptes séparés se
marient et créent un compte joint. Lorsque Janet et moi nous
sommes mariés, mon compte était dans le rouge, alors
que Janet avait de l’argent. Après notre mariage, nous
sommes allés à la banque et nous avons fusionné
nos deux comptes en un seul compte joint. Au regard de la banque, je
n’étais plus simplement Stephen Robinson et elle n’était
plus seulement Janet Bowen. À ce moment là, nous sommes
devenus Stephen et Janet Robinson. Nous avions créé un
nouveau partenariat qui se composait de l’actif et du passif
des deux parties. Et comme Janet avait plus de crédits que je
n’avais de passif, le nouveau compte avait un solde positif.
C’était quasiment un miracle ! Rien qu’en
entrant dans les liens du mariage et en m’unissant avec Janet,
j’avais une base financière ferme pour la première
fois depuis plusieurs mois.
Cette
situation est une excellente analogie de ce qui se passe lorsque nous
entrons dans l’alliance de l’Évangile. Le Sauveur,
qui jouit d’un crédit infini, propose à l’homme
une fusion. À ce moment celui ci dispose d’une
responsabilité limitée. J’utilise le mot
« propose » à dessein, car la relation
en question est souvent comparée dans les Écritures à
un mariage, et cette proposition est-certainement aussi intime et
présente autant d’obligations que le mariage. C'est
pourquoi le Christ est souvent appelé l’Époux
(voir Matt. 25:1 13 ; Jean 3:29) et l’Église (ou
Israël) la Nouvelle Mariée (voir Osée 2:19 ;
Apoc. 21:2 ; D&A 109:74).
Le
mari et la femme deviennent une seule entité par les liens du
mariage, il en est de même pour le Sauveur et la personne
sauvée : ils deviennent un par l’alliance de
l’Évangile (voir 1 Cor. 6:15-17). Tout comme la nouvelle
mariée se détourne de toute autre loyauté et
prend sur elle le nom de son mari, celui qui entre dans l’alliance
du Christ se consacre entièrement à lui, le met en
premier dans sa vie, et prend son nom sur lui. Nos désirs et
notre fidélité se basent sur cette union. Il nous
apporte sa perfection. Dans l’alliance, ce qui m’appartient
lui appartient, et ce qui est à lui est à moi. Mes
péchés deviennent les siens comme paiement, et sa
justice devient mienne comme justification.
Lorsque
nous devenons un en Christ, son crédit et le nôtre
fusionnent. Nous créons, spirituellement, un partenariat
bénéficiant d’un compte joint. Puisqu’il a
plus de crédits que nous n’avons de débits (en
fait il dispose d'un océan illimité de crédits),
le nouveau compte possède un solde positif dés sa
création, et le partenariat est justifié, même si
ses partenaires minoritaires (vous et moi) ne peuvent avoir ce solde
positif. L’apôtre Paul faisait référence à
cette situation quand il parle « d’être en
Christ » (1 Cor. 1:1) et c’est-ce que Moroni appelle
être « parfait en Christ » (Moro. 10:32).
Considérés
solidairement, le Christ et moi formons une nouvelle créature.
L’ancien moi qui était imparfait, cesse d’exister,
et une nouvellecréature glorieuse, un partenariat parfait, le
remplace. Considérés solidairement, comme une entité
unique, nous deux, le Christ et moi sommes parfaits. Je ne dis pas
(et ceci est absolument crucial !) que nous ne pouvons devenir
parfaits plus tard. Je dis qu’à partir du moment où
le partenariat est formé de bonne foi, à partir du
moment où nous avons une foi sincère en Christ, et que
nous nous repentons véritablement de nos péchés,
que nous recevons le baptême et le don du Saint-Esprit, alors
ce partenariat est de nature céleste. Les mérites du
Partenaire majoritaire permettent cet état de fait. Il est
vrai qu’il ne s’agit pas ici de la perfection
individuelle, qui arrivera plus tard (beaucoup plus tard), c’est
plutôt la "perfection en Christ" (voir Moro.
10:32-33), par laquelle nous recevons les bénéfices des
mérites de notre partenaire. Néanmoins, à
compter de ce moment, le royaume est à nous, pourvu que nous
conservions ce partenariat en respectant l’alliance de
l’Évangile (voir 3 Né. 27:16, 19-21).
À ce point du
raisonnement, on pourrait m’objecter que j’ai encore des
défauts et des limites, et j’admets que si je devais
être jugé seul, c’est vrai. Mais dans le cadre de
l’alliance, je ne suis pas jugé séparément,
mais comme étant un en Christ. Faites le calcul : Si le
Christ est infini et illimité et moi je suis fini et limité
et que nous devenions un, combien font le Christ et moi si on nous
ajoute ? Quelle est la somme d’une quantité infinie
et positive avec une quantité négative et limitée
(+x) ? Eh bien, l’infini évidemment !
Et si, moi (la partie finie) j’ai comme valeur positive dix,
cinq ou un, si je suis prophète, président de pieu ou
simple membre empêtré dans ses difficultés, le
résultat est toujours le même. L’infini plus tout
autre valeur, positive ou négative égale l’infini.
Ce qui compte ce n’est
pas la valeur que nous apportons dans l’équation, mais
que nous puissions écrire l’équation en entrant
dans l’alliance avec le Christ infini, quelle que soit la
valeur que nous pensons avoir de nous mêmes. Deux individus
unis dans l’alliance sont parfaits tant que l’un d’eux
est le Christ.
Dans D&A
76:68-69, Joseph Smith décrit les habitants du royaume
célestes en ces termes : « Ce sont ceux dont
le nom est écrit dans le ciel, où Dieu et le Christ
sont les juges de tous. Ce sont les justes parvenus à la
perfection par l’intermédiaire de Jésus, le
médiateur de la nouvelle alliance, qui accomplit cette
expiation parfaite par l’effusion de son sang. « Ceux
qui héritent du royaume céleste sont les hommes et les
femmes justes3, c'est àdire ceux qui ont faim et soif et
veulent la justice. Ce sont de bons voisins et font du mieux qu’ils
peuvent. Ce qui les qualifie pour être des justes, de braves
gens. Ces bonnes gens sont donc rendus parfaits par l’intermédiaire
du sacrifice expiatoire parfait du Christ parfait.
Vous
voyez, vous pouvez devenir justes au sens du monde. Vos efforts
suffiront à faire de vous une bonne personne, même si ce
n’est qu’une personne juste au plan humain. On n’a
certes pas besoin de l’Évangile pour être un brave
homme dans sa vie personnelle (en fait, on peut même être
hostile à l’Évangile tout en étant
relativement bon). On peut, par ses efforts personnels, devenir une
personne honorable et se qualifier pour obtenir une gloire terrestre
(voir D&A 76:75).
Mais
vous ne pouvez pas vous rendre parfait par vous même. Vous ne
pouvez vous débarrasser de vos péchés pour vous
rendre digne d’entrer en présence de Dieu le Père.
Vous ne pouvez vous transformer en être céleste, même
si vous essayez très dur, parce que vous avez déjà
péché, et que le processus de purification du péché
exige, non seulement un accomplissement parfait à l’avenir,
mais aussi un accomplissement parfait dans le passé. Sinon,
vous n’êtes pas sans péché, vous êtes
juste un pécheur qui a cessé de pécher
récemment. Tous les étudiants ont appris la triste
vérité qu’une fois que l’on a une mauvaise
note, aucune meilleure ne pourra rétablir à l’avenir
la moyenne à 20. L’innocence exige le pardon et la
purification. Elle exige que le texte soit effacé et réécrit,
afin que tous les actes pécheurs du passé ne soient
plus pris en compte, et tout ceci ne peut venir que par l’expiation
du Christ. Vous pouvez arriver à être juste et atteindre
un niveau terrestre par vos efforts personnels et en faisant de votre
mieux, mais seul. Le mot ‘juste’ est le même en
grec et en hébreu. Ils ont deux acceptions dans les
Écritures : a) les justes parfaits au sens céleste
du terme (voir Actes 7:52 ou Rom. 3:10) ou b) relativement justes
comparés au reste du monde (voir Matt. 5:45). Dans ce cas, il
s’agit de la dernière acception : le Christ peut
vous rendre parfait et vous amener au niveau céleste.
L’analogie de la firme
Certains de mes étudiants
en économie préfèrent l’analogie
suivante : Si deux sociétés, l’une en
faillite totale et l’autre qui présente un bénéfice
incroyable fusionne pour créer une nouvelle société,
que va-til arriver en ce qui concerne les dettes de la société
en faillite ? Elles sont remboursées grâce au
profit de la plus forte, et la nouvelle société, la
combinaison des deux, va être jugée financièrement
saine. Tant que l’une produira plus que l’autre ne
perdra, la société sera bénéficiaire.
Elle est financièrement justifiée.
Il
en est de même sur le plan spirituel. Lorsque nous entrons dans
l’alliance de l’Évangile et que nous devenons un
avec le Christ, nous créons une nouvelle société,
un partenariat, qui présente immédiatement du profit et
qui est immédiatement justifiée par les mérites
infinis du Sauveur (qui représente la seule entreprise
véritablement bénéficiaire). Tant que nous ne
terminons pas ce partenariat, nous sommes justifiés par ses
mérites grâce à cette relation unique. En tant
qu’individu, je n’ai aucun espoir, mais en tant
qu’actionnaire minoritaire dans une société
dirigée par le Christ, je suis assuré d’avoir le
succès.
L’analogie
des sportifs
Certains
de mes élèves sont plus à l’aise si l’on
prend des exemples ou des illustrations dans le domaine du sport
plutôt que celui des affaires ou des finances, c'est pourquoi
je compare quelques fois la relation dans l’alliance à
une équipe sportive. Dans les sports en équipe, il
importe peu quel joueur, marque les points. Quand l’un d’eux
marque, c’est toute l’équipe qui marque. Si
l’avant-centre marque un but du milieu du terrain, peu importe
que les arrières n’aient pas eu l’occasion de
toucher la balle, ou qu’un des joueurs soit sur le banc de
touche. Peu importe que certains joueurs aient commis des maladresses
ou aient raté la balle. Lorsqu’un des joueurs marque,
c’est toute l’équipe qui marque. Concernant la
victoire, peu importe que l’on soit en défense ou en
attaque. C’est toute l’équipe qui gagne, et pas
seulement le joueur qui vient de marquer un but.
En
contractant l’alliance de l’Évangile, nous
intégrons une équipe dont le capitaine est
Jésus-Christ, un vainqueur du style de Zinedine Zidane qui
marque à tous les coups. Si nous faisons partie de son équipe,
nous ne serons jamais vaincus. Même si je rate le but, de temps
en temps, même s’il me dit de rester sur le banc de
touche la plupart du temps, tant qu’il sera le capitaine, nous
gagnerons. Mais je dois être dans son équipe, ne pas
jouer seul ni être dans une autre équipe.
La
course de fond
On
pourrait aussi comparer l’alliance de l’Évangile à
une course de fond. Normalement, on considère qu’il n’y
a qu’un gagnant dans une course, mais dans celle de l’Évangile,
tous ceux qui finissent gagnent. De plus, on ne tient pas compte des
différences dans les temps d’arrivée. Certains
auront fait un bon temps et d’autres non, mais les seuls
perdants sont ceux qui auront abandonné avant d’arriver
au but. Dans la course de l’Évangile, il n’y a pas
de perdants. Il n’y a que des gens qui abandonnent. Tous ceux
qui passent en courant la ligne d’arrivée en quelques
minutes, tous ceux qui la passent en marchant en mettant des heures
ou tous ceux qui la passeront en rampant en y mettant des jours, tous
ceux là gagneront le prix. Car ils auront enduré
jusqu’à la fin, selon leurs talents et leurs capacités,
en ayant les yeux fixés sur le Sauveur. Paul a utilisé
cette analogie lorsqu’il écrit : « Courons
avec persévérance dans la carrière qui nous est
ouverte, les yeux fixés sur Jésus qui est l’auteur
et le consommateur de la foi « (Héb. 12:1-2).
Beaucoup parmi nous usent leur précieuse énergie à
se soucier du peu de temps qu’ils ont au lieu d’avoir les
yeux fixés sur le but, tout en plaçant un pied devant
l’autre et à endurer jusqu’à la fin.
La parabole de la bicyclette
Alors que nous discutions
pendant cette sombre nuit, il me semblait que rien ne s’arrangeait
pour elle. Alors je me souvins d’un évènement et
que maintenant nous appelons dans notre famille : la parabole de
la bicyclette.
Une fin
d’après midi, après le travail, notre fille
aînée, Sarah, alors âgée de sept ans vint
me voir alors que je lisais le journal pour me dire : « Papa,
est-ce que je peux avoir un vélo ? Je suis la seule dans
le quartier à ne pas avoir de vélo.» Je
marmonnais un truc vague qui n’engageait à rien, mais
Sarah souleva le journal, me regarda dans les yeux et me demanda :
« Combien et quand ? »
À
cette époque, il nous était difficile financièrement
de lui acheter une bicyclette, alors j’essayais de la coincer.
« Je vais te dire, Sarah « lui dis-je,tu
économises tous tes sous, et bientôt tu auras assez pour
t’acheter un vélo. »
« D’accord,
répondit-elle » et elle s’en alla. Je m’étais
débarrassé du problème. Quelques semaines
s’écoulèrent, et j’étais une
nouvelle fois dans mon fauteuil à lire le journal. Cette fois
je savais que Sarah faisait quelques corvées pour sa mère
et qu’elle était payée. C’est alors qu’elle
rentra dans sa chambre et j’entendis un bruit qui faisait
« clic, clic».
« Sarah,
qu’est-ce que tu fais ? » lui demandais-je.
Elle sortit de sa chambre avec une boîte de conserve à
la main. Cela avait été autrefois un pot de confiture
de cerise au marasquin, qu’elle avait nettoyé et dans
lequel elle avait découpé une fente. Dans le pot il y
avait un paquet de pièces de monnaie. Sarah me montra la boîte
de conserve et dit : « Tu m’as promis que si
j’économisais tous mes sous, bientôt, j’en
aurais suffisamment pour m’acheter un vélo. Alors,
voilà, papa, j’ai économisé jusqu’au
moindre centime ! »
C’est
ma fille et je l’aime. En fait je ne lui ai jamais menti. Si
elle économisait tous ses sous, à la fin elle aurait
suffisamment pour s’acheter un vélo. Mais au rythme où
elle allait, je crois que c’est plutôt une voiture
qu’elle préférera. Entre temps, ma gentille
petite Sarah faisait tout ce qui était en son pouvoir pour
suivre mes instructions, mais ses besoins étaient loin d’être
satisfaits. Je craquais. « OK, Sarah « lui
disje, partons en ville pour voir des vélos. »
Nous allâmes dans tous
les magasins de Williamsport. Finalement, nous le trouvâmes
dans un des grands magasins discount : La Bicyclette parfaite
(sans doute celle qu’elle avait connue dans la vie pré
mortelle). À peine arrivée au milieu du magasin, elle
savait que c’était La Bicyclette. Elle se précipita
sur le vélo et dit : « Papa, c’est-celle
là. C’est celle-là que je veux. » Elle
était tout excitée.
Puis
elle remarqua l’étiquette qui pendait sur le guidon, et
en souriant elle se baissa pour la retourner. Sur le coup, elle la
regarda et son sourire disparut. Sa figure s’assombrit, et elle
commença à pleurer. « Oh ! Papa
dit-elle désespérée, je n’aurais jamais
assez d’argent pour me payer un vélo. »
C’était sa première dose amère de la
réalité des adultes.
Le
vélo, pour autant que je me souvienne, coûtait plus de
cent dollars. C’était vraiment au delà de ses
moyens. Mais comme Sarah est ma fille et que je l’aime, je
voulais qu’elle soit heureuse. Alors je lui demandais :
« Sarah, combien as-tu d’argent ? »
« Soixante et un
cents », répondit-elle désespérée.
« Bon, voilà ce que nous allons faire, ma chérie.
Nous allons modifier nos accords. Tu vas me donner tout ce que tu as,
les soixante et un cents, tu me feras un gros baiser, et ce vélo
sera à toi. »
Il
faut dire qu’elle n’a jamais été sotte.
Elle a sauté dans mes bras, m’a fait un gros bisou et
m’a donné ses soixante et un cents. J’ai dû
revenir à la maison en roulant très doucement parce
qu’elle n’a jamais voulu se séparer du vélo.
Elle le ramena à la maison sur le trottoir (c’était
à quelques pâtés de maisons), et je conduisais à
côté d’elle. Pendant que je conduisais, il me vint
à l’esprit que tout ceci était une parabole sur
l’expiation du Christ.
Vous
voyez, nous voulons tous désespérément quelque
chose, mais ce n’est pas une bicyclette. Nous voulons le
royaume de Dieu. Nous voulons revenir dignes et purs en présence
de nos parents célestes. Mais le prix terrifiant c’est
une performance parfaite, ce qui est absolument au delà de nos
moyens. À un certain moment dans notre progression
spirituelle, nous réalisons pleinement le prix de l’entrée
dans ce royaume, et nous réalisons aussi que nous ne pouvons
pas payer. Alors nous sombrons dans le désespoir. Janet en
était à ce point là cette nuit alors que nous
discutions, désespérée par la gigantesque
différence entre la performance parfaite et ce qu’il lui
semblait qu’elle pouvait faire.
Mais
c’est seulement à ce moment là, lorsque nous
réalisons finalement notre incapacité à nous
perfectionner et à nous sauver nousmêmes, lorsque nous
nous rendons compte de notre situation véritablement
désespérée ici bas et de la nécessité
d’être sauvés grâce à une
intervention extérieure, que nous apprécions pleinement
celui qui est venu pour sauver.
À
ce moment, le Sauveur entre et dit : « Bon, tu as
fait tout ce que tu pouvais, mais c’est insuffisant. Ne
désespère pas. Bon, voilà ce que nous allons
faire. Nous allons faire un arrangement différent. Combien
as-tu ? Combien peux-tu donner honnêtement de toi-même ?
Tu me donnes tout cela (les soixante et un cents), tu fais tout ce
que tu peux, et je fournirais le complément. Tu me donnes tout
ce que tu as, tu me prends dans tes bras et tu me donnes un baiser
(c’est-à-dire nous créons une relation
personnelle), et le royaume est à toi ! La perfection
restera notre but ultime, mais jusqu’à ce que tu puisses
jouir de la tienne, tu utiliseras la mienne. Qu’en dis tu ?
Tu fais tout ce que tu peux, et je fais tout ce que tu ne peux pas
encore faire. À tous les deux, nous aurons tout fait. Tu seras
justifié à cent pour cent.
Au
fur et à mesure que nous discutions, Janet et moi cette nuit,
pour une raison indéterminée, cette illustration
particulière l’atteignit. À partir du moment où
elle considéra l’Expiation et l’alliance de
l’Évangile de cette façon, elle vit comment cela
fonctionnait, et il se fit en elle une transformation remarquable.
C’est comme si elle s’était épanouie. Je me
souviens qu’elle a dit entre ses pleurs, quelque chose comme
cela : « J’ai toujours eu le témoignage
du Sauveur et j’ai toujours cru qu’il est le fils de
Dieu. J’ai toujours cru qu’il avait souffert et qu’il
était mort pour moi. Mais maintenant, je sais qu’il peut
me sauver, qu’il peut me sauver de moi même, de mes
péchés, de mes faiblesses et de mon manque de talent.
« Depuis ce jour, l’expérience de Janet en a
aidé d’autres dans l’Église et à
l’extérieur. L’expérience a montré
qu’elle n’était pas la seule, qu’il y en a
beaucoup qui veulent servir Dieu et garder ses commandements, qui ont
faim et soif de justice, mais qui, à cause de la sublimation
même de leurs nobles désirs, désespèrent
de réaliser la perfection. À tous ceux là, nous
déclarons : « Le Christ est la réponse.
Il présente le pont entre la mortalité et la
perfection. Il est la solution au Grand Dilemme. »
« Demandez et l’on
vous donnera ; cherchez et vous trouverez ; frappez et l’on
ouvrira. Car quiconque demande reçoit, qui cherche trouve, et
l’on ouvrira à celui qui frappe. » (Matt.
7:7,8)
Ça, c’est
vraiment la bonne nouvelle.
CHAPITRE
TROIS : L’ALLIANCE
Une
alliance est un contrat qui précise les termes et les
obligations des deux parties. Celles ci doivent signer le contrat
pour qu’il soit validé et applicable au regard de la
loi. Autrefois on versait le sang d’un animal lors d’un
sacrifice pour conclure une alliance et lier les deux parties. C’est
pourquoi « faire alliance » se dit en hébreu
« couper une alliance. Le sang de la victime étai
appelé le sang de l’alliance et une fois celui ci versé
on considérait que les termes du contrat étaient
validés et liaient les deux parties contractantes. On trouve
dans l’Ancien Testament un exemple où Dieu fait alliance
au Sinaï avec son peuple par l’intermédiaire de
Moïse. Le contrat fut conclu en sacrifiant des bœufs. Le
sang des animaux sacrifiés fut répandu sur le peuple
(Ex. 24:3-8) une fois les termes de l’alliance acceptés.
Par définition, une
alliance est une obligation contractuelle. Une alliance unilatérale
cela n’existe pas,. Il n’y a pas de notion d’alliance
dans une obligation unilatérale, c’est simplement une
dette, ou de l’esclavage. Un vœu peut être
unilatéral, mais une alliance doit comprendre des obligations
réciproques. « Si tu fais ceci, je fais cela. »
À l’époque de l’Ancien Testament,
l’alliance entre Dieu et son peuple contenait toujours des
termes précis, et tant que le peuple élu respectait ses
obligations, Dieu respectait les siennes. A contrario lorsque le
peuple brisait l’alliance, Dieu n’était plus lié.
Par exemple, dans 2 Rois 18:12, Dieu n’a pas respecté
l’obligation précisée dans l’alliance de
sauver Israël de ses ennemis parce que celui ci n’avait
pas honoré son contrat en désobéissant aux
commandements qu’il avait reçus tel que décrit
dans Exode 24:3 8. Dieu s’oblige à respecter les termes
de ses alliances tant que nous respectons les nôtres (D&A
82:10 ; 84:39-40).
Dans
l’Ancien Testament, le Seigneur dit à Israël qu’il
existerait un jour une nouvelle alliance, une nouvelle relation entre
Dieu et son peuple élu, supérieure à celle
décrite dans la loi de Moïse (Jér. 31:31, 33).
Cette promesse fut accomplie quand l’alliance de l’Évangile
remplaça celle du Sinaï après la mort et la
résurrection de Jésus-Christ. Tout comme dans
l’ancienne, cette nouvelle alliance éternelle nécessite
aussi une victime pour le sacrifice : c’est Jésus-Christ
lui même, « l’Agneau de Dieu »
(Jean 1:29), « l’Agneau qui a été
immolé » (Apoc. 5:6, 9,12). Le sang de Jésus-Christ
qui a été versé à Gethsémané
et sur la croix, est-celui de la nouvelle alliance. Au moment où
il a été versé, il a validé l’accord
(Luc 22:20 ; 1 Cor. 11:25). De la même façon que
Moïse a versé le sang de l’ancienne alliance sur le
peuple élu dans Exode 24:8 pour montrer qu’il acceptait
le contrat, les personnes qui acceptent la nouvelle alliance doivent
prendre sur elles le sacrifice expiatoire du Christ. Lorsque nous
prenons le sang du Christ sur nous, lorsque nous nous purifions dans
« le sang de l’Agneau « (Apoc. 7:17),
nous sommes liés par la nouvelle alliance de la même
façon que les enfants d’Israël l’étaient
avec l’ancienne. Lorsque le sang du Christ a été
versé, le nouveau contrat entre Dieu et les hommes, l’alliance
de l’Évangile, a été validé et
ratifié par tous ceux qui en ont accepté les termes.
Justification
Lorsque
les hommes respectent leurs alliances, et qu’ils vivent selon
les accords passés avec Dieu, on dit qu’ils sont
justifiés. Être justifié, signifie être
reconnu innocent, lavé de toute accusation de mauvaise
conduite, et se trouver sans faute au regard de la loi. La
justification est très importante dans un tribunal, car elle
permet de déclarer que l’accusé est non coupable.
Être justifié,
c’est donc être reconnu non coupable par Dieu, c’est
être lavé de toutes souillures pécheresses et
libéré de toutes obligations envers lui. Ce qui permet
d’entrer dignement dans le royaume en sa présence.
Se sentir justifié est
une noble aspiration et une condition nécessaire à
l’exaltation dans le royaume de Dieu. L’ancienne alliance
de la loi de Moïse et la nouvelle alliance de l’Évangile
ont toutes les deux pour objectif de justifier la personne qui l’a
contractée et qui la respecte.
Mais
dans la loi de Moïse, la justification s’appuyait sur la
justice (justification par la loi), alors que l’alliance de
l’Évangile s’appuie sur la loi de la miséricorde
(justification par la foi).
Justification
par la loi
Théoriquement,
un moyen d’être justifié, et d’être
déclaré non coupable au regard de la divinité
consisterait à garder tous les commandements tout le temps ;
à ne jamais commettre le moindre péché de sorte
qu’on ne serait jamais coupable. C’est ce qu’on
appelle la justification par la loi (en la gardant) ou la
justification par les œuvres. Le système qui définirait
la justice sur des critères exclusivement dus au mérite
ou aux efforts que l’on déploierait pour garder un
ensemble de règles particulières serait un système
basé sur la justification par les œuvres ou par la loi.
Ce système attend de l’individu qu’il fasse son
chemin vers le royaume de Dieu en s’abstenant tout d’abord
de pécher. Cette sympathique solution au problème du
péché supprime la nécessité du pardon, du
repentir ou de l’expiation. En conséquence, il n’est
nul besoin non plus d’un sauveur. L’apôtre Paul,
dans les écrits du Nouveau Testament, définit
l’ancienne alliance mosaïque comme un système de
justification par la loi ou par les œuvres.
Les
termes de l’ancienne alliance, la loi de Moïse,
précisaient essentiellement que si les enfants d’Israël
« gardaient les commandements » c’est à
dire, s’ils observaient les six cent treize commandements et
interdictions de la loi mosaïque, Dieu les protégerait de
leurs ennemis et leur donnerait la terre promise et une postérité.
Si les deux parties respectaient leur part du contrat, Israël
serait le peuple élu de Dieu ; il serait leur Dieu. Cette
alliance était conditionnée par l’obéissance
stricte et par la loi de justice.
Dans
la pratique, les rabbins savaient que personne ne garde toutes les
règles tout le temps, mais ils avaient foi dans la miséricorde
de Dieu qui rachèterait les fautes d’une façon ou
d’une autre. Cependant, il n’y a rien dans les Écritures
pour justifier une telle attente. Il est dit clairement dans
Deutéronome 27:26 que si l’on garde la loi à cent
pour cent, on est juste, mais si l’on brise une seule de ses
dispositions, on est pécheur, on devient transgresseur et
maudit par la loi (voir Jacques
2:10).
De plus, selon les termes de l’ancienne alliance mosaïque,
les personnes pouvaient théoriquement se rendre dignes par
leurs efforts personnels et leurs mérites en gardant toutes
les règles tout le temps.
Techniquement,
il n’y avait rien de faux dans l’ancienne alliance et
dans la loi. C’était la parole de Dieu. Elle était
juste. Si le peuple avait respecté les termes du contrat, il
aurait été justifié par la loi. Après
tout, selon l’esprit de la définition même, est
juste celui qui exécute absolument tout ce que Dieu lui
commande.
Malheureusement,
il apparaît que personne n’en est capable. C’est
comme le fait de dire à ma fille Sarah qu’économiser
tous ses sous pour s’acheter un vélo peut être
plausible en théorie, mais absolument inapplicable dans la
réalité. Il en est de même pour la justification
par la loi, bienque ce soit valable enthéorie, ça ne
marche pas dans la pratique si nous voulons résoudre ici bas
nos besoins dans la situation difficile où nous nous trouvons.
Du fait de notre faiblesse humaine et de notre nature déchue,
les conditions de la loi mosaïque, l’ancienne alliance,
sont tout simplement hors de notre portée et ne peuvent nous
justifier. Théoriquement, c’est possible, mais dans la
pratique c’est impossible. Obtenir la justification en
obéissant à la loi ou par les œuvres est une
impossibilité parce que tous les hommes sauf un ont désobéi
au moins une fois dans leur vie. Et on ne peut prétendre à
la justification par l’obéissance si on désobéit
de temps en temps.
Comme
le montre Paul, il y a loin entre essayer de garder les commandements
et les garder véritablement. Selon lui, le premier imbécile
venu qui se croit suffisamment fort pour garder toutes les règles
rend le sacrifice du Christ inefficace pour ce qui le concerne (Gal.
5:4). De plus, celui qui voudrait se fier entièrement à
sa justice a besoin qu’on lui rappelle que la justice obtenue
par le respect de la loi exige un sans faute absolu : « En
effet tous ceux qui s’appuient sur les œuvres de la Loi
sont sous la malédiction ; car il est écrit :’maudit
quiconque n’est pas constant à observer tout ce qui est
écrit dans le livre de la Loi’. Or que par la Loi nul ne
soit justifié devant Dieu, cela est manifeste, puisque le
‘juste vivra par la foi.’ or la Loi ne procède pas
de la foi ; mais elle dit : ‘Celui qui accomplira ces
commandements vivra en eux. « Le Christ nous a rachetés
de la malédiction de la loi » (Gal.3:10-13).
Paul montre ici que toute
prétention à la justice basée sur des efforts
personnels à garder les commandements exige un sans faute
absolu. Un petit écart et on n’est plus parfait, on est
devenu pécheur, et dans ce sens nous sommes tous pécheurs.
« Car nous venons de prouver que tous, Juifs et Grecs,
sont sous le péché, selon qu’il est écrit :
Il n’y a point de juste, pas même un seul… En
effet, nul homme ne sera justifié devant lui par les œuvres
de la loi, car la loi ne fait que donner la connaissance du péché. »
(Rom. 3:9, 10, 20)
En
d’autres termes, personne ne peut prétendre être
juste puisque tout le monde a brisé la loi. Et ce qui est
pire, c’est que la loi elle même prononce une malédiction
sur tous ceux qui ne gardent pas les commandements à la
perfection. (Deut. 27:26), mais à cause de sa nature déchue,
il était carrément impossible à l’homme de
garder tous les commandements de l’ancienne alliance. C’est
pourquoi au moins selon le point de vue de Paul à partir du
premier siècle, Dieu, dans sa miséricorde, a proposé
une nouvelle alliance, un contrat dont nous pouvons respecter les
termes. Jésus-Christ est le seul qui nous rachète de la
malédiction de cette loi qui exige que nous accomplissions un
parcours sans faute. Il nous offre un nouveau moyen pour être
justifié, non par la loi (qui consiste à garder les
commandements tout le temps), mais par la foi en Christ. Certains
tentent naïvement de se justifier par les œuvres, mais
c’est de l’auto justification ; ce genre de
tentative débouche sur une fausse piste. La Bible et le Livre
de Mormon disent tous les deux que l’on ne peut être
justifié de cette façon.
« Cependant
sachant que l’homme est justifié, non par les œuvres
de la Loi, mais par la foi dans le Christ Jésus, nous aussi
nous avons cru au Christ Jésus, afin d’être
justifiés par la foi en lui et non par les œuvres de la
Loi ; car nul homme ne sera justifié par les œuvres
de la loi. » (Gal. 2:16)
Et
les hommes sont suffisamment instruits pour distinguer le bien du
mal. Et la loi est donnée aux hommes. Par la loi, aucune chair
n’est justifiée ; ou, par la loi les hommes sont
retranchés… il n’y a aucune chair qui puisse
demeurer en la présence de Dieu, si ce n’est par les
mérites, et la miséricorde et la grâce du saint
Messie ». (2 Né. 2:5-8)
Bref,
nous ne pouvons arriver à la justification de notre propre
chef. Nous ne pouvons pas gagner le droit d’entrer dans le
royaume céleste en gardant tous les commandements. Nous
pourrions en théorie, mais pas en pratique, parce que ni vous
ni moi ni personne n’a jamais gardé tous les
commandements. C’est tellement évident et pourtant il y
en a qui ne le voit pas. Réfléchissez un peu. Nous
avons déjà un jour ou l’autre brisé
certains commandements, c’est pourquoi nous ne pouvons être
justifiés en prétendant garder les commandements. Nous
sommes déjà disqualifiés ! Hormis le
Sauveur en existe-t-il un qui garde les commandements tout le temps ?
Si notre seul espoir d’hériter du royaume céleste
réside dans le fait de garder toutes les règles,
d’obéir à tous les commandements et à
vivre tous les principes à la perfection, alors, vous et moi
avons déjà brûlé nos dernières
cartouches il y a longtemps. Il est exact que l’Évangile
propose le repentir, le pardon, et l’expiation, mais ce sont
des remèdes à la désobéissance plutôt
que des récompenses pour notre obéissance.
De
nombreux membres de l’Église confondent l’objectif
à long terme visant la perfection individuelle avec la
nécessité à court terme d’être
« parfait en Christ concluant à tort qu’ils
doivent se perfectionner par leurs efforts personnels avant de
pouvoir espérer entrer dans le royaume de Dieu. Elder Bruce R.
McConkie a parlé de cette opinion comme d’une hérésie
mortelle que l’on trouve entre autres dans l’Église
d’aujourd’hui. S’il nous était possible de
nous perfectionner tout seuls, de nous rendre dignes du royaume de
Dieu grâce à nos efforts personnels, nous n’aurions
absolument pas besoin de Jésus-Christ : « Je
ne rejette pas la grâce de Dieu ; car si la justice
s’obtient par la loi, le Christ est donc mort pour rien »
(Gal. 2:21). Si nous pouvions être justifiés par nos
efforts personnels, alors nous n’aurions pas besoin du Sauveur
et le sacrifice infini du Christ aurait été accompli en
vain.
La
justification par la foi en Christ
La
seule voie possible pour être justifiés, et être
déclarés non coupables devant Dieu, consiste tout
d’abord à admettre nos imperfections, et notre
impossibilité d’arriver à la perfection seuls ou
à nous sauver par nos efforts personnels et ensuite à
nous confier dans le Christ notre Sauveur. Nous devons accepter son
aide pour nous permettre d’entrer totalement dans la nouvelle
alliance, dans laquelle ses efforts contrebalanceront nos
déficiences. C’est-ce qu’on appelle la
justification en Christ.
L’innocence
parfaite est toujours exigée dans la nouvelle alliance de la
foi, mais cette innocence est requise de la part de l’équipe,
ou du partenariat, composé du « Christ et moi et
non de moi seul. Du fait que le Christ et moi sommes un dans
l’alliance de l’Évangile, Dieu nous accepte dans
notre dignité combinée, car le Christ et moi sommes
parfaitement dignes. Il en résulte que le Christ et moi sommes
purs et dignes. Mon parcours individuel vers la perfection restera un
but à long terme et constituera le résultat final de
notre relation dans l’alliance, mais ne sera pas une condition
sine qua non pour être justifiés dans l’immédiat
dans la foi au Christ. « Et nous savons que tous les
hommes doivent se repentir, croire au nom de Jésus-Christ,
adorer le Père en son nom, et persévérer jusqu’à
la fin dans la foi en son nom, sinon ils ne peuvent être sauvés
dans le royaume de Dieu. Et nous savons que la justice par la grâce
de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ est juste et
véritable. » (D&A 20:29-30). La loi et la foi,
ces deux moyens pour atteindre la justification, sont présentées
dans le Nouveau Testament comme des fardeaux ou des jougs distincts.
L’obligation faite par la loi d’une obéissance
parfaite était comparée à un lourd « joug
de servitude » (Gal. 5:1 ; Actes 15:10), alors que
les obligations de l’alliance de l’Évangile que
sont le repentir, le pardon, et l’expiation sont qualifiées
de « douces » et de « légères ».
« Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués
et ployez sous le fardeau, et je vous soulagerai. Prenez sur vous mon
joug, et recevez mes leçons, car je suis doux et humble de
cœur ; et vous trouverez le repos dans vos âmes. Car
mon joug est doux, et mon fardeau léger. » (Mat.
11:28-30)
Il n’existe
pas de joug plus lourd que l’exigence de cette perfection qui
apporte la malédiction de la loi. Et de nombreux Saints
ploient encore sous son fardeau . Mais la bonne nouvelle, c’est
que nous sommes libérés en Christ de ce fardeau
écrasant. Il s’en est chargé à notre place
et ce qu’il a accompli dans sa perfection nous libère
d’avoir à souffrir la même chose. Dans l’alliance
de l’Évangile, nous substituons le poids du péché
à l’obligation de l’aimer et de s’aimer les
uns les autres et de faire au mieux de nos capacités.
Garder les commandements
Mais ne nous est-il pas
commandé de garder les commandements ? La réponse
est : oui et non. Lorsque je demande à mes élèves
s’il est nécessaire de garder les commandements pour
entrer dans le royaume céleste, tous me répondent
affirmativement avec une absolue certitude. Ils savent que c’est
vrai parce qu’ils ont entendu les autorités de l’Église
et leurs instructeurs leur dire cela pendant toute leur vie. Mais
quand je leur demande s’ils ont déjà violé
un commandement, ou si actuellement ils ne vivent pas les
commandements, la plupart d’entre eux répondent par
l’affirmative. Ils ne voient généralement pas le
problème important qu’impliquent ces deux réponses.
Les Saints de derniers jours
utilisent habituellement l’expression« garder les
commandements » dans un sens différent
historiquement et techniquement de celui qui est employé
en-dehors de l’Église. Ce n’est pas faux, mais il
est différent, et pour cette raison « garder les
commandements » est quelquefois une expression ambiguë
et gênante pour eux, surtout lorsqu’ils parlent à
des personnes hors de l’Église. En général,
nous disons « garder les commandements « alors
que pour nous cela veut dire « essayer très
fortement de garder les commandements et y arriver la plupart du
temps ». Définie ainsi, cette expression décrit
nos tentativesà obéir, que la nouvelle alliance exige
comme gage de notre « bonne foi ». Dans cette
acception, « garder les commandements « est
possible et nécessaire ; c’est à dire,
essayer de garder les commandements, faire du mieux que nous pouvons,
c’est une exigence de l’alliance de l’Évangile,
alors que le fait de réussir tout, tout juste et maintenant en
gardant tous les commandements n’en est pas une. C’est
pourquoi l’alliance de l’Évangile propose le
repentir et l’Expiation du Christ en sus des commandements.
Cependant, sur le plan
technique, cet usage dans l’Église est incorrect. Si
nous insistons sur les points cruciaux, « garder les
commandements » signifie ne pas les violer, aucun d’entre
eux, et jamais. En réalité, personne ne les garde à
la perfection. Techniquement, vous ne pouvez prétendre les
garder en ce sens dans la mesure où vous en briserez toujours
un. C’est-ce que Jacques dit dans Jac. 2:10 : « Car
quiconque aura observé toute la loi, s’il vient à
faillir en un seul point, est coupable de tous. En effet, celui qui a
dit :’tu ne commettras point d’adultère’
a dit aussi :’ tu ne tueras point’. Si donc tu tues,
quoique tu ne commettes point d’adultère, tu es
transgresseur de la loi. »
L’ambiguïté
entre l’acception traditionnelle et l’usage que font les
membres de l’Église de l’expression « garder
les commandements « a suscité dans le passé
des discussions entre des membres de l’Église et
d’autres chrétiens et a eu pour conséquence que
des gens qui ne comprennent pas notre vocabulaire théologique
disent que nous croyons dans le salut par les œuvres. Il s’en
est suivi que des membres de l’Église ont conclu à
tort qu’il était exigé d’eux une
performance parfaite dans le cadre de l’alliance de l’Évangile,
alors que l’objectif est d’atteindre des buts appropriés
et de faire tout ce que nous pouvons pour les accomplir. Le but
ultime de l’expiation du Christ est de montrer la voie à
ceux qui n’ont pas gardé, qui ne gardent pas et qui
probablement ne garderont pas tous les commandements tout le temps
puissent encore être exaltés dans le royaume céleste
divin. Ils continueront à y progresser dans l’éternité
jusqu’à la perfection dans la mesure où ils
manifesteront leur soif et leur faim de justice.
Dans
le Nouveau Testament, lorsque Paul parle de garder les commandements
ou d’être justifiés par les œuvres, il veut
dire qu’il faut obéir à tous les commandements,
tout le temps. C’est pourquoi il en conclut que personne, dans
cette acception, ne peut « garder les commandements que
notre incapacité à les garder nous condamne sûrement,
et que nous devons chercher une autre voie de salut. À
strictement parler, il importe peu de savoir si on les suit ou pas ;
si on ne les respecte pas tous, on est transgresseur et coupable. En
s’appuyant sur cette définition, il est clair que
quiconque voudrait prétendre à la justice en les
respectant se doit de les garder tous, tout le temps. Bonne chance à
lui.
Les termes de la
Nouvelle alliance
Les
conditions de l’ancienne alliance, la Loi mosaïque,
exigeaient l’obéissance parfaite aux règles. En
retour on se trouvait justifié aux yeux de Dieu, on était
sauvé de ses ennemis, et on héritait de la terre
promise. Les termes de la nouvelle alliance sont : 1) avoir foi
au Seigneur Jésus-Christ, croire continuellement au Sauveur et
montrer son engagement envers lui ; 2) se repentir, ce qui
représente un processus continuel consistant à rejeter
ses fautes et à repartir d’un bon pied ; 3) le
baptême, ordonnance symbolique au cours de laquelle le poids
des péchés est enlevé. Lorsque l’on a
accompli toutes ces choses, on est digne de 4) recevoir le don du
Saint-Esprit.
L’alliance
est entérinée par la réception du don du
Saint-Esprit, et certifie que l’on a été purifié
de ses péchés passés, et que l’on est
maintenant digne de la compagnie du troisième membre de la
Divinité (3 Né. 27:19-21). Lorsque l’on
respecte la nouvelle alliance, on est justifié au regard de
Dieu, on est sauvé de ses ennemis (qui sont le péché
et la mort), et on hérite de la terre promise (qui est le
royaume de Dieu). Ainsi la nouvelle alliance réalise selon des
conditions acceptables toutes les promesses annoncées dans
l’ancienne, et qui autrement auraient été
inaccessibles.
Nous
avons là une façon de comprendre l’alliance de
l’Évangile, cette proposition du Sauveur à ses
bien aimés. L’alliance est un accord de partenariat
entre nous et le Sauveur. Nous devons croire au Christ et à la
justification par la foi en lui. Nous devons nous engager envers le
Christ et admettre la justification par la foi. Sachant que nous ne
pouvons faire tout ce que la loi exige de nous, nous acceptons de
faire tout ce que nous pouvons dans le cadre de l’alliance de
l’Évangile. Nous acceptons de faire du mieux que nous
pouvons pour le Sauveur et nous lui donnons tout ce que nous avons.
Nous admettons que la perfection est notre but ultime et que nous
voulons œuvrer en ce sens de concert avec lui. C’est
ainsi que l’idée de « garder les
commandements « est toujours une part importante de
l’arrangement, mais que « garder les commandements à
la perfection » n’en fait pas partie, tout au moins
dans l’immédiat.
En
retour de cette concession magnifique, nous acceptons de nous
repentir à chaque fois que nous ne respectons pas les
commandements à la perfection et nous recommençons
aussi souvent que nécessaire, et nous ne cessons jamais de
nous repentir pour essayer d’être comme lui.
En
retour, le Sauveur accepte de couvrir nos fautes au cours de notre
apprentissage et de nos progrès. Bien que notre perfection
individuelle ne se manifestera que plus tard, bien longtemps après
que cette vie sera finie, notre perfection conjointe, notre
perfection en Christ, elle, est opérationnelle immédiatement.
À partir du moment où nous entrons dans l’alliance
avec lui, il couvre nos fautes, nous sommes parfaits en lui, pourvu
que nous continuions dans l’alliance, que nous « endurions
jusqu’à la fin ». Une fois redevenus
innocents, purs et dignes par la foi, la repentance et le baptême,
nous recevons le don du Saint-Esprit, que Dieu nous accorde comme
« arrhes de notre héritage » (Éph.
1:14 ; 2 Cor. 1:22 ; 5:5), une sorte de garantie et de
paiement comptant des bénédictions merveilleuses dont
nous hériterons. Par le don du SaintEsprit, le Christ donne
aussi à ses partenaires minoritaires un compas pour leur
permettre de mieux naviguer spirituellement, avec le réconfort
d’un témoignage et l’assurance qu’ils ont
été vraiment justifiés par son alliance.
Tout comme la dîme, les
termes de cette alliance sont dans un sens les mêmes pour tous,
mais ils sont différents pour chacun selon ses capacités
personnelles. Les conditions de la loi de la dîme sont
universelles : un dixième de notre revenu annuel (D&A
119:4). Mais cette formule donne des résultats différents
pour chacun d’entre nous. Il en est de même dans
l’alliance de l’Évangile. Le Sauveur exige un
pourcentage précis : tout ce que nous avons, c’est
à dire cent pour cent. Mais les cent pour cent de l’un
seront différents de l’autre, car ils sont fonction de
la connaissance spirituelle et de la maturité de l’individu.
Quelle merveilleuse flexibilité ! Il n’exige jamais
plus que ce que je suis capable de donner, et ce qu’il requiert
de moi est toujours adapté à ma connaissance et aux
circonstances.
C’est
pourquoi je ne dois pas me décourager si je ne progresse pas
autant que frère X ou sœur Y. Mes obligations consistent
à donner tout ce que, moi, j’ai, et non pas tout ce qu’a
quelqu’un d’autre, à être aussi bon que je
puis l’être, et non aussi bon que n’importe qui
d’autre. Dans les Doctrine et Alliances 10:4, le Seigneur
avertit qu’il convient même d’éviter de
courir plus que l’on a de force :
« Ne
cours pas plus vite et ne travaille pas au delà des forces et
des moyens qui te sont donnés… » Ayez foi en
Christ ; faites du mieux que vous pouvez ; n’essayez
pas de faire plus que vous pouvez.
Les
apôtres et les prophètes sont justifiés par la
foi en Christ selon les mêmes conditions que moi. Mais lorsque
j’aurais atteint leur degré de progression et de
maturité dans l’Évangile, il sera requis de moi
que j’atteigne leur niveau de performances, mais on ne me le
demandera pas avant. C’est pourquoi je ne dois pas désespérer
parce que je n’ai pas l’impression de faire aussi bien
que les autres, ou que je ne paie pas la même dîme que
d’autres. Ce que Dieu exige dans les deux cas est juste et
adapté à chaque personne.
Cependant
l’inverse est vrai. Tout comme je ne dois pas déprimer
du fait que d’autres font mieux que moi, je ne dois pas
regarder ceux qui ne font pas aussi bien que moi. Car les termes du
contrat sont les mêmes pour eux que pour moi :
« Donnez-moi tout ce que vous avez, que ce soit beaucoup
ou peu, et je ferais le reste pendant que vous apprendrez comment
faire. » Peu importe que l’on ait soixante et un
cents, un dollar et demi, ou deux cents, le marché est
toujours le même : « Donnez moi tout ce quevous
avez, et je ferais le reste. » Du fait que nous ne pouvons
satisfaire à nos besoins, même s’ils sont tous
différents, nous sommes tous dans le même bateau et nous
avons tous besoin du même salut. C’est pourquoi
l’alliance offerte par le Sauveur est la même pour tous.
Attitude
Il
est évident que la meilleure façon de déterminer
si notre alliance est validée ne repose pas nécessairement
sur notre performance relative ou même sur notre « bonté »
telle que nous, humains, considérons la bonté, mais
plutôt sur notre attitude, les désirs de notre cœur.
Les Écritures le disent clairement : « C’est
pourquoi la rédemption vient dans et par l’intermédiaire
du saint Messie ; car il est plein de grâce et de vérité.
Voici, il s’offre en sacrifice pour le péché,
pour satisfaire aux exigences de la loi, pour tous ceux qui ont le
cœur brisé et l’esprit contrit, et il ne peut être
satisfait aux exigences de la loi pour personne d’autre. »
(2 Né. 2:6-7)
L’attitude,
la condition de notre cœur, est tout. Il importe peu que nous
soyons fiers de notre capacité relative à garder les
commandements, tant que notre attitude n’est pas correcte, que
notre cœur n’est pas brisé, et que notre esprit
n’est pas contrit, notre bonté relative ne nous sert pas
à grand’ chose. Mais aussi impressionnante que soit la
performance relative d’un individu, sans le Sauveur celle-ci
est insuffisante pour obtenir le salut ; elle ne suffit pas pour
satisfaire à la perfection exigée pour entrer en
présence de Dieu.
D’un
autre côté, dès que notre attitude est correcte,
c’est à dire dès que notre cœur est brisé
et notre esprit contrit, notre faiblesse relative est de peu
d’importance, du moment que nous entrons dans l’alliance
et que nous continuons à la respecter. Lorsque le coût
de la bicyclette s’élève à plus de cent
euros, quelle différence cela peut-il faire sur le long terme
qu’il me manque cent euros et qu’il vous manque à
vous quatre vingt dix neuf euros ? Nous sommes tous des
mendiants aux yeux de Dieu. C’est pourquoi je ne ressens aucune
supériorité par rapport au plus humble des membres. Je
peux seulement ressentir de l’empathie pour celui qui partage
la même situation que moi devant Dieu.
La
Sainte-Cène
La
conversion et le repentir ne sont pas des événements
qui arrivent une seule fois. De plus nous ne pouvons garder tous les
commandements tout le temps, c’est pourquoi nous devons
renouveler nos alliances régulièrement. En tant
qu’êtres déchus nous avons besoin de nous rappeler
l’alliance que nous avons faite et l’engagement que nous
avons pris lors du baptême. Nous avons besoin d’occasions
qui nous permettent de nous corriger fréquemment. Cela peut
sembler curieux au regard de nombreuses confessions de prendre la
Sainte Céne toutes les semaines. Mais les saints des derniers
jours savent que des êtres imparfaits doivent redéfinir
régulièrement leur but visant à la perfection,
ce qui leur permet entre temps d’être justifiés
par le sacrifice expiatoire du Christ.
C’est
pourquoi nous venons toutes les semaines devant le Seigneur pour nous
préparer à la Sainte-Cène et dire en substance :
« Père céleste, je n’ai pas été
parfait cette semaine, mais je me repens de mes péchés
et réaffirme mon engagement à garder tous les
commandements. Je promets de revenir pour essayer de nouveau de tout
mon cœur, tout mon pouvoir, toute ma pensée et toute ma
force. J’ai toujours besoin de la purification qui vient de la
foi, du repentir et du baptême. Veuille perpétuer mon
contrat, mon alliance du baptême et accorde moi les
bénédictions continuelles de l’Expiation et la
compagnie du Saint-Esprit. »
Doctrine
et Alliances 20:77 doit être l’Écriture la plus
familière des saints des derniers jours. Nous faisons cette
prière à chaque fois que nous renouvelons nos alliances
avec Dieu : « Ô Dieu, Père éternel,
nous te demandons au nom de ton Fils, Jésus-Christ, de bénir
et de sanctifier ce pain pour les âmes de tous ceux qui en
prennent, afin qu’ils le mangent en souvenir du corps de ton
Fils, et te témoigner, Ô Dieu, Père éternel… »
Quand nous prenons la
Sainte-Cène, nous renouvelons l’alliance de l’Évangile,
et nous le faisons en souvenir du Fils qui est l’auteur de
cette alliance. Lorsque nous pensons au Sauveur et à son
sacrifice, nous témoignons de certaines choses. Témoigner
c’est jurer ou affirmer solennellement. C’est pourquoi
‘et te témoigner’ introduit la déclaration
légale de la prière : « et te
témoigner, ô Dieu, Père éternel, qu’ils
veulent prendre sur eux le nom de ton Fils, et garder toujours les
commandements qu’il leur a donnés. »
Pourquoi est-il nécessaire
de trouver ces mots : « veulent prendre » ?
Sont-ils importants ? Cela ferait-il une différence si on
les enlevait et qu'on lisait seulement : « …et
te témoigne, ô Dieu Père éternel, qu’ils
prennent sur eux le nom de ton fils, et qu’ils se souviennent
toujours de lui afin qu’ils gardent les commandements qu’il
leur a donnés » ? Oui, cela ferait une
différence. Cela en ferait une, car je ne peux faire ce qui
vient d’être dit. Je ne peux témoigner, affirmer
ou jurer que je peux toujours me souvenir de lui et garder ses
commandements. Je mentirais, et je le sais ; je veux faire ce
qui est juste, mais parfois je ne peux pas. C’est précisément
là qu’est le problème : L’expiation du
Christ et l’alliance de l’Évangile me sont
nécessaires en tout premier lieu ; je ne peux garder tous
les commandements tout le temps quels que soient les efforts que j’y
consacre. C’est pourquoi je ne peux témoigner
honnêtement devant Dieu que je garderais tous les commandements
quand je sais que dans une mesure plus ou moins grande je ne le
ferais pas.
Cependant,
je peux en toute honnêteté affirmer que je suis disposé
à le faire. Je peux jurer que c’est là le désir
de mon cœur. Je peux affirmer que j’ai faim et soif de
ces choses, et que je veux faire tout ce qui est en mon pouvoir pour
y obéir. Ainsi Dieu me fait connaître grâce aux
termes techniques contenus dans la prière de renouvellement de
l’alliance que l’engagement honnête de mon cœur
et mes efforts sincères suffisent pour que l’alliance
soit renouvelée, et la foi suffit, par la grâce du
Christ, pour me justifier aux yeux de Dieu.
Un
cœur dévoué
Par
dessus tout, c’est notre cœur que Dieu veut. Les
performances imparfaites peuvent être corrigées, les
péchés pardonnés, les fautes oubliées,
mais Dieu ne peut rien contre un cœur rebelle et mal disposé
tant qu’il ne se repent pas. On peut être sauvé de
la faiblesse, mais pas de la rébellion. « Voici, le
Seigneur exige un cœur et un esprit bien disposés. »
(D&A 64:34)
Doctrine
et Alliances 46:9 montre que Dieu accepte notre bonne volonté
sincère et notre désir honnête quand bien même
nous ne sommes pas des plus performants. Cette écriture parle
des dons de l’Esprit accordés aux saints : « Ils
sont donnés pour le profit de ceux qui m’aiment et
gardent tous mes commandements… » Les dons de
l’Esprit sont pour ceux qui aiment Dieu et qui gardent tous les
commandements ? Oh, non, pas tous les commandements :
Jamais je ne serais qualifié ! Mais attendez, il y a une
virgule « … et de celui qui cherche à faire
ainsi ». Merci Seigneur, pour ce qui vient après la
virgule ! Même ceux qui ne sont pas parfaits peuvent jouir
des dons et des bénédictions de l’Esprit, tant
que l’on cherche à garder les commandements au mieux de
nos capacités.
La
Perle de grand prix dit aussi comment le Saint-Esprit a confirmé
à Adam que : « …de même que tu es
tombé, tu puisses être racheté, ainsi que toute
l’humanité, tous ceux qui le veulent » (Moïse
5:9). Remarquez qu’il n’est pas dit : « tous
ceux qui sont parfaits » ; Adam est imparfait et
déchu (comme vous et moi). La promesse s’adresse à
tous ceux qui le veulent, c’est à dire à tous
ceux qui désirent véritablement la rédemption de
leur imperfection. Un autre aspect des promesses de la nouvelle
alliance montre que tous ceux qui le désirent réellement
et qui y travaillent de toutes leurs forces peuvent entrer dans le
royaume de Dieu, quelle que soit l’énergie qu’ils
déploient, et qu’ils hériteront du royaume.
Et
ça c’est la bonne nouvelle.
CHAPITRE
QUATRE : LE SALUT PAR LA GRÂCE
Je
pose souvent cette question à mes étudiants :
« Quand vous serez à la barre de Dieu au jour du
Jugement dernier, combien parmi vous aimeraient avoir l’assurance
que Dieu sera absolument juste avec vous ? » En
général, toutes les mains se lèvent. C’est
à ce moment que je leur tire le tapis sous les pieds. « Vous
auriez intérêt à bien réfléchir.
Être juste consiste à être jugé selon les
lois de la justice et recevoir ce que l’on mérite. Mais
des êtres déchus et imparfaits tels que nous ne
cherchent pas à avoir ce qu’ils méritent. Ils
cherchent mieux. Ils ne veulent pas que Dieu les juge justement, ils
veulent qu’il soit miséricordieux. L’expiation du
Christ fournit un moyen pour que Dieu soit en même temps juste
et miséricordieux. Comme le Christ et moi sommes un dans
l’alliance de l’Évangile, et que dans un
partenariat, il importe peu de savoir qui fait quoi, le Christ peut
satisfaire aux exigences de la justice en ma faveur, et je peux alors
recevoir les bénéfices de la miséricorde de
Dieu. Voilà un arrangement qui satisfait la justice et la
miséricorde.
Il
se trouve qu’il y a toujours des gens qui sont si
« dépendants » de la loi de la justice
qu’ils ont des difficultés à intégrer la
loi de la miséricorde ou de la grâce. Certains aspects
de l’Évangile et de la miséricorde les agacent et
leur semblent injustes (en d’autres mots, miséricorde
plutôt que justice) par exemple, ce n’est pas très
juste qu’une personne doive souffrir pour les péchés
d’autrui. Il n’est pas juste que des gens commettent des
crimes horribles et soient ensuite complètement pardonnés
et purifiés sans avoir à en souffrir. Il n’est
pas juste que celui qui travaille seulement une heure reçoive
la même récompense que celui qui travaille toute la
journée. (Voir Matt. 20:1-16)
Non,
l’Évangile, parfois, n’est pas juste, mais c’est
en fait une partie de la bonne nouvelle. Elle n’est pas juste,
elle est miséricordieuse, et grâce à Dieu, il en
est ainsi, car nul homme ne peut être acquitté vu les
exigences de la justice absolue. Du point de vue des êtres
imparfaits et mortels que nous sommes, se trouver jugés
exclusivement par la justice est notre pire cauchemar. Il n’en
reste pas moins que certains d’entre nous ne veulent pas
abandonner la loi de la justice. De nombreuses personnes m’ont
dit : « Oui, ce que vous dites sur la miséricorde
et la justice serait merveilleux si c’était la réalité,
mais pour moi, il y a quelque chose qui ne va pas. C’est trop
facile, cela ne semble pas juste. » En d’autres
termes « Je n’accepte pas la miséricorde
parce que ça n’est pas la justice. » Mais
c’est justement cela la bonne nouvelle. L’Évangile
offre la miséricorde à ceux qui seraient autrement
damnés par la justice. Que disent les Écritures :
« Oh !La
grandeur de la miséricorde de notre Dieu, le Saint d’Israël !
Car il délivre ses saints de ce monstre affreux, le diable, et
de la mort, et de l’enfer, et de l’étang de feu et
de soufre, qui est le tourment sans fin ». (2 Né.
9:19)
Maintenant, ce
n’est pas un sort injuste que les Saints soient délivrés
de l’enfer. Il n’y a rien de mal à ce que les gens
aillent en enfer, ils le méritent. Après tout, ils ont
des péchés à payer et il n’est que juste
qu’ils les assument : « Mais malheur à
celui à qui la loi est donnée, oui, qui a tous les
commandements de Dieu, comme nous, et qui les transgresse, et qui
prodigue les jours de son épreuve, car affreux est son
état ! » (2 Né. 9:27). Dans la
situation décrite dans ces deux Écritures, le diable,
la mort, et l’enfer reçoivent un pouvoir sur les
individus limité dans le temps et en intensité
permettant de rembourser la dette du péché. L’enfer
n’est pas une invention satanique. Il fait partie du plan de
Dieu, et cette notion est parfaitement juste. Il est vrai que c’est
Satan qui y règne, mais seulement dans la limite permise par
Dieu. La menace de l’enfer représente la menace de la
justice, et la peur de recevoir ce que l’on mérite et
d’avoir à payer ce que l’on doit sans que la
miséricorde n’interfère.
D’un
autre côté, l’expiation du Christ offre un moyen
d’obtenir la miséricorde plutôt que la justice et
d’éviter ainsi un juste châtiment en enfer. Mais
si on rejette la miséricorde qu’offre le Christ, alors
il est juste de souffrir pour ses péchés. La justice ne
pourra jamais intervenir pour nous sauver d’un châtiment
mérité, seule la miséricorde peut le faire. « Et
tandis que le bras de sa miséricorde est étendu vers
vous à la lumière du jour, ne vous endurcissez pas le
cœur… (Autrement) selon le pouvoir de la justice, car la
justice ne peut se voir opposer un refus, vous devrez vous en aller
dans l’étang de feu et de soufre, dont les flammes ne
s’éteignent pas, et dont la fumée monte pour
toujours et à jamais, étang de feu et de soufre qui est
le tourment sans fin. » (Jacob 6:5, 10)
Dans
cette vie, il n’y a que deux maîtres et deux
possibilités. Nous devons choisir à qui nous
appartenons : à l’un ou à l’autre. Si
nous ne choisissons pas l’un, c’est l’autre que
nous aurons par défaut. Il n’y a pas de terrain neutre,
pas de troisième choix. La vie est réglée par
défaut comme les ordinateurs. Les conditions s’appliquent
automatiquement à moins de prendre une décision
consciente pour les modifier. Ainsi, si nous refusons que le Christ
soit notre Seigneur en remplissant toutes les conditions pour entrer
dans son alliance, Satan devient notre seigneur par défaut.
C’est le Christ par choix ou Satan par défaut. Il n’y
a pas d’autres options.
Le
Christ « apportera le salut à tous ceux qui
croiront en son nom ; ceci étant le but de ce dernier
sacrifice : réaliser les entrailles de miséricorde,
ce qui l’emporte sur la justice et fournit aux hommes le moyen
d’avoir la foi qui produit le repentir. Et ainsi la miséricorde
peut satisfaire aux exigences de la justice et les enserre dans les
bras de la sécurité… » (Alma
34:15-16) Le choix qui se présente à nous est la
miséricorde ou la justice. On peut se tourner vers l’un
de ces deux choix, et l’un et l’autre sont en accord avec
la nature et le plan de Dieu. Mais hormis Dieu et Satan, il n’existe
pas de troisième voie. De nouveau, la vie a des réglages
par défaut, et ces réglages sont définis sur la
justice. Nous pouvons choisir la miséricorde offerte par
l’alliance de l’Évangile, mais si nous la
refusons, c’est la justice que nous subirons.
Cependant, la miséricorde
a ceci d’original : par définition elle ne
s’obtient qu’à condition de ne pas la mériter.
Car si nous méritons quelque chose, alors il est juste que
nous la recevions. Et cela cesse d’être la miséricorde.
C’est pourquoi dans ce sens, tout au moins, accorder ou
bénéficier de la miséricorde a toujours un côté
injuste. Mais un des aspects merveilleux de l’Évangile,
une des bonnes nouvelles parmi d’autres est que Jésus-Christ
ne se soucie pas de cette injustice. Il a la volonté de
souffrir injustement et de compenser lui même la justice en
payant de sa personne afin d’étendre la miséricorde
à des êtres faibles comme nous. Cette volonté qui
est la sienne de payer plus que son dû et de porter plus que ce
qu’il devrait afin d’accorder la miséricorde à
autrui représente la grâce du Christ.
La
grâce
Dans la
Bible, le mot grâce a plusieurs significations. Les mots
hébreux ou grecs habituellement traduits par « grâce »
(respectivement hen ou charis) sont aussi traduits par faveur,
plaisir, remerciements, gracieuseté ou bienveillance. On
utilise aussi le terme pour désigner un cadeau, un bénéfice,
ou un geste symbolique. Dans la société contemporaine,
le pourboire ou la gratuité (de la même racine latine
que grâce) représente la même idée. Un
client paie sa note, c’est la justice qui l’exige, mais
le pourboire est laissé à la libre appréciation.
Il n’y a aucune obligation. La grâce peut aussi signifier
la beauté (Jacques 1:11) ou elle peut désigner la
faveur ou la situation particulière que l’on accorde à
une tierce personne en retour d’un service rendu (voir Gen.
33:8), pour un avantage spirituel (voir 1 Sam. 2:18), ou même
pour décrire la beauté physique (voir Esther 2:15-17).
Dans le Nouveau Testament, le
mot « grâce » se rapporte plus souvent à
la grâce ou à la faveur divine, et l’on comprend
habituellement ce terme comme désignant l’attitude
bienveillante qui prédispose Dieu à agir positivement
envers les êtres humains. Le mot clé ici est
‘prédispose’. En d’autres termes, avant
d’avoir fait quoi que soit, avant d’être beau et
intelligent ou charmant ou même juste, avant d’avoir pu
gagner quelque récompense ou mériter quelques
bénédictions, avant tout ceci, Dieu est déjà
prédisposé à mon égard. La grâce en
ce sens n’est pas une chose que je peux susciter, manipuler,
gagner, mériter, ou contrôler, car c’est un aspect
préexistant de l’attitude de Dieu à mon égard.
Avant que j’aie même pu lui répondre, il m’aimait
déjà, il voulait déjà m’aider et il
voulait déjà me voir réussir (Cf. 1 Jn 4:19) Par
cette prédisposition à mon égard, Dieu m’accorde
aussi des dons de temps en temps pour m’aider à réussir.
Dans les Écritures ces dons sont quelquefois présentés
comme étant la grâce de Dieu, puisque ce sont des
symboles de sa prédisposition positive à mon égard.
Tout comme notre Père
céleste, la plupart des parents sont prédisposés
favorablement envers leurs enfants avant même qu’ils
aient fait quoi que ce soit de méritant. Même lorsque
tout ce que peut faire un enfant, c’est pleurer et mouiller ses
couches, même dans ces circonstances, on peut être sûr
que ses parents disposent d’un vaste réservoir d’amour
et de soins et qu’ils se soucient de lui. Bien que les enfants
consomment plus qu’ils ne produisent, la plupart des parents
sont prédisposés à les traiter favorablement, ou
en d’autres termes à leur accorder la grâce. C’est
pourquoi ils font des choses pour leurs enfants qu’ils ne
feraient pas pour des étrangers.
Quand
il grandit, le « s’il te plaît » de
l’enfant est un appel à la bienveillance et à la
grâce de maman et papa. « S’il te plaît »
n’est pas un argument, il n’avance aucune preuve que ce
qui est demandé est juste ou mérité. Cela
n’implique pas que l’objet en question ait été
gagné. Il signifie simplement : « Faites le
parce que vous m’aimez et que vous êtes prédisposés
en ma faveur, ou faites le simplement parce que je le veux ou que
j’en ai besoin, et que vous vous souciez de mes besoins et de
mes désirs. Faites le en signe de votre grâce, pour
exprimer votre affection envers moi. Faites le parce que je suis à
vous et que vous êtes à moi ». L’expression
espagnole « por favor » qui signifie « s’il
te plaît » se traduit littéralement « par
grâce » ou « par faveur » et
exprime la véritable signification de la supplique « s’il
te plaît ».
Théologiquement,
la grâce de Dieu représente sa bienveillance à
notre égard, sa prédisposition à agir au mieux
de nos intérêts avant même d’avoir gagné
ou mérité sa considération. Les saints des
derniers jours comprennent que Dieu a exprimé de nombreuses
façons sa grâce inconditionnelle envers ses enfants. Par
exemple, Dieu a fait de nous ses enfants d’esprits dans la vie
pré mortelle. Ce fut pour nous une grande bénédiction,
alors que nous ne l’avions pas demandé, et qu’il
n’y avait aucun moyen de mériter ou de gagner par avance
le droit à devenir ses enfants. Dieu l’a fait parce
qu’il avait le pouvoir de le faire et nous nous en sommes
trouvés mieux après qu’il l’ait eu fait.
Notre naissance en tant
qu’enfants d’esprits fut l’expression gratuite de
la bienveillance du Père, de son souci et de son amour
délibéré et sans exclusive à notre égard.
C’est-cela la grâce pure. De plus, tout comme les parents
aiment leurs petits enfants avant même qu’ils puissent le
leur rendre, Dieu nous aime avant même que nous puissions
l’aimer en retour, et encore moins « gagner »
cet amour par notre bon comportement.
La
grâce divine touche aussi et réclame les enfants morts
avant l’âge de responsabilité (voir D&A
29:46 ; 137:10). Tout comme elle réclame les malades
handicapés (voir D&A 29:50) et ceux qui sont véritablement
ignorants des commandements de Dieu dans la mesure de leur ignorance
(voir 2 Né. 9:25-26). Dans tous ces cas, Dieu est
prédisposé à agir unilatéralement en leur
faveur sans qu’il leur soit nécessaire de se qualifier
pour mériter son attention. Ils sont sauvés par la
grâce. Les saints des derniers jours croient aussi que c’est
par la grâce divine que la postérité d’Adam
ne supporte pas le poids du péché d’Adam (le
péché originel) et que c’est là un acte
unilatéral qui montre la bienveillance de Dieu (voir Moro. 8:
8) Ainsi, tous les hommes ressusciteront par la grâce de Dieu.
Ces aspects de la grâce divine sont des dons que nous ne
pouvons maîtriser ni mériter.
Néanmoins,
on utilise quelques fois le terme de grâce dans un sens
différent pour décrire une qualité remarquable
et qui concerne le comportement. Quand on en parle dans ce sens, la
faveur ou la grâce divine n’est pas une donnée
préexistante, mais une chose que l’on doit rechercher,
qui peut augmenter ou diminuer, ou même être complètement
perdue en raison du comportement de l’individu. Ainsi, Pierre
soutient dans 1 Pierre 5:5 que Dieu accorde sa grâce aux
humbles (par opposition à ceux qui manquent d’humilité).
Il exhorte aussi les croyants à « croître
dans la grâce » (voir 2 Pierre 3:18) (Cf. Luc
2:52). Jean explique que les croyants reçoivent grâce
sur grâce, ou en d’autres termes, ils reçoivent
davantage de faveurs de la part de Dieu à chaque fois qu’ils
réagissent positivement (gracieusement) aux grâces déjà
obtenues (voir Jean 1:16 ; D&A 93:12, 19-20). Paul avertit
même les Galates du danger à se laisser détourner
de la grâce de JésusChrist à cause de leur folie
(voir Gal. 1:6 ; 5:4).
Cette
grâce qui vient en retour peut se développer (1 Pierre
1:2). Elle « abonde » en certaines
circonstances, ou elle peut être reçue en « vain »
(2 Cor. 6:11). On l’emploie dans le sens d’une récompense
dans Luc 6:32, 34 (… quel gré vous en saura-t-on ?)
et des remerciements que les hommes doivent à Dieu. Encore
aujourd’hui, « dire les grâces »
signifie offrir les remerciements dus à Dieu pour ses
bénédictions. Ce genre de grâce sensible
constitue aussi la nuance qui se trouve derrière la plupart
des Écritures dans lesquelles on parle de trouver « grâce
aux yeux » d’autrui (voir Gen. 19:19 ; 1 Sam.
20:3). Quand on emploie le terme « grâce »
dans ce sens, en tant que grâce sensible, on voit comment on
peut dire que quelqu’un a grandi de grâce en grâce
pour arriver enfin à une « plénitude de
grâce » (D&A 93:12, 19-20).
Nous
voyons donc que certains aspects de la faveur ou de la grâce
divine sont unilatéraux et sans condition préalable.
Ces choses nous ont été accordées par Dieu sans
tenir compte de notre comportement personnel. Ce sont des dons
totalement désintéressés accordés à
tous les humains à cause de son amour préexistant.
Cependant, d’autres aspects de la faveur ou de la grâce
divine sont soumis à conditions et sont susceptibles
d’augmenter ou de diminuer, et même de disparaître
totalement de nos vies en fonction de la façon dont nous les
recevons. Néanmoins, dans les deux cas, l’amour et la
grâce de Dieu sont déversés sur l’homme.
L’amour et la grâce proviennent de lui, car c’est
sa nature, et il fait le premier pas. Dieu nous aime, non pas parce
que nous sommes si aimables qu’il ne peut s’empêcher
de nous aimer, il nous aime parce que c’est dans sa nature
d’aimer, parce que Dieu est amour (voir 1 Jean 4:8).
Sauvé par la grâce
La plus grande expression de
l’amour et la grâce unilatérale et sans condition
manifestée par Dieu se manifeste dans le don du Sauveur en
faveur des pécheurs. « Car Dieu a tant aimé
le monde, qu’il a donné son Fils unique, afin que tous
ceux qui croient ne périssent pas, mais qu’ils aient la
vie éternelle » (Jean 3:16). L’expiation du
Christ et le don de sa miséricorde sont pour nous, que nous
soyons justes ou pas, que nous les méritions ou pas. Elles
sont offertes tant pour le juste que pour le méchant
(religieusement parlant). Tout le monde est invité à le
recevoir. Cette solution pour résoudre tous les problèmes
de l’humanité est offerte gratis (gracieusement). La
justice n’exigeait pas que le Père fournisse un Sauveur,
non plus que Jésus-Christ s’offre pour être ce
Sauveur et souffre à notre place pour nous sauver. Lorsqu’il
a vu notre faiblesse, le danger que nous courions, et la nécessité
dans laquelle nous étions, son amour et sa compassion l’ont
poussé à offrir son intervention, à se porter
volontaire.
L’alliance
de l’Évangile repose sur la grâce, l’expression
de la bienveillance divine. Dieu n’était pas tenu de
nous proposer cette nouvelle alliance, et le Christ n’était
pas obligé de se porter volontaire. En tant qu’humains,
nous n’avons pas mérité nigagné l’offre
de la nouvelle alliance. C’est plutôt le contraire :
l’alliance de l’Évangile était nécessaire
en premier lieu à cause de notre désobéissance
et de notre incapacité à garder les commandements. Nous
ne l’avons pas gagné, nous en avions besoin. Pas de
grâce, pas de volontaire, pas de volontaire, pas de sauveur,
pas de sauveur, pas de salut. La conclusion est inévitable :
nous sommes sauvés par la grâce.
Pour
certaines raisons, les saints des derniers jours ne sont pas à
l’aise avec la doctrine de la grâce. Je crois que c’est
parce qu’ils ont été trop rebutés par les
interprétations provenant de certaines confessions chrétiennes
et ils en sont arrivés à rejeter le terme même ;
ils ont jeté le bébé avec l’eau du bain.
Cependant, étant donné le nombre d’Écritures
des livres canoniques qui enseignent la grâce, nous ne pouvons
nier la place centrale qu’elle occupe dans l’Évangile.
Ainsi, voici ce que dit le Livre de Mormon : « …réconciliez
vous avec la volonté de Dieu, et non avec la volonté du
diable et de la chair ; et souvenez vous, lorsque vous serez
réconciliés avec Dieu, que ce n’est que dans et
par la grâce de Dieu que vous êtes sauvés. (2 Né.
10:24)
Car nous
travaillons diligemment à écrire ; pour persuader
nos enfants, et aussi nos frères, de croire au Christ et
d’être réconciliés avec Dieu ; car
nous savons que c’est par la grâce que nous sommes
sauvés, après tout ce que nous pouvons faire. (2 Né.
25:23)
«Et si les
hommes viennent à moi, je leur montrerai leur faiblesse. Je
donne aux hommes de la faiblesse afin qu’ils soient humbles ;
et ma grâce suffit à tous les hommes qui s’humilient
devant moi ; car s’ils s ’humilient devant moi, et
ont foi en moi, alors je rendrai fortes pour eux les choses qui sont
faibles. » (Éther 12:27)
« Oui,
venez au Christ et soyez rendus parfaits en lui, et refusez vous
toute impiété ; et si vous vous refusez toute
impiété et aimez Dieu de tout votre pouvoir,de toute
votre pensée et de toute votre force, alors sa grâce
vous suffit, afin que par sa grâce vous soyez parfaits dans le
Christ ; et si, par la grâce de Dieu, vous êtes
parfaits dans le Christ, vous ne pouvez en aucune façon nier
le pouvoir de Dieu.
« Et
en outre, si, par la grâce de Dieu, vous êtes parfaits
dans le Christ et ne niez pas son pouvoir, alors vous êtes
sanctifiés dans le Christ, par la grâce de Dieu, grâce
à son effusion du sang du Christ, qui est dans l’alliance
du père pour le pardon de vos péchés, afin que
vous deveniez saints, sans taches. » (Moro. 10:32-33)
Pour les saints des
derniers jours, la doctrine de la grâce n’implique pas
que le salut ne vienne que d’elle seule, c’est à
dire, sans participation dans une certaine mesure au processus, et
cela ne signifie pas que le salut soit octroyé sans aucune
condition. S’il en était ainsi, celui ci se résumerait
à une chose qui nous tomberait du ciel, comme si l’on
était frappé par un éclair ou si l’on
gagnait à la loterie. Les saints des derniers jours ne croient
pas que la grâce soit accordée d’une façon
aléatoire ni qu’elle soit irrésistible, ou que le
salut soit accordé unilatéralement de la part de Dieu
(prédestination). Dieu peut être prédisposé
en notre faveur, il peut placer à notre portée ce qui
ne l’était pas, et il peut ôter tous les obstacles
obstruant le chemin du salut, mais il ne nous obligera pas, une fois
déblayé ,à prendre celui-ci, et il ne nous
sauvera pas contre notre gré. L’alliance de l’Évangile
est proposée gracieusement, mais c’est par choix
librement consenti qu’on l’accepte.
Certains
théologiens soutiennent que la grâce soumise à
conditions verrait disparaître sa qualité en tant que
grâce, mais je ne suis pas d’accord. Supposez qu’un
être cher vous ait offert un voyage tous frais payé à
Hawaii, et ce gratis (c’est à dire gracieusement) et
qu’il vous ait demandé de répondre à
l’invitation avant une certaine date. est-ce que la condition
consistant à répondre affirmativement avant une
certaine date diminue en quoi que ce soit la valeur de cet acte de
gentillesse et sa gratuité motivé par l’amour ?
Prétendriez vous qu’à partir du moment où
vous auriez répondu affirmativement, votre parent vous devrait
ce voyage, et que vous l’auriez en fait gagné en
remplissant la seule condition exigée : accepter l’offre
dans le délai prescrit ? Le fait que l’on admette
qu’il s’agisse d’un cadeau et affirmer que l’on
veut le recevoir transforme-t-il celui-ci en dû ?
Évidemment non, et de
la même façon, Dieu, notre riche Parent céleste,
nous offre son royaume gracieusement, en faisant à notre place
ce que nous ne pouvons faire pour nous mêmes. Mais il exige
aussi que nous reconnaissions et que nous acceptions l’offre
par la foi en Christ, le repentir, le baptême, et la réception
du Saint-Esprit. Alors, tant que nous gardons l’alliance de
l’Évangile, la grâce de Jésus-Christ est
suffisante « pour (lui) appartenir, pour (nous) sauver, et
pour (nous) justifier ». Les Écritures sont
claires : tant que nous respectons l’alliance,la grâce
du Christ n’est pas simplement nécessaire, elle est
suffisante pour notre salut (Voir Éther 12:27 ; Moro.
10:32-33).
Mais nous
devons accepter cet accord. Lorsque nous acceptons le Christ et que
nous faisons alliance avec lui, les exigences de la justice, qui
représentent les exigences de la perfection dont nous ne
jouissons pas, sont satisfaites par la grâce de Dieu, et nous
sommes sauvés. C’est ainsi que les principes du salut de
l’alliance évangélique nous sont offerts par
faveur, gracieusement et avec bienveillance. Mais on peut toujours
refuser la grâce. On peut résister à l’amour
de Dieu et rejeter son alliance. Le Christ se tient à la porte
et il frappe, mais il ne donne jamais de coups de pied dedans. C’est
nous qui devons ouvrir la porte.
La
foi ou les oeuvres ?
Pendant
des siècles les théologiens ont discuté à
perte de vue pour savoir si l’on était sauvé par
la foi ou par les œuvres. On peut les renvoyer dos à
dos, car ni la foi seule (considérée comme une simple
croyance passive) ni les œuvres seules ne peuvent nous sauver.
Le salut n’est viable que par l’alliance dans laquelle la
foi et les œuvres jouent chacune leur rôle. Soutenir que
le salut ne vient que par les œuvres seules, que nous pouvons
être sauvés sans la grâce divine, insulte à
la miséricorde de Dieu et est une moquerie envers le sacrifice
que Jésus-Christ a subi en notre faveur. D’un autre
côté, soutenir que le salut ne vient que de la croyance
seule et que Dieu ne place aucune autre obligation sur le croyant,
insulte à la justice divine et fait du Christ le serviteur du
péché.
La
conception de l’alliance dans les Écritures, accord
entre les hommes et Dieu qui établit des obligations pour les
deux parties et qui satisfait en même temps la justice et la
miséricorde, élimine l’opposition entre la foi et
les œuvres. En résumé, voici en quoi consiste
l’accord : nous faisons ce que nous pouvons, et
Jésus-Christ, l’objet de notre foi, fait ce que nous
sommes incapables de faire grâce à son amour, sa
miséricorde et sa grâce. Et nous devons croire qu’il
le peut, nous devons croire le Christ.
Dans
la parabole des talents, il importe peu de savoir que celui qui a
cinq talents en a gagné cinq autres, alors que celui qui en a
deux n’en gagne que deux de plus. Les efforts de l’un et
de l’autre sont acceptés, bien que l’un ait plus
de talents et ait donné plus de résultats que l’autre.
En fait, celui qui n’avait qu’un talent aurait été
accepté si seulement il avait fait ce qu’il avait pu,
mais il n’a pas choisi d’essayer.
On
trouve en de nombreux endroits dans les Écritures le terme de
foi défini en tant qu’« engagement »,
incluant ainsi dans le seul mot de foi le sens de croyance et de
comportement. Dans cette acception, on peut dire que nous sommes
sauvés par la foi seule (c’est à dire grâce
à un engagement total de notre croyance et de notre
comportement)
Il est
vrai que nos œuvres ne peuvent nous sauver, mais nous pouvons
contribuer dans une certaine mesure aux efforts conjoints de notre
partenaire. Nous devons faire quelque chose pour participer au
partenariat, pour être dans l’alliance. Même si
tous les efforts que nous faisons sont insuffisants pour nous sauver
par nous mêmes, ils suffisent comme symbole de notre bonne foi
à établir l’alliance avec notre Sauveur. Cette
relation a pour finalité de lui appartenir, de (nous) sauver,
et de (nous) justifier, cependant Dieu exige encore de nous notre
participation. Sans notre accord et notre participation, le salut ne
se résumerait qu’à de la prédestination et
rien de plus, un accident aléatoire qui surviendrait
arbitrairement à certains et pas aux autres.
Non,
nous devons participer à notre salut dans la mesure de nos
capacités. Après tout, il s’agit d’un
partenariat, et l’associé minoritaire se doit de
contribuer dans la mesure de ses moyens. Refuser cette participation
revient à refuser l’idée même du
partenariat. Deux personnes sur un tandem, peuvent ne pas faire les
mêmes efforts, mais si le plus faible utilise cela comme excuse
pour lever le pied et cesser de pédaler, alors l’arrangement
cesse d’être un partenariat et cela devient de
l’exploitation. Dans le langage de l’Évangile,
cela s’appelle violer l’Alliance.
Essayer
de faire de notre mieux pour garder les commandements et être
semblables au Christ font partie de nos obligations dans le cadre de
l’alliance, non parce que nous pouvons y arriver dans cette
vie, mais parce que l’essai, notre engagement à essayer,
démontre notre sincérité et notre fidélité
envers l’alliance, c’est la déclaration de nos
buts et de nos désirs. Nos essais courageux montrent que nous
avons véritablement faim et soif de justice, même si
nous n’y arrivons pas toujours. La foi consiste à
vouloir toujours essayer, encore et toujours. Alors que la réussite
ne fait pas partie des exigences de l’alliance de la foi, mes
essais les plus sincères, eux, en font partie. L’alliance
de l’Évangile exige cet effort de « bonne
foi ».
Ainsi
le vieux débat entre la foi et les œuvres représente
une dichotomie et une alternative fausses. Quel que soit le bord que
l’on choisisse, la foi seule ou les œuvres seules, le
concept de l’alliance, du partenariat entre l’individu et
Dieu est supprimé.
Résister
à la grâce
Trop
nombreux parmi nous se disent : « Quand j’y
serai arrivé, quand je me serai perfectionné moi même,
quand j’aurais réussi à devenir complètement
juste ; alors je serai digne de l’Expiation. Alors le
Christ pourra faire son œuvre et m’exalter. »
Mais ceci n’arrivera jamais, car c’est mettre la charrue
avant les bœufs. C’est comme si on disait : « Quand
ma tumeur sera partie, j’appellerai le médecin. Je serai
prêt à le recevoir à ce moment. » Ce
n’est pas comme cela que ça marche en médecine ou
dans l’Évangile. « Ce ne sont pas ceux qui
sont en bonne santé qui ont besoin du médecin, mais
ceux qui sont malades » (Matt. 9:12)
Même
un prophète aussi grand que Moïse apprit qu’il ne
pouvait résister au pouvoir de Satan ni le rejeter tant qu’il
ne fit pas appel au pouvoir de Dieu par le nom du Fils unique (voir
Moïse 1:20,21). De même, Jean vit que ceux qui recevront
le salut, la force et le royaume vainquent Satan par le sang de
l’Agneau plus que par leurs efforts personnels (voir Apoc.
12:10).
J’ai la
ferme conviction que dans la plupart des cas la croyance selon
laquelle nous devons nous sauver nous mêmes grâce à
nos bonnes œuvres n’est pas seulement de la mauvaise
information, mais c’est mal. C’est mal tout d’abord
parce que ce faisant on charge les gens d’un fardeau impossible
à porter, le fardeau de la nécessité d’être
parfait. À terme, ils vont se désespérer et vont
abandonner. Ensuite, c’est mal parce que cela empêche les
gens d’admettre qu’ils ont besoin d’un Sauveur et
qu’il leur faut accepter les mérites et la miséricorde
du saint Messie. Cela les empêche d’appréhender
Jésus-Christ dans son rôle de Sauveur. Finalement, c’est
mal parce que certaines personnes sont tout simplement trop
arrogantes pour admettre leurs imperfections. Ils refusent de
s’accepter comme pécheurs ou d’admettre qu’il
existe des choses qu’ils ne peuvent faire tous seuls ; de
tels cœurs ne seront jamais brisés, ils sont trop
orgueilleux. Ces gens considèrent le Christ et son expiation
comme de simples outils pratiques que l’on utilise pour se
sauver soi même, comme le menuisier emploierait un marteau et
des clés pour construire une maison. Ces sauveteurs amateurs
s’attribuent tout le mérite de leur salut alors que
c’est le Christ qui devrait en bénéficier. Le
menuisier ne remercie pas le marteau.
Celui
qui croit travailler à son propre salut n’a pas
l’humilité nécessaire pour recevoir la
purification par l’expiation du Christ :
« Il
s’offre en sacrifice pour le péché, pour
satisfaire aux exigences de la loi, pour tous ceux qui ont le cœur
brisé et l’esprit contrit ; et il ne peut être
satisfait aux exigences de la loi pour personne d’autre. »
(2 Né. 2:7).
C’est
précisément le point que le Sauveur souligne dans la
parabole du pharisien et du péager (voir Luc 18:9-14). Le
pharisien faisait partie de ces personnes qui « se
persuadaient par elles mêmes d’être justes »
(verset 9). Le péager, quant à lui, ne gardait pas les
commandements de Dieu aussi bien que le pharisien, mais il le savait,
et il en avait le cœur brisé. Beaucoup de personnes qui
lisent cette parabole voudraient voir un hypocrite dans le pharisien,
mais le texte ne suggère rien de cela. Le pharisien faisait
véritablement tout ce qu'il devait faire, il en était
fier et en retirait un sentiment de supériorité, alors
que le péager n’était pas dans ce cas. Mais là
n’est pas le point important.
Cette
parabole ne traite pas de l’hypocrisie, elle traite de
l’orgueil ; selon des normes humaines objectives, en terme
de nombre et de fréquence de règles respectées,
le pharisien était vraiment le plus juste des deux. Dans
Philippiens 2:12 (« travaillez à votre salut avec
crainte et tremblement ») Paul n’a pas enseigné
que l’on pouvait se sauver soi-même. Lui plus que tout
autre connaissait plus sur ce point. Il veut dire plutôt, comme
le verset suivant l’explique clairement, que pendant que nous
accomplissons l’œuvre, Dieu est-celui qui opère en
nous, avec nous, et par nous pour désirer et accomplir le but
commun de notre salut. Nos œuvres et la grâce divine sont
également nécessaires ! Cependant, selon le
Sauveur : « Je vous le dis, celui ci [le péager]
descendit dans sa maison, justifié, plutôt que l’autre
[le pharisien] » (verset 14).
Je
crains que, tout comme le pharisien de la parabole, certains parmi
nous relativement bons à garder les règles ne se
persuadent de leur justice. Ces gens sont exagérément
fiers de leur propre bonté ; ils s’exaltent eux
mêmes. Mais quand nous nous enorgueillissons de notre bonté
au lieu de nous humilier devant notre imperfection (cf. 2 Né.
4:17-19), notre cœur n’est pas brisé, et notre
esprit n’est pas contrit.
Je
me souviens d’un missionnaire que nous avons connu dans l’est
des États Unis qui ne pouvait simplement pas être
enseigné sur ce sujet. Il a dit une fois : « Il
est évident que je peux me rendre parfait. C’est la
différence entre les saints des derniers jours et les autres
chrétiens. Ils croient qu’ils sont sauvés par la
grâce, que Dieu leur présente tout sur un plateau
d’argent, et nous, nous savons que nous devons le faire nous
mêmes. Je suis déjà très bon dans ce que
je fais actuellement, et j’ai confiance que je serais arrivé
à la perfection aux environs de trente ans. » Il
doit avoir dans les trente ans maintenant. Je me suis souvent demandé
comment il allait.
Quel
mérite nous permet d’entrer dans le royaume ?
Quelles bonnes œuvres nous rendent parfaits ? Ces
Écritures propres aux saints des derniers jours sont claires à
ce sujet. :
« Et
puisque l’homme était déchu, il ne pouvait rien
mériter par lui même ; mais les souffrances et la
mort du Christ expient ses péchés, par la foi et le
repentir, et ainsi de suite. (Alma 22:14)
« Et
je remercie aussi mon Dieu, oui, mon grand Dieu, de ce qu’il
nous a accordé de nous en repentir, et aussi de ce qu’il
nous a pardonné les nombreux péchés et meurtres
que nous avons commis, et a ôté la culpabilité de
notre cœur par les mérites de son Fils. »
(Alma 24:10) « …se reposant uniquement sur les
mérites du Christ, qui était l’auteur et le
consommateur de leur foi (Moro. 6:4)… « pour qu’ils
connaissent les promesses du Seigneur, qu’ils croient en
l’Évangile, placent leur confiance dans les mérites
de Jésus-Christ, soient glorifiés par la foi en son
nom, et sauvés par leur repentir ». (D&A 3:20)
Ceux qui envisagent d’entrer
dans le royaume de Dieu par leurs propres mérites ne
comprennent pas encore comment on arrive à la perfection et à
qui doivent être attribués les mérites. Ils se
glorifient de leurs efforts et s’attribuent le rôle de
sauveur. Le prophète Zenock nous avertit dans le Livre de
Mormon que nous risquons d’encourir la colère de Dieu si
nous n’apprécions pas sa grâce et sa miséricorde :
« …tu es en colère, ô Seigneur, contre
ce peuple, parce qu’il ne veut pas comprendre la miséricorde
que tu lui as accordée à cause de ton Fils. »
(Alma 33:16)
L’archétype
de ceux qui veulent s’exalter et s’accorder tous les
mérites pour ce que seul le Sauveur peut accomplir est
évidemment Satan. Dans Moïse 4:1 on nous dit que Satan
insista : « je le ferais certainement ; c’est
pourquoi donne-moi ton honneur ». J’oserais dire que
ceux qui ne se rendent pas compte de leur totale dépendance
envers le Sauveur et qui insistent à vouloir travailler à
leur propre salut sont coupables de cette même attitude
satanique. Il vaut mieux être le péager pécheur
qui se repose humblement sur la miséricorde de Dieu que d’être
le pharisien qui se persuadait de sa justice en s’appuyant sur
ses bonnes œuvres pour se sauver, car le précédent
a au moins appris qu’il a besoin du Sauveur et qu’il est
prêt à l’accepter et à se repentir, alors
que le dernier ne l’est pas (évidemment, une autre
possibilité serait de combiner le cœur brisé et
l’humilité du péager avec l’obéissance
du pharisien).
« Mon
joug est léger »
Certains
rejettent l’idée de la grâce parce qu’elle
leur semble trop facile. Ils veulent que le salut soit plus
difficile. Il existe un certain confort à se dire : « Le
salut est si difficile à atteindre que je ne peux vraiment pas
y arriver, alors je n’ai pas vraiment besoin d’essayer. »
Cette attitude fournit une excuse facile pour ne pas essayer du tout.
Cela me rappelle un peu cette jeune femme qui refusait
systématiquement les demandes de rendez vous d’un homme
qui tout aussi systématiquement lui démolissait ses
excuses les unes après les autres. Finalement, elle fut forcée
d’admettre la vérité : « Ecoute,
je suis à bout d’argument, alors je vais te le dire
carrément. Je ne veux pas sortir avec toi. »
Certains d’entre nous
utilisent de semblables tactiques évasives avec le Seigneur
lorsqu’il nous invite à entrer dans son royaume. Nous
présentons une excuse après l’autre pour
expliquer pourquoi nous ne pouvons entrer dans le royaume. Mais la
grâce divine, qui a ôté tous les obstacles et
déblayé le chemin, élimine toutes nos excuses.
Par sa grâce, tous les problèmes peuvent être
surmontés, toutes les circonstances peuvent être
réglées, tout le monde peut être sauvé, à
la seule condition que nous désirions véritablement le
royaume. Nous disons :
« Je
voudrais vraiment venir avec toi, mais je ne peux observer tel ou tel
commandement tout le temps,’ et lui nous répond :
« Peux-tu le garder quatre-vingt-dix pour cent du temps
(ou quatre-vingts ou soixante-dix) ? Alors, commence à ce
niveau, et nous y travaillerons ensemble ! »
Finalement, face à tout ce que Dieu a fait et veut faire pour
nous, après avoirdéblayé tous les obstacles et
que nous soyons face à une porte ouverte, soit nous disons :
« Oui, je veux venir avec toi » ou « Écoute,
je suis à bout d’arguments, alors je vais te le dire
carrément. Je ne veux pas sortir avec toi. »
Personne ne peut se défiler en disant : » je
voudrais bien venir, mais je ne peux pas ». La grâce
a supprimé toutes les excuses sauf une : » je
ne veux simplement pas venir, je préfère mes péchés
au royaume ».
Quand
j’entends quelqu’un se plaindre que la doctrine de la
grâce rend les choses trop faciles, je pense à
l’occasion où le Seigneur a essayé de montrer sa
grâce, son mérite, et sa miséricorde envers Isra
ël lorsque celui ci a péché dans le désert :
« Et il les a corrigés dans le désert avec
sa verge, parce qu’ils s’endurcissaient le cœur
comme vous ;et le Seigneur les a corrigés à cause
de leur iniquité. Il a envoyé parmi eux des serpents
brûlants qui volaient ; et lorsqu’ils ont été
mordus, il a préparé un moyen pour qu’ils soient
guéris ; et tout l’effort qu’ils avaient à
faire était de regarder ; et à cause de la
simplicité du moyen, ou de sa facilité, il y en a eu
beaucoup qui ont péri. » (1 Né. 17:41 ;
cf. Nom. 21:4 9 ; Alma 33:20)
J’ai
peur qu’aujourd’hui dans l’Église nous en
ayons de semblables qui vont périr plutôt que d’accepter
la grâce de Dieu parce que cela leur semble trop facile. Ils ne
vont pas croire le Christ. Mais comme le disait Alma à son
fils Helaman : « Ô mon fils, ne soyons pas
paresseux à cause de la facilité du chemin ; car
il en fut ainsi pour nos pères ; car il était
préparé pour eux de telle sorte que, s’ils
regardaient, ils pourraient vivre ; de même en est-il pour
nous. Le chemin est préparé, et si nous regardons, nous
pouvons vivre à jamais. » (Alma 37:46)
L’histoire
de Naaman le lépreux dans l’Ancien Testament nous
prévient aussi d’éviter de mépriser la
simple miséricorde divine. Naaman s’en alla voir le
prophète Élisée, voulant être guéri
et il s’attendait à ce que les soins fussent difficiles
et coûteux. Lorsqu’Élisée lui dit d’aller
se baigner dans le Jourdain sept fois, « il s’en
retourna en colère » (2 Rois 5:12), se sentant
insulté, rejeté et dégoûté par une
prescription aussi simple. Heureusement ses serviteurs purent le
convaincre d’essayer ce remède « trop
facile ». « …Si le prophète t’eût
demandé quelque chose de difficile, ne l’aurais tu pas
fait ? Combien plus doistu faire ce qu’il t’a dit :
lave-toi et tu seras pur. » (2 Rois 5:1-3)
Naaman
s’humilia, fit la chose simple qu’on lui demandait et fut
guéri. Naaman dans sa colère était-il si
différent de ceux qui de nos jours pensent que les eaux du
baptême et la grâce de Dieu sont trop faciles pour nous
purifier de nos péchés ? Lorsque Pierre a dit :
« Éloigne-toi de moi, car je suis un homme pécheur,
ô, Seigneur », il disait probablement la vérité.
Mais apparemment, Jésus lui a trouvé quelque utilité.
Mon
collègue Léon Hartshorn raconte cette histoire
poignante sur la façon dont la croyance de son père en
Christ a évolué :
Mon
père était un brave homme. Il s’était bien
occupé de ma mère pendant des années alors
qu’elle était malade avant de décéder. Il
enseigna à ses enfants à être honnêtes et
justes. Il a toujours payé sa dîme, mais il n’allait
pas à l’Église. Mon père avait travaillé
à la mine pendant une grande partie de sa vie, dans un
environnement qui n’invitait en général pas
l’Esprit de Dieu, et c’est peut être pour cette
raison qu’il pensait qu’il n’aurait pas pu être
pleinement pratiquant et jouir de toutes les bénédictions
d’une vie active dans l’Évangile.
J’étais
marié depuis deux ou trois ans lorsque je retournai le voir
chez lui. Alors que nous étions assis ensemble, il me dit :
« Fils, j’ai fait un rêve. J’ai rêvé
que je me tenais au bord d’une falaise, et que le Sauveur
s’approchait de moi à cheval. Il avait une corde
attachée à la selle et enroulée autour du
pommeau de la selle. Il m’a tendu la corde et m’a dit :
« Bob, je veux que tu me descendes avec mon cheval le long
de la falaise ». Je lui répondis que c’était
impossible ; qu’il était impossible pour un homme
de descendre un cheval et son cavalier le long d’une falaise.
Il répondit « Bob, descends- moi avec mon cheval le
long de la falaise ». Alors, j’ai pris le bout de la
corde et je les ai descendus au bas de la falaise. À ma grande
surprise, ce n’était pas du tout difficile. Lorsque le
cheval et son cavalier furent arrivés au bas de la falaise, il
regarda vers le haut et dit : « Bob, envoie la
corde. » Je la laissai tomber, et il la réenroula
autour du pommeau de la selle. Alors, me regardant du bas de la
falaise, il me dit simplement : « Bob, c’est
aussi simple que cela de vivre mes commandements si tu veux
essayer. » C’était une leçon que mon
père pouvait comprendre, une leçon enseignée
dans son vocabulaire de chevaux, de cavaliers, de selles et de
cordes. À la suite de cela il essaya de faire tout ce qu’on
lui demanda dans l’Église et fut très pratiquant
durant les vingtcinq dernières années de sa vie.
Les
fruits de la grâce
La
grâce du Christ a le pouvoir de convertir les cœurs
contrits si l’on reconnaît humblement que l’on
dépend d’elle et de la miséricorde. J’ai
connu un membre de l’Église dont le sens de la justice
était si fort qu’il était dans l’incapacité
d’accepter l’expiation du Christ, encore qu’il ne
s’en rendait pas compte à l’époque. C‘était
un homme vraiment très dur, avec sa femme, ses enfants, dur
avec ses amis et ses voisins, et surtout dur avec lui même. Il
n’était jamais véritablement injuste, mais il ne
pardonnait jamais et n’oubliait jamais. Il luttait pour obtenir
la perfection absolue dans tout ce qu’il faisait, et il ne
tolérait absolument aucun échec de qui que ce soit. À
ses yeux, ‘une honnête tentative’ ou ‘un
effort courageux’ n’était que des euphémismes
pour le mot échec, et que le ciel vienne en aide à sa
femme ou à ses enfants s’ils ne satisfaisaient pas ses
attentes ! Il faut dire honnêtement que cet homme n’avait
jamais demandé qu’on lui fasse une fleur, et il n’en
avait jamais fait lui non plus. Pour lui, l’idée selon
laquelle on peut être pardonné de nos péchés
à cause de ce que le Christ a fait et par conséquent,
échapper totalement au châtiment d’une juste
punition lui semblait trop facile. Il définissait
sarcastiquement la doctrine du terme de « grâce
facile » parce qu’il avait l’impression que
celle-ci permettait aux gens qui méritaient d’être
punis de se libérer de l’hameçon.
Après
plusieurs années d’amitié, je découvris
que cet homme cachait un grand secret, un terrible péché
qui datait de loin pour lequel il n’arrivait pas à se
pardonner. Dans son esprit, ce péché était si
horrible que la justice l’empêcherait d’entrer dans
le royaume de Dieu pour l’éternité. Il était
totalement désespéré, et dans sa résignation
absolue envers ce qu’il considérait un juste sort, il
était devenu dur, froid et mort. La haine et la rage qu’il
ressentait envers son imperfection montaient en spirale pour aspirer
tous ceux qu’il connaissait susceptibles de montrer des signes
d’imperfection.
Nous
parlions un jour de la loi de la justice et je fus d’accord
pour admettre qu’il avait sans doute raison : qu’elle
lui claquerait probablement la porte du royaume à la figure.
Mais je lui fis remarquer que la miséricorde pouvait ouvrir
des portes là où la justice en était incapable.
C’est alors que je fis un pari et que je lui dis que je ne
croyais pas que sa fixation sur la justice fut motivée par la
douleur et la culpabilité, comme il le prétendait, mais
plutôt par l’orgueil. Il ne pouvait tolérer l’idée
qu’il était comme les autres hommes. Il ne pouvait
tolérer l’idée qu’il avait besoin d’aide,
et qu’il ne pouvait s’abaisser pour en demander. Il était
prêt à admettre le fait que d’autres pouvaient
être spirituellement en décalage, mais qu’il ne
put se sauver lui même, qu’il eut besoin de l’aide
d’autrui, c’était tout simplement monstrueux, trop
grotesque à considérer. Son orgueil ne pouvait se le
permettre.. C’est pourquoi il rejetait la miséricorde,
même si il ne pouvait satisfaire la justice. En conséquence,
son cœur ne s’était pas brisé sous le poids
du péché, il s’était endurci. Il aurait
préféré être damné par la justice
plutôt que de faire appel à la miséricorde
divine.
Au début,
il fut scandalisé par ce que je lui dis, et pendant un temps
notre amitié fut ébranlée. Mais petit à
petit il se rendit compte que son rejet du concept de la miséricorde
revenait à rejeter le Christ. Finalement, il me dit un jour :
« C’est vraiment cela. Je suis tout simplement trop
orgueilleux pour admettre ma faiblesse et demander de l’aide.
Je ne veux pas admettre mon imperfection, même à moi
même, encore moins à l’évêque ou à
Dieu. Mon orgueil me pousserait plutôt à aller en enfer
pour m’acquitter de la totalité de la punition plutôt
que de m’humilier et de rechercher la miséricorde
divine. » Il se décida finalement à aller
voir son évêque et, avec un courage immense, confessa un
péché soigneusement caché pendant des décennies.
Et alors qu’il s’humiliait et recherchait la miséricorde
au lieu de la justice, une chose merveilleuse se passa. Quand il vit
qu’il était pardonné par la grâce d’une
tierce personne, et qu’il réalisa ce qui avait été
fait pour lui gratuitement, quand il se rendit compte du soulagement
incroyable qu’il lui avait été octroyé
gratis, il commença à se comporter avec patience,
miséricorde et pardon avec ceux qui l’entouraient. Ce
n’était plus un homme dur.
— Mais
pourquoi ferais-tu cela pour moi ?
— Parce
que je t’aime.
— Mais
ce n’est pas juste.
— C’est
vrai, ce n’est pas juste du tout, c’est miséricordieux.
Après tout, c’est un cadeau.
— Mais
comment est-il possible de mériter un tel cadeau ?
— Ne sois pas sot.Tu ne peux
le mériter. Tu ne le mérites pas. Je te fais ce don
parce que je t’aime et que je veux t’aider, et non parce
que je te le dois.
— Mais,comment
pourrais-je te rembourser ?
— Ça
recommence. Tu ne comprends toujours pas ? Tu ne peux me
rembourser, ni toi ni toutes les multitudes de tes semblables. Des
dons de cette grandeur ne peuvent être remboursés. Tu ne
peux que m’aimer en retour de ce que j’ai fait par amour
pour toi, et chercher à devenir ce que je suis : un
dispensateur de dons généreux.
Et
ça, c’est la bonne nouvelle.
CHAPITRE
CINQ : INCOMPRÉHENSION DE LA DOCTRINE DE LA GRÂCE
On peut mal interpréter
la doctrine de la grâce et même la déformer de
multiples façons. Une des plus graves altérations
consiste à prétendre que je n’ai plus besoin de
travailler aussi dur puisque le Christ va accomplir tout ce que je ne
peux faire dans le cadre de l’alliance. Je peux me détendre
et laisser Jésus faire tout pour moi ; je peux me
contenter de faire un effort symbolique, continuer à jouir de
mes péchés favoris, tout en espérant être
« sauvé par la grâce ».
L’apôtre Paul se
trouva confronté dans l’Église primitive à
ceux qui pensaient que la grâce devait être une
autorisation ou une protection permettant de continuer à
pécher : « Quoi donc ! Pécherions
nous, parce que nous ne sommes pas sous la loi, mais sous la grâce ?
Certes non ! Ne savez-vous
pas que si vous vous livrez à quelqu’un comme esclaves
pour lui obéir, vous êtes esclaves de celui à qui
vous obéissez, soit du péché qui conduit à
la mort, soit de l’obéissance qui conduit à la
justice ? » (Rom. 6:15-16)
Cette
fausse doctrine du salut par la grâce sans engagement ni
loyauté viole les termes de l’alliance évangélique
en demandant à Jésus de faire pour moi ce que je
pourrais très bien faire tout seul, mais que je ne suis pas
disposé à faire. N’importe qui peut affirmer
qu’il fait de son mieux et prétendre qu’il est
justifié par la foi en Christ et qu’il jouit de la
compagnie du Saint-Esprit, alors qu’en fait il reste
obstinément engoncé dans ses péchés. Seul
Dieu sait qu’il ment. Je voudrais pouvoir proposer un test pour
faire la différence entre les honnêtes gens qui font ce
qu’ils peuvent et ceux qui voudraient qu’on les porte
quand ils pourraient marcher, mais je ne sais pas comment faire. Je
suis heureux que Dieu puisse le faire.
Il
est sûr que ceux qui disent : « Je fais du
mieux que je peux mais qui violent sciemment les commandements ont
besoin d’apprendre la différence entre vouloir la
justice et souhaiter vouloir la justice. Bien que Dieu accepte les
intentions et les désirs justes en lieu et place d’une
performance parfaite, il ne veut pas être payé en
monnaie de singe. Il n’acceptera pas de simples vœux à
la place d’intentions et de désirs justes. Cette
attitude n’est pas de l’engagement. Ce n’est pas de
la fidélité. Elle ne satisfait pas aux obligations de
l’alliance évangélique et ne suscite aucune
promesse. Dans ces cas, ces individus n’ont pas réellement
faim et soif de justice, mais ils ont faim et soif de péché,
et ils s’attendent à ce que Jésus tolère
ce comportement ou même éventuellement qu’il le
soutienne. Ils ont brisé leur alliance. Doctrine et Alliance
50:7-8 dit : « Voici, en vérité, je
vous le dis, il y a parmi vous des hypocrites, et certains ont été
trompés par eux… mais les hypocrites seront démasqués
et retranchés, soit dans la vie, soit dans la mort, comme je
le veux. »
Ceux
qui commettent l’erreur doctrinale et morale de ne pas vouloir
faire ce qu’ils peuvent cherchent à être sauvés
dans leurs péchés plutôt que de leurs péchés.
Cela ne se peut. Il y a une grande différence entre considérer
mes péchés comme des ennemis desquels j’essaie
avec difficulté de m’échapper et les considérer
comme de vieux amis sympas que j’ai répugnance à
abandonner. Il y a une différence entre être incapable
de vaincre mes péchés tout de suite, auquel cas
l’alliance me promet de l’espoir, et ne pas vouloir même
essayer, auquel cas je reste soumis à la justice. L’alliance
offre la grâce et le pardon si l’on montre une attitude
de repentance continuelle aussi bien à ceux qui essaient et
réussissent qu’à ceux qui essaient, mais
faillissent et essaient de nouveau. Mais, il n’y aura pas de
pardon pour ceux qui ne veulent pas essayer, ou qui abandonnent après
une ou deux tentatives.
La
grâce « facile »
Un
jour je faisais un discours sur un sujet sur la grâce dans une
petite ville du Nevada. J’expliquais que la perfection n’était
pas requise de nous immédiatement, mais que nous étions
dans l’obligation de faire tout ce que nous pouvions et que le
Sauveur avait promis de faire le reste. Après le discours, on
est venu me voir pour me dire : « Dr Robinson, savez
vous ce que cela signifie ? Cela signifie que je n’ai pas
à mettre mes pêches en conserve cette année ! »
À ce moment, un rire général éclata, mais
quand il se calma, je répondis : « Oh non, mon
ami, vous m’avez mal compris. Ce n’est pas du tout ce que
cela veut dire. Si vous croyez vraiment que Dieu attend de vous que
vous mettiez vos pêches en conserve (et c’est une
proposition que l’on peut discuter), alors vous devez faire le
maximum qui est en votre pouvoir. Cette doctrine signifie simplement
que vous n’avez pas à
vous sentir coupable ou vous faire du souci pour les pêches que
vous ne pouvez mettre en conserve. »
Ce
n’est pas la doctrine de la grâce « facile ».
On ne peut concevoir d’abandonner ou de renoncer à une
vertu quelconque que l’on possédait avant d’entrer
dans l’alliance sans violer celle-ci. L’alliance
évangélique n’est pas une excuse pour travailler
en deçà de nos capacités. L’alliance exige
plus que simplement souhaiter être meilleur ; nous devons
véritablement faire tout ce qui est en notre pouvoir. Bien que
la perfection ne soit pas requise de nous dans l’immédiat,
il est requis que nous fassions tout ce que nous pouvons. La bonne
nouvelle c’est que Dieu n’exigera pas de nous plus que ce
que nous pouvons faire au mieux de nos compétences ; la
mauvaise nouvelle c’est qu’il n’en acceptera pas
moins.
En fait, la
grâce « facile » n’existe pas parce
que le partenariat avec le Christ n’est pas facile, il fait
appel au meilleur de nous-mêmes. Il exige notre loyauté,
que nous servions Dieu de tout notre cœur, de tout notre
pouvoir, de toute notre pensée et de toute notre force. Il
exige que nous nous repentions continuellement et que nous soyons
toujours engagés. De plus il n’offre aucune preuve ni
aucune garantie en dehors du témoignage personnel de l’Esprit
qu’il peut faire ce qu’il promet. Au contraire, il nous
demande de lui faire confiance, d’accepter ce qu’il dit
par la foi.
La loi
actuelle du salut temporel (le programme d’entraide) fonctionne
selon les mêmes termes que sa contrepartie spirituelle. Il est
exigé de ceux qui ont besoin d’aide matérielle
qu’ils contribuent selon leurs moyens. Il leur est demandé
d’utiliser toutes leurs ressources, importantes ou non. Alors,
par l’intermédiaire de l’Église et de ses
membres, le Seigneur ajoute tout ce qui est nécessaire.
Lorsqu’il est bien géré, le programme d’entraide
est un partenariat qui répond aux besoins honnêtes de
l’individu tout en lui demandant de faire du mieux qu’il
peut. De plus, ce programme prévoit que des progrès
soient accomplis, et il vise à terme à ce que
l’individu devienne autosuffisant.
Le
principe du bien être spirituel n’est pas différent.
En démontrant notre bonne foi en faisant tout ce que nous
pouvons et en consacrant toutes nos ressources au bien commun, la
grâce divine et l’expiation du Christ suffisent à
combler tous nos besoins, mais l’alliance exige que nous
déployions tous nos efforts, suppose que des progrès
soient accomplis, et vise à terme, en ce qui concerne la
justice, à ce que nous devenions autosuffisants.
Les
superlatifs de l’Évangile
Une
autre distorsion de la doctrine de la grâce, peut être
moins grave que la grâce « facile » mais,
je pense, plus répandue dans l’Église, est de
considérer que le Sauveur nous accorde sa grâce
seulement après que nous ayons fait tout ce que nous pouvions
faire. Il s’en suit qu’étant donné que
personne ne fait en réalité tout ce qui, théoriquement,
est possible, personne ne peut être véritablement digne
de la grâce non plus. Voici comment fonctionne cette fausse
logique :
1. La
grâce et la miséricorde ne sont accordées qu’à
ceux qui en sont dignes, et seulement après avoir prouvé
leur dignité.
2.
Seuls ceux qui gardent continuellement tous les commandements divins
sont véritablement dignes.
3.
Comme je ne peux garder continuellement tous les commandements, donc,
je ne suis pas véritablement digne et je ne peux m’attendre
à recevoir la grâce et la miséricorde.
Ce genre de raisonnement est
simplement l’ancienne exigence d’une perfection totale
qui essaie de se glisser par la porte de service de l’Église
sous un déguisement évangélique, et qui méprise
l’expiation du Christ en insistant sur le fait que nous devons
nous perfectionner et nous sauver avant que le Christ puisse le
faire, que nous devons d’abord nous guérir avant
d’appeler le médecin. Cette logique interdit au Christ
de ne jamais sauver personne. Malheureusement, quelques fois, même
les personnes versées dans les Écritures veulent
limiter leur conception de la grâce à ce niveau sans se
rendre compte que, sur le long terme, celle-ci transforme la doctrine
de la grâce en doctrine du salut par les œuvres. Tout
comme la miséricorde n’est pas la miséricorde si
elle est méritée, la grâce n’est pas la
grâce si nous la gagnons.
Il
existe un grand nombre de superlatifs dans les Écritures et
l’Église exhorte les saints et décrit leurs
obligations : de tout notre cœur, notre plus profond
désir, nos efforts les plus sincères, après tout
ce que nous pouvons faire, toujours, tous, jamais, etc. Nous devons
nous souvenir que ces termes appliqués à des mortels ne
sont que des ambitions, c’est à dire, qu’ils
définissent nos désirs et déterminent nos buts,
que dans chaque cas, les circonstances dans lesquelles se trouve
l’individu déterminent ce que « tout »
le meilleur ou « le plus grand » signifie et
que « jamais» tous ou « toujours »
ne sont que des objectifs à atteindre avec l’aide du
Christ et par son expiation. « Après tout ce que
nous pouvons faire ».
À
mon avis, une partie du blâme quant à notre mauvaise
application des superlatifs évangéliques et autres
raisonnements obsédants vient de la mauvaise compréhension
de 2 Néphi 25:23 : « Car nous travaillons
diligemment à écrire, pour persuader nos enfants, et
aussi nos frères, de croire au Christ et d’être
réconciliés avec Dieu ; car nous savons que c’est
par la grâce que nous sommes sauvés après tout ce
que nous pouvons faire. »
À
première vue, on pourrait penser que la grâce nous est
accordée chronologiquement après avoir accompli tout ce
que nous pouvons faire, mais on peut démontrer que c’est
faux, car nous avons déjà reçu de nombreuses
manifestations de la grâce de Dieu bien avant que nous en
soyons à ce point. C’est par sa grâce que nous
respirons. C’est par sa grâce que nos parents célestes
nous ont spirituellement engendrés et que nous jouissons d’une
espérance divine. C’est par la grâce qu’un
plan fut préparé et qu’un Sauveur fut désigné
pour racheter l’humanité suite à la chute d’Adam
et Ève. C’est par la grâce que la bonne nouvelle
de l’Évangile nous est donnée pour nous montrer
nos possibilités éternelles. C’est par la grâce
que nous avons le libre arbitre qui nous permet d’accepter
l’Évangile lorsque nous l’entendons. C’est
par la grâce qui vient de la foi en Christ que nous commençons
le processus du repentir, et c’est par la grâce que nous
sommes justifiés et que nous appartenons au royaume de Dieu
bien que ce processus ne soit pas terminé. La grâce de
Dieu a fait partie de notre progression spirituelle dès le
début et le sera jusqu’à la fin.
C’est
pourquoi considérer la grâce divine comme une cerise sur
le gâteau qu’on placerait au dernier moment ou comme la
simple touche finale à tout ce que nous avons déjà
accompli de nous-mêmes sans l’aide de Dieu la
déprécierait. Il serait plus juste de considérer
l’inverse : nos efforts sont la cerise sur le gâteau
que Dieu nous a déjà donné.
En
fait, je considère que la préposition « après »
dans 2 Néphi 25:23 est une préposition de
séparation plutôt qu’une préposition de
temps. Elle indique une séparation logique plutôt
qu’une séquence dans le temps. Nous sommes sauvés
par la grâce « en dehors de ce que nous pouvons
faire » ou « nonobstant tout ce que nous
pouvons faire ou encore « sans tenir compte de ce que nous
pouvons faire ». Une autre paraphrase de ce verset
pourrait être celle-ci : « Ce n’est que
par la grâce que nous sommes sauvés, après que
tout soit dit et accompli ».
De
plus, même l’expression « tout ce que nous
pouvons faire » est susceptible d’avoir une
interprétation négative qui désignerait toute
bonne action isolée que nous aurions pu éventuellement
accomplir. C’est absurde. Si la grâce ne fonctionnait que
dans ces cas, personne ne pourrait être sauvé, pas même
le meilleur d’entre nous. C’est précisément
parce que nous ne faisons pas toujours tout ce que nous pourrions
faire que nous avons tout d’abord besoin d’un sauveur, et
qu’il est évident que nous ne pouvons pas considérer
tout ce que nous avons accompli comme une condition suffisante pour
obtenir la grâce et être sauvés ! Je crois
que nous devons insister dans 2 Néphi 25:23 sur « tout
ce que nous pouvons faire » en opposition avec tout ce que
lui peut faire ». De plus, « tout ce que nous
pouvons faire » ici doit probablement être compris
dans le sens de « quoi que nous fassions ».
Ainsi, le sens correct de
2 Néphi 25:23 serait que quels que soient nos efforts, en
fin de compte c’est par la grâce que nous serons sauvés.
La grâce n’est pas simplement une touche décorative,
la finition du couronnement de nos efforts personnels, c’est la
participation de Dieu dans le processus de notre salut du début
à la fin. Bien que je doive être intimement engagé
dans le processus de mon salut, à terme, le succès de
cette aventure dépend totalement de la grâce du Christ.
Mais quand en aurai-je fait
assez ?
J’ai
un ami qui se pose toujours la question à ce propos :
« Mais quand est-ce que j’en aurai fait assez ?
Comment saurais-je que j’ai réussi ? »
Il pose la mauvaise question, ce qui montre qu’il ne comprend
pas la doctrine de la grâce. La bonne question c’est :
« Quand mon offrande est-elle acceptable aux yeux du
Seigneur ? À quel moment mes efforts sont-ils
acceptés ? » Voyez-vous, la réponse à
la question précédente : « Quand est-ce
que j’en aurais fait assez » est : « Jamais
dans cette vie ». Puisque la perfection est l’objectif,
le Seigneur ne peut jamais approuver sans condition une performance
imparfaite. Peu importe ce que nous faisons ici-bas, peu importe la
qualité de notre performance, l’exigence pour faire
mieux, la pression pour s’améliorer ne cessera jamais.
On n’est pas encore arrivé.
Nous
ne sommes pas des serviteurs rentables ici bas, ou pour employer un
terme plus moderne, nous sommes de mauvais investissements (voir, par
exemple, Luc 17:10 ; Mosiah 2:21). Du point de vue du Sauveur,
même le plus juste d’entre nous coûte plus cher à
sauver et à maintenir en vie que ce qu’il peut rapporter
en retour. Alors si nous cherchons à ce que le Seigneur nous
dise : « OK, tu en as fait assez, tu as rempli ton
contrat, tu as réussi, tu peux te détendre ».
Nous risquons d’être déçus. Même si
nous déployons tous nos efforts, nous devons accepter le fait
que jamais dans cette vie, nous n’atteindrons le point
d’équilibre. Nous sommes tous des serviteurs non
rentables portés sur le dos du Sauveur parce qu’il le
veut bien, par sa grâce.
Cependant,
le Seigneur nous dit : « Étant donné
les circonstances présentes et ton degré de maturité
actuel, tu fais un travail acceptable convenable. Évidemment
ce n’est pas parfait, mais tes efforts sont acceptables pour le
moment. Je suis satisfait de ce que tu as fait. » Nous
pouvons ne pas être des serviteurs rentables au sens strict du
terme, mais nous pouvons encore
être de bons et fidèles serviteurs dans cette acception
limitée. Aussi si nous faisons ce qui peut être
raisonnablement attendu d’un disciple loyal dans les
circonstances du moment, alors nous pouvons avoir foi que notre
offrande est acceptée par la grâce de Dieu. Il est clair
que nous ne sommes pas rentables, personne d’entre nous. Mais
dans le cadre de l’alliance, nos essais sincères sont
acceptables pour le moment.
En
fait, il existe une façon de savoir si nos efforts sont
acceptables, que notre alliance est reconnue et validée aux
yeux de Dieu. Si nous utilisons les dons de l’Esprit ou
l’influence du Saint-Esprit, nous pouvons savoir que nous
sommes dans le cadre de l’alliance, car les dons et la
compagnie du Saint-Esprit sont donnés à nul autre.
C’est une des raisons pour lesquelles le Saint-Esprit est
donné : comme symbole et garantie de notre statut dans
l’alliance et comme paiement comptant des bénédictions
et de la gloire à venir si nous sommes fidèles.
L’apôtre Paul parle du Saint-Esprit comme « une
arrhe de notre héritage » (Éph. 1:14) une
référence à « l’acompte »
qui, bien que considéré comme symbolique, conclut une
affaire lorsque l’argent change de mains. Ainsi « l’arrhe
de l’Esprit dans nos cœurs » (2 Cor.
1:22 ; 5:5) nous assure de la validité et de l’efficacité
de notre transaction, de notre alliance, avec Dieu.
Ressentez vous l’influence
du Saint-Esprit dans votre vie ? Jouissez vous des dons de
l’Esprit ? Alors vous pouvez savoir que Dieu accepte votre
foi, votre repentir, et votre baptême et qu’il est
d’accord « pour que vous ayez toujours son Esprit
avec vous » (D&A 20:77). C’est peut-être
pour cette raison que le Saint-Esprit est appelé le
Consolateur, car si nous prenons plaisir avec ce don, nous savons que
nos efforts sont acceptables, dans l’immédiat, et que
nous sommes justifiés devant Dieu par notre foi en Christ. Et
c’est vraiment consolant.
Tout
lui donner
Que signifie
tout lui donner ? Certains ont plus de capacités, plus de
talents que d’autres. Cependant, selon la parabole, il n’est
pas attendu de ceux qui ne possèdent qu’un ou deux
talents qu’ils en gagnent cinq. Seul celui qui a cinq talents
se doit d’en gagner cinq.
Permettez-moi
d’illustrer ceci par un exemple. Il y a de nombreuses années,
j’ai connu une femme qui était, tout au moins au début,
une des personnes les plus rudes que j’ai jamais connues.
Violée dans son enfance, elle s’était enfuie de
chez elle et avait vécu dans la rue pendant des années.
Jeune fille, elle circulait à travers le pays avec un gang à
motos. À l’âge mûr, sa beauté fanée,
elle passait la grande partie de son temps au bar, où des
missionnaires la rencontrèrent alors qu’ils étaient
entrés là pour faire de la monnaie pour téléphoner
à l’extérieur. Quand elle fut baptisée,
beaucoup de membres doutaient que sa conversion tienne longtemps, et
il y avait de bonnes raisons pour le penser.
Longtemps
après son baptême, cette sœur jurait comme un
palefrenier, même dans l’Église, et ne vécut
jamais la Parole de Sagesse à cent pour cent. Une fois, lors
de sa première année dans l’Église, elle
perdit son sang froid et boxa une des sœurs. Son ex-mari est
alcoolique et ses enfants ont tous fait un séjour en prison.
Maintenant la question est de
savoir si une personne comme elle peut sérieusement s’attendre
à être sauvée. Que peut espérer une
personne comme elle, avec tous ses défauts et toutes ses
faiblesses ? Avec tout ce qu’elle avait vécu et
tous ses problèmes, pourquoi s’embêter à
venir à l’Église ?
« Si
vos péchés sont comme l’écarlate, ils
deviendront blancs comme la neige, s’ils sont rouges comme de
la pourpre, ils deviendront comme de la laine ». Dieu ne
ment pas. Quiconque veut venir, le peut. Chacun est invité,
nul n’est exclu. Même si cette sœur devait revenir
de plus loin, la même alliance lui était offerte :
« Fais ce que tu
peux. Je ferais le reste pendant que tu apprendras comment. »
Et elle fut aussi fidèle qu’elle le put dans ces
circonstances. Elle n’a jamais dit : « Non, je
ne veux pas » ou « Lâchez-moi »
ou « Pourquoi vous adressez-vous à moi ?
Voyez plutôt celui-là qui a commencé ».
Elle disait toujours : « Je sais, je suis désolée,
j’essaierai de faire mieux ». Et elle essayait de
faire mieux. Elle échouait souvent, mais petit à petit
au fil des années, elle fit de grands progrès. Elle
abandonna le thé, le café, l’alcool. Ensuite elle
s’arrêta de jurer. Plus tard elle s’arrêta de
fumer et commença à se calmer plus ou moins.
Finalement, après avoir été dans l’Église
pendant de nombreuses années, elle fut prête à
aller au temple. Une personne de cet acabit peut-elle vraiment
espérer hériter du royaume de Dieu ? Évidemment
oui.
Question plus
difficile : à quel moment cette sœur est-elle
devenue candidate pour entrer dans le royaume ? Est-ce
lorsqu’elle a abandonné la cigarette, ou lorsqu’elle
a maîtrisé son langage et son caractère ? Ou
est-ce lorsqu’elle s’est finalement qualifiée pour
obtenir une recommandation pour le temple ? Non. À aucun
de ces moments, bien qu’ils aient tous été des
points de repères importants dans sa progression. Elle a été
justifiée par sa foi en Jésus-Christ le jour où
elle s’est repentie de ses péchés, qu’elle
s’est fait baptiser, et qu’elle a reçu le don du
Saint-Esprit, car elle est entrée dans cette alliance de bonne
foi et en toute sincérité. Elle a cru en Christ, et
elle a cru le Christ. Comme la veuve avec son sou, elle a donné
tout ce qu’elle avait sans rien retenir. Ce n’était
peut être pas beaucoup, mais c’était tout ce
qu’elle avait.
Toutes
les semaines elle prenait la Sainte-Cène, elle se repentait de
ses erreurs et décidait de nouveau de les éliminer.
Certaines choses ont pris des années pour être
surmontées. D’autres restent encore à faire, mais
elle essaie toujours, et elle n’abandonnera pas. Et tant
qu’elle n’abandonne pas et endure jusqu’à la
fin sous le joug de l’Évangile, en tirant en direction
du royaume, sa récompense est assurée. Dieu connaît
les circonstances dans lesquelles nous évoluons, et il nous
juge en conséquence. Il sait qui est dans un trou et qui est
dans un fauteuil, il ne jauge pas seulement la hauteur, il juge aussi
la progression.
Chacun
d’entre nous fonctionne à des degrés différents
de performances dans le cadre de l’alliance. Les pourcentages
varient d’une personne à l’autre et même
pour une même personne sur une période de temps donnée.
Dans mon cas, mes efforts peuvent m’amener à vingt pour
cent sur le chemin de la perfection. Le Sauveur couvre les quatre
vingts pour cent restants. Dans votre cas, vos efforts peuvent
représenter cinquante pour cent, ou deux pour cent, du chemin.
Le Sauveur couvre là aussi la différence. Dans tous les
cas, la somme de l’effort conjoint est la même :
Quel que soit les efforts de chacun, qu’ils soient faibles ou
importants additionnés à l’expiation du Christ
équivaudront à cent pour cent de ce qui est exigé
pour entrer dans le royaume de Dieu.
La
fausse perfection
Alors
que signifie être parfait ? Et pourquoi nous commande-t-on
dans les Écrituresd’être parfaits ?(Voir
Matt.5:48 ; 3 Né. 12:48) En fait, je n’aime
pas le mot parfait parce qu’il est souvent mal employé.
Je tique souvent quand on l’utilise dans les discours ou les
leçons, parce qu’on l’emploie le plus souvent dans
son sens philosophique qui signifie « qui ne peut
être amélioré » et ce n’est
presque jamais dans cette acception qu’on le trouve dans les
Écritures. Les saints des derniers jours croient à la
progression éternelle. Personne ne sera jamais
« imperfectible » au sens absolu du terme. La
perfection ici-bas consiste plutôt à accepter l’alliance
de l’Évangile pour devenir parfait en Christ.
Jusque là, j’ai
employé le mot « parfait » pour dire :
« sans erreur », « sans faute »
ou « sans tache » mais même ce sens est
différent du sens scripturaire habituel. Dans le Nouveau
Testament le mot grec traduit pour « parfait »
est « teleios ». Cela signifie mûr,
mature, prêt, complet, tout, etc. Une pomme sur un arbre peut
être qualifiée de teleios quand elle est mûre et
prête à être cueillie, mais cela ne signifie pas
qu’on ne peut pas l’améliorer. Elle contient peut
être un vers à l’intérieur.
Voici
un autre grand secret : être parfait signifie faire du
mieux qu’on peut en fonction des circonstances présentes.
Comme Brigham Young l’expliquait :
« Nous
occupons tous des places différentes dans le monde et le
royaume de Dieu. Sont parfaits ceux qui agissent justement, et
recherchent la gloire du Père céleste, que leur
connaissance soit grande ou petite, qu’ils accomplissent de
grandes choses ou des modestes, et s’ils font au mieux de leurs
capacités… « Soyez parfaits autant que vous
le pouvez car c’est tout ce que l’on peut faire bien
qu’il soit écrit : « Soyez parfaits
comme votre Père qui est dans les cieux ». Être
aussi parfaits qu’il est possible de l’être, selon
notre connaissance, c’est être aussi parfait que notre
Père dans les cieux. Il ne peut pas être plus parfait
que ce que lui permet sa connaissance, tout comme nous. Lorsque nous
agissons selon notre connaissance dans la sphère et la
position que nous occupons, alors nous sommes justifiés ».
Brigham Young dit que faire au
mieux de notre connaissance c’est être parfait parce que
nous accomplissons notre part de l’alliance, et ce faisant,
Jésus-Christ accomplit la sienne et nous rend parfaits grâce
à son mérite et à sa miséricorde. La
perfection dont nous jouissons est une perfection en Christ. C’est
aussi la perfection qui nous permet d’entrer dans le royaume
céleste. L’autre perfection, la vraie, la personnelle,
le genre « je ne fais jamais d’erreur »
viendra plus tard, beaucoup plus tard.
On
dit qu’un jour quelqu’un a remis en question l’œuvre
de Mère Thérésa, cette sainte femme qui sert les
plus malheureux à Calcutta aux Indes, au motif qu’elle
ne réussira jamais à faire ce qu’elle essaie. Peu
importe les efforts qu’elle pouvait faire, disait son
contradicteur, il y aurait plus de pauvres et de malades demain qu’il
n’y en a aujourd’hui, et tous ses efforts ne pourraient
même pas commencer à résoudre le problème.
Puisqu’elle ne pourrait jamais espérer réussir,
pourquoi gaspillait-elle ses forces dans une cause perdue ? La
réponse de Mère Thérésa était un
classique : « Dieu n’exige pas que je réussisse
disait-elle, « seulement que je fasse ce que je peux ».
Et ça, c’est une vérité de l’Évangile.
Pourquoi exiger davantage ?
Malheureusement, on demande
fréquemment dans l’Église d’en faire plus
que ce que l’on peut réellement. Je me souviens d’un
dimanche à la réunion de prêtrise à Durham
en Caroline du Nord, qu’on a demandé aux anciens de
faire don d’un samedi de ce mois pour chacun des six projets
utiles, mais différents. Le problème c’est qu’il
n’y a que quatre samedis dans le mois. En résumé,
accomplir les six tâches était impossible pour personne,
et quand on le fit remarquer, aucune des obligations ne fut annulée.
Chacun se devait de faire « du mieux qu’il
pouvait ».
Il
y a plusieurs années, alors que je lisais dans un cours du
Nouveau Testament, Matthieu 11:28-30, qui parle du joug de Jésus
qui est doux et son fardeau léger, une étudiante au
fond de la classe m’interrompit avec un bruyant « Ah ! ».
Lorsque je l’invitai à s’expliquer sur ce que
signifiait cette exclamation, elle dit : « Son joug
est doux ? Son fardeau léger ? Celui qui croit cela
dans l’Église est soit un nouveau converti soit un
abruti ».
Cette
sœur était divorcée avec plusieurs enfants et
elle avait repris ses études pour essayer d’améliorer
sa vie et celle de sa famille. Elle continua : « J’ai
essayé de faire et d’être tout ce que l’Église
voulait, mais finalement j’ai dû abandonner. On me
demandait toujours plus que ce que j’avais. Je n’y peux
rien si je suis fauchée ou que je suis mère célibataire
avec deux jobs et que j’essaie d’aller à l’école
à plein temps. Je ne peux faire ce que font les autres
membres, et on me demande toujours plus, plus de temps, plus de
talents, plus d’argent, plus d’engagement, et je n’ai
rien de plus à donner. Les demandes de l’Église
dépassent mes ressources.
Pourquoi
est-ce que l’Église semble quelquefois exiger plus de
moi que ce que je peux donner ? Pourquoi cette pression
continuelle que je ressens pour être, pour accomplir et pour
donner plus ?» Tout d’abord, nous devons nous
souvenir que la perfection est le but à atteindre, un but
réel, et nous nous devons d’y travailler en déployant
tous nos efforts. Nous devons juste nous souvenir en même temps
que notre salut n’est pas en jeu.
Par
exemple, lorsque j’étais au lycée, je pratiquais
l’haltérophilie. À cette époque, un
assistant se tenait toujours prés du banc pour se saisir des
haltères en cas de problèmes. Mais invariablement, il y
avait un petit échange rituel, familier à ceux qui ont
fait de la gymnastique qui se déroulait ainsi : après
avoir soulevé les haltères autant que je le pouvais, au
bord de l’évanouissement, je disais à
l’assistant : « Enlève ! mais il me
disait toujours : Non, encore une ! En général,
après l’avoir baissée, je réussissais à
la remonter et je disais : OK, enlève ! De nouveau
l’assistant me disait : Non, encore une. Quelque soit le
nombre de levées que par un effort surhumain je réussissai,
, encore une, disait le surveillant allez, encore une ! »
Et cela continuait jusqu’à ce que mes muscles lâchent
vraiment, alors l’assistant saisissait la barre.
À
cette époque je n’étais pas naïf au point de
dire : « Je suis humilié, embarrassé et
offensé. Tu m’as demandé une levée de plus
et je n’y suis pas arrivé. Tu exiges trop de moi, tu
veux toujours plus que ce que je peux donner. Je ne peux satisfaire
tes demandes. Je rentre à la maison pour ne plus revenir. »
Je n’étais pas dans ces sentiments parce que dans une
salle de gym, celui qui lève et celui qui aide comprennent que
la véritable force s’acquiert à la dernière
levée, à l’extrême limite entre ce que l’on
peut faire et ce que l’on ne peut pas. En m’encourageant
à travailler à la limite de mes capacités,
l’assistant m’aidait à développer la
puissance que je recherchais. Il n’y avait jamais aucune gêne
à ce que je ne puisse faire cette dernière levée,
et personne ne s’attendait sérieusement à ce
qu’il y en ait, mais j’avais la satisfaction de savoir
que j’avais travaillé au delà des limites de mes
forces et que cela m’avait rendu plus fort.
Je
crois qu’on peut appliquer le même principe aux exigences
apparemment importantes de l’Église. Un des buts de
l’Église est de perfectionner les saints. Puisque nous
accomplissons les plus grands progrès en allant aux limites de
nos capacités, alors peu importe la quantité ou la
qualité de nos actes, le Seigneur, comme l’assistant à
la gym, nous demandera toujours plus, cherchera toujours à ce
que nous nous améliorions, et nous poussera toujours vers la
perfection. Puisque le but même que nous visons est la
perfection, les exigences de l’Assistant sont tournées
vers l’infini et dépasserons les capacités
de chacun. Nous devons seulement nous rappeler que notre salut n’est
pas en jeu, car cette question est déjà réglée
si nous continuons à garder nos alliances. Nous ne devrions
pas être gênés quand nous atteignons nos limites
ni nous sentir humiliés quand nous ne faisons pas tout ce qui
nous est demandé. Nous devrions plutôt éprouver
de la satisfaction en arrivant aux limites de nos capacités
(car c’est à ce point que l’on fait de vrais
progrès) et laisser Dieu se soucier du reste. Lorsque nous
sommes soumis à la pression des exigences de perfection, nous
devons nous rappeler que nos efforts les meilleurs seront acceptés
comme paiement comptant, au moins maintenant.
La
« douceur » du joug du Sauveur ne signifie pas
que nous puissions nous attendre à être exemptés
des dures tâches de la vie et d’être à
l’abri des dures réalités de l’existence
(demandez à Job ou aux pionniers mormons). Ce joug est doux
(a) parce qu’il rend possible ce qui était impossible
auparavant et (b) parce qu’il octroie des bénédictions
et des grâces compensatrices pour nous soutenir dans les
difficultés. Le joug de la loi de Moïse ne pouvait même
pas être soulevé , alors que celui du Christ le peut et
il peut aussi être porté parce que son poids est adapté
individuellement à nos capacités et à notre
force. Dans ce sens « doux » ne veut pas dire
« totalement sans effort » mais plutôt
« totalement dans les limites de notre capacité ».
Mais même en dehors de cette définition, ceux qui
supportent son joug en obéissant humblement et lui consacrent
leurs efforts apprennent vite qu’une main invisible allège
le fardeau dans les moments difficiles et déversent des
bénédictions hors de proportion avec les sacrifices
demandés.
La
perfection personnelle
Mais
est-ce que je serais un jour parfait dans le sens d’être
sans erreur, sans faute, sans tache ? Je parle de moi, en tant
qu’individu, en dehors de ma perfection en Christ dans
l’alliance ? Je pense que la réponse est oui. Par
exemple, j’imagine une scène dans environ un million
d’années, après être resté dans le
royaume céleste très, très longtemps. Je
m’approcherai du Seigneur et je lui dirai une chose de ce
genre : « OK. J’y suis arrivé. J’ai
réussi à manger des fruits hors saison (ou n’importe
quoi d’autre). Maintenant qu’est-ce que je fais ? »
Il me regardera et dira : « Hé ! Ça
y est ! Félicitations ! C’était la
dernière épreuve. Tu as finalement appris à
garder tous les commandements tout le temps ! » Et je
suppose que nous inviterons le voisinage à un barbecue en mon
honneur.
Mais ce sera
dans un million d’années, et bien après la
résurrection des justes. Entre temps, mon seul espoir est que
le Christ me portera sur ses épaules. Entre temps, mon seul
espoir de perfection résidera dans la perfection en Christ,
qu’il partage avec ceux qui sont dans l’alliance de
l’Évangile, car c’est-cette seule perfection et
rien d’autre qui me permettra d’entrer dans le royaume
céleste au jour du jugement dernier.
Le
réconfort de la connaissance
Il
y a longtemps Janet et moi avions une amie que ne comprenait pas
comment fonctionnait la grâce et qui disait : « Bon,
je pense que je suis à la moitié de mon existence, et
je suis à mi-chemin du royaume céleste, donc je suis
dans les temps. » Un jour je lui ai demandé :
« Judy, qu’est-ce qui arriverait si tu mourais
demain, où serais tu dans l’éternité ? »
Apparemment, cette pensée ne lui était jamais venue à
l’esprit. Elle réfléchit pendant un moment, puis
dit : « Voyons voir, à mi-chemin du royaume
céleste c’est… mi-terrestre ! Ce n’est
pas très bon, n’est-ce pas ? »
Non, ce n’est pas très
bon. Ce n’est pas non plus l’Évangile. Nous devons
savoir que dans cette alliance passée avec le Sauveur, si nous
mourons demain, nous pouvons espérer entrer
au royaume céleste. Cet espoir est une des bénédictions
promises dans l’alliance : « …faisons de
bon gré tout ce qui est en notre pouvoir, alors nous pourrons
nous tenir là avec la plus grande assurance pour voir le salut
de Dieu, et voir son bras se révéler. » (D&A
123:17, voir aussi D&A 106:8 ; Éph. 3:12).
Quand nous aurons fait ce qui
est en notre pouvoir, nous aurons « la plus grande
assurance » du salut de Dieu. Une partie du réconfort
qui vient du Saint-Esprit c’est de savoir que bien
qu’imparfait, si je meurs dans l’alliance, j’hériterai
quand même du royaume de Dieu. En fait cela ne peut en être
autrement, puisque tout le monde meurt encore imparfait.
Une
bonne nouvelle entre toutes c’est que le Christ nous promet que
nous ne serons pas tenus comptables de nos erreurs si nous restons
dans l’alliance pendant toute notre vie. Celui qui ne ment pas
promet que nous recevrons le royaume de Dieu ; « Et
il arrivera que quiconque se repent et est baptisé en mon nom
sera rassasié ; et s’il persévère
jusqu’à la fin, voici, je le tiendrai pour innocent
devant mon Père en ce jour où je me tiendrai pour juger
le monde. » (3 Né. 27:16) Néphi s’en
est aussi porté garant. Il a entendu la voix du Père
qui disait : « Oui, les paroles de mon Bien aimé
sont vraies et dignes de foi. Celui qui persévère
jusqu’à la fin, celui-là sera sauvé »
(2 Né. 31:15).
Le
Père et le Fils mentent-ils ? Évidemment non. Si
nous avons foi au Christ et que nous nous repentons de nos péchés,
si nous sommes baptisés et recevons le don du Saint-Esprit, si
nous sommes plein de bonne volonté et respectons nos
alliances, alors comment pouvons nous douter que, par le sacrifice
expiatoire du Christ, nous hériterons du royaume de Dieu ?
Devant de telles promesses, qui oserait douter de cette vérité ?
Lorsque le prophète
Énos a entendu la voix du Christ lui déclarer :
« Tes péchés
te sont pardonnés, et tu seras béni », il
répondit : « Moi, Énos, je savais que
Dieu ne pouvait mentir ; c’est pourquoi ma culpabilité
était balayée. » (Énos 1:5-6) Il est
fréquent que lorsqu’on lutte spirituellement, on
souhaite voir les résultats avant de croire que quelque chose
est arrivée. On met la charrue avant les bœufs. On veut
avoir une confirmation, recevoir les bénédictions de la
foi, avant de croire. Remarquez qu’Énos n’a pas
« ressenti » subjectivement que sa culpabilité
s’évanouissait et qu’ensuite il a cru ; c’est
tout le contraire. Il savait que sa culpabilité était
effacée parce que le Christ le lui avait dit, et il a cru le
Christ.
De plus,
« persévérer jusqu’à la fin »
ne veut pas dire « persévérer dans la
perfection ». Cela signifie persévérer dans
l’alliance de la foi et du repentir. C’est ainsi que nous
constatons que la foi en Christ, le repentir, et la purification par
l’Expiation ne peuvent être des évènements
d’un moment dans notre vie. Bien que ceux ci puissent commencer
à un moment précis, ils font partie d’un
processus continuel nous amenant à rejeter nos fautes, à
réaffirmer nos désirs et nos buts, et à
recentrer nos vies sur le Christ à chaque fois que nous nous
éloignons.
Ayez
confiance en moi
Quand
nos filles jumelles étaient petites, Janet et moi sommes allés
en famille à la piscine pour unesoirée familiale.Nous
avions l’intention d’apprendre aux filles à nager.
Après nous être installés, j’ai pris
Rebekah et nous avons commencé à entrer dans le petit
bain de la piscine.Tout en rentrant dansl’eau, je me disais :
« Qu’est-ce
que je suis bien comme père. On passe une soirée
familiale formidable. » Mais ses pensées à
elle en entrant dans l’eau étaient : «
Mon papa va me noyer, je vais mourir. » L’eau était
profonde d’un mètre vingt, mais Rebekah mesurait
seulement un mètre. Elle était si terrifiée de
ce qui était, dans son esprit, de l’eau profonde qu’elle
se mit à trépigner à griffer et à hurler.
Paniquée comme elle était, on ne pouvait rien lui dire.
Finalement, j’en fus
réduit à la prendre et à la serrer dans mes bras
et à lui dire : « Becky, tu te calmes !
Je suis ton père, et je t’aime. Je ne vais pas permettre
qu’il t’arrive quoi que ce soit. Tu es en sécurité.
Maintenant tu te calmes et tu me fais confiance ! »
Grâce à Dieu, elle cessa de lutter, se calma et me fit
confiance. Ce n’est qu’à ce moment, que j’ai
pu placer mes mains sous elle pour la soutenir hors de l’eau.
« OK, maintenant, agite tes jambes. Très bien.
Allez, accélère. » C’est ainsi qu’elle
commença à apprendre à nager.
C’est
un peu comme cela que ça se passe avec nous dans le domaine
spirituel. Nous sommes tellement paralysés par la peur de nos
péchés, que nous ne pouvons apprendre à les
surmonter. Nous nous inquiétons tellement de savoir si nous
allons vivre ou mourir, ou si nous sommes arrivés dans le
royaume, que nous ne faisons pas de réels progrès
spirituels. Notre manque de foi en Christ fait que nous nous soucions
de notre situation spirituelle et que nous doutons des promesses
divines. Je connais des gens qui se flagellent journellement :
« Est-ce que j’ai été suffisamment bon
aujourd’hui ? est-ce que mes bonnes actions ont surpassé
mes péchés ? Est-ce que j’ai passé la
barrière ? Suis je dans le royaume, ou non ? »
Comme pour l’expérience de Becky avec la nage, leur peur
les empêche d’apprendre et de progresser. La panique
spirituelle les handicape. À ce moment, lorsque la panique
survient et nous paralyse, nous devons croire au Christ. Nous devons
écouter sa voix, « Stephen, calme toi ! Je
suis ton Père, et je t’aime. Je ne vais pas permettre
que quelque chose puisse t’arriver. Je te tiens ! Tu es en
sécurité. Maintenant détend-toi et fais moi
confiance, je vais t’enseigner ce que tu as besoin de savoir. »
Alors il nous prend dans ses bras et nous dit : « OK.
Maintenant, paie ta dîme. C’est assez bien. Maintenant,
paie une dîme entière. » Et c’est ainsi
que l’on commence à apprendre la perfection. « Ainsi
la miséricorde satisfait aux exigences de la justice, et les
enserre dans les bras de la sécurité. »
(Alma 34:16).
« Dans
les bras de la sécurité » est mon expression
favorite dans le Livre de Mormon. Dans l’alliance de
l’Évangile, nous sommes enserrés dans les bras de
la sécurité, ses bras. « Tout va bien. Tu
vas y arriver. Fais moi confiance. »
Et
ça, c’est une bonne nouvelle.
CHAPITRE
SIX : « SEIGNEUR ? COMMENT EST-CE POSSIBLE ? »
Jusqu’à
maintenant, nous avons examiné l’Expiation du point de
vue des bénéficiaires. Nous avons étudié
les questions pratiques de leur signification pour nous et comment
nos vies pouvaient en être transformées. Maintenant il
nous faut examiner celles-ci du point de vue de celui qui a payé,
celui du Sauveur et non du sauvé. Comment le Christ peut-il
utiliser ce vaste océan de mérite et de miséricorde
en ma faveur ? Qu’est-ce qui lui donne le pouvoir de
sauver ? Qui était-il exactement, qu’a-t-il fait
pour moi, pourquoi l’a-t-il fait et qu’est-ce que cela
lui a coûté ?
La
divinité du Christ
Tout
d’abord, Jésus était Dieu, non seulement le Fils
de Dieu ou le Frère aîné, mais Dieu de plein
droit. Avant de prendre la chair et le sang, il était connu et
adoré en tant que Jéhovah ; le Dieu Tout Puissant,
le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, le Dieu d’Israël.
L’apôtre Paul explique que Jésus-Christ est le
créateur de toutes choses et qu’il est le pouvoir qui
tient toutes choses assemblées dans leur état créé :
« Car en lui, tout a été créé
dans les cieux et sur la terre, ce qui est visible et ce qui est
invisible, trône, souverainetés, principautés,
pouvoirs. Tout a été créé par lui et pour
lui. Il est avant toutes choses, et tout subsiste en lui »
(Col. 1:16) L’apôtre Jean dit pratiquement la même
chose, bien qu’il insiste sur le fait que Jésus-Christ
est la source de la vie et de la lumière : « Tout
a été fait par elle, et rien de ce qui a été
fait n’a été fait sans elle. En elle était
la vie, et la vie était la lumière des hommes »
(Jean 1:3-4).
Les
prophètes du Livre de Mormon témoignent aussi de la
divinité de Jésus-Christ. Ainsi, Néphi déclare :
« Et le Dieu de nos pères qui furent emmenés
hors d’Égypte, hors de servitude, et furent aussi
préservés dans le désert par lui, oui, le Dieu
d’Abraham et d’Isaac, et le Dieu de Jacob se livre en
tant qu’homme, selon les paroles de l’ange, entre les
mains des méchants, pour être élevé, selon
les paroles de Zénock, et pour être crucifié,
selon les paroles de Néum, et pour être enseveli dans un
sépulcre, selon les paroles de Zénos… »
(1 Né. 19:10)
Pendant
son expiation, Dieu, dans la personne de Dieu le Fils, Jésus-Christ,
assuma la responsabilité morale de toutes choses négatives,
les souffrances, les douleurs et la mort, qui sont une partie
nécessaire du plan de Dieu. Ce plan, défendu et soutenu
par Jésus avant que le monde fut, exige que nous vivions dans
un monde déchu et imparfait. De temps en temps, il nous
demande de souffrir, il demande à certains parmi nous de
souffrir horriblement. C’est pourquoi il est juste que le Dieu
qui a élaboré un tel plan et qui nous demande de
l’appliquer accepte de souffrir conformément à
ses dispositions plus que n’importe lequel d’entre nous.
Et c’est-ce qu’il fit à Gethsémané
et au Calvaire. C’est là que Jésus-Christ a gagné
le droit de nous demander de souffrir pour lui, car il a accepté
de souffrir, de répandre son sang, et de mourir pour nous.
Dans l’Évangile de Jésus-Christ, personne n’est
berné. Personne ne se fait avoir par ce que Dieu a dit, car
c’est lui qui a proposé le plan et il en a souffert le
plus. Cela lui donne le droit de dire : « c’est
un bon plan ; c’est-ce qu’il faut faire ».
Il y a des critiques qui
disent que le Christianisme est une religion basée sur le
sacrifice humain. On pourrait éventuellement le dire si
Jésus-Christ n’était pas Dieu, s’il n’était
qu’un être humain parmi d’autres. Après
tout, si l’Expiation se résume à une exigence de
Dieu réclamant le sang d’une victime afin d’être
réconcilié avec l’humanité pour nous
pardonner, en quoi est-ce tellement différent dans le principe
que d’attraper une pauvre vierge et de la précipiter
dans un volcan pour épargner le village, ou de brûler
des enfants sur un autel dédié à Moloch pour
gagner ses faveurs ? La différence capitale se trouve
dans le fait que dans ces cas là, ce sont des êtres
humains qui souffrent pour réconcilier Dieu avec l’humanité,
alors que dans le Christianisme c’est Dieu lui même,
Jésus-Christ, qui souffre et meurt pour réconcilier
l’humanité avec lui même et son Père. Nous
n’essayons pas d’atteindre Dieu pour toucher son cœur
par nos sacrifices, mais c’est Dieu qui essaie de nous
atteindre pour toucher le nôtre par son sacrifice infini.
L’Agneau de Dieu sacrifié qui est mort sur le Calvaire
était Dieu.
L’humanité
du Christ
Selon les
Écritures, Jésus n’était pas seulement
divin, il était véritablement et pleinement humain :
« La Parole a été faite chair, et elle a
habité parmi nous, pleine de grâce et de vérité,
et nous avons contemplé sa gloire, une gloire comme celle du
Fils unique venu du Père » (Jean 1:14). « Aussi
devait-il devenir, en tout, semblable à ses frères,
afin d’être un grand prêtre miséricordieux
et fidèle dans le service de Dieu, pour faire l’expiation
des péchés du peuple. Car du fait qu’il a
souffert lui même de la tentation, il peut secourir ceux qui
sont tentés. » (Héb. 2:17-18)
Doctrine remarquable que celle
qui est enseignée ici. Ce même JésusChrist qui
est Dieu est aussi l’un de nous. Il était homme en tout
point (« en tout ») jusqu’à être
tenté comme les autres hommes. Et du fait qu’il a été
tenté personnellement, le Christ peut comprendre ce qu’est
la tentation. En s’appuyant sur son expérience dans la
condition humaine, il comprend ce que nous subissons ici, et il peut
se mettre à notre place pour nous aider à surmonter la
tentation comme il l’a fait.
Mais
se peut-il que Jésus-Christ, le fils divin, ait été
véritablement tenté ? Soyons plus précis :
est-ce que Jésus-Christ avait une nature et des pulsions
charnelles ? est-ce qu’il a senti sa chair dire « oui ! »
et devoir dire « non ! » ? Est-ce
qu’il n’a jamais ressenti l’attirance, l’appel
charnel du péché ?
Beaucoup
de chrétiens ont tendance à répondre :
« Non, le Christ était trop saint pour ressentir
des tentations réelles ». Mais je crois que la
bonne réponse, celle que donne les Écritures est oui.
Jésus était humain tout comme nous. Une partie de ce
que le Livre de Mormon appelle la grande condescendance de Dieu
consiste dans le fait que le Christ a accepté de prendre un
corps mortel qui l’a assujetti aux tentations physiques (voir 1
Né. 11:13-32). Ce n’est pas que le Christ n’a
jamais eu à faire face à l’attirance charnelle,
mais c’est plutôt sa sainteté et son obéissance
parfaite qui lui permirent d’ignorer constamment celle-ci. La
justice de Jésus réside dans le fait qu’il a
rencontré les mêmes expériences, les mêmes
pulsions charnelles, les mêmes distractions et oppositions de
la chair et de l’esprit que nous dans la mortalité, mais
il les a rejetées immédiatement à chaque
occasion : « Il subit les tentations, mais n’y
prêta pas attention ». (D&A 20:22)
Pensez-y. Si le Christ n’avait
pas été comme nous, sujet à la tentation, s’il
avait été un être d’une espèce
différente subissant des expériences qualitativement
différentes, comment aurait-il pu prétendre se poser en
exemple à suivre ? Comment sa personne ou ses actions
auraient-elles pu nous être applicables ? Peu importe la
patience que pourrait me montrer un oiseau pour m’apprendre à
voler, ou un poisson pour m’apprendre à respirer sous
l’eau. Je n’ai pas d’ailes et je n’ai pas de
nageoires. Ils ne peuvent pas m’enseigner par l’exemple
parce que nous ne sommes pas de la même espèce. De même,
si Jésus n’était pas véritablement humain,
ou si sa justice et son obéissance étaient le résultat
d’un don particulier que je ne partage pas avec lui, alors il
ne peut m’enseigner par l’exemple comment lui être
semblable.
Autrefois
existait une hérésie du nom de docétisme, qui
enseignait que Jésus n’était pas réellement
humain, qu’il n’avait que l’apparence de l’homme.
Influencés par la pensée helléniste, les
docétistes soutenaient que la nature humaine était
parfaitement incompatible avec la nature divine. Se sentant obligés
de choisir entre l’humanité de Jésus et sa
divinité, ils en conclurent que Jésus était
divin et non humain, en dépit du témoignage des
Écritures, ils déclarèrent que son humanité
n’était qu’une illusion.
Si
l’on prétend que l’expérience mortelle de
Jésus était de nature différente de celle du
reste de l’humanité, ou que sa justice et sa perfection
s’appuyaient sur des causes dont nous ne pouvons bénéficier,
alors cette façon de voir est dans une certaine mesure une
forme moderne de docétisme. Jésus-Christ en tant que
mortel était le meilleur d’entre nous, mais il était
l’un d’entre nous, et la tentation fait partie de la
nature humaine. Sa chair était humaine et son expérience
était humaine. C’est pourquoi l’auteur des Hébreux
insiste sur le fait « qu’il a souffert lui même
de la tentation » (Héb. 2:18).
Il
faut dire aussi que la tentation même subie intensément
sur une longue période n’est pas en soi un péché.
Nous choisissons rarement l’objet de nos tentations, non plus
que leur intensité ni leurs fréquences. Mais, tant que
nous y résistons, nous restons innocents. Ainsi, quand les
Écritures affirment « qu’il a souffert
luimême des tentations » ce n’est pas une
insulte à son encontre ou une atteinte à sa perfection
morale.
Comprenez-moi
bien. Je ne suis pas en train de suggérer que Jésus ait
pu se laisser aller, d'une manière ou d'une autre, à
avoir des pensées impures, car cela aurait été
pécher, et il ne s’est jamais abandonné au péché.
Je ne crois pas qu’il ait « lutté »
ou « combattu » les tentations. Je veux
simplement souligner qu’il était aussi vulnérable
aux suggestions et aux pulsions surgissant à son esprit du
fait de sa nature mortelle, nature héritée de sa mère
mortelle, tout comme nous. Il ne prêtait tout simplement pas
attention à ces suggestions, et il les rejetait immédiatement
de son esprit. La capacité de la chair à suggérer,
à séduire, était la même pour lui que pour
nous, mais à l’inverse de nous, il n’y a jamais
réagi. Il n’a jamais pensé, réfléchi,
ou nourri des options pécheresses même comme
éventualités théoriques, « il n’y
attachait aucune importance ».
« Mais
nous n’avons pas un grand prêtre incapable de compatir à
nos faiblesses ; mais il a été tenté comme
nous à tous égards, sans commettre le
péché »(Héb.4:15). Parce qu’il
« a été tenté comme nous à
tous égards », notre Sauveur comprend notre
situation, sait par expérience personnelle ce contre qui nous
luttons, et il peut se solidariser avec nous et avoir compassion.
Ainsi, quand je suis tenté, je n’ai pas besoin de faire
appel à quelque entité lointaine qui ne s’est
jamais trouvée à ma place. Je peux présenter mes
problèmes à un grand prêtre, Jésus, qui
peut « compatir à [mes] faiblesses »
parce qu’il est passé par où je suis en ce
moment. Je peux faire part de mes problèmes à un Dieu
compatissant qui sait par expérience de quoi je parle et
comprend ce que j’endure. Il existe certains aspects de sa
nature que nous ne pouvons pleinement comprendre, mais il n’y a
aucun domaine de la nature humaine qui lui soit étranger. Et
ça, c’est une bonne nouvelle.
Souffrance
par procuration
Certains
sont toujours ennuyés par la fin d’Hébreux 4:15 :
« sans commettre de péché ». Au
fond, tous les hommes ne sont pas seulement tentés de pécher,
ils pèchent. Il m’est arrivé à l’occasion
de succomber à la tentation et de ce fait je suis devenu
coupable, mais cela n’est jamais arrivé à Jésus,
alors comment peut-il comprendre le pécheur ? Comment
notre Sauveur peut-il prétendre être pleinement humain
et nous comprendre s’il n’a jamais souffert du péché
et de la culpabilité ? Comment un être parfait et
sans péché peut-il comprendre la souffrance que
j’endure dans mon indignité ? Sait-il ce que c’est
que de se regarder dans un miroir et mépriser ce qu’il
nous renvoie ? Sait-il ce que c’est que d’errer dans
les ruines d’une vie détruite à cause de ses
propres choix ? Les hommes sont inévitablement les
incendiaires de leur bonheur. Qu’est-ce que le doux Jésus
sans péché peut-il connaître du côté
obscur de la nature humaine ?
Selon
les Écritures, il en sait plus du côté obscur que
n’importe qui d’entre nous. En fait, il en sait plus sur
la douleur, le chagrin, la solitude, la contradiction, la honte, le
rejet, la trahison, l’angoisse, la dépression, et la
culpabilité que nous tous réunis. Car dans le Jardin de
Gethsémané et au Calvaire, Jésus a pris sur lui
les péchés et les souffrances du monde entier.
« Cependant, ce sont nos souffrances qu’il a
portées, c’est de nos douleurs qu’il s’est
chargé ; et nous l’avons considéré
comme puni, frappé de Dieu et humilié. Mais il était
blessé pour nos péchés, brisé pour nos
iniquités ; le châtiment qui nous donne la paix est
tombé sur lui et c’est par ses meurtrissures que nous
sommes guéris. » (Ésaïe 53:4,5)
Je souhaiterais attirer
l’attention sur certains aspects de la souffrance par
procuration du Sauveur qui nous échappent souvent, mais qui
sont importants pour comprendre notre relation avec lui. Tout
d’abord, Jésus-Christ n’a pas seulement pris sur
lui la punition pour nos péchés, il a pris aussi la
culpabilité. Le péché, l’expérience
elle même avec toutes ses conséquences et ses
ramifications négatives, en plus de la punition, devinrent
siens. C’est une distinction importante. Dans l’Expiation,
Jésus ne se borne pas à endurer la punition à
notre place, il devient le sujet coupable à notre place, il
devient coupable pour nous et prend sur lui notre culpabilité :
« Celui qui n’a pas connu le péché, il
l’a fait (devenir) péché pour nous, afin que nous
devenions en lui justice de Dieu. » (2 Cor. 5:21)
Il y a un véritable
transfert en Christ de la culpabilité vers l’innocence.
Par l’unicité de notre relation dans l’alliance,
ma culpabilité devient celle du Christ, qu’il a
ressentie et pour laquelle il a souffert. En même temps, son
innocence et sa perfection deviennent miennes, et je suis purifié
et rendu digne. En Christ, nos péchés cessent de nous
appartenir, en ce qui concerne la justice divine, c’est comme
si nous ne les avons jamais commis. Par l’Expiation, nous ne
sommes pas simplement pardonnés, nous redevenons innocents.
Si Jésus n’avait
pris sur lui que le châtiment de nos péchés, et
non les péchés eux mêmes, alors au moment de la
rétribution, nous aurions été seulement
« coupables, mais pardonnés au lieu d’être
sanctifiés par l’expiation du Sauveur, rendus parfaits
en Christ, innocents et dignes d’entrer dans le royaume de Dieu
en présence du Père. Une partie de la bonne nouvelle
concernant l’expiation du Christ est que celle-ci nous redonne
l’impeccabilité, l’innocence, la perfection et la
gloire céleste, chose qui ne pourrait se faire si nous nous
entêtions à vouloir souffrir pour nos péchés.
Dans cette éventualité, bien que nos péchés
puissent éventuellement être payés, ils
resteraient nôtres, comme des chèques annulés.
Sans l’expiation du Christ qui ôte la culpabilité
et paye en même temps son dû, nous ne pourrions jamais
retrouver l’innocence nécessaire pour vivre en présence
de Dieu (cf. D&A 1:31 ; 19:4-19).
En
subissant notre punition et en vivant notre culpabilité, Jésus
a appris par procuration au travers de l’Expiation ce qu’il
aurait ressenti s’il avait commis les péchés
qu’il n’a jamais commis. C’est pourquoi dans un
sens il est correct de dire que bien que Jésus n’ait
commis aucun péché, il est coupable de tous et sait
intimement et personnellement leur poids affreux. Par nous, en
portant nos péchés, celui qui est sans péché
a connu l’horreur totale de la culpabilité humaine, pas
seulement les péchés d’une vie, mais ceux de
toutes les vies, les péchés du monde. Ainsi, par son
expiation par procuration, Jésus en sait plus que quiconque
sur le côté obscur de l’être humain. Même
dans ce domaine, il nous est supérieur.
À
un moment lors de son agonie, Jésus s’est écrié :
« Mon Dieu, Mon Dieu, pourquoi m’as tu abandonné ? »
(Matt. 27:46). Est-il possible que le Père céleste
l’ait réellement abandonné ? Dieu l’a-t-il abandonné en cette heure sacrée et terrible ?
Oui. Car le Christ était devenu coupable des péchés
du monde, coupable à notre place. Que nous arrive t-il quand
nous sommes coupables de péchés ? L’Esprit
de Dieu se retire de nous, les cieux deviennent comme du plomb, et
nous sommes laissés seuls à mariner dans notre
culpabilité jusqu’à ce que nous nous repentions.
À Gethsémané le meilleur parmi nous est devenu
par procuration le pire d’entre nous et a enduré les
souffrances des profondeurs de l’enfer. Et comme un coupable,
le Sauveur a subi pour la première fois de sa vie la perte de
l’Esprit de Dieu et de la communion avec son Père.
Il n’y avait pour lui
aucun soutien, aucune aide, ni de la part de ses amis qui dormaient
pendant son agonie, ni de l’Esprit de Dieu qui s’était
retiré de lui. Personne n’a jamais été
aussi seul que le Christ dans le Jardin. C’est ce que dit Ésaïe
63:3 « J’ai été seul à fouler
au pressoir » (voir aussi D&A 73:107).
En
hébreu le mot Geth (gath) signifie « pressoir »
et semani (shemen) signifie « huile » ou
« richesse ». Gethsémané signifie
donc : « le pressoir à huile » ou
le pressoir de la richesse ». Cette expression fait
allusion aux grands pressoirs pour les olives ou pour le raisin que
l’on utilisait pour extraire l’huile ou le vin et c’est
ce genre d’appareil que l’on s’attend à
trouver dans un jardin d’oliviers comme Gethsémané.
Les olives ou les grappes de raisin étaient placées
dans les pressoirs pour en extraire leur jus.
C’est
vraiment un nom approprié pour le Jardin où Jésus
a pris sur lui le poids infini des péchés et des peines
du monde pour être pressé par ce fardeau formidable
jusqu’à ce que le sang exsude de sa peau (voir Luc
22:44 ; D&A 19:18). Tout comme les olives et le raisin sont
foulés au pressoir, Jésus, le vrai cep (voir Jean
15:1), fut pressé à Gethsémané, « le
pressoir jusqu’à ce que sa richesse, son jus, son huile,
son sang fussent versés pour l’humanité. Il n’est
pas étonnant que le vin de la Dernière Cène et
celui de la cérémonie chrétienne soit ce symbole
si approprié pour représenter le sang du Christ :
ils sont obtenus par le même procédé.
Plus bas que tout cela
Même si nous essayons de
comprendre l’expérience de Gethsémané,
nous sommes condamnés à la sous estimer. Un jour alors
que Joseph Smith se plaignait au Seigneur de ses épreuves et
de ses souffrances, le Seigneur lui répondit en disant :
« Le Fils de l’homme est descendu plus bas que tout
cela, es tu plus grand que lui ? » (D&A 122:8)
Ailleurs dans les Écritures, on dit que le Christ est descendu
plus bas que tout : « lui qui est monté là
haut, de même qu’il est descendu au dessous de tout, en
sorte qu’il a compris toutes choses, afin d’être en
tout et à travers tout, la lumière de la vérité. »
(D&A 88:6 ; voir aussi Éph. 4:8-10).
À
Gethsémané et au Calvaire, dans sa souffrance horrible
et sa mort, le Christ est descendu plus bas que tout, de même
que dans sa résurrection, il est monté au delà
de toutes choses. Entre ces deux évènements,
Jésus-Christ a fait le tour soit personnellement soit par
procuration de tous les genres possibles d’expériences
que connaît l’homme, les pires circonstances comme les
meilleures. Il a été le plus humble d’entre nous
et le plus exalté de tous, de sorte « qu’il
comprend toutes choses ». Que ce soit sur le plan matériel
comme pour la lumière de la création ou par expérience
en tant que victime expiatoire, le Christ remplit toutes choses, est
en toutes choses et est la cause de tout. Il est omniprésent.
Nous nous fourvoyons tout
simplement et nous sous-estimons grossièrement l’étendue
de l’Expiation quand nous sommes tentés de penser que
nos péchés ne permettent pas à Dieu de nous
comprendre ou de nous atteindre. Aussi bas que nous soyons tombés,
notre Rédempteur a déjà eu lieu ; et il y
est allé dans le seul but de nous retrouver et de ramener la
brebis perdue au bercail. J’entends quelques fois des gens
dire : « Comment puis-je revenir à l’Église,
ou prier, ou m’approcher de Dieu après ce que j’ai
fait. Je suis tombé trop bas ; je suis trop loin pour
qu’il puisse m’atteindre. Je suis trop méprisable
pour être sauvé ». À ceux-ci, le
Sauveur répond essentiellement : « Je sais où
tu es. J’y suis déjà passé, et c’était
pire que ça. Je sais ce que tu ressens, car je l’ai
vécu. Je me souviens de mes souffrances quand je les ai
endurées, et mon cœur saigne pour toi. Mais je veux que
tu reviennes. Je suis même prêt à te porter si tu
me le permets. » Peu importe à quel point nous
sommes perdus, Jésus-Christ, la voie du retour, la porte du
foyer, est toujours à notre portée.
L’Expiation infinie
Les souffrances de
Jésus-Christ au Jardin et sur la croix ont dépassé
l’ensemble des souffrances de tous les êtres humains. La
souffrance de Jésus n’était pas une simple
douleur un peu rude et une mauvaise mort, ce n’était pas
juste la plus douloureuse de toutes les expériences et de
toutes les morts. La souffrance du Christ était exponentielle,
elle était infinie. Lorsque le Christ est descendu au dessous
de toutes choses, il a franchi la frontière entre le fini, ce
qui peut être mesuré, et l’infini. Comme sa
souffrance a été infinie, sa gloire maintenant est
infinie, et de même sa capacité à sauver est
infinie. « C’est pourquoi il doit nécessairement
y avoir une expiation infinie ; si ce n’était pas
une expiation infinie, cette corruption ne pourrait revêtir
l’incorruptibilité » (2 Né. 9:7).
« C’est pourquoi rien moins qu’une expiation
infinie suffit pour les péchés du monde »
(Alma 34:12 ; voir aussi 2 Né. 25:16 ; Alma
34:10 ; D&A 19:10-19).
La
nature humaine fait que nous souhaiterions quantifier, mesurer
l’expiation du Christ, mais son épreuve est au delà
de toute mesure ; elle est au delà de notre
compréhension. Jésus n’a pas seulement porté
les péchés du monde, mais aussi les chagrins, les
douleurs, et les maladies du monde entier : « Et il
ira, subissant des souffrances, et des afflictions, et des tentations
de toute espèce ; et cela, afin que s’accomplisse
la parole qui dit qu’il prendra sur lui les souffrances et les
maladies de son peuple. Et il prendra sur lui la mort, afin de
détacher les liens de la mort qui lient son peuple ; et
il prendra sur lui ses infirmités, afin que ses entrailles
soient remplies de miséricorde, selon la chair, afin qu’il
sache, selon la chair, comment secourir son peuple selon ses
infirmités » (Alma 7:11-12).
Combien
de gens ont souffert quelle somme de souffrance ici bas rien
qu’aujourd’hui ? Combien de gens dans combien
d’hôpitaux actuellement dans le monde supplient pour
avoir une autre piqûre afin d’apaiser leurs souffrances ?
Rien qu’aujourd’hui ? Pourtant les souffrances de
Jésus-Christ dans le Jardin et sur la croix ont dépassé
les souffrances cumulées de toute l’humanité de
nos premiers parents jusqu’au Dernier Jour, pour ce monde et
pour tous les mondes qu’il a créés par son
pouvoir.
Jésus-Christ
a pris sur lui tous les aspects négatifs de l’existence
humaine provoqués par la Chute. Il a souffert par procuration
à Gethsémané toutes les douleurs intimes, toutes
les douleurs de cœur, toutes les douleurs physiques et tous les
handicaps, tous les fardeaux émotionnels et toutes les
dépressions de la famille humaine. Il connaît la
solitude de ceux qui ne sont pas acceptés, qui ne sont pas
beaux. Il sait ce que c’est que de voir composer les équipes
et d’être le dernier choisi. Il connaît l’angoisse
des parents dont les enfants tournent mal. Il connaît l’enfer
intime de l’enfant ou du conjoint violé. Il connaît
toutes ces choses intimement et personnellement parce qu’il les
a vécues à Gethsémané. Après avoir
vécu une vie parfaite, il a alors choisi de vivre nos vies
imparfaites. Dans ce Gethsémané infini, le méridien
des temps, le centre de l’éternité, il a vécu
des milliards de milliards de vies de péchés, de
douleurs, de maladies et de chagrin.
Dieu
n’utilise pas de baguette magique pour effacer les mauvaises
choses de l’existence. Les péchés qu’il
remet, il les remet en faisant en sorte qu’ils deviennent siens
et qu’il souffre à cause d’eux. Les souffrances et
les chagrins d’amour dont il nous soulage, il le fait en les
endurant lui même. Ces choses peuvent être partagées
ou transférées, mais on ne peut s’en débarrasser
d’un revers de main. Quelqu’un doit les endurer. Ainsi
nous ne lui devons pas seulement notre purification spirituelle du
péché, mais aussi notre guérison physique,
mentale, et émotionnelle, car il a porté ces infirmités
pour nous aussi. Tout ce que la Chute a eu de négatif, le
Sauveur l’a rectifié. Tout ceci fait partie de son
sacrifice infini, de son don infini.
C’est
pour cette raison que pour pouvoir supporter le poids infini de
l’agonie, Jésus avait besoin d’avoir un Père
divin, infini. De Marie, il a hérité la capacité
de mourir, mais de son Père il a hérité la
capacité de vivre s’il le choisissait. C’est
pourquoi sa vie ne pouvait lui être ôté s’il
ne le voulait pas, il avait pouvoir sur la mort (voir Jean 10:17-18).
Si vous ou moi avions été au pressoir de Gethsémané
et que nous avions dû supporter le poids des péchés
et de la douleur, nous aurions été écrasés
comme des insectes, disparus immédiatement. Mais parce qu’il
était le Fils de Dieu, et qu’il avait pouvoir sur la
mort, sa vie ne pouvait lui être ôtée tant qu’il
ne le décidait pas de lui même.
Dans
le Jardin et sur la croix, il a dit en substance : « Je
souffrirai cette agonie, J’irai jusqu’au bout ;
j’endurerai pour eux et je tiendrai jusqu’à ce
qu’ils soient sauvés ». Comme l’a dit
frère Neal A. Maxwell : « Le fardeau accumulé
de tous les péchés mortels, passés, présents,
futurs, pesant sur cette âme sensible, sans péché
et parfaite ! Toutes nos infirmités et toutes nos
maladies faisaient, aussi, d’une certaine façon, parties
de l’arithmétique terrible de l’expiation…
Sa Souffrance, telle qu’elle était, l’énormité
multipliée par l’infini, évoquait son dernier cri
sur la croix venu du tréfonds de l’âme, traduisant
un sentiment d’abandon. »
A-t-il
été tenté à cause de son agonie infinie à
donner sa vie pour mettre fin à ses souffrances avant que le
prix ne soit complètement payé ? La plus grande
tentation à laquelle il a dû faire face n’a-t-elle
pas été d’abandonner ses frères et ses
sœurs plus faibles en mourant prématurément afin
d’être délivré de la douleur infinie ?
Peut être. Tout ce qu’il avait à faire était
de se laisser aller et la douleur se serait arrêtée,
mais vous et moi aurions été perdus. Alors seconde
après seconde, heure après heure, il a subi son
agonie ; il ne pouvait se reposer, mais il ne voulait pas
mourir, pas avant que ce soit fini, pas avant que nous fussions
sauvés avec lui. Ainsi, lorsque le Vainqueur reviendra sur
terre revêtu de pouvoir et de gloire, les anges déclareront
sa victoire infinie et éternelle : « C’est
fini, c’est fini ! L’Agneau de Dieu a vaincu et
foulé seul au pressoir, oui, au pressoir de l’ardeur de
la colère du Dieu tout-puissant. » (D&A 88:106)
La
divine victime a satisfait aux exigences de la justice dans le Jardin
du Pressoir et sur le Calvaire, elle l’a fait seule, et elle
l’a fait pour vous et moi. Ceci lui donne le droit de réclamer
ceux qui acceptent son alliance, pour les placer chacun sous son aile
en disant : « J’ai payé pour celui-ci,
il est à moi. ». « Père, vois les
souffrances et la mort de celui qui n’a commis aucun péché,
en qui tu te complaisais. Vois le sang de ton Fils qui a été
versé, le sang de celui que tu as donné afin que toi
même, tu sois glorifié ; c’est pourquoi,
Père, épargne ceux-ci, mes frères, qui croient
en moi, afin qu’ils viennent à moi et qu’ils aient
la vie éternelle. » (D&A 45:4-5)
Et
ça, c’est la meilleure nouvelle.